Voici ma première fiction sur l'univers de Magi, j'espère que vous apprécierez : ) Je vous souhaite à toutes et tous une bonne lecture.
Disclaimer : Les personnages ainsi que l'univers de la série sont la propriété de la merveilleuse Shinobu Ohtaka
Longeant lentement le mur, Kougyoku avançait à pas lents, guettant le moindre bruit autour d'elle. Se penchant doucement en avant, elle regarda à gauche puis a droite avant de s'engouffrer prudemment dans le couloir. Seuls les bruits feutrés de ses pas rompait le silence des lieux, silence qui la maintenait sur le qui-vive. Elle sursauta vivement en entendant des voix approcher et se plaqua dos au mur, derrière un des longs rideaux pourpre qui encadraient une large fenêtre. Le cœur martelant sa poitrine à grands coups, elle entendit deux personnes discuter calmement tout en avançant à une allure régulière. Deux servantes qui allaient sans aucun doute s'acquitter de leurs tâches quotidiennes au palais. Restant immobile encore un moment, elle soupira lentement et relâcha ses muscles quand les voix disparurent. Elle avait du sang de noble, elle n'avait pas à se cacher... mais elle ne pouvait pas. Son père, Koutoku était le frère de l'empereur actuel il est vrai... Mais, à l'inverse de ses frères, cousins et cousine, sa mère n'était qu'une simple courtisane issue des faubourgs. Et bien qu'elle n'ait que six ans, elle savait très bien ce qu'il se disait à son sujet. Elle voyait les gens murmurer dans son dos lorsqu'on la voyait. Mais à quoi bon le murmurer ? Il lui paraissait évident qu'ils parlaient d'elle, leurs messes basses ne suffisaient pas à masquer leurs regards. La petite « bâtarde » n'était arrivée au palais que pour son lien de parenté avec le frère de l'empereur, ce dernier ne lui accordait d'ailleurs pas la moindre affection ou attention. Au contraire, en témoignait l'emplacement éloigné de ses appartements et du peu de fréquentations des habitants du palais. Elle avait été amenée ici, c'était tout. On lui fournissait ses repas, et c'était à elle d'occuper ses journées comme bon lui semblait. Qui se souciait de ce qu'une fille issue du peuple pouvait bien faire ? Cette isolation dans laquelle la petite était plongée depuis son arrivée la poussait à fuir toute personne qui pouvait croiser son chemin. Pourtant, ce que la petite princesse désirait par dessus tout, c'était de se faire des amis, de pouvoir parler, jouer et rire avec eux... Mais pour l'heure, ses seules amies étaient les nombreuses poupées de chiffons qu'elle habillait et coiffait encore et encore, et qui ne parlaient pas... ne riaient pas...
Elle se mordit la lèvre, laissant échapper un sanglot. Il n'y avait personne qui l'attendait, personne qui l'appelait pour passer du temps avec elle, pour simplement lui parler, lui demander si elle allait bien... Elle ne sortait jamais de ses appartements pour ne pas entendre les murmures sur son passage. A quoi bon, quand elle se tournait vers les gens qu'elle croisait, ceux ci se détournaient d'elle comme pour cacher qu'ils parlaient d'elle à l'instant. Pensaient-ils qu'elle n'entendait pas ? Pensaient-ils qu'elle ne comprenait pas ? Mais si, elle entendait, elle comprenait...
Elle se frotta les yeux avec sa manche avant de se pencher à nouveau pour regarder si la voie était libre et reprit sa progression. Ses longs cheveux lui cachaient en partie la vue mais elle n'y prenait plus réellement attention. A quoi bon, tout le monde se fichait de sa présence ici alors sa coiffure... Elle du cligner des yeux quand elle passa devant une fenêtre, la lumière du soleil l'éblouissant. Mettant sa main en visière, elle regarda à l'extérieur. La cour se dessinait en contrebas, entourée d'une part par les autres ailes du palais, réservées à divers membres de la famille royale et de l'autre, par un vaste jardin dans lequel bon nombres de résidents aimaient se promener. La petite princesse avait depuis longtemps envie de s'y rendre, encore maintenant c'était le cas... mais elle sentait la peur la gagner dès l'instant ou elle songeait qu'elle ne pourrait le faire sans croiser quelqu'un. C'était inévitable aussi y renonçait-elle a chaque fois. Elle n'oserait jamais s'y rendre...
Son regard se posa sur un petit garçon qui courait avec un grand sourire aux lèvres. Clignant des yeux, elle sentit son cœur battre un peu plus vite. Il devait avoir à peu près son âge, ses cheveux bleus attachés en arrières, de nombreuses mèches persistaient malgré tout à s'échapper, virevoltant au gré de sa course. Un grain de beauté apparaissait sous sa lèvre inférieure. Elle l'avait déjà vu à de nombreuses reprises. Et elle avait longtemps espéré avoir l'occasion d'aller lui parler mais... Elle avait appris en entendant les serviteurs discuter entre eux qu'il s'agissait du plus jeune fils de l'empereur. Le regardant encore un peu, elle le vit se précipiter vers deux jeunes hommes accompagnés d'une petite fille. Tous avaient les mêmes cheveux bleus, ce même grain de beauté... Elle sentit de nouveau les larmes lui monter aux yeux. Oh comme elle l'enviait. Comment pourrait-elle aller lui parler à lui alors qu'elle, elle n'était rien qu'une « bâtarde »... Une larme coula sur sa joue en le voyant lever les mains pour qu'un de ses frères se penche et le prenne dans ses bras. Comme elle aimerait elle aussi avoir quelqu'un pour l'enlacer et lui parler, pour lui sourire comme ils le faisaient tous les trois... Elle avait des frères aussi mais elle ne les avait encore jamais rencontrés, tout juste aperçu de loin... Savaient-ils seulement qu'ils avaient une sœur ? Elle se le demandait, jamais ils n'avaient cherché à venir la voir... Des sanglots s'échappèrent de ses lèvres alors qu'elle essuyait tant bien que mal les larmes qui coulaient. Si seule... elle se sentait si seule. Toutes ces journées se ressemblaient, elles passaient les unes après les autres sans qu'il ne se passe rien, sans que rien ne vienne égayer ce quotidien morne. Si seulement quelqu'un voulait bien d'elle ici... Cette maison était immense, les repas étaient bons... mais sans personne pour se soucier ne serait ce qu'un peu d'elle, sans personne qui se demande si elle allait bien, qui ne vienne lui parler... cet endroit était aussi froid que la glace. Pourquoi l'avait on amenée ici si c'était pour qu'elle se retrouve seule ainsi. Personne n'avait besoin d'elle, pire, c'était à peine si elle existait...
« Je déteste cet endroit... » murmura t-elle entre deux sanglots.
Un claquement la fit bondir et pivoter sur ses talons. Une porte ? Entendant des pas approcher, elle sentit la panique la gagner tandis qu'elle regardait rapidement autour d'elle à la recherche d'une cachette. Il n'y en avait aucune. Elle sentit son cœur tambouriner furieusement contre sa poitrine alors qu'elle entendait maintenant clairement les voix se rapprocher. Paniquant, elle se jeta sur une porte qu'elle remarqua à la dernière minute et l'ouvrir pour s'y engouffrer, la fermant aussi vite que possible, le souffle court. Restant dos contre celle-ci, elle attendit, priant de toutes ses forces pour que ces personnes ne viennent pas ici. Et elle sentit ses jambes céder sous son poids quand elle les entendit s'éloigner, se laissant glisser contre le bois froid de la porte pour finalement regarder autour d'elle. De larges étagères étaient dressées contre les murs, se hissant jusqu'au plafond, chacune garnies d'ouvrages divers. En son centre trônait un bureau en bois ainsi qu'un siège de même couleur sur un tapis pourpre aux motifs dorés qui échappaient à la petite. Se relevant doucement, elle avança prudemment, regardant avec une curiosité timide. Elle ne s'était jamais aventurée par ici aussi, malgré la peur constante de se faire surprendre, elle éprouvait de l'intérêt pour ce qu'elle voyait. Des livres et parchemins à perte de vue... Elle se demandait à qui pouvait bien appartenir cet endroit...
Elle sursauta et poussa un petit cri effrayé en entendant un bruit derrière elle. Tremblant de tous ses membres, elle tourna lentement la tête, s'attendant à trouver quelqu'un prêt à la sermonner quant à sa présence ici mais elle ne trouva personne. Déboussolée, elle regarda partout autour d'elle, cherchant à comprendre ce qu'il s'était passé. Ce fut en sentant son pied buter contre quelque chose qu'elle le remarqua. Un livre était étalé sur le sol. Sans doute était ce lui qui avait fait ce bruit en tombant... mais comment était-il tombé d'ailleurs ? Elle resta un moment à contempler la reliure de celui-ci, rose pâle avec des écriture dorées. Elle la trouvait jolie... Hésitant encore un peu, elle se pencha pour le saisir délicatement. Si elle le laissait par terre, le propriétaire des lieux devinerait que quelqu'un s'était introduit ici... Cherchant du regard, elle pinça les lèvres. Elle ne savait pas ou le ranger du tout... Le regardant, elle fut prise d'une vive curiosité et ouvrit les pages avant de cligner des yeux. Il n'y avait rien d'écrit, sur aucune page... Elle pencha la tête. Pourquoi garder un livre dont les pages étaient vierges ? A moins que ça ne soit un journal... Le refermant doucement, elle le serra contre elle.
« ... »
Ce n'était pas bien, elle le savait mais... Regardant autour d'elle pour s'assurer que personne n'était là, elle le glissa dans son kimono, le calant bien pour qu'il ne tombe pas avant de coller son oreille contre la porte. Personne... Ouvrant, elle fila rapidement des lieux.
Kougyoku restait agenouillée à observer l'ouvrage posé devant elle sur le sol. Elle... l'avait volé. Peu importe comment elle y pensait : ça restait un vol ! Elle avait volé ce livre à quelqu'un ! Elle sentit la panique la gagner. Et si le maître des lieux se rendait compte de la disparition du livre ? Et si quelqu'un l'avait vu sortir de la pièce ? Elle se ferait prendre à coup sûr et elle serait punie... Il fallait qu'elle le ramène et vite ! Pourtant... elle abandonna cette idée dès l'instant ou ses yeux se reposèrent dessus... Elle ne comprenait pas pourquoi. Jamais elle n'avait ressentit l'envie de s'emparer de quelque chose comme ça auparavant. Le prenant dans ses mains, elle s'assit confortablement sur un coussin, calant son dos contre le mur avant de l'ouvrir pour le feuilleter. Il n'y avait vraiment rien d'écrit sur aucune page. Que pouvait-elle en faire ? Un journal... Oui, puisqu'elle ne pouvait se confier à personne, alors elle pourrait tout lui confier à lui ! Peut-être se sentirait-elle mieux ainsi ! Elle se sentit un peu excitée à cette idée et alla chercher une plume ainsi qu'un pot d'encre. S'installant à même le sol, elle se chatouilla le nez du bout de la plume, réfléchissant par quoi commencer avant d'écrire tout en le murmurant
« Je m'appelle Kougyoku Ren... »
Réfléchissant à nouveau, elle pencha la tête en voyant les mots qu'elle venait d'écrire disparaître lentement, comme absorbés par le papier et se redressa, clignant des yeux.
« Mais... »
Comment de l'encre pouvait-elle s'effacer comme ça ? C'était impossible ! Trempant le bout de sa plume dans le pot d'encre, elle s'apprêtait à écrire à nouveau mais interrompit son geste à mi-chemin en voyant un mot se former.
« Bonjour Kougyoku »
Abasourdie, la petite laissa tomber sa plume et resta à fixer ces deux mots. Qui... qui avait écrit ça ? Comment était-ce possible ? Pourquoi ? Et comment ?
D'une main tremblante, elle reprit sa plume et l'avança sur la page pour écrire.
« Qui êtes vous ? Comment faîtes vous ça ?»
Attendant un peu, elle se mordit la lèvre en voyant de nouveau la page absorber les lettres jusqu'à ce qu'elles disparaissent sans laisser la moindre trace. Puis d'autres prirent leur place quelques minutes après.
« Je m'appelle Kougyoku. A vrai dire... je suis toi mais quelques années plus tard. »
La petite cligna des yeux. Quoi ? QUOI ? Non. Non, ça devait être une mauvaise blague, voilà tout. Mais... il n'y avait personne ici qui avait de raison de lui faire ce genre de blague...
« Et pour comment je le fais, c'est très simple grâce à la magie... Quel âge as tu ? »
La petite resta un moment immobile, se demandant ce qu'elle devait faire. Puis, elle finit par tendre la main pour écrire à nouveau. Qu'importe si cette personne lui mentait ou pas... Après tout, c'était impossible qu'elle se parle à elle même non ? Mais... c'était la première personne qui lui adressait la parole depuis tellement longtemps... Qui que soit cette personne, elle lui écrivait et lui posait des questions, lui répondait, s'intéressait à elle...
« J'ai six ans... »
Elle attendit patiemment, se ruant presque sur la page quand elle vit la réponse arriver.
« Je vois. Je suis donc arrivée à temps... »
Elle pencha la tête à cette remarque. Arrivée à temps ? Pourquoi donc ? Avait-elle peur de manquer quelque chose ?
« Tu sais, ce n'est pas par hasard que tu as trouvé ce journal. A vrai dire, je voulais que tu le trouve pour que tu me rendes quelques services. »
Intriguée, la petite princesse répondit aussitôt.
« Je ne pourrais sûrement pas t'aider, je suis toute seule ici, je ne peux pas faire grand chose... »
Mais si elle était une réplique de sa personne, celle ci devait le savoir mieux que quiconque non ?
« Je le sais. Je sais que tu te sens seule, que tu as peur des gens qui t'entourent alors que tu aimerais pourtant avoir des amis. Aujourd'hui encore, la solitude me fait peur mais tu sais ? Je me suis fait des amis et ça t'arrivera aussi. Tu en es capable, tu est forte et tu le deviendras encore plus, tu arriveras à te faire des amis, je te le promets »
La petite sentit son cœur battre plus vite en lisant ces lignes. Elle... était en train de l'encourager ? Elle sentit une douce chaleur envahir sa poitrine alors que des larmes perlaient au coin de ses yeux. C'était la première fois que quelqu'un lui disait ce genre de choses...
« Que veux tu que je fasses ?
_C'est simple. A partir de maintenant, je vais te décrire ce qu'il se passera et les choix que tu dois faire afin de ne pas commettre les mêmes erreurs que moi.
_... Je peux vraiment te faire confiance ? Tu n'es pas en train de te moquer de moi ?
_Ne t'en fais pas, je te laisserais en juger par toi même. Si vraiment tu as l'impression que je te mens, tu pourras arrêter quand bon te semblera. Mais j'espère sincèrement que tu me croiras car je ne te veux aucun mal, loin de là. »
Encore indécise, Kougyoku regardait les mots qui restaient inscrits sur la page. Elle avait compris que ses mots s'effaçaient quand son interlocutrice lui écrivait. Et quand elle écrivait à son tour, c'était ceux de son homologue du futur qui s'effaçaient... Un moyen de parler qui ne laissait aucune trace...
« Pourquoi est ce que tu m'as envoyé ce journal ? »
Elle ne comprenait pas la raison. Si vraiment elle parvenait à devenir plus forte et se faire des amis dans le futur, alors pourquoi ressentait-elle le besoin d'éviter des erreurs du passé ?
« A l'heure ou je t'écris, je suis âgée de dix-neuf ans. Il s'est passé beaucoup de choses et il va encore s'en passer beaucoup d'autres... La situation a prit une direction que j'aurais espéré ne jamais voir arriver, et pour laquelle j'éprouve énormément de regrets. Je ne veux pas que tu éprouve ces regrets toi aussi.
Treize ans après ton époque, nous avons perdu plusieurs membres de notre famille et il se peut que ce ne soit pas les derniers. »
Perdu ? Elle resta silencieuse. Des membres de leur famille seraient... morts ?
« Je sais que pour le moment, ces mots n'ont que peu de sens mais bientôt tu comprendras. Bats toi pour garder ceux qui te sont précieux autour de toi... et surtout prends bien soin d'eux.
... »
Effectivement, la petite ne savait que penser. Des membres de sa famille allaient mourir... mais elle ne les connaissait même pas... devait-elle être triste ? Elle n'arrivait pas à éprouver de peine pour des personnes dont elle ne savait rien... Mais... Elle lut ces lignes à nouveau. Elle comprendrait bientôt, vraiment ?
« … Tu vas m'aider à me faire des amis ? »
_Oui. Aujourd'hui encore, je regrette cette solitude dans laquelle j'étais plongée alors je t'aiderais à ne pas ressentir la même chose.
_... Et... est ce que tu accepterais d'être mon amie ? »
Lâchant la plume, elle attendit fébrilement la réponse. Demander à son elle du futur d'être son amie, ça devait lui paraître bizarre... Elle ouvrit les yeux et vit que la réponse était déjà arrivée. Que ferait-elle si sa réponse était non ? Inspirant lentement, elle s'avança et ouvrit à peine un œil, angoissée, le cœur battant.
« Avec plaisir Kougyoku ! Je t'ai envoyé ce journal pour réparer des erreurs que j'ai commise mais si tu ressens le besoin de parler, je serais là ! Tu peux compter sur moi ! »
Elle relut encore et encore la réponse qu'elle avait reçu et, avant d'avoir pu saisir sa plume, elle éclata en sanglots. Une amie... elle avait vraiment une amie ? Prenant le journal, elle le serra de toutes ses forces contre sa poitrine, ses épaules secouées par des sanglots. Son amie... Sa première amie... C'était étrange, elle parlait avec elle par le biais d'un journal, ne la connaissait pas, ne savait même pas si elle disait la vérité... mais ça la rendait heureuse, tellement heureuse. Cette personne lui parlait à elle, elle lui demandait son aide à elle... Dans ce cas, elle ferait tout son possible pour aider son amie. Elle ferait tout pour qu'elle n'ait pas de regrets.
« Merci... »
