Auteur : Rhysenn (/s/193202/1/IrresistiblePoison)

Titre : Irresistible Poison

Genre : Romance / Drame

Résumé : Le poison n'est pas toujours mortel - Draco apprend qu'il y a d'autres manières de souffrir tout en survivant.

Paring : HPDM

Avertissement : Attention, il s'agit d'un slash (relations entre personnes du même sexe).

Rating : T

Disclaimer : Les persos appartiennent à JKR, et l'histoire à Rhysenn - autrement dit, rien ne m'appartient, seulement la traduction.

Il s'agit de la première fic slash que j'ai lue et je la conseille à tous ceux qui veulent découvrir ce couple autant qu'à ses fans. Je m'attelle donc à la traduction de la fameuse et excellente fic de Rhysenn, que je vous conseille de lire en VO si vous vous y connaissez en anglais ! Sinon, enjoy !


Chapitre 1 : Le Vin du Paradis

Le vin empoisonné du Paradis ;

Amour contre nature, et haine davantage contre nature.

Harry traversait silencieusement les terres de Poudlard, se dirigeant vers la volière. Il était seul, et jetait constamment des regards prudents par-dessus son épaule, le doux bruissement de l'herbe sous ses pieds amplifié par douzaines dans le silence résonnant de son esprit. Les arbres noueux de la Forêt Interdite formaient de noires et menaçantes silhouettes contre l'arrière-plan du ciel sombre et infini, et donnaient à Harry un distinct sentiment de malaise.

Sans sa Cape d'Invisibilité, il se sentait exposé, vulnérable, comme si chaque ombre s'enfuyait devant lui pour le laisser bien visible sous les rayons du clair de lune. Il l'avait prêtée à Sirius, qui se cachait toujours et avait plus besoin de la protection qu'offrait l'invisibilité qu'Harry. Depuis qu'il n'avait plus sa Cape Harry avait cessé ses escapades nocturnes, mais ce soir il n'avait pas réussi à fermer l'œil et décida d'envoyer une lettre à Sirius à la place. Etant donné que Ron s'était déjà rapidement endormi, Harry s'était aventuré dehors seul.

L'air de la nuit était frais, sentant la rosée et l'herbe coupée, teinté d'une légère senteur épicée venant des fleurs exotiques de la Forêt Interdite qui se trouvait à une courte distance. Harry inspira profondément, savourant l'arôme subtil qui portait succinctement l'essence de la Forêt endormie, étrangement rafraîchissant et mystérieusement séduisant à la fois.

Tout à coup un éclat d'argent scintillant vers sa droite attira son attention, s'évanouissant aussi vite qu'il était apparu. Harry jeta un œil attentif dans cette direction tandis qu'un doux bruissement confirmait ses soupçons. Il y avait un mouvement mystérieux dans les buissons à environ un lancer de pierre de lui, et la main d'Harry se referma sur sa baguette alors qu'il s'approchait avec précautions.

Alors qu'il s'approchait, les nuages noirs s'écartèrent dans le ciel, permettant à un généreux rayon de lune de se mettre à briller, et la mâchoire d'Harry se relâcha alors que ses yeux se posaient sur la vue qui s'offrait à lui.

« Malfoy ?! »

Le fin visage sursauta en réponse, et Harry surpris le plus bref reflet d'argent tandis que des yeux familiers se tournaient pour le regarder, bien qu'ils soient voilés d'une expression 

inhabituelle de surprise totale. Les yeux d'Harry s'agrandirent alors qu'ils vacillaient rapidement vers le corps de Malfoy, et le laissèrent un instant muet alors qu'il restait bouche bée d'un ahurissement non dissimulé.

Sa voix était affaiblie par un choc toujours vif lorsque les mots prirent finalement forme sur ses lèvres,

« Malfoy – qu'est-ce que tu fais nu ? »


Il voulait être invisible.

Se tenant sur les bords de la nuit, les limites entourées de haies de la Forêt Interdite serpentant dans l'enveloppante obscurité à ses côtés, il se sentait plus invisible que jamais. Le ciel velouté lui tombait dessus, de faibles filets de clair de lune ivoire traversant vaguement la toile noire et infinie de la nuit.

Mais bien sûr, d'un autre point de vue, comme celui des chouettes silencieuses qui s'abattaient au-dessus de sa tête, il était loin de se fondre dans la nuit vivante tout autour de lui. Ses cheveux blond clair brillaient d'un argent liquide dans le clair de lune, et son teint pâle était nuancé d'une sorte de lueur surnaturelle, comme irradiant de l'intérieur, se découpant contre la nuit austère. Il se détachait de son environnement avec grâce et arrogance, pas avec la gêne d'une personne mal dissimulée, mais avec l'air unique d'une personne faite pour être différente.

Les bottes de Draco avançaient doucement dans la boue humide, et l'herbe bruissait en bienvenue alors qu'il approchait la Forêt, radiante et grouillante de vie dans la nuit immobile. Dans sa main droite il serrait étroitement une petite fiole de fluide incolore, aussi clair que du cristal scintillant toujours opaque sous le clair de lune. Les doigts fins de Draco agrippaient fortement le petit récipient, et il regarda le liquide précieux avec précaution en s'approchant furtivement de la Forêt.

Il avait travaillé sur cette potion dans un secret absolu ces quelques dernières semaines, rassemblant soigneusement tous les ingrédients nécessaires – les fauchant dans le placard de la réserve privée de Rogue, les achetant à un individu louche tapis dans une ruelle de Pré-au-Lard. Il n'avait jamais imaginé qu'une potion puisse être si dure à concocter – pourquoi certains ingrédients étaient ajoutés il ne le comprenait pas, mais les instructions étaient suffisamment claires et il les suivait simplement comme telles. A plusieurs reprises il s'était demandé si ça valait tous ces ennuis et ces risques, mais à chaque fois sa réponse avait été oui.

Il avait peu d'aspirations dans la vie, et mis à part celles qui lui étaient imposées, une qui venait de lui était le désir d'être invisible. Il pouvait honnêtement dire que ça n'était pas pour des intentions voyeuristes – il avait voulu ça depuis son enfance, et l'aspiration à cette habilité particulière était progressivement devenue de plus en plus forte lorsqu'il avait quitté l'enfance, malgré des objectifs sordides.

Tout ce qu'il voulait était être capable de disparaître un moment, de se cacher et d'être seul. Il voulait pouvoir prendre du recul et observer les autres sans qu'ils le remarquent, s'éclipser sans que quiconque sache où il allait. Bien sûr, être invisible ouvrait un monde de nouvelles possibilités – des tours à jouer, des coups à commettre – mais il ne s'agissait pas de ses premières raisons de vouloir autant être invisible.

Il avait trouvé ce livre de sorts dans la grande bibliothèque de son père pendant l'été – il était ancien et chiffonné, si vieux que les numéros de pages étaient en chiffres romains. Il tombait presque en morceaux, retenu par une corde fragile abîmée par le temps qui s'était rapidement effilochée quand il avait essayé d'ouvrir le livre, faisant voltiger les feuilles de parchemin jaunis au sol. Il avait ramassé les papiers défaits avec hâte et s'était précipité dans sa chambre pour une lecture approfondie. Les pages étaient cornées, tachées et généralement plus qu'usées, et elles n'étaient pas toutes clairement numérotées étant donné que les bordures du papier s'étaient détériorées avec les années, mais il avait réussi à passer le livre au crible et à son plus grand délice, trouva une page décolorée et à moitié déchirée décrivant une potion de Perte de Substance – bingo.

Le sort s'avéra être extrêmement difficile – mais il était supposé être un puissant sort de Magie Noire, et s'il avait été aussi simple qu'un geste de baguette, Draco aurait douté de l'authenticité de cette affirmation. Avec une intense détermination, il avait réussi à rassembler tous les ingrédients nécessaires demandés à la dernière étape de la potion, sauf un.

Une rose noire sauvage. Elle s'était avérée être la plus difficile à obtenir ; il avait ratissé les fleuristes de tout Pré-au-Lard, à la recherche d'une rose sauvage qui avait été noire depuis le premier bourgeon et non teinte ou magiquement cultivée. Il avait même envoyé un hibou chez Calyx & Corolla (le fleuriste de vente par hiboux le plus reconnu du coin) pour ça, mais ils étaient plus chers que même lui ne pouvait se le permettre, puisque ce n'était la saison des roses qu'en Ecosse à cette époque de l'année. On lui avait finalement dit qu'il ferait mieux de regarder dans la Forêt Interdite, où toutes les variétés de pousses (aussi bien que d'autres faunes et flores plus sauvages) fleurissaient et verdoyaient, surtout lorsque la nuit tombait.

Alors il était là, à minuit juste passé, s'approchant avec précaution de la Forêt, priant intérieurement pour trouver une rose noire près de la lisière de la forêt sans avoir à s'aventurer plus loin (depuis sa première année, il avait entretenu une peur profonde de la Forêt la nuit).

Par fortune, il eut de la chance ; son cœur fit un bon lorsque ses yeux perçants tombèrent sur une fleur sombre nichée dans l'ombre d'un Buisson Mordant. Prenant garde à ne pas bousculer le buisson instable, Draco se mit à genoux et observa les pétales qui formaient les contours de la rose, dont la couleur était presque impossible à distinguer dans la nuit.

Ses doigts tremblèrent légèrement lorsqu'il tendit la main vers la fleur, sentant les fines épines lui écorcher la peau pendant qu'il la délogeait de la terre avec précaution, et elle céda avec une facilité surprenante. Secouant la tige pour en enlever la terre restante, Draco la maintint au niveau de ses yeux pour mieux la voir – les pétales veloutées d'une pure noirceur captaient la lune laiteuse, ne reflétant rien.

Draco sourit de satisfaction. La rose la plus magnifique, peinte des couleurs de la nuit.

Il se permit un moment d'admirer la fleur parfaite qu'il tenait à la main, avant de se mettre au travail. Il n'avait besoin que des pétales, et il les retira soigneusement de la tige, d'une texture semblable à du satin noir contre ses doigts, et les jeta, une par une, dans la fiole de potion qu'il avait préparée avec les autres ingrédients. Le liquide clair devint rapidement écarlate avec les pétales – pas une trace du noir de la rose, mais rouge frais, vibrant, vif et fougueux. C'était prêt – et cela devait être consommé immédiatement. Il n'y avait pas de chemin retour, plus maintenant.

Prenant une profonde inspiration, Draco ferma les yeux et bu la potion entière d'une gorgée silencieuse.

Ca brûlait. Ca brûlait comme un feu en fusion sous sa peau, écorchant ses nerfs à vif avec une sensation inhabituelle qui lui coupa le souffle. Son sang était comme des morceaux de glace sous sa peau chaude, des vagues de chaleur sous des veines froides. Il ouvrit les yeux avec hésitation, puis les referma rapidement alors qu'un vertige s'y engouffrait, brouillant sa vision. Ses cheveux frissonnèrent derrière sa nuque, et son corps entier rougit d'une chaleur soudaine, comme de l'air chaud parcourant sa colonne vertébrale, anéantissant le froid originel comme du mercure dans son sang.

La chaleur était suffocante ; Draco se demanda vaguement si c'était un signe que le sort agissait, et il tâtonna les boutons de sa chemise, écartant son col d'un coup sec et respirant légèrement mieux lorsque l'air frais de la nuit s'engouffra contre sa peau nue et luisante, apaisant la chaleur qui faisait rage de l'intérieur.

D'un seul geste ses doigts détachèrent le reste des boutons, et sa chemise blanche tomba au sol, translucide dans la semi-obscurité. Il plissa les yeux, tendant les mains devant lui, essayant de voir s'il avait déjà commencé à devenir inconsistant, mais un persistant bourdonnement dans sa tête gardait son esprit aux abois. Une chaleur piquante démangeait toujours les parties de son corps encore habillées, et il était sur le point de se déshabiller le reste du corps lorsqu'un fort bruissement de brindilles sèches craquant sous des pas le glaça en plein mouvement.

Quelqu'un arrivait.

Draco se retourna, se retrouvant face à face avec Harry, qui avait une expression sidérée dans ses yeux vert foncé. La mâchoire d'Harry était relâchée, et il fixait Draco avec incrédulité.

« Malfoy – qu'est-ce que tu fais nu ? »

Un bref air de surprise alarmée passa sur les traits de Draco, partiellement assombris dans l'obscurité, et un court silence enlacé de malaise s'écoula avant que Draco ne parle finalement.

« Tu – tu peux me voir ? » Draco ne pouvait retenir l'incrédulité dans sa voix, rivalisant presque avec l'expression stupéfaite d'Harry.

Harry paraissait maintenant dégoûté. « Bien sûr que je peux te voir. Ceux que je ne peux pas voir sont tes vêtements où ils devraient être, voilà le problème. Qu'est-ce que tu fous, bordel ? »

Malfoy baissa les yeux sur lui-même, d'un air partagé entre le désarroi et l'incompréhension, puis leva à nouveau les yeux vers Harry.

« Tu peux vraiment me voir ? » répéta Draco, perplexe et paraissant plutôt frustré. Il tendit instinctivement la main pour ramasser sa chemise, étendue sur l'herbe humide.

« Tu te tiens nu au grand air, c'est plutôt dur à louper ! » Harry semblait ennuyé, et détourna avec résolution son visage de Malfoy. « Mets quelque chose, tu veux ? »

« Je ne suis pas nu, » rétorqua Draco, avec autant de dignité que pouvait rassembler quelqu'un qui s'habille avec hâte. « Je suis torse nu, au cas où tu ne l'aurais pas remarqué. »

« Non, je n'ai pas remarqué, Dieu merci. » Harry s'arrêta, et regarda furtivement Draco, qui était occupé à fermer les boutons de sa chemise, les décalant, et ne le remarqua pas. « Qu'est-ce que tu fiches, Malfoy, à te pavaner dans la Forêt torse nu au milieu de la nuit ? Une danse tribale pour le dieu de la lune ? Tu es devenu fou ? » Harry secoua la tête avec une perplexité moqueuse. « J'avais toujours eu des soupçons sur toi, Malfoy, mais je n'aurais jamais pensé que tu sois assez grave pour courir autour de Poudlard à poil. »

« Oui, parce que je pourrais tomber sur Rusard, pas vrai, et ça c'est vraiment son truc, » répliqua Draco d'un ton sarcastique, défiant Harry du regard alors qu'il ajustait son col, de travers à cause des boutons décalés. « J'apprécie ton inquiétude, Potter, mais tu me ferais une grosse faveur si tu te perdais simplement. »

« Je peux te dénoncer, » fit calmement remarquer Harry.

« Oui, et tu peux aussi expliquer ce que tu faisais à marcher près de la Forêt à cette heure de la nuit, » rétorqua Draco avec impatience. Il voulait se débarrasser d'Harry le plus vite possible, puisqu'il n'avait aucune idée du moment où la potion de Perte de Substance faisait effet après avoir été absorbée, et il aurait beaucoup plus d'explications à donner si Potter le voyait disparaître dans les airs devant ses yeux.

L'expression d'Harry ne bougea pas d'un trait. « Qu'est-ce que tu fais, Malfoy ? » demanda-t-il à nouveau, d'un ton égal, déterminé. Il semblait être bien plus calme maintenant que Draco était entièrement habillé, et il était clair qu'il n'irait nulle part sans la réponse qu'il demandait.

« Ce ne sont pas tes putain d'affaires, Potter, » cracha Draco, d'un ton menaçant bien qu'imperceptiblement désespéré. « Va-t-en. » Une pause, puis il ajouta pour l'effet intimidant, « Ou je te jette un sort, et ne pense pas que je n'oserai pas. »

« Et ne pense pas que je ne riposterai pas. » Une touche de colère trouva son chemin dans la voix d'Harry, et il rétrécit les yeux, tentant de se concentrer sur Draco dans la semi-obscurité, ce qui était difficile étant donné que la lune au-dessus d'eux s'était glissée derrière un nuage noir et que le peu de lumière s'attardait comme de la brume entre eux.

Harry avança d'un pas, ses doigts se resserrant sur sa baguette.

Draco se tendit, chaque muscle de son corps prêt à l'action, sa nervosité ostensiblement proliférée par la potion passant dans son sang. C'était un sentiment étrangement excitant ; il s'était en partie attendu à la sensation d'être éthéré, comme dans un rêve, comme flottant sur un nuage tandis que sa forme physique s'évaporait. Mais le sentiment qui 

faisait rage dans son corps maintenant était complètement différent, mais entièrement nouveau – c'était plus dense, comme s'il était encore plus immergé dans son corps actuel que jamais auparavant. Ses sens étaient décuplés, maintenant aussi aiguisés que la pointe d'un poignard, et le bas murmure de la nuit agitée bourdonnait comme une pulsation assourdissante en même temps que ses propres battements de cœur.

C'était… étrange. Et mauvais.

Draco recula d'un pas, l'impression de malaise montant inexorablement en lui, une sauvage sorte d'anxiété et de peur le submergeant, semblable à la réalisation paniquée que vous aviez lorsque vous étiez sur un tapis volant en route pour l'Arabie et que vous vous souveniez soudainement que vous aviez laissé la douche ouverte à la maison. Et maintenant le plus important dans l'esprit de Draco était de se débarrasser d'Harry avant que quoi que ce soit d'autre n'arrive.

« Potter, je te jure, si tu ne… » commença Draco, la voix durcie par la colère, juste au moment où les nuages se déplacèrent soudain, révélant une fois de plus la lune, et des rayons d'un blanc nacré traversèrent le ciel sombre de la nuit, tombant sur le visage d'Harry et illuminant ses traits avec une lumière pâle et surnaturelle, et Draco se figea sur place.

L'aveuglant éclat de lumière calcina son esprit sans avertissement ; il ne fut pas accompagné de douleur mais fut rapidement écarté par une autre sensation sans nom qui coulait dans tout son être, intense et sans mélange, embarras et extase à la fois. Sa vision se brouilla momentanément, puis se remit vivement au point – l'arrière-plan d'arbres sombres se dissout, déformé par le vif éclat de la lune incandescente, et…

…et Harry.

Harry se tenait devant lui, semblant de plus en plus nerveux devant l'étrange comportement de Draco, et Draco ne pouvait que le fixer, impuissant tandis que la sensation douloureuse s'engouffrait dans ses veines et s'emparait de lui. Elle laissait son esprit secoué mais clair, de manière dérangeante, alors qu'elle inondait son corps, que chaque fibre cédait à cette terrifiante et nouvelle sensation qui le possédait tout entier.

L'horreur étincelait dans les yeux gris et choqués de Draco toujours inébranlablement fixés sur Harry, le clair de lune se déversant sur ses épaules comme de la nacre liquide.

« Malfoy ? » commença Harry de manière incertaine, et il leva la main droite pour écarter sa mèche sombre de ses yeux, mais pour Draco c'était comme si Harry avait tendu la main 

pour lui saisir la poitrine, l'attirant plus près, et il tituba en avant hors de sa propre volonté, de manière totalement injustifiée.

Avant que Draco ne sache ce qu'il se passait, il avait abrégé la distance qui les séparait, en quelques enjambées rapides et silencieuses. Ses mains s'élevèrent pour tenir le visage étonné d'Harry, et en l'espace d'un battement de cœur il embrassait Harry, durement et pleinement sur les lèvres, d'une manière profondément passionnée, complètement désespérée.

Harry eut à peine le temps de réagir, et ses protestations étouffées furent noyées par les lèvres de Draco se renfermant sur sa bouche, et le pur choc le paralysa pendant quelques instants, le rendant incapable de bouger. Les lèvres de Draco brûlaient fiévreusement contre les siennes, l'embrassant avec toute la ferveur de quelqu'un d'ivre d'une totale dépendance, et cela prit quelques instants à disparaître avant que le fragment de pensée Malfoy t'embrasse ! ne fasse son chemin à travers la confuse stupéfaction et ne pousse Harry à l'action.

Harry repoussa violemment Draco, et tomba en arrière, haletant doucement, couvrant sa bouche de ses mains alors que la sensation cuisante s'attardait encore sur ses lèvres.

« Malfoy ! » bredouilla Harry, complètement sidéré, le souffle coupé par la vigueur du baiser de Draco. « Qu'est-ce que tu penses être en train de faire, putain ?! » Harry jurait rarement à moins que ce ne soit absolument nécessaire, et c'était sans aucun doute le cas ici.

Lorsqu'il leva les yeux pour rencontrer ceux de Draco, il vit que l'horreur qui les remplissait surpassait de loin la sienne.

L'expression de pur désarroi et de pure révulsion sur le visage de Draco empêcha Harry de dire un mot de plus. Draco paraissait complètement anéanti, l'expression choquée parlait plus éloquemment qu'il ne pourrait jamais l'articuler. Il fixait Harry, le dégoût se mélangeant à un ébahissement total.

« Qu'est-ce – qu'est-ce qui vient de se passer ? » Sa voix tremblait et hésitait.

« C'est à toi de me le dire, » répondit furieusement Harry, le choc initial disparaissant et laissant la place à l'indignation. « Qu'est-ce que tu essaies de faire, par l'enfer, Malfoy !? »

« Est-ce que – est-ce que je viens de t'embrasser ? » La même voix traumatisée.

« Oui, tu l'as fait putain. » La respiration d'Harry était encore rapide et superficielle tandis qu'il essayait de reprendre contenance, et il s'appuya contre le tronc d'un arbre proche, ne se sentant pas très stable. « Qu'est-ce que ça voulait dire ? »

Draco ne sembla pas entendre la question d'Harry. « C'est dégoûtant. »

La voix de Draco était toujours blanche, presque creuse. Il ferma les yeux, se sentant étrangement détaché en dépit de la montée frénétique d'horreur en lui. Il savait ce qu'il venait de se passer, et il ne voulait pas y penser, ne voulait même pas s'en souvenir.

La colère rougit les joues d'Harry. « Dégoûtant ? Tu m'attrapes et te forces contre moi, et tu dis que c'est dégoûtant ? » Harry sembla ne rien vouloir d'autre que de tendre la main et étrangler Draco à mort, mais étant donné ce qu'il s'était passé la dernière fois qu'ils avaient eu un contact corporel quelques instants auparavant il y réfléchit à deux fois. Il passa rageusement le dos de sa main contre sa bouche « Tu es révoltant Malfoy. »

Draco était sur le point de rétorquer d'une longue diatribe colorée de jurons lorsque les mots d'Harry le poignardèrent, déclenchant un douloureux élancement inconnu à l'intérieur de lui, semblable à la sensation qui l'avait ravagé avant que ce dont il ne voulait pas se souvenir ne se produise.

Qu'est-ce qu'il se passe ? Qu'est-ce qui m'arrive ?

Ces questions demandaient des réponses, mais elles auraient à attendre plus tard. Pour le moment il devait affronter un Harry très livide qui semblait prêt à le massacrer à tout moment, et étant donné son état d'hébètement actuel Draco n'était pas très sûr d'être prêt à un combat pareil.

Il leva les yeux vers ceux d'Harry ; et cela se produisit à nouveau, comme une secousse électrique à travers son corps, seulement plus intense et pénétrante, lançant la chair et la moelle droit dans son âme. Draco sursauta, et un léger halètement involontaire s'échappa de ses lèvres ; il se souvenait de ce même sentiment brûlant, et il menaçait de…

Il pouvait se sentir tomber dans ces yeux d'émeraude froide, la couleur du jade éclatante dans son esprit, la couleur du désir, de la passion, de la haine, du besoin et de l'horreur tous mélangés dans une seule corde qui se liait autour de son cœur, l'attirant vers Harry, ou rapprochant Harry de lui, il ne savait pas…

Pars d'ici. Maintenant.

Avec une exclamation étouffée qui sonnait comme « Oh mon Dieu », Draco arracha désespérément son regard de celui d'Harry, une douleur sourde le déchira pendant qu'il le faisait, et avant qu'il n'oublie ce qu'il devait faire Draco tournoya et se rua dans la direction opposée. Il ne s'inquiéta pas de dissimuler le bruit de ses pas, et il traversa le parc à toute vitesse sans un regard en arrière, aussi vite que ses jambes pouvaient le porter.

Harry se tenait sans comprendre, suivant Draco des yeux avec stupéfaction pendant que l'autre garçon se retourna soudainement et s'enfuit. Bizarre, pensa-t-il, confus, se mettant à genoux sur l'herbe tendre d'un air absent pour ramasser un objet qui brillait au clair de lune. C'était une fiole de verre transparente, totalement vide excepté des traces rouge vif, qu'Harry soupçonnaient être du sang, bien qu'il ne pense pas que c'en était.

La sensation de picotement était toujours sur ses lèvres, les restes de la chaleur des lèvres de Draco, et Harry secoua la tête, totalement perplexe. De toutes les personnes qu'il s'était attendu à embrasser de sa vie, Draco Malfoy était l'une des dernières.

Harry fronça les sourcils. Oh, comme c'est écoeurant. Malfoy, de toutes les personnes.

Il décida de retourner à la Tour Gryffondor, ayant eu suffisament de mauvaises surprises pour la nuit, avant qu'un autre évènement qui ne le laisserait pas totalement indemne ne surgisse sur son chemin. Mais de ce que j'en sais, si je deviens fou ou si je développe une maladie chronique dans quelques années, pensa Harry d'un air mécontent, ça pourrait être lié à ça.

Glissant la fiole de verre dans sa poche, la lettre pour Sirius totalement oubliée, Harry retourna lentement à la Tour Gryffondor, où il monta tranquillement au dortoir jusqu'à son lit. Mais ce ne fut que longtemps après qu'il se soit couché que le sommeil le submergea finalement.


Oh mon Dieu. Qu'est-ce qui vient de se passer ? Oh mon Dieu.

Les mots traversaient son esprit comme un mantra fiévreux, et Draco ferma les yeux en titubant dans la salle de bain et claqua la porte, s'inquiétant peu de réveiller quelqu'un. Le plus étrange était que ses pensées étaient claires et non brumeuses après tout cela, et qu'il ne pouvait donc pas en rendre responsable un esprit embrouillé, bien que son corps fut à l'agonie – une étrange, irréelle sorte d'agonie, comme le souvenir d'un cauchemar terrifiant le hantant pendant des heures.

Il se brossa les dents cinq fois de suite pour se débarrasser du goût d'Harry, jusqu'à ce que ses gencives soient douloureuses et ne commencent à saigner. Le goût métallique du sang sur sa langue éveilla ses sens, amenant une fois de plus le sentiment de panique.

Qu'est-ce qui vient de se passer ?

Il savait fichtrement bien ce qui venait de se passer. Il venait d'embrasser Harry Potter, voilà ce qu'il s'était passé. Cette pensée lui donna la nausée, bien qu'en même temps une partie enfouie de lui désirait ardemment renouveler ce plaisir pervers et interdit.

Qu'est-ce qui a mal tourné ? Pourquoi la potion n'a-t-elle pas fonctionné comme elle le devrait ?

La langue à vif et picotée par l'arrière goût de menthe du dentifrice, Draco prit le chemin de son dortoir, récupéra le livre de sorts en lambeaux et le descendit avec lui à la salle commune des Serpentard. Elle était sombre et froide, comme son sentiment actuel, et Draco pointa sa baguette vers la cheminée éteinte. Elle s'enflamma avec un crépitement de flammes oranges, et la chaleur se diffusa à travers lui comme une vague apaisante, bien qu'elle ne dissipe pas le persistant pincement au cœur qui le troublait toujours ; la sensation de vide douloureuse.

S'installant par terre, s'adossant contre un côté du fauteuil, Draco ouvrit le livre, tâtant d'un air absent le gros nœud où il avait renoué la reliure ficelée. Il feuilleta les pages jusqu'à celle qui décrivait la potion de Perte de Substance, et se retrouva à observer la liste familière des ingrédients. Il passa soigneusement un doigt le long de la liste, cochant mentalement chaque élément qu'il avait utilisé, repassant la procédure dans son esprit, exactement comme le livre en avait donné l'instruction. La potion avait été parfaitement concoctée.

Ses yeux perçants suivirent son index jusqu'au bas de la page, et relevèrent une phrase qu'il n'avait pas remarquée auparavant, il était sûr qu'elle n'était pas là la dernière fois qu'il avait regardé, mais elle était maintenant écrite d'une encre bleu foncé décolorée.

Draco se pencha gravement en avant, plissant les yeux ; l'écriture était légèrement tachée et plutôt cursive, mais la phrase latine qu'elle énonçait suffisamment lisible :

Traicit et fati litora magnus amor.

Draco la fixa, et cligna des yeux. N'y croyant pas, il saisit le livre et vérifia frénétiquement les pages ; mais, trop usés, les numéros de page étaient maintenant brouillés et méconnaissables. Son corps entier se raidit d'une peur froide tandis qu'un sentiment de 

profond, d'horrible effroi l'envahit, et la compréhension de la phrase s'infiltra dans son esprit conscient, qui traduisit :

Un grand amour peut franchir les limites du destin.

Il fixa le livre, les doigts tremblants. Une page disait 'Potion de Perte de Substance' avec une brève description ; en la tournant, les quelques pages suivantes détaillaient la procédure. Mais quelque chose n'allait définitivement et indéniablement pas.

La citation latine. L'étrange sensation faisant des ravages dans son corps. Ce – ce sentiment.

Puis tout à coup il sut, et la réalisation affolée vola en éclats comme des bouts de verre dans son esprit : Non. Non, ce n'est pas possible.

Ce n'était pas une potion de Perte de Substance – il devait d'une quelconque manière avoir mélangé les pages lorsqu'il avait rattaché le livre – à la place, il avait concocté un… un…

Et à ce moment-là, même les jurons lui manquèrent, alors que l'entier impact de ce qu'il venait juste de s'infliger à lui-même jaillissait en lui, hurlant comme le vent glacé du désert…

« Qu'es-ce que j'ai fait ? » demanda Draco dans un chuchotement horrifié ; et il avait trop peur de la réponse.

TBC...

Dites-moi ce que vous en pensez please !!