Voici un petit OS divisé en deux parties sur une scène de mon couple préféré qui est née tout récemment. J'étais tellement inspirée que je n'ai pas eu d'autre choix que de la coucher sur papier!
L'OS n'est pas entourée de circonstances particulières et ne se situe pas dans un espace temps précis. Il n'y a pas de raison définie qui justifie la présence de Sookie au Fangtasia au début l'OS. Je n'ai fait que m'amuser sans vraiment me soucier des détails logiques de l'histoire originale. Je tiens également à préciser que le style avec lequel j'ai écrit n'est pas vraiment le mien. Normalement, j'écris à la troisième personne, mais les livres de Charlaine Harris m'ont convaincue de tenter l'expérience au "je". Aussi, mon style est plus dark, moins sarcastique que celui de Harris. J'ai adoré me glisser dans sa peau! XD
Cela dit, j'espère que ça vous plaira!
Lexa Nedra
L'issue d'un cauchemar
Première partie
J'ai brusquement tourné les talons, mais une main puissante s'est aussitôt refermée sur mon bras, près de mon coude, par derrière. L'étau m'a attiré dans la direction opposée et j'ai vertement pivoté sur moi-même, comme une toupie. Mes longs cheveux blonds m'ont fouetté le visage. Eric a immédiatement saisi mon autre bras de sa main libre afin de me faire prisonnière de son étreinte puis a encré son regard dans le mien.
- Sookie.
Il y avait dans ses yeux écarquillés une intensité que je ne lui avais jamais vue, une avidité, une urgence. Il paraissait effaré, hagard. Cette remarque a fait courir un frisson d'angoisse le long de mon échine et j'ai décidé de ne pas lui résister autant par peur qu'il ne perde les pédales et ne broie mes coudes que par envie de découvrir la raison pour laquelle il me retenait. Il ne cillait pas, ne bougeait pas, comme si maintenant qu'il avait capté mon attention, il ne savait plus trop quoi en faire.
Je pouvais deviner ses mâchoires étroitement serrées l'une contre l'autre, car la pointe de sa mandibule, sous ses oreilles, était plus proéminente que d'ordinaire. J'ai su, juste d'après cet unique détail, qu'il allait me dévoiler quelque chose d'inédit. J'ai retenu mon souffle.
Quelque chose de pointu a alors jailli de sa poitrine, directement d'où était situé son cœur qui, pendant un instant, avait peut-être produit quelques battements incertains. Un pieu ensanglanté auquel s'était accroché des organes en lambeaux a aspergé mon visage et mon torse de son sang et Eric a ouvert la bouche sous l'effet de la surprise. J'ai sursauté, répugnée. Son regard jusqu'alors écarquillé d'appréhension s'est vidé de toute émotion et s'est transformé en simple écran vide. Mon attention, nouvellement attirée par le bout de bois qui m'avait pratiquement embroché, s'est reposée sur le visage d'Eric dont la bouche évacuait déjà une incroyable quantité d'un sang épais semblable à du goudron. Je ne me souvenais pas avoir autant tremblé. J'avais l'estomac à l'envers.
Une fois le choc passé, j'ai poussé un hurlement à m'en déchirer les cordes vocales tandis que je constatais qu'on venait de tuer mon Viking préféré sous mes yeux. Je n'avais aucune idée de l'identité du responsable, d'autant plus que nous étions seuls sur le sinistre terrain. Le pieu avait simplement surgi de nulle part.
Je n'ai pas eu le temps d'esquisser le moindre geste avant que le corps d'Eric n'éclate tel un ballon surchargé d'air et projette autour de nous d'innombrables masses écarlates, gluantes et informes. J'ai voulu refermer mes mains autour de ses larges poignets dans le futile espoir d'éviter le désastre, mais mes doigts ne se sont resserrés que dans ma paume moite. Mon cri, que je n'avais pas encore interrompu, a redoublé d'ampleur.
- ERIC! m'ai-je époumonée en me redressant violemment.
Je cherchais mon souffle, quelque chose à quoi m'accrocher. J'avais l'impression qu'on venait de m'enfoncer un poing dans le ventre. Mes mains tâtaient le tissu sous mes doigts et j'ai compris que j'étais installée à l'horizontal sur un fauteuil de velours deux places. J'ai cherché Eric du regard, complètement affolée, mais je n'ai trouvé ni flaque grumeleuse et cramoisie sur le plancher ni d'homme correspondant à sa description. J'ignorais si se devait être un bon ou un mauvais signe.
Un rapide examen des lieux m'a permis de m'apaiser : ce scénario sanguinolent n'avait été qu'un cauchemar. Je me trouvais en pleine sécurité – tout est relatif – au Fangtasia alors que l'horrible scène qui m'avait fait réagir aussi violemment s'était produite sur le terrain sombre d'une usine désaffectée. Sacrilège! Ça m'avait semblé si réel!
Trop réel, d'ailleurs. J'ai décidé de ne pas écarter cette terrifiante scène de mon esprit avant de m'assurer qu'Eric était bel et bien en vie. Il ne devait pas être bien loin, non? Après tout, le Fangtasia lui appartenait. J'ai rejeté l'épaisse couverture rouge qui recouvrait mes jambes et j'ai posé mes pieds sur le sol de ciment froid en effectuant une rotation complète avec ma tête afin de ne pas épargner de mon analyse oculaire un seul recoin du bar dans lequel je me trouvais.
J'ai cessé mes recherches lorsque je l'ai aperçu en compagnie de Pam, tous deux appuyés contre le comptoir situé à quelques mètres de moi.
Pam portait son habituel masque impassible, mais revampé : un de ses sourcils impeccablement dessinés s'était arqué au-dessus de son œil gauche et formait un demi-cercle parfait. Elle me dévisageait comme une mère aurait dévisagé son gamin lors d'une crise de larmes particulièrement excessive et exaspérante. Typiquement Pam. Eric, quant à lui, avait le corps légèrement fléchi vers l'avant, comme s'il s'apprêtait à me rejoindre sans toutefois l'oser. Ses chevilles étaient croisées. Sa bouche entrouverte et ses pupilles dilatées – allez savoir comment j'ai pu remarquer ce dernier détail depuis ma position – témoignaient clairement d'une stupeur muselée et ses bras croisés sur sa poitrine reprenaient lentement place de chaque côté de son corps.
J'avais l'impression d'être une bête de foire singulièrement moche sous un projecteur tant leur regard était lourd, mais j'ai rapidement compris que mon cri n'avait malheureusement pas fait partie de mon rêve ; Eric et Pam avaient parfaitement dû m'entendre hurler le nom du Viking. Je ne pouvais pas les blâmer de me regarder ainsi. J'avais d'ailleurs dû interrompre de façon plutôt impolie leur conversation. La violence de ma réaction, par ailleurs, n'allait certainement pas m'aider à les persuader que je n'avais fait qu'un « banal » rêve érotique au sujet d'Eric – du moins, pas avec consentement.
J'ai enfoui mon visage dans mes mains en poussant un brusque soupir. Quelle honte! Contre toute attente, c'est un sanglot qui s'est échappé. Décidément, c'était tout ou rien. Tout en pestant contre moi-même et mon incapacité à endiguer mes émotions en public, je me suis levée et j'ai couru jusqu'aux toilettes des dames. Magnifique sortie de scène. Dramaturge plutôt que serveuse chez Merlotte? J'y ai pensé.
Là, j'ai mis le verrou comme si j'avais eu à mes trousses un psychopathe chronique et me suis perchée au-dessus du lavabo immaculé, la tête pendue entre mes épaules tremblotantes. Sans trouver la force de me contenir, je me suis mise à pleurer.
Bon sang, ce rêve m'avait paru d'une telle tangibilité! J'avais ressenti l'appréhension mêlée d'excitation lors du mutisme d'Eric, j'avais ressenti la surprise et le dégoût de voir surgir un pieu de sa poitrine, j'avais ressenti l'épouvante en le voyant exploser sous mes yeux. J'avais manifestement pu goûté à ce cocktail d'émotions car après quelques secondes de répit, j'ai improvisé un bol de fortune avec le creux de mes mains et les ai placées sous le jet d'eau afin d'effacer l'horrible goût de bile qui roulait dans ma bouche. J'ai bu à grandes gorgées. Je me suis ensuite aspergé le visage pour me ressaisir et tressailli lorsqu'on a cogné à porte.
- Sookie. Ouvre-moi.
Eric. Comme si sa proximité était connectée à mon réservoir lacrymal, mon visage s'est tordu de façon ridicule tandis que ma mémoire me rappelait l'horreur qui m'avait envahie dans mon rêve – merci au miroir fixé au-dessus du lavabo qui m'a renvoyé ma très charmante image. J'ai discrètement reniflé pour éviter qu'il m'entende me lamenter, mais j'ai abandonné toutes ces précautions futiles en me remémorant l'ouïe ultrafine des vampires. Qui plus est, j'étais trop épuisée pour contrôler mes réactions, et Eric m'avait déjà vu dans de bien pires conditions qu'en larmes. J'ai néanmoins ignoré sa présence. Pas question de pleurnicher dans ses bras. J'allais ramasser à la petite cuiller le peu de dignité qui me restait.
J'ai attrapé la serviette rouge brodée d'un imposant F suspendue à une barre de métal et épongé mon visage. Ça m'a fait du bien. En jetant un œil dans la glace, j'ai remercié mon rêve d'avoir décoré ma peau de plaques incarnates qui auraient le pouvoir d'alerter quiconque se trouvait à dix mètres de moi que j'avais été victime d'une crise de larmes. Puis je me suis rappelé que je détenais de tout mon temps et que je pouvais rester enfermée dans les toilettes jusqu'à ce que mort s'ensuive. Surtout si Eric avait l'intention de rester immobile dans le cadre de porte jusqu'à ce que je me décide à en sortir.
- Sookie, a-t-il réitéré d'une voix incroyablement douce afin de me rappeler qu'il était toujours là.
J'ai plaqué la serviette contre mon visage pour m'empêcher de fondre de nouveau en larmes et j'ai sérieusement cru à ma plus récente théorie au sujet de la potentielle connexion entre mon réservoir lacrymal et la proximité d'Eric. J'avais indubitablement les nerfs à fleur de peau, car j'étais normalement une femme forte qui ne se mettait pas dans tous ses états à cause d'un cauchemar.
J'ai senti la commissure de mes lèvres s'incurver. Un sourire? Croyez-le ou non, j'ai souri en sentant les effets bénéfiques du son de sa voix grave sur mes nerfs tendus. J'avais manifestement besoin de sommeil. Loin de lui.
Cinq minutes plus tard, Eric n'avait pas réessayé de m'attendrir avec son accent archaïque. J'en ai déduit qu'il avait abandonné et s'était éloigné pour me laisser le temps de me ressaisir. Je me suis promise de le remercier pour sa délicatesse. Ou pas. À vrai dire, rien ne m'indiquait qu'il n'était pas encore de l'autre côté du mur à patienter. Les vampires pouvaient se déplacer avec une discrétion et une vitesse étonnantes ; les deux options restaient donc envisageables.
Le décor commençait sérieusement à me déprimer lorsque j'ai décidé de sortir des toilettes. J'ai jeté un œil à mon reflet dans le miroir – mes plaques s'effaçaient paresseusement – et j'ai doucement déverrouillé la porte pour ne pas alerter quiconque se trouverait dans les parages s'il s'avérait qu'Eric s'était éloigné. Mais qui n'ai-je pas aperçu en ouvrant la porte? Eric, évidemment, qui, de plus, ne m'offrait pas la possibilité d'échapper à son interrogatoire aussi facilement que j'aurais pu espérer puisqu'il remplissait le cadre de porte par son maintien. Avec ses deux avant-bras plaqués contre les murs, ça ne me laissait pas beaucoup d'espace pour m'échapper. J'aurais bien pu me glisser dans le jeu sous ses bras, mais quelque chose me disait qu'il avait suffisamment eu la puce à l'oreille lors de mon réveil mouvementé pour qu'il me rattrape aussitôt. Somme toute, Eric Northman n'avait aucune délicatesse.
J'ai donc décidé de faire une femme de moi et me suis également accotée au cadre de porte pour l'affronter, le visage obstinément baissé – qu'on me secoue. Je n'allais certainement pas me lancer dans des justifications ; je n'étais nullement obligée d'expliquer ma réaction à quiconque – et encore moins à Eric.
- Je vais bien, lui ai-je assuré.
- Bien sûr. Et moi, je suis un loup-garou, a-t-il rétorqué du tac au tac.
Il était de notoriété publique que les vampires et les loups-garous n'étaient pas les meilleurs amis du monde ; aussi, déstabilisée par cette réplique pour le moins loufoque, j'ai levé la tête et croisé son regard. Aussi expressif qu'une planche à repasser. Ma proximité avec lui m'a aussitôt rappelé mon rêve, et j'ai dû sourire pour tenter de rivaliser avec mon réservoir lacrymal qui faisait encore des siennes. Oh que non. Surtout pas devant Eric. Il serait trop… satisfait. Pourtant, j'avais une incroyable envie de me jeter dans ses bras, de l'embrasser, de le…
- Je te répète que je vais bien, ai-je répété d'une voix étonnamment rauque.
Je me suis éclaircie la gorge et j'ai tenté de me faufiler sous son bras. En vain. Il l'a baissé au même moment, me barrant ainsi le passage. Ça ne m'avait rien coûté d'essayer. Je n'ai pas cherché à retenter ma chance, car quelque part au fond de moi, sa curiosité mal placée me touchait.
- Sookie Stackhouse. Tu me mens. N'oublie pas que tu as mon sang dans tes veines.
Comme si c'était une chose que j'étais près d'oublier! J'ai ricané avec un manque flagrant de sincérité et me suis mise à danser d'un pied à l'autre. J'ignorais totalement ce que serait l'issue de cette conversation, d'autant plus que Pam semblait avoir disparue – je ne l'apercevais pas derrière Eric. Ce qui faisait de nous les deux seuls occupants des alentours. Et Dieu savait à quel point se trouver seul avec Eric Northman pouvait être angoissant. J'ai prié pour que l'ouverture du bar se fasse d'une seconde à l'autre et que je puisse me sauver de cet entretien.
Mon cœur a raté un battement lorsqu'une de ses mains s'est glissée sur ma joue. Seigneur, il était si beau! N'avoir eu aucune retenue, je me serais jetée contre son torse et l'aurait embrassé jusqu'à ce que je ne sente plus mes lèvres. Mais j'avais une fierté et, surtout, un petit ami que j'aimais – aussi cette dernière raison fut-elle celle qui me poussa à écarter ses longs doigts masculins de mon visage.
- Eric, je vais bien. Maintenant, laisse-moi passer.
J'aurais peut-être pu paraître implacable si j'avais au moins tenté de partir, mais je suis bêtement restée là, devant lui, à attendre qu'il s'écarte. Autant ordonner à une table de se mettre à danser! Il n'a pas bronché, pas même sourcillé. Bon, d'accord. Il commençait à m'énerver royalement.
- Eric, ai-je répété, les dents serrés.
- Sookie, m'a-t-il imité.
Le même, l'identique ton de voix qu'il avait employé dans mon rêve. J'ai tressauté, comme giflée derechef par la tangibilité de cette scène que j'avais vécue dans ma tête.
Ç'aurait pu être vrai. Eric pouvait mourir à tout instant, de cette même manière. Un pieu pouvait lui transpercer la poitrine d'une nuit à l'autre – il avait tant d'ennemis. Une seule pensée vers l'éventualité d'une vie sans le grain de sel d'Eric Northman et je me suis sciemment effondrée dans ses bras. J'ai entouré sa taille des miens et j'ai libéré un bref sanglot, l'oreille contre son torse ferme. Il ne m'a pas rendu mon étreinte. Cette absence de réaction m'a tellement embarrassée que je me suis aussitôt écartée de lui comme d'un lépreux. Ça n'avait duré qu'une seconde.
- D'accord. Sérieusement, dégage, lui ai-je ordonné sans oser le regarder.
Au même moment, la porte principale – celle des clients – du Fangtasia s'est ouverte et les premiers fêtards de la soirée sont apparus. Dieu merci! C'était l'heure de l'ouverture du bar. J'ai aperçu Pam, dans son habit de vinyle écarlate provocateur, réclamer des papiers d'identité à un groupe d'adolescents gothiques et me suis demandé ce qu'elle avait pensé de mon réveil brutal. À peine ai-je eu le temps de m'attarder sur la question qu'Eric m'a écrasé dans ses bras. La seconde suivante, nous étions dans son office. J'étais en mauvaise posture.
- Tu ne quitteras pas cette place avant de m'avoir expliqué ce que tu as vu, m'a-t-il annoncé d'une voix pas attendrie le moins du monde par mon dernier geste.
J'ai poussé un court soupir haut perché, indignée par son front. Avais-je étourdiment signé un contrat de partage intégral lorsque nous avons échangé nos sangs? J'ai serré les poings. Comme si ça ne suffisait pas, j'ai sentie, de nouveau, mes yeux picoter. J'avais envie de l'assommer – et de m'assommer par la suite.
- Je n'ai rien vu, ai-je déclaré d'une voix écumante de rage. J'ai rêvé. Un rêve stupide. Il n'y a rien d'autre à dire. J'aurais bien apprécié que tu me demandes mon avis avant de m'incarcérer dans ton bureau.
- Tu as hurlé mon nom en te réveillant, a-t-il cru bon de me rappeler en ignorant superbement mon reproche.
Non, vraiment? J'allais indubitablement devoir lui expliquer la raison si j'avais l'intention de retourner à Bon Temps. Mais où diable était Bill lorsque j'avais besoin de lui? Je me suis accrochée à cette pensée pour m'assurer qu'Eric n'oserait pas franchir une frontière trop risquée avec moi. Comme s'il était le seul susceptible d'une telle infraction…
Eric a dû sentir que je n'allais plus lui résister car il a libéré son poste devant la porte et s'est approché de moi d'une démarche affreusement sexy, les bras ballants. Tout en pensant à Bill, à Bill et à Bill, je l'ai laissé s'approcher, convaincue qu'il allait s'arrêter à une distance convenable étant donné de l'hostilité à l'état gazeuse que mes pores de peau dégageaient. Il ne voulait tout de même pas recevoir un coup de patte en pleine figure, non? Il ne s'est arrêté que lorsque ma tête ne pouvait plus fléchir davantage pour garder le contact visuel ; c'est-à-dire lorsqu'il fut littéralement plaqué contre moi. Logique revue. C'est en voulant reculer que j'ai constaté que j'étais de nouveau prisonnière ; derrière moi, son bureau me bloquait l'accès. Bravo, Sookie.
- J'ai rêvé à toi, ai-je stupidement annoncé.
Une chance qu'Eric était une personne patiente, car la chose avait certainement déjà été assimilée si on prenait en considération ce que j'avais hurlé en me réveillant. J'ai souhaité pouvoir m'arracher les yeux lorsqu'ils se sont, encore une fois, mis à me démanger. Ceux d'Eric s'étaient doucement écarquillés, juste assez pour que je le sache accroché à mes lèvres. Exactement comme dans mon rêve.
Bon sang, il ne m'aidait pas du tout. Bill, Bill, Bill, Bill, Bill…
- Quelqu'un te transperçait le cœur d'un pieu, lui ai-je finalement dévoilé d'une traite.
Enfin! C'était dit. Peut-être m'étais-je attendue à ce qu'il grimace ou à ce qu'il s'intéresse à l'identité de son assassin, mais certainement pas à ce que son regard s'adoucisse encore davantage comme se fut le cas. Jamais je n'avais vu une telle tendresse dans ses yeux, si bien que j'en ai été effrayée pendant quelques instants. Eric semblait enivré, complètement émerveillé, comme un enfant devant une maison en bonbon. Était-ce si jouissif de savoir que ses amis rêvaient de son meurtre? J'ai écarté mon torse du sien en m'appuyant sur mes mains plaquées contre le bureau derrière moi. Je n'avais aucune envie de développer un torticolis parce que monsieur ne savait pas garder ses distances.
- Tu t'es mise dans un tel état pour cette raison? a-t-il soufflé en s'approchant encore plus de moi.
Ah. Voilà donc pourquoi il semblait séduit par sa propre mort. J'ai été tentée par l'idée de complètement nier la chose, mais une parcelle de moi désirait savoir ce qu'il allait faire de cette découverte. Mis à part le frisson qui m'a secoué lorsque son membre s'est s'enfoncé contre mon entrejambe, je n'ai pas réagi.
Pendant que j'oubliais que j'avais un petit ami en quelque part à Bon Temps, Eric s'est penché sur moi et son visage d'une beauté barbare s'approchait du mien. Si ses traits ne dégageaient aucune émotion, ses yeux, en revanche, parlaient comme une pie. Il me désirait. Il voulait me prendre, là, sur son bureau, et me faire crier jusqu'à ce que les clients du Fangtasia se demandent si quelqu'un n'étaient pas en train de se faire torturer dans le bureau du propriétaire.
J'ai frissonné en m'imaginant ce que devait être une partie de jambes en l'air avec Eric Northman. J'aurais dû me dégager, ou du moins faire preuve d'un minimum de résistance en reculant mon torse tandis qu'il approchait le sien, mais je n'en ai rien fait. Je l'ai laissé glisser sa main sur ma nuque et mêler ses doigts dans mes cheveux sous ma queue de cheval. Je sentais son souffle contre ses lèvres. J'attendais impatiemment qu'il se lasse de ce moment de flottement et m'embrasse comme une furie, mais il ne se décidait pas à le faire. Bon sang, était-il en train de me laisser le temps de prendre conscience du fait que j'étais à deux doigts de me montrer infidèle envers Bill?
Ses doigts se sont resserrés autour de mon élastique et il l'a fait glisser le long de ma queue de cheval parfaitement centrée. Lorsque mes cheveux ont encadré mon visage, il a repositionné l'extrémité de ses doigts contre ma tempe et les a faufilés dans mes cheveux jusqu'à ce qu'il atteigne le sommet de mon crâne. Son poing les a délicatement saisi et il m'a obligé à pencher la tête vers l'arrière. Je l'ai laissé faire. J'adorais ça.
Son autre main s'est posée sur ma mâchoire sous mon oreille, et ses canines ont brusquement jaillis de ses gencives. Se faisant, il a poussé un sourd grondement en retroussant sa lèvre supérieure. Le tableau a eu raison de moi et j'ai attiré sa tête contre la mienne sans ménagement.
La langueur du moment s'est soudain muée en fièvre. Il m'embrassait avec une telle véhémence que j'ai cru que ses canines affutées allaient me charcuter la langue. Ses mains voyageaient partout sur mon corps, pressaient ma tête contre la sienne, tiraient sur mes cheveux et mes vêtements. Je me suis bientôt retrouvée assise contre le bureau et plusieurs objets qui s'y trouvaient ont volé jusqu'au plancher. Eric ne semblait pas s'en soucier le moins du monde. Il a même été jusqu'à écarter d'un geste rotatoire de son bras tout ce qui s'y trouvait pour m'y étendre sans que je me retrouve avec un téléphone coincé sous mon dos.
Lorsque j'ai noué mes jambes autour de son torse et appliqué une pression contre ses fesses à l'aide de mes pieds, il a reculé son visage et a poussé ce même sourd grondement qui avait tout déclenché. J'ai compris qu'il désirait me mordre, mais je n'étais pas d'accord ; Bill se poserait bien trop de questions s'il s'apercevait des marques de morsure étrangères sur ma carotide…
- Ne me mords pas, lui ai-je ordonné en un murmure.
Sans manifester le moindre signe qui aurait pu m'indiquer qu'il avait compris le message, il s'est penché sur mon cou et s'est mis à l'embrasser avec la même ferveur. J'ai gémi et fermé les yeux. J'avais confiance en lui, donc je n'ai pas tenté de le repousser. Cela dit, je n'avais aucune envie qu'il arrête. Eric était une vraie bête. Je l'ai imaginé m'arracher tous mes vêtements en poussant une vocifération et j'ai souri. Sourire qui s'est d'ailleurs éclipsé à plein régime lorsque ses lèvres dévastatrices se sont attaquées de nouveau aux miennes. Sa langue explorait chaque recoin de ma bouche sans me donner la chance de reprendre mon souffle. Oubliait-il que contrairement à lui, j'étais humaine et je nécessitais d'oxygène?
Eric s'est lassé de notre position et s'est redressé aussi rapidement que les vampires pouvaient le faire. Je l'ai alors contemplé dans toute sa splendeur : j'avais défait sa coiffure lissée vers l'arrière par du gel et son débardeur noir qui dévoilait ses biceps bien bombés était tout de travers. Je pouvais pratiquement voir un de ses mamelons par le trou réservé au passage des bras. J'avais tant envie d'y plaquer ma bouche! À vrai dire, j'avais envie qu'il me fasse l'amour. Je n'ai pas eu le temps d'aligner deux autres pensées cohérentes qu'il m'a tiré par le col de mon chandail – qui a émis un craquement – et m'a de nouveau plaqué contre lui. Entraînée par sa force, je nous ai projeté contre la porte, mais il a échangé nos positions avant que nous l'atteignions. J'ai poussé un gémissement étouffé et Eric a riposté en reculant de nouveau la tête pour m'exposer ses canines.
- Ne me mords pas! ai-je répété avec une once de panique dans la voix – il était de moins en moins facile de prévoir ses gestes.
Il a grogné comme un chien auquel on aurait arraché son os et a levé mon chandail par-dessus ma poitrine à brûle-pourpoint. La chaleur montait. Sans ménager mon soutien-gorge – que j'avais acheté pour impressionner Bill lors de nos premiers jours de fréquentation –, il a écarté un bonnet et a couvert le mamelon qu'il a libéré de sa bouche. J'ai gémi de plus bel en saisissant ses cheveux, plaquant sa tête plus étroitement sur mon sein. Je sentais mon entrejambe délirer.
- Sookie, a-t-il soufflé d'une voix étonnement grave.
- Eric, l'ai-je imitée à défaut de faire preuve d'éloquence.
Il s'est relevé pour m'embrasser et j'ai glissé sa main sous son débardeur de plus en plus encombrant.
- Je t'aime, Sookie Stackhouse.
J'ai suffoqué, mais sa bouche ne m'a pas permis de renchérir. Mon excitation est morte en un claquement de doigt. Je l'ai obligé à s'interrompre en repoussant ses larges épaules de toutes mes maigres forces et nous nous sommes fixé pendant au moins dix secondes. Interminable. C'est le temps que je lui ai offert pour rectifier le tir, lui permettre de corriger ses pensées, de me détromper, mais il n'en a rien fait. Il se contentait d'haleter, le regard grisé, comme s'il ne venait que de me dire une banalité telle que « Faisons l'amour! », réplique qui aurait passé comme une lame chauffée dans du beurre.
Au bout de la onzième seconde, je l'ai carrément poussé et j'ai rabattu mon chandail sur ma poitrine. J'ai pivoté sur moi-même, saisi la poignée de porte et tiré. Elle restait obstinément fermée. Je l'ai alors déverrouillée en poussant un juron et me suis enfuie à toute jambe, traversant la salle bondée du Fangtasia comme si Eric Northman venait de m'annoncer qu'il souhaitait me trancher la gorge.
