« La vérité est comme le soleil. elle laisse tout voir mais ne se laisse pas regarder. »
Victor Hugo
VOLTE FACE
La nuit venait de tomber sur la mégalopole japonaise. Des milliers de lucioles artificielles illuminaient maintenant la ville. De sa chambre, la jeune fille assise en tailleur sur son lit ne pouvais percevoir que la lumière de quelques lampadaire éclairants la voie aux voitures empruntant encore la rue à cette heure. L'appartement, plongé dans la pénombre, était presque calme. Son « petit frère » venait d'aller se coucher, laissant son père seul dans le salon encore entrain de se saouler à la bière premier prix devant un show télévisé de l'idole Okino...
Cette ambiance effacée était propice aux introspections. Dans ses mains, elle tenait un collier de joaillier que lui avait offert Shinichi. C'était cependant Conan qui lui avait remit, au nom de ce dernier. Aujourd'hui, elle venait de gagner une année supplémentaire, et il n'était toujours pas revenu.
« Il a toujours veillé sur moi. Il m'a toujours protégée. Jamais il ne me laisserait seule comme ça. Il est égoïste, mais sûrement pas à ce point. »
Elle le revoit, titubant avant de redisparaître comme à chaque fois... Ça faisait des mois qu'il n'était pas réapparu. De toute évidence il a de graves problèmes...
« Il me manque... »
Le manque est un cercle vicieux qui ne fait que vous entraîner dans la souffrance, tout comme l'espoir. Plus vous en avez, plus douloureuse sera la désillusion.
Elle en vient à se surprendre elle même. Jamais elle n'aurait pensée qu'il lui manquerait autant avant sa disparition. Elle le voyait tous les jours depuis quinze ans, pourquoi, s'envolerait-il d'un seul coup ? « C'est bien la preuve qu'il ne faut rien prendre pour acquit » .
Cette dernière pensée était bien plus terrifiante que les précédentes. Elle prenait conscience qu'elle pouvait tout perdre à tout instant, que la vie ne tient qu'a un fragile fil d'argent. Nous sommes tous des funambules sans filin. Chacun de nos gestes, de nos choix, est susceptible de nous faire basculer dans les abîmes sans fond de l'existence.
Qu'est-ce qu'elle peut faire ? Attendre ? Mais jusqu'à quand alors ? Devrait-elle broder de la tapisserie jusqu'à la fin de ses jours telle une Pénélope attendant qu'Ulysse ne revienne ?
Attendre, c'est placer son destin dans les mains de la providence, c'est se déposséder de son pouvoir sur sa propre existence. Peut-elle se permettre de le voir revenir en s'élançant vers lui en déambulateur ?
Le temps lui aussi est un ennemi. C'est bien lui qui finit par nous tuer à la fin... La seconde avant de mourir, on est encore en vie... Qu'éprouvera-t-elle vraiment pour lui dans cinq ans...Dans dix ans ou dans vingt ans ? Courir après une chimère est l'ultime damnation. Elle a espoir. Si il ne revient pas : c'est la désillusion qui l'attend. Mais si il finit par faire son retour, découvrir que ses sentiments ont changés, que les années ont détruit le lien qui les unissait, qu'elle n'attendait plus que son ami lycéen, tel qu'il était il y a des années, découvrir qu'elle ne poursuivrait qu'une vulgaire chimère qui ne pourra pas combler les années perdues l'entraînera également dans une désillusion d'une tristesse inouïe.
L'inaction est le pire des choix. Il faut qu'elle fasse quelque chose, elle en est convaincue.
Que font les gens habituellement lorsque quelqu'un de leur entourage disparaît ?
Il vont déclarer la disparition de leur proche aux autorités compétentes. Cela semble évident. Pourtant dans le cas de ce détective lycéen, les choses avaient été quelque peu différentes.
Elle s'en souvient maintenant : C'est le professeur Agasa qui lui avait défendue d'aller voir la police. Pourquoi après tout ? Le premier jour on peux comprendre, mais après tant de temps, c'est étrange qu'il ne se soucie pas plus que cela du sort de son ami …
Elle l'a décidé, elle veut le retrouver, elle veut l'aider.
Elle défet délicatement la boucle du collier pour le placer autour de son cou, puis se lève.
Son ombre descend l'escalier puis hèle un taxi.
La vie ne tient qu'a un fragile fil d'argent, chacun de nos choix est susceptible de nous faire basculer dans les abîmes sans fond de l'existence...
