Disclaimer : L'univers d'Harry Potter, ses lieux et personnages appartiennent en intégralité à J. .

Note d'auteur : Hello tout le monde ! Comme promis, voici le premier chapitre d'une fiction centrée sur Blaise Zabini, en réponse à la table 2 de prompts d'Ao et LITS. Cette fiction comportera donc quinze chapitres, d'environ 1000 mots. J'espère qu'elle vous plaira. Bonne lecture ! :)


Janvier 2002

Blaise poussa la porte du bar, laissant la ruelle sombre et glauque de l'Allée des Embrumes derrière lui. L'odeur âcre de la transpiration mêlée à celle piquante de la bière le prit à la gorge. L'endroit était quasi-vide. Quelques personnes à l'air peu recommandable vidaient des pintes, dégageant une aura de brutalité.

En habitué, Blaise se dirigea sans attendre vers le bar. Il se glissa sur un des hauts tabourets, et demanda un verre. Lorsqu'il sentit la première gorgée d'alcool descendre le long de son gosier et lui réchauffer le ventre, la lassitude familière s'empara de lui. Les yeux fermés, il tenta quelques instants de tenir sa culpabilité à distance, mais cela ne fonctionna pas. Comme d'habitude.

Au moment où il redemandait un verre, il vit du coin de l'oeil quelqu'un s'asseoir sur le tabouret voisin. Peu étonné, il leva sa boisson vers le nouvel arrivant.

— A ta santé, Drago, murmura-t-il.

Puis il but cul sec. Son ami ne répondit pas, le regard fixé sur le bois du bar devant lui. Le silence s'installa, mais aucun des deux n'en était gêné. Le silence faisait du bien. Surtout en ce moment, alors qu'ils étaient constamment entourés d'ordres, de cris de souffrance, de supplications, et de rires hystériques. Blaise essaya de repousser les souvenirs qui l'assaillaient, mais rien n'y fit.

Plus tôt dans la soirée, Drago et lui jouaient aux échecs dans le salon du manoir Malefoy, essayant d'ignorer tant bien que mal les hurlements qui montaient du sous-sol. Un cri plus perçant que les autres avait fait trembler sa main. Il l'avait crispée sur son accoudoir pour masquer sa faiblesse, mais Drago l'avait vu. Il n'avait rien dit cependant. Juste :

— Tour en E5.

Ils avaient continué la partie, comme si de rien n'était. Mais quelques instants plus tard, Bellatrix avait fait irruption dans la pièce, suivie des parents Malefoy. Blaise se souvenait avec netteté de ses lèvres si rouges, qui se détachaient sur sa peau pâle, ourlées d'un sourire cruel. D'une voix nonchalante, elle leur avait annoncé que le Lord leur confiait une mission.

Blaise s'était tendu, imperceptiblement, son visage gardant une expression polie. Tandis que Bellatrix donnait les détails, son regard s'était égaré vers les parents de Drago. Lucius fixait le sol, muet et suant de peur. Narcissa, les doigts étroitement liés, fixait son fils d'un air suppliant. Ces yeux le glacèrent encore plus que les paroles de Bellatrix. Il ne perçut que les derniers mots de sa tirade.

— Et après vous être amusé un peu, tuez-les tous.

Puis elle avait fait volte-face, d'un pas impérial, la tête haute. Suite à un dernier regard à son fils, Narcissa avait suivi sa soeur, le dos raide. Blaise était resté figé plusieurs secondes, jusqu'à ce que Drago le rappelle à la raison. Lorsqu'il leva les yeux vers son ami, il crut se voir dans un miroir. Son visage en apparence calme n'était qu'un masque, et il se fissurait doucement au fond de ses pupilles, qui laissaient transparaître sa peur.

Toutefois, les deux Serpentard avaient quitté le manoir, leurs capes sur les épaules et les visages engloutis par leurs cagoules. Ils s'étaient rendus à l'adresse délivrée par Bellatrix. Des gens soupçonnés de cacher les derniers membres de l'Ordre. C'était faux, évidemment.

Blaise se souvenait vaguement avoir fait voler la porte en éclats. Le reste se fondait en un brouillard flou. Il avait toujours été doué pour effacer les souvenirs douloureux. Malgré tout, il ne parvenait pas à oublier la petite fille. La fillette blonde, qui s'était trouvée là ce soir. Elle avait des yeux verts, comme les siens. Des yeux verts agrandis par la peur et remplis de larmes de terreur. Des yeux verts qu'il avait vu s'éteindre.

— On était obligé de le faire.

La voix douloureuse de Drago le ramena brutalement à la réalité. Dans le bar misérable qui les entourait.

— On était obligé, répéta Drago, comme pour s'en persuader. Bellatrix va vérifier, comme d'habitude, pour voir si on a fait notre boulot. Et si elle l'avait trouvée vivante, elle...

La fin de sa phrase s'étrangla dans sa gorge. Il vida son verre d'un trait, et le silence se réinstalla. Blaise ne dit rien. Lui aussi se disait ça, pour se sentir mieux. Mais il savait, tout au fond de lui, que ce n'était qu'une excuse. On ne tuait pas les gens pour les protéger.

— Parfois, j'aimerais m'endormir pour ne plus jamais me réveiller, chuchota-t-il d'une voix rauque. Ou fuir le plus loin possible de cette guerre.

— Ne dis pas de bêtises, souffla Drago, d'un ton presque apeuré. On ne fuit pas le Seigneur des Ténèbres.

Blaise eut un rire désabusé.

— Je sais bien, murmura-t-il. Mais ne me dis pas que tu n'y as jamais pensé.

Il laissa le silence planer quelques secondes, faisant tourner les dernières gouttes du whisky au fond de son verre.

— Parfois... Parfois je me dis que j'aurais aimé être libre de mes choix.

Drago s'abstint de tous commentaires. Qui ne rêvait pas d'être libre ? Qui ne rêvait pas de pouvoir faire ce qu'il lui chantait ? Personne. Seulement, voilà. Ils étaient Drago Malefoy et Blaise Zabini, deux Mangemorts enrôlés de force dans une guerre dont ils ne comprenaient même plus le sens, qui les épuisaient davantage de jour en jour.

— J'ai pensé à quelque chose l'autre jour, poursuivit soudain Blaise. Tu vas me trouver stupide, mais... J'ai pensé que... J'aurais aimé être un oiseau. Pour pouvoir partir, m'envoler loin de tout ça. Me sentir libre. Aller où bon me semble. Les oiseaux ont de la chance.

Sur cette dernière parole philosophique, il renversa la tête en arrière, laissant les dernières gouttes ambrées du whisky s'écraser sur sa langue engourdie. Drago resta silencieux. Il aurait aimé trouver cela stupide, mais il ne le pensait pas. Il fallait avouer qu'être un oiseau semblait une possibilité séduisante dans leur situation.

Mais il ne fallait pas se faire d'illusions. Leur réalité était ici, dans ce pub miteux, devant un verre d'alcool, à essayer d'oublier les horreurs qui jalonnaient leur quotidien. Du coin de l'oeil, Drago vit la porte du bar s'ouvrir sur Dolohov et Yaxley. Alors il répondit enfin à son ami, d'une voix douce :

— Et moi j'aurais aimé être choisi pour participer à l'attaque contre les Trois Balais, on ne peut pas tout avoir dans la vie.

Il n'acheva même pas son verre et se leva.

— Allons-nous-en.

Après un moment de surprise, Blaise s'avisa de la présence des deux Mangemorts. Sagement, il se contenta de les saluer sur le chemin qui le menait à la sortie. Drago et lui rentrèrent silencieusement, le coeur lourd, mais une pensée commune nichée au fond de leur esprit.

Être un oiseau, c'était bien. Mais si Potter gagnait la guerre, ce serait encore mieux.


Note de fin : Merci d'avoir lu jusqu'ici, j'espère que ça vous a plu ! Une p'tite review pour me dire ce que vous en avez pensé ? :)