LA DOUCHE


La mission avait été un succès complet et Dumbledore devait être content, peut-être même qu'il pourrait le laisser tranquillement pendant quelques jours, Rémus l'espérait en tout cas : il était si las et amer, désirant du repos et qu'on le laisse tranquille. Soupirant, il craqua son dos en s'étirant avant de prendre une allure traînante d'agonie, marchant vaillamment pour rentrer chez lui, souriant légèrement en pensant à salle de bain, et surtout à sa douche qui l'attendait sagement. Une fois rentré, il verrouilla sa maison miteuse pour ne pas qu'on le dérange avant au moins trente-six lunes, semant des habits sales, déchirés et ensanglantés sur son passage vers la salle d'eau. Ce fut quand il enclencha l'eau chaude qu'il finit par gémir de plaisir et commencer à se détendre.

Tout ce sang qui partait enfin de son corps n'était pas à lui, enfin pas tout mais une bonne partie quand même. Lentement il leva ses mains et se mit à frotter sa peau blessée, la nettoyant tranquillement, grimaçant à peine quand il s'occupait des zones meurtries tellement il n'en pouvait plus. Continuant de se laver, il se mit à penser à avant avec un sourire nostalgique et mélancolique. Combien de temps cela faisait que cette maison n'était habitée que par lui ? Cinq jours ? Trois semaines ? Six mois ? En tout cas, cela faisait une éternité selon son cœur et il ne faisait que survivre depuis que son amour était partis pour toujours.

Il se rappela avec un doux sourire son humour douteux et les blagues qui allaient avec, et quand ses instincts canins prenaient le pas sur lui, le rendant tout fou. Rémus se souvenait de leurs nuits tendres et passionnées, ce sentiment d'être complet quand ils ne faisaient qu'un, Sirius profondément blottis au chaud en lui. Son corps se mit à vibrer de plaisir en repensant aux délicieux souvenirs mais cela ne l'émouvait pas. Se masturber ? Pour ensuite pleurer toutes les larmes de son corps lorsque la douleur de l'absence de son amour lui reviendrait dans la figure, tel un boomerang, lorsque les brumes de la jouissance se seront dissipées ? Non, cela n'aurait aucun sens.

Soupirant, il ignora la raideur de son sexe, se concentrant sur le visage souriant de sa tendre moitié, de son rire et de son odeur. Pourtant les souvenirs s'estompent avec le temps, qu'ils soient beaux ou tristes, et notre loup se rendit compte avec amertume qu'il n'arrivait plus à se rappeler de son parfum, du velouté de sa peau ou de la nuance exacte de ses yeux. Frappant le mur d'injustice, il coupa l'eau et sortit de la douche, grognant à moitié, de méchante humeur, s'essuyant vivement pour ensuite regagner sa chambre, autrefois la leur. La colère laissa place de nouveau à l'abattement et il s'allongea sur son lit, enfouissant la tête dans la chemise préférée de son amour, la serrant contre lui, laissant échapper comme prévus deux-trois larmes amères.

Il savait que Sirius n'aurait jamais voulu qu'il abandonne le combat alors il décida de rester dans l'Ordre jusqu'à ce que la guerre prenne fin et après il dirait adieu à tout le monde pour disparaître sans se retourner. Il ne savait pas encore s'il allait vivre un peu ou mourir de suite pour retourner au plus vite dans les bras de son aimé, quoiqu'il en soit ce ne serait plus de la survie mais quelque chose de bien mieux. Ragaillardit et déterminé, Rémus eut l'impression qu'un poids immense venait de quitter ses épaules à présent qu'il savait enfin vers où se tournait sa vie. Souriant doucement, apaisé et soulagé, notre loup put enfin fermer les yeux et laisser son esprit dans le monde de Morphée qui ressemblait étrangement à Sirius, serein.