CHAPITRE 01

Diverses plantes grimpantes…

Enroulées autour des différents conifères, des lianes aux couleurs brunâtres, voir verdâtres à certains endroits, naissaient du sol et venaient enlacer les troncs qui respiraient puissamment de vie.

Ceux-ci, centenaires où millénaires, semblaient commencer à s'étouffer avec l'étranglement que provoquait la montée de cette fine écharpe terreuse. Certains laissaient apercevoir des éclats de couleurs, toutes aussi étincelantes les unes que les autres.

D'une quantité de couleurs pastel variées, un enchevêtrement de beauté se dévoilait au monde dès qu'un rayon de lumière traversait la toile de feuillage qui servait de dôme à la forêt.

La fine brise qui s'enfilait dans les branchages, laissait une douce mélodie se répercuter dans le lointain, mélangeant son chant avec celle des oiseaux qui n'hésitaient pas à laisser leur air se répercuter par-à-coup dans le temps universel.

Au sol, la végétation, elle, laissait arborer une flore des plus rutilantes et des plus diverses. Myrte, narcisse, gattilier, verveine… tant de plantes diverses qui paressaient au cœur même de la forêt. Des rochers, parsemés ci-et-là, se retrouvaient couverts d'un fin chapeau de mousse d'un vert criard. Certains animaux, aux poils soyeux, paissaient tranquillement, comme si le temps s'était arrêter aux yeux du monde.

Un peu plus en contre bas, le bruissement d'une chute d'eau retentissait fortement. Grande et forte, elle descendait bruyamment de la falaise pour laisser choir son contenu sur le lac translucide, transformant sa base en une longue écharpe écumeuse. Sa surface reflétait, dans un éclat puissant, les rayons du soleil qui illuminait le lieu de sa douce puissance. À son bord, des bouquetins crétois s'y abreuvaient paisiblement pendant que d'autres paissaient tranquillement dans leur coin. Plus loin, des fourogatos se prélassaient tranquillement, dorant leurs poils au soleil. Leurs petits s'amusaient au pied du rocher sur lequel reposaient les parents. Petits êtres espiègles remplis de malice, ils passaient leur temps à se mordiller l'un l'autre, se servant de leur queue touffue comme d'une souris à chasser.

Le calme divin qui régnait sans commune mesure sur les lieux fût soudain briser. Des bruits de pas et des craquements de branches, trop vite repoussées pour pouvoir rester intact dans le sillage des inconnus, retentissait dans ce lieu pourtant paisible. La brise, pourtant d'un calme olympien, se souleva brusquement, renversant les plantes vivaces sur son passage.

Brusquement sortis d'un bosquet en fleur, deux jeunes personnes couraient à en perdre haleine, ne sachant pas vraiment de quel côté ils allaient. En avant-garde, le jeune homme tenait par la main une jeune femme tout aussi belle que la déesse Aphrodite elle-même.

Habillé d'un pagne, sorte de toge courte, d'un blanc immaculé ceinturée par une corde argentée et de sandales en cuir s'arrêtant à la cheville, ces dernières dévoilant un entrelac de fils qui permettait une bonne stabilité, le jeune homme se protégeait le visage avec son avant-bras, évitant tout coup de fouet provoqué par les branches résistantes. Sa tignasse, d'un noir profond aux reflets corbeau, était hirsute et parsemée de branchages et de feuilles. La jeune femme, quant-à-elle, était habillée d'un pagne long, sorte de robe toute aussi immaculée que le vêtement du jeune homme. À sa taille, une ceinture ciselée d'or arborait des incrustations de pierre blanche qui chatoyaient au moindre passage d'un rayon de lumière de l'astre céleste. Sa longue crinière, d'un brun clair, flottait derrière elle comme si elle était soutenue par des êtres invisibles. Tout comme son compagnon de fuite, elle arborait aussi des branchages et des feuilles dans sa belle et longue crinière.

Jetant un rapide coup d'œil derrière elle, elle tourna à nouveau son visage vers son compagnon d'infortune, le protégeant aussi de son avant-bras. Quelques millièmes de seconde avant de se retrouver dans l'ombre, un fin rayon de soleil traversa son visage et laissa dévoiler la couleur de ses pupilles. D'un vert émeraude, encore plus brillant que la pierre elle-même, son regard donnait l'impression de transpercer quiconque le croisait, comme si l'âme de l'heureux infortuné qui avait l'audace de l'apercevoir, se retrouvait aspirée à l'intérieur.

Courant toujours sans savoir où elle allait, ses yeux parcourant les alentours à la vitesse de l'éclair tout en se laissant guider par son compagnon, elle sentit une faible pression autour de sa main. Ce dernier venait de serrer sa propre main autour de la sienne, la prévenant d'un changement de direction dans la course. Se souvenant de ce qui avait été décidé au début de leur fuite, elle attendit le second signal, ses sens en alerte.

Signal qui ne tarda pas !

Celui-ci se faisant ressentir, comme un courant électrique qui lui traversait tout le membre droit, elle baissa rapidement son bras, attrapa les pans de sa robe, les souleva d'un coup sec et sauta dans les airs, la laissant apercevoir un tronc d'arbre reposer sur son flan le temps de quelques secondes. Ce dernier devait être mort depuis des années car il était complètement recouvert de mousse. Son écorce tombait lentement en poussière et divers insectes trainaient à sa surface.

Ses longues jambes longilignes se dévoilant à l'air libre, elle gémit rapidement d'extase quand l'air frais de la forêt vint se frôler à elle.

Percutant rudement le sol, elle repartit immédiatement dans sa course folle, entrainée par son compagnon. Ce dernier ne semblait pas savoir où aller mais son instinct le guidait inlassablement vers une destination bien précise.

Sortant d'un bosquet, les deux jeunes gens déboulèrent le long du ruisseau, faisant fuir tous les animaux présents aux alentours, même ceux qui se reposaient près du lac.

Arrivé devant la haute falaise ou tombait majestueusement la grande cascade, le jeune couple d'infortune s'arrêta rapidement. Lâchant la main de la jeune fille, le garçon laissa son regard bleuté, d'un bleu aussi clair que la surface d'un lac, sonder les alentours à une vitesse folle. La jeune femme, quant-à-elle, se dirigea directement vers le lac, la soif la prenant.

Sa robe entourant tout l'espace autour d'elle, la jeune femme tendit rapidement la main et, de sa paume, s'aspergea d'eau tout en essayant de boire le peu que cette dernière retenait en son sein. Les gouttelettes qui s'éparpillaient autour d'elle comme sur son visage étincelaient d'une beauté cristalline quand le soleil venait s'y réfléchir.

- Gaïa, dépêche-toi, nous n'avons point le temps de nous abreuver aussi longtemps !

La voix dure et ferme de son compagnon fit sursauter la jeune femme. Elles les savaient suivit mais pas au point de ne pas pouvoir se désaltérer quelques secondes. Le jeune garçon, quant-à-lui, avait détourner le regard et le laissa se diriger vers le bosquet qu'il venait de quitter.

Il les percevait !

Le sens aux aguets, il sentait qu'ils allaient bientôt arriver et que le peu d'avance qu'ils avaient réussi à prendre ne serait bientôt qu'un pâle souvenir. La sueur qui suintait sur son front coulait en de fines perles, s'écoulant lentement sur les côtés de son visage. Large de carrure, son corps athlétique se dessinait avec volupté derrière son vêtement partiellement déchiré par sa courses effrénée et qui lui collait partiellement à la peau. Son torse se bombant à chaque respiration, on pouvait voir qu'il avait énormément de mal à reprendre son souffle.

Le jeune homme releva la tête et, tout en passant sa main dans sa tignasse corbeau, jeta à nouveau un coup d'œil à la falaise qui lui faisait dorénavant face.

- Me voici Héphestion, dit-elle en se redressant. Par où allons-nous maintenant ?

Le haut de sa robe trempée, Héphestion pouvait remarquer les formes que dévoilait sa poitrine. A travers le tissu, il pouvait voir pointer deux formes rondes à l'aspect dur et ferme. Déglutissant avec peine, il détourna le regard et, tout en levant le bras, pointa un endroit un peu plus loin devant lui.

- Nous devrions passer par là. dit-il

Son regard plongea dans le vert émeraude de Gaïa, faisant légèrement tressaillir la jeune femme qui avait toujours autant de mal à résister au regard du jeune homme et ce, depuis qu'elle l'avait rencontré au coin d'un des temples de son village.

- Soit nous traversons le lac afin de gagner du temps, soit nous escaladons la falaise, aux risques de nous briser le cou si nous ratons une seule prise rocheuse.

- Et si nous faisions vite le tour du lac ? demanda Gaïa, soucieuse.

- Aurais-tu peur de te mouiller ou de t'écorcher les doigts… Gaïa ?

Le ton amusé du jeune homme tiqua la jeune femme. Affichant une moue réprobatrice sur son doux visage, elle regarda les pans de la falaise qui lui faisait face. Déglutissant difficilement, elle se demandait comment elle allait procéder pour agencer une telle montée avec la robe qu'elle portait.

N'étant pas du tout habillée pour un tel sport, elle n'était pas du tout prête à prendre un tel risque.

- Je n'ai pas peur. répliqua la jeune femme. C'est juste que je ne suis pas habillée pour escalader les pans de la falaise. Et je me disais que l'on pourrait, peut-être, les semer… en contournant le lac… non ?

Le ton hésitant de Gaïa n'échappa pas à Héphestion. Il était vrai que, au vu de la tenue de sa jeune compagne, escalader les morceaux rocheux qui leurs faisaient face allait être difficile mais pas impossible.

D'un simple signe de tête, il lui fit comprendre que polémiquer ne servait à rien. Dos à sa compagne, le jeune homme se passe une dernière fois la main dans sa tignasse noire aux reflets corbeau avec un soupir las tout en s'approchant de la roche. D'un simple coup d'œil, il trouva les prises dont ils avaient besoin et il n'hésita plus. Bandant ses muscles, il fit craquer ses doigts et posa sa main droite dans le premier creux qu'il avait repérer. Son pied du même côté trouva une surface plane et il put commencer l'ascension de la falaise.

- Repère bien le chemin que j'utilise Gaïa. cria Héphestion tout en s'élançant dans son escalade.

Soupirant de lassitude, la jeune femme finit par relever sa robe et chercha un moyen pour qu'elle ne traine pas dans ses pieds durant l'ascension de la falaise. Une idée lui traversant l'esprit, elle la remonta encore plus et entrepris de la nouer à divers endroits pour éviter une quelconque rechute.

Elle était sur le point d'assimiler son travail quand la brise légère du coin se souleva, provoquant un coup de fouet dans sa longue crinière brune qui se mit à virevolter autour de son visage. Apeurée, elle fit dos à la falaise et se plaqua à même la robe, les pans de sa robe s'éparpillant autour d'elle pour reprendre sa forme initiale.

Juste en face d'elle, dans la pénombre des conifères lui faisant face, des jeux d'ombre ondulaient, menaçants. Au cœur même de cette noirceur percée de temps à autres par un faible rayon de lumière, quatre paires de points lumineux d'un rouge sanguin se dévoilaient à elle. Ils avançaient irrémédiablement vers eux avec une lenteur qui lui fit dresser les poils sur la nuque, lui coupant le souffle par la même occasion.

Héphestion, qui avait parcouru un peu de distance, ressentit le mal qui se dégageait de la pénombre et, ardemment bien accrocher à ses prises, tourna légèrement la tête dans la même direction que la jeune femme. La peur suintant de tout son corps, il baissa rapidement la tête pour voir si sa jeune compagne la suivait bien et resta tétanisé par la scène qu'il voyait. Reprenant une contenance des plus froides, il l'appela sans risque vu le temps qu'ils leur restaient.

- Gaïa ! Gaia ! Dépêche-toi de me suivre ! On n'a plus beaucoup de temps !

Il avait beau tenter de la secouer du haut de son perchoir, rien n'y faisait. La jeune femme avait le regard complètement fixé sur les ombres qui avançaient lentement, mais sûrement, vers elle. N'y réfléchissant pas plus que de quelques millièmes de secondes, Héphestion respira un bon coup et lâcha ses prises d'un coup sec, son corps tombant rapidement dans le vide. La distance avec le sol était telle qu'il avait juste le temps de se retourner et de retomber sur ses pieds. Son poids provoquant un bruit sourd sur le sol dur de la forêt, il ne mit que quelques secondes pour adopter une posture de défense des plus basiques alors que son bras gauche attrapait le tour de taille de la jeune femme pour la pousser derrière lui.

Les ombres, qui glissaient inlassablement vers eux, finirent par sortir de la pénombre du paysage boisé, tel des fantômes en quête d'une proie à hantée durant le restant de sa vie. Repoussant les quelques branches qui se trouvaient encore devant eux, les silhouettes finirent par se dévoiler à eux, les paires de points rouge sang éclatants d'envie encore plus qu'avant.

Le soleil décida de se révéler à ce moment-là, ce dernier étant dissimulé par les nuages cotonneux qui s'éparpillaient dans le ciel bleuté. Majestueuse puissance, il laissa ses rayons se propager sur la petite plaine et envahit l'ombre terrestre en une seule traite.

Les ombres qui se trouvaient à la lisière de la forêt disparurent pour ne laisser plus que des corps puissants se dévoiler à leurs yeux. Elles semblaient même avoir été aspirée par eux. Recouvert d'une armure intégrale aux formes des plus simple et aussi sombres que l'Erèbe, Héphestion pouvait remarquer que de fines arabesques étaient ciselées à même dans les parties de la cuirasse, leurs donnant un cachet encore plus fort que l'apparence en elle-même qu'elles dégageaient. Au niveau de leur poitrine, une protection pectorale d'une couleur rouge sanguine se reflétaient tel un rubis que l'on venait d'extraire du sol. Les reflets du soleil venant s'y reposer donnaient encore plus d'importance aux reflet rougeâtre qui ressortait du plastron pectoral.

Les quatre hommes, tel était ces nouveaux venus, arboraient la même couleur de cheveux. D'un blond cendré, on ne voyait de leur chevelure que quelques mèches qui ressortaient de leur casque. Le casque, quant-à-lui, de forme assez simple, était tout aussi sombre que le reste de l'amure et protégeait la tête dans pratiquement toute sa partie. Seul l'avant du visage était dégagé et laissait apparaitre des visages virils au sourire carnassier. Leur regard était, par contre, plongé dans l'obscurité et les deux jeunes gens ne pouvait voir que la lueur rouge étinceler dans cette pénombre, une lueur des plus malsaine et envieuse envers eux.

Déglutissant, la gorge complètement sèche, Héphestion se demanda ce qu'ils leur voulaient. Et qui étaient-ils en plus ! Tout comme Gaïa. Qui était-elle ? Pour cela, il ne pouvait l'en blâmer, il venait tout juste de la rencontrer dans le village où il se trouvait quand ses adversaires venaient d'apparaître, ne leur laissant pas le temps d'apprendre à se connaître tous les deux. Mettant le village à feux et à sang, Héphestion lui avait attrapé la main pour la mettre en sécurité. Sans y réfléchir, il avait foncé directement dans les bois et avait laissé son instinct le guider, comme à chaque fois qu'il part en voyage.

De là, il avait senti ses adversaires du moment continuer à saccager le village avant de les prendre en chasse, faisant de leur rencontre un véritable cauchemar. Maintenant, ils étaient devant eux et il ne savait pas comment agir. S'arquant un peu plus sur ses pied, Héphestion les dévisagea de son regard bleuté sans les quitter des yeux. Derrière lui, il pouvait sentir la jeune femme tressaillir et se plaquer un peu plus contre lui, la rondeur de ses seins se massant contre son dos. Fermant son esprit, il jeta un rapide coup d'œil à sa compagne, lui fit un sourire rassurant, et se concentra pleinement sur les nouveaux arrivant.

- Qui êtes-vous ?

Sa voix était caverneuse et il ne la reconnu pas, se demandant si la panique qui le hantait s'était fait ressentir dans sa question. Et c'est ce qu'il dut penser car le rire sadique que lançait les quatre hommes ne le laissait pas en reste. Bien au contraire, les poils se trouvant sur sa nuque et ses avant-bras se tendirent à l'extrême et lui donna froid dans le dos.

Une larme glacée coula même le long de sa colonne vertébrale et c'est là qu'il comprit qu'il avait son dos poisseux de sueur. Le froid qui s'en dégagea venait tremper l'avant du vêtement de la jeune fille, obligeant les tétons de cette dernière à durcir contre son dos, le faisant frémir.

Malgré la situation, il arrivait encore à ressentir du désir envers la jeune femme alors que le lieu, ni même le moment, ne se prêtait pas à ce genre de pensées. Un bruissement de pas le fit revenir à la réalité et il foudroya ses adversaires de son regard bleuté qui s'éclaircissait quand les rayons du soleil venaient s'y réfléchir.

Devant eux, les quatre hommes venaient de se remettre en route, d'un pas lent et malsain. Le rire sadique qui sortait de leur bouche les firent grelotter et ils reculèrent d'un pas sans le vouloir. La peur leur tenaillait le centre même de leur ventre, ce qui accentua le plaisir du sang chez les quatre nouveaux venus.

- Qui êtes-vous ? demanda à nouveau Héphestion.

Sa voix trembla un peu moins que la première fois qu'il avait posé la question mais la conviction qu'il venait d'y insérer le rassura considérablement. Le côté caverneux avait disparu et cela était le principal ! Son regard fuyant d'un adversaire à un autre, il n'en était pas rassuré pour autant. Au fur-et-à mesure que les inconnus avançaient vers eux, voyait, au niveau de leur pas, les touffes d'herbes se brunir et perdre leur vitalité. La vie les quittant, elles terminèrent en cendre, ne laissant qu'une tache ovale là où se trouvait l'empreinte de leurs pas.

- Héphestion… j'ai peur… déclara Gaïa.

Il la comprenait parfaitement. Lui-même avait peur et il ne savait pas comment agir. Lui souriant, il espérait de tout cœur lui redonner un peu d'espoir. Pourtant, au fond de lui, il savait que de l'espoir il n'y en avait pas. L'heure de leur mort sonnait et l'Hadès arriverait bien plus vite qu'ils ne le pensaient.

Respirant un bon coup, son torse se gonflant comme un ballon, Héphestion se cramponna un peu plus fort sur ses jambes et fixa complètement son regard bleuté dans la pénombre de ceux de ses adversaires. Un bras courbé et l'autre relevé devant son visage, il attendait courageusement que ces derniers mènent l'assaut pour un combat perdu d'avance.

Se trouvant plus qu'à quelques pas de leurs victimes, les quatre inconnus ricanèrent de plus belle, faisant hérisser les poils sur les avant-bras et nuques du jeune couple. Des quatre, les plus grands leva lentement son bras droit et pointa les jeunes de son index, son ongle étant un peu plus grand que la moyenne. Il releva lentement le visage, dégageant la pénombre qui s'affichait sur son regard et laissa à découvert un regard meurtrier, à l'éclat sanguin. Ses lèvres s'étirèrent pour afficher des dents aussi blanches que la plus pure des colombes mais aux pointes acérées comme des crocs qui n'attendaient qu'une seule chose… dévoré leurs proies !

Tout doucement, un nuage rougeâtre se mit à l'envelopper, entourant tout son corps comme un fin voile protecteur. Au plus l'aura grandissait, au plus la couleur rouge s'assombrissait, prenant pratiquement la couleur du sang. Pliant son index, le carnassier effectua dans cette protection chimérique une rotation des flux qui obligea cette aura à se replier sur son index. Illuminé, l'ongle de l'index se mit à croître, prenant une taille des plus extraordinaire et une couleur écarlate.

Héphestion n'en croyait pas ses yeux. Voir une tel chose était impossible. Regardant cet appendice grandir en quelques secondes, il se demandait comment il allait pouvoir les sortir de ce pétrin pour lequel ils n'avaient rien demander. Ce qui le terrifiait le plus était le tourbillon sanguin qui entourait le membre et qui semblait menaçant à souhait.

Déglutissant alors que sa bouche était aussi sèche qu'un désert, Héphestion ne douta plus et se promis de tout faire pour sauver la jeune femme qui se trouvait contre lui, apeurée par les évènements. Elle avait le droit de vivre et il ferait tout pour qu'elle puisse continuer à voir le monde, un monde ou de tels carnassiers ne vivraient plus. Décider, il s'arma de courage et attendit patiemment que son meurtrier lance le premier coup car tel était le mal qui se trouvait devant lui.

D'un simple retrait de son bras, un filament écarlate se dessina sur la trajectoire de l'index, provoquant une faible bourrasque dans son sillage. Le carnassier en sourit de plus belle devant la peur qui s'affichait dans le regard de ses proies. Il en jubilait intérieurement. Pour lui, une telle peur était source de bonheur et de plaisir, encore plus que de passer une nuit avec une femme. Arquant son dos et remplissant ses poumons d'air, il renvoya son bras vers l'avant, l'ongle de son index bien droit devant lui et s'apprêta à décharger toute sa fougue de cruauté sur ses nouvelles victimes. Il espérait voir leurs yeux s'écarquiller d'horreur et que leur sang viendrait s'asperger sur sa cuirasse et son visage. Il l'espérait tellement. Il les voyait se rapprocher de lui à une telle vitesse que cela l'excitait encore plus. Il était sur le point de les atteindre quand une lumière sur son coté gauche éclata, devenant de plus en plus lumineuse au fur-et-à-mesure qu'elle se rapprochait de lui. Fulminant de rage, il stoppa net son attaque et esquiva la lumière blanche qui passa devant lui.

Héphestion, tout comme Gaïa, n'en crurent pas leurs yeux. Tournant le visage du côté d'où venait la luminosité, ils purent voir arriver un homme recouvert d'une armure dorée. Ce dernier écartait lentement les branches qui lui faisait face avec une délicatesse qui les laissait pantois.

Sa crinière brune cascadait légèrement jusqu'à ses épaules, les fines mèches partant dans tous les sens, et ondulait avec grâce à chacun de ses pas. Son regard, pourtant dure, laissait entrapercevoir une âme juvénile où l'espièglerie et la malice ne faisait qu'un. Couleur marron, les éclats de luminosité provoqué par le soleil donnait des petits reflets mordorés avec, à certains endroits, un soupçon d'éclat d'un rouge sang presque imperceptible.

Sa voix, chaude et remplie de malice, résonna dans l'air, telle la résonnance d'un chant d'oiseau se répercutant dans l'étendue boisée. Le tout suintant l'humour.

- Je te conseillerai de ne pas aller plus en profondeur dans tes menaces silencieuse… Trinidor !