Résumé : je sais que la réécriture des épisodes a été faite des dizaines de fois, mais j'avais envie de faire cette version. La raison pour laquelle le Docteur devient humain est sensiblement la même que dans l'épisode, mais l'histoire prend une tangente TRÈS différente.

Public : 13 ans et + (quelques allusions, mais c'est très indirect)

Disclaimer: Doctor Who et ses personnages ne m'appartiennent pas et je ne fais ceci que dans un but purement ludique.

En espérant que vous trouviez autant de plaisir à lire cette histoire que j'en ai eu à l'écrire...

- Cache-cache -

Rose n'arrivait pas à prononcer le nom de leur face sans attraper un torticolis de la langue et ce n'était pas son problème le plus immédiat. Le Docteur et elle se précipitèrent dans le Tardis et évitèrent de peu les tirs de lasers qui déchirèrent un des panneaux muraux. Le Docteur fit se rabattre les portes dans un claquement et il activa les moteurs d'un geste sec, avant de se retourner brusquement vers Rose : « Il faut fuir. »

« Fuir? Ce n'est pas ton genre. »

« Pas le choix, cette fois. Il faut se cacher. »

Rose hocha la tête : « D'accord, se cacher. Où? Et quand? »

« Un endroit connu, discret, loin de toute technologie… et avec un déguisement… »

« Tu vas te déguiser? »

« Pas le choix. Pas cette fois. »

Il avait l'air mortellement sérieux et il essayait tant bien que mal de dissimuler son inquiétude croissante.

« Dis-moi tout. » demanda-t-elle gravement.

Il délaissa les commandes le temps de pincer les lèvres et fit descendre du plafond un appareil rappelant un peu un casque d'écouteurs.

« Je suis le dernier Seigneur du temps, ils pourraient me retrouver n'importe où. Je dois donc faire disparaître le dernier Seigneur du temps. Si j'avais su qu'ils étaient impliqués dans cette histoire, j'aurais évité cette planète. Je ne les aime pas beaucoup, ceux-là, et eux… m'aiment un peu trop. »

Le sang de Rose se figea et son cœur rata un battement. Le Docteur aurait pu dire pareille chose n'importe quand, mais son ton était inhabituel et c'est ce qui lui fit comprendre le sérieux de l'affaire.

« Qu'est-ce que tu veux faire? » fit-elle d'une petite voix.

« Devenir humain. Avec les milliards d'humains dans l'univers, aucune chance qu'on puisse me retrouver. Ceci fera disparaître de mes gênes tout ce qui provient de Gallifrey. Plus de Docteur. »

« Tu pourras redevenir le Docteur? »

« C'est ce qui t'inquiète? Oui. Cette transformation est temporaire. Ce sera à toi de décider quand je devrai revenir. »

« Moi? Qu'est-ce que je devrai faire? »

« Tout ce qui est moi sera contenu dans un objet et ce sera toi qui en seras la gardienne. Toi seule. Je ne me souviendrai de rien. »

« Plus de mémoire? »

« S'il y a le moindre indice indiquant que je ne suis pas entièrement humain… ils nous retrouveront. Tu as deviné ce qu'ils veulent, n'est-ce pas? » dit-il nerveusement. « Le dernier Seigneur du temps, une source unique pour leur permettre de vivre presque éternellement. Je ne peux pas permettre ça. Les monstres les plus méchants veulent toujours manger le héros. Et zut… je n'imaginais pas être un héros risquant d'être mangé. Alors, je dois disparaître le temps qu'ils meurent de faim. Ou l'équivalent génétique. Quelques mois, tout au plus. »

Des mois? Rose ravala sa protestation.

« Et nous nous cacherons où? »

« Pas dans le placard de Jackie, si c'est ce à quoi tu songeais. La discrétion est la clé. Évitons Londres et l'époque contemporaine. Depuis quelques temps, j'ai l'impression que j'y passe trop de temps. On se demande pourquoi… » ajouta-t-il avec un sourire en coin. « Disons un petit coin de campagne reculé où rien ne se passe. La campagne anglaise. Tu crois pouvoir jouer les jeunes pupilles anglaises? Et tiens, je connais la date parfaite. Il faudra pouvoir effacer facilement nos traces et j'ai la solution. Tu me fais confiance? »

« Oui. »

Pour toi ajouta-t-elle en pensée.

« On dirait que tu as peur de ce truc transformateur. Est-ce que c'est si douloureux? »

« C'est ce qu'on dit. Je ne l'ai jamais fait. L'arche caméléon n'est pas un recours habituel. »

« Il y a sûrement un autre moyen. »

« Ils sont déjà sur nos traces. Je dois effacer au plus vite la piste. »

« Et s'il y a un problème? »

« Nous allons en Angleterre, un peu après 1900. Vas t'habiller pour cette époque et rassembler ce qu'il faut de bagages pour nous deux. Le Tardis t'aidera à sélectionner le nécessaire. Et quand tu reviendras, je serai ici, dans ce fauteuil. Je donnerai l'impression d'être ivre et un peu perdu. Je veux que tu me conduises hors du Tardis. Je ne dois pas le voir avec mes nouveaux yeux. Je dois ignorer son existence. »

« Et en sortant d'ici? »

« J'aurai une histoire de prête. Il y a sûrement des petits boulots disponibles et j'aurai les qualifications requises. Tu pourras me suivre comme ma pupille… oui, je pense que c'est le plus facile. Le Tardis préparera une histoire générale. Tu devras t'adapter aux détails. »

Il agita une montre de gousset sous son nez : « La clé de mon essence gallifreyenne sera contenue dans cet objet. Ne l'ouvre qu'en cas d'extrême urgence. Ne la perds pas. »

Dès qu'elle s'éclipsa pour fouiller dans le costumier, il programma leur destination de même qu'une base d'histoire personnelle que le Tardis s'empressa d'enrichir avec les données temporelles qu'elle récoltait aussi facilement qu'il respirait. Il hésita, puis créa un nouveau fichier vidéo, un message du Docteur pour la Rose qui le veillerait durant tout ce temps. Tant de choses et de précautions à prendre et si peu de temps pour tout lui dire. Oh, d'accord, elle était intelligente et débrouillarde. Elle avait de la jugeote. Il accrocha la montre au casque et effectua un branchement. Il jeta un coup d'œil par-dessus son épaule.

Elle déposa près de la console trois valises et, sur le fauteuil, un paquet de vêtements en tweed. Il valait mieux qu'il se change immédiatement.

« Est-ce que tu resteras le même extérieurement? Tu ne changeras pas de visage? »

Il parut surpris et hocha la tête : « Pas de nouveau visage. »

Elle avait deviné qu'il ne voulait pas de témoin et s'éloigna rapidement pour enfiler ses nouveaux vêtements.

Il s'installa finalement dans le fauteuil en abaissant le casque sur son front avec un frisson. Adieu Docteur… La bonne nouvelle était qu'il oublierait – temporairement du moins – ses hurlements et la douleur qui les provoquait.

Elle ne pourrait pas porter de jeans et de basket avant un certain temps, songea Rose en les laissant dans un coin. La robe était toute simple, les chaussures à talons plats. Dieu merci, pas de corset. Elle se démaquilla, enleva sa montre et ses bijoux, brossa énergiquement ses cheveux et se fit un chignon à la base de la nuque.

Elle se dépêcha un peu trop, aussi entra-t-elle dans le poste de pilotage alors que la transformation n'était pas complète. Les hurlements du Docteur lui broyaient le cœur. C'est bientôt fini, ce n'est plus très long… Comment pouvait-il endurer cette douleur, pire, se la faire subir!

D'un coup, il devint muet et inerte. Rose respira un peu mieux et desserra les dents. L'écran principal clignotait : il lui avait laissé un message?

Elle l'écouta, puis repassa la vidéo une seconde fois.

Elle prit une profonde inspiration, emporta les valises hors du Tardis, qui était apparu dans le recoin le plus poussiéreux d'un vieux bâtiment en bois… une grange probablement. Elle revint dans le Tardis et retira délicatement la montre de gousset de son support. Le boîtier était tiède et il donnait l'impression de soupirer dans sa paume. Elle le passa à une longue chaîne qu'elle glissa à son cou et dissimula sous le collet et dans les plis de son corsage. Pas question de laisser traîner cet objet au fond d'une poche comme un simple jeu de clés. Elle s'occupa de débrancher le casque de métal, ce qui fit réagir le Docteur. Les paupières du Docteur… non, ce n'était plus le Docteur… les paupières de l'homme qui ressemblait au Docteur frémirent et il lui fallut de l'aide pour se remettre debout. Il tituba jusqu'à la porte, fermement guidé par Rose.

En sortant de la grange – car c'en était une – l'air frais sembla le revigorer et l'aider à se mettre les idées en place.

« Est-ce que j'ai encore trébuché dans le chemin, chère Rose? » demanda-t-il sur un ton d'excuse en empoignant deux des valises.

« Oui. Ce n'est pas très grave. Les bagages n'ont pas été emportés trop loin. »

« Que ferais-je sans toi? Et par où se trouve cette digne institution qu'ils appellent un pensionnat? Nous aurions peut-être dû demander qu'on vienne nous chercher à la gare. » dit-il en examinant dubitativement la quantité de boue dans le chemin et en estimant le poids des valises.

« Tu as prétendu que tu avais besoin de te dégourdir les jambes. »

« Vraiment? Eh bien, allons-y, chère enfant. Et rappelles-toi qu'il faudra abandonner le tutoiement en public. C'est plus poli.»

'Chère enfant'?

« Euh… oui, bien-sûr. »

Ils dépassèrent un panneau indicateur au bout d'un moment : « Hulton Academy… c'est bien là que nous allons, n'est-ce pas? »

« Que nous allons et que nous resterons, je l'espère! » déclara le type tout à fait humain qui bataillait avec la boue, les valises et ses grands pieds.

« Et pour y occuper les fonctions de…? »

« Professeur de langue, voyons! Leur annonce n'était pas très claire, aussi je ne suis pas certain laquelle ils veulent me voir enseigner. Mais avec le nombre de langues que je parle, ça ne devrait poser aucun problème. »

« Mais… comment savent-ils que tu arrives? »

« Je leur ai écrit bien sûr. Enfin… il me semble l'avoir fait. » fit-il en plissant le front. « Je n'aurais tout de même pas fait tout ce chemin jusqu'ici sans envoyer une lettre d'introduction. »

« Ce ne serait pas la première fois que tu irais dans un endroit sans t'y annoncer. »

« Pas tant que ça. Enfin… il me semble que ce n'est pas le cas. Eh bien, nous verrons. Voilà le pensionnat. »

Les lieux semblaient un peu sévères, mais le bâtiment en pierres foncées était tout en angles et il n'y avait pas de parterres de fleurs. Ce n'était pas tout à fait sa faute s'il ne savait pas charmer au premier regard. Et puis, un autre panneau identifiait les lieux comme un pensionnat pour garçon. On repasserait pour style fanfreluches et dentelles.

« Mais… qu'est-ce que je vais faire dans cet endroit? »

« Quoi, j'ai oublié de le mentionner ou bien tu as oublié? Cesse de me taquiner, charmante enfant. Tu seras la secrétaire du directeur. Et puis, tu ne seras pas la seule femme. Il y a trois ou quatre servantes, deux cuisinières et il me semble que la femme du directeur vit ici également. Et ne vas pas croire que cet emploi t'épargnera la poursuite de tes études. Tu sais que je te surveillerai sur ce point. Nous sommes en 1913 alors j'estime qu'une jeune fille doit connaître plus que la broderie et la cuisine. J'espère qu'ils ont un bon orgue. Tu aimerais apprendre à en jouer? Je suis certain que cela te plairait. »

Rose digérait la quantité d'informations et bénissait au moins le ciel de ne pas se retrouver à travailler comme servante. Il lui avait déjà fait le coup. Mais il lui faudrait déployer toute sa patience pour jouer le rôle de la jeune pupille passive et encore plus celle de la secrétaire d'un directeur pédant qui ne voyait en la femme que la créature effacée et insignifiante.

Le Docteur avait dit quelques mois. Elle jouerait le jeu durant quelques mois. Elle y arriverait.

Il tira la cloche et ils furent introduits dans le parloir. Comme Rose l'avait prévu, le directeur fut très surpris d'accueillir un nouveau professeur avant même que l'offre d'emploi ait été publiée dans les journaux.

« La rumeur s'est rendue jusqu'à Londres, très certainement, et mon… mon… Monsieur Smith a préféré venir en personne plutôt que d'envoyer une lettre. Il sait voyager plus vite que la poste. » dit Rose en réfléchissant à toute vitesse.

« Certes. » approuva le directeur, tout en doutant toujours.

« Montrez-lui vos références. » dit Rose en sortant les papiers psychiques d'une des valises.

Le directeur examina méticuleusement les papiers, braqua un regard étonné sur John Smith, relu une fois encore les papiers et hocha la tête avant de remettre avec plus de respect le petit étui dans les mains de Rose.

« Eh bien, Monsieur Smith, je crois que vous avez bien fait de venir. L'Académie Hulton n'attendait plus que vous pour commencer l'année scolaire! Vous avez un mois pour vous préparer à la rentrée scolaire. »