Titre: Échec et maths
Genre: Romance, angst, drama, un peu d'humour, tranches de vie par moments, avec, je le promets, une happyend.
Rating: M (pour mentions sexuelles et peut-être un lemon, dans quelques siècles)
Personnages: Inui/Kaidoh, avec tout Seigaku, leurs familles respectives et peut-être d'autres persos, si l'occasion se présente.

Note: Premièrement, j'aimerais vous signaler que le titre n'est pas une erreur de ma part : je sais bien que l'expression aux échecs s'écrit plutôt «Échec et mat», seulement, j'ai voulu faire ce qu'on appelle... *roulement de tambour* un jeux de mots! En effet, «maths», c'est en référence aux pourcentages d'Inui, si vous n'aviez pas compris. Le titre cache d'autres significations que vous devriez comprendre au fur et à mesure.

Sinon... me voici avec une nouvelle histoire longue. Je ne promets pas de pouvoir la finir, encore moins rapidement, mais j'ai déjà 6 chapitres d'écrit, ce qui est pas mal (je trouve du moins).

Parlons logistique : ce texte sera écrit à la troisième personne, mais je varierai d'un POV à l'autre. Je commence ici avec Inui, et le prochain chapitre sera le même laps de temps du POV de Kaidoh. Ça peut paraître répétitif, mais je crois que pour le type d'histoire que je veux faire, c'est nécessaire.

Je pense avoir gardé Inui assez IC, mais Kaidoh peut paraître OoC. En fait, c'est ma propre vision du personnage que j'ai essayé de présenter, à vous de voir ce que vous en pensez.

J'ai tout dit, je pense bien. Je ne vous retiens pas plus longtemps. Bonne lecture~!


Il était de ces gens incapables de vivre sans comprendre à la perfection leur environnement. La plupart de ces personnes avaient par conséquent un leadership connu et surtout reconnu, leur permettant ainsi de contrôler leur entourage à leur guise. Cependant, un certain nombre de ces personnes n'essayaient pas d'influencer le monde autour d'eux : ils tentaient plutôt de le prédire.

Évidemment, la vie n'étant pas si simple, il n'existait aucune méthode pour prédire à cent pour cent les évènements futurs. Cependant, avec un peu d'observation et beaucoup de réflexion, il était fort possible d'émettre des probabilités. Tout le monde le faisait un peu inconsciemment : qui n'a pas pensé qu'il avait de faibles chances d'échouer à un examen ou de fortes chances de rater son bus?

Inui Sadaharu était de ceux qui prédisaient l'avenir avec une acuité et une constance frôlant l'obsession maladive. Dans son carnet, toujours greffé à ses mains, il notait tout, et de chaque petit détail, il déduisait : 54% de chance que ci, 23% de chance que ça, etc.

Sa méthode, qui pour quiconque aurait semblé indigeste, était pour lui semblable à l'action de respirer : tout aussi facile et tout aussi vitale. Ainsi, il prévoyait en terme de pourcentage chacune de ses actions et surtout celles de ses collègues, dans le but de comprendre au maximum son environnement. Autrement, il lui semblait qu'il n'arriverait pas à saisir son univers – idée qui l'aurait angoissée s'il y avait songé avec sérieux.

Ce matin-là, comme tous les matins, il arriva à l'avance à l'entrainement matinal de l'équipe de Seigaku et commença à prédire : 54% de chances que Momoshiro soit encore en retard, 33% qu'Echizen l'accompagne, 99% que dans ce cas Tezuka leur fasse faire au moins vingt laps de course. Cette fois-ci, Momoshiro fut le seul à arriver en retard, mais leur capitaine ne manqua pas de lui donner sa punition.

Toutefois, ce qui intéressait vraiment l'adolescent n'était pas ces membres de l'équipe. Il regardait plutôt du côté de Kaidoh, notant qu'il avait le même bandana qu'à l'habitude, que sa démarche n'avait pas changé et que son expression était tout aussi renfrognée. Franchement, c'était un matin comme tous les autres pour le serpent, qui ne remarquait toujours pas les coups d'œil en coin de son senpai.

63%. Inui savait qu'il y avait 63% de chance qu'il soit amoureux de son kouhai. Il avait calculé ce chiffre à sa façon de le regarder à chaque occasion, même si apparemment ses données étaient toujours bonnes. Il l'avait aussi déduit de sa propension à reporter les moindres études de ses coéquipiers sur son partenaire de doubles, à noter comment chacun agissait avec lui sans autant se soucier de comment ils agissaient avec les autres.

Cependant, l'élément qui avait été décisif et qui avait fait augmenter le nombre de 46% à 63% était les rêves pervers qu'il avait commencé à faire et sa propension à se masturber en pensant à son kouhai. Le chiffre n'avait pas monté plus haut parce qu'il y avait encore la possibilité que ce soit simplement ses hormones, ou son obsession de concocter pour le serpent le meilleur entrainement qui lui était simplement monté à la tête. Il y avait donc 20% de chance que ce ne soit que ses hormones, 15,5% que ce ne soit que son désir de lui faire un meilleur programme et 1,5% que ce soit une pure coïncidence – c'était une simple marge d'erreur qu'il s'imposait.

La plus grande probabilité était quand même qu'il soit amoureux, et, d'après ses observations des plus approfondies, il avait compté que les chances que l'autre l'aime également n'étaient que de 13%. Encore une fois, deux autres options s'offraient : 65% qu'il le considère comme son meilleur ami et 22% qu'il ne le considère que comme un senpai. Aucune marge d'erreur cette fois : il était certain de ses résultats.

Avec seulement 63% de son côté et 13% de l'autre, il était évident qu'il n'y avait que peu de probabilités pour qu'ils finissent en couple. C'est pourquoi Inui, bien décidé à faire confiance à ses chiffres comme toujours, décida de ne pas agir. Il ignora toutes ces sensations qui lui traversaient le corps et continua son entrainement, sans toutefois cesser de réfléchir à ses chiffres.

Bientôt, l'entrainement se termina et tous durent aller dans leurs classes respectives. En cours, Inui s'entraina subtilement, tout en prenant des notes de cours et en songeant à son partenaire de double – son cerveau lui permettait aisément un tel éparpillement de pensées. Des bouts de ses rêves lui revinrent sans qu'il le veuille et il se remémora avec force détails ce qui le troublait tellement. La question était surtout : pourquoi Kaidoh?

Inui savait depuis longtemps qu'il y avait 96% de chances qu'il soit homosexuel, voyant que ce qui l'intéressait le plus dans la vie était la force et l'entrainement – les filles n'étant ni compréhensives sur le sujet, ni particulièrement fortes. Ses premiers rêves érotiques avaient confirmé ses soupçons. Sa sexualité ne le mettait pas particulièrement mal à l'aise; au contraire, elle confirmait qu'une fois de plus, ses chiffres étaient justes.

La question n'était donc pas «pourquoi un homme?» mais plutôt «pourquoi celui-ci?». Inui n'avait réussi à trouver aucune donnée vraiment pertinente sur le sujet. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il y avait 34% de chances que ses «sensations» soit dues au fait qu'il avait la charge de son entrainement (il s'occupait aussi des autres titulaires, mais pour eux il se contentait de créer le menu, alors que pour Kaidoh il l'observait aussi pendant ses entrainements), et donc qu'il le fréquentait plus que n'importe qui. Il avait également la chance de voir ses muscles en action régulièrement, ce qui l'obligeait à considérer la possibilité que ce ne soit que ses hormones. Seulement, était-il possible qu'il soit attiré par une personne sans qu'elle soit l'objet de son affection?

Inui manquait d'observation dans le domaine, puisque c'était la première fois dans sa vie qu'il ressentait de l'attirance pour une personne. Il n'était pas sans savoir que la plupart des gens considéraient l'amour comme un concept inexplicable et croyaient qu'il prenait naissance sans raisons ni logique. Toutefois, il refusait d'admettre que quoi que ce soit puisse être illogique, même l'amour : ç'aurait été renié tout ce qu'il était.

C'est pourquoi il tentait de débusquer les 66% restants. Quelle autre raison expliquerait qu'il soit attiré par son kouhai? Depuis un certain temps, il avait grandi et devenait de plus en plus attirant. Cependant, Inui devait admettre que la plupart des membres de leur équipe étaient séduisants; cela n'expliquait donc pas pourquoi c'était Kaidoh qui attirait son attention, et pas Tezuka par exemple. Était-il simplement plus sensible à l'apparence de Kaidoh qu'à celle des autres garçons de leur équipe? Pour quelles raisons?

Voyant comment cette piste ne menait à rien, Inui tenta une autre approche. Et si ce n'était pas le physique, mais plutôt la personnalité qui l'attirait en premier lieu? Il ne fallait pas oublier que, bien que l'amour soit d'abord un phénomène physique, les agissements et la compatibilité comptaient beaucoup dans les relations humaines, particulièrement dans celles d'ordre romantique. Il était vrai que Kaidoh et lui s'entendaient bien, mieux qu'avec n'importe qui d'autre (c'était vrai des deux côtés, et Inui en tirait un sentiment bien étrange de joie quant à cette observation) : était-ce suffisant pour établir un terrain propice à l'amour?

Inui décida que oui et un autre 38% prit sa source dans cette cause. Il restait donc un 28% incompréhensible, qui flottait dans sa tête. Malgré la petitesse du chiffre, il ne pouvait s'empêcher de penser que la réponse devait s'y trouver. Cependant, il ignora cette impression – qui au demeurant n'était pas logique – et décida qu'il n'était pas nécessaire d'en déterminer la valeur. De toute façon, il lui fallait plus de données pour mieux s'avancer, et c'est ainsi qu'il closit la réflexion qu'il menait jusqu'alors.

Pendant le reste de la journée, Inui évita ce train de réflexion et prit plutôt des notes sur tout le reste : les tics verbaux de ses professeurs, le nombre de papiers que les élèves dans sa classe se lançaient, l'identité de ceux qui jouaient avec leur portable pour comparer leurs notes à l'examen (comme il le pensait, sortir son portable en classe diminuait la note d'une moyenne de 5%).

La journée passa plutôt vite et l'entrainement de l'après-midi débuta sans soucis. La journée était chaude, mais pas de manière assommante. En regardant le ciel parfaitement bleu, Inui déduisit qu'il n'y avait que 4% de chance qu'il y ait de la pluie d'ici le lendemain. Ensuite, son attention se porta tout naturellement sur Kaidoh qui jouait un match de pratique contre Echizen. Prétextant intérieurement la volonté d'étudier plus en détail le style de jeu du première année qui l'avait battu, il délaissa son propre entrainement – qui consistait en de simples exercices d'assouplissement – pour aller observer la partie.

Le plus jeune venait de gagner un point, ce qui lui donnait une avance de 4 parties contre 2 pour Kaidoh. Le nez dans son cahier, l'adolescent à lunettes nota quelques détails sur la façon de jouer du gagnant jusqu'à présent – il s'était encore amélioré : Inui devait une fois de plus revoir ses informations –, mais, en peu de temps, il revint sur la section consacrée à son supposé amour. Il remarqua alors que les pages qui couvraient le sujet de son serpent favori ne cessaient de croitre en nombre, battant même la place qu'occupait Tezuka.

Ce fut un véritable choc. Il avait adopté son style de jeu, et donc son style de pensée, dans le but de battre Tezuka. Il n'y avait pas si longtemps, c'était le seul but qui l'animait; et voilà qu'une autre personne prenait plus de place!

Inui aimait à voir son carnet comme une extériorisation de ses réflexions. C'était en quelque sorte la concrétisation de ses pensées, et par extension de sa façon de penser, de ses obsessions. Si une bonne partie était consacrée aux jus qu'il confectionnait toujours avec joie, jusqu'alors la majeure partie avait concerné son rival de toujours.

Que son obsession pour Kaidoh soit si marquée ne l'aurait pas autant choqué s'il n'avait pas totalement ignoré le processus. Ce n'était que devant le fait accompli qu'il se rendait compte de ce qu'il avait fait. Il se savait un peu obsédé, mais n'avait jamais remarqué qu'il écrivait à ce point sur lui. Lui qui remarquait tout sur les autres avait manqué quelque chose qui le concernait directement.

Son cahier lui glissa des mains et se retrouva sur le sol. Heureusement, personne ne sembla remarquer sa bévue – ou alors ses capacités d'observation étaient si troubles qu'il ne voyait plus rien, ce qui le fit paniquer un peu plus.

On dit que l'amour rend aveugle, voire qu'il rend stupide. La probabilité qu'il soit amoureux venait de monter d'un bon 14%, mais il ne trouva pas la force de calculer le pourcentage des autres probabilités. Il n'avait plus besoin de chiffres pour comprendre qu'il ne comprenait pas.

Il reprit son cahier et, sans un mot, alla se changer, avant de partir. Il n'avait dit au revoir à personne, mais on ne le retint pas pour autant. Même Kaidoh ne sembla pas remarquer qu'il était parti avant la fin de l'entrainement; Inui en ressentit une profonde douleur à la poitrine, qui ne s'estompa qu'au moment où il se retrouva dans son lit. Contrairement à ses bonnes habitudes, il ne s'entraina pas pour le reste de la soirée ni ne fit ses devoirs. Il se contenta de rester couché sous ses couvertures en songeant encore une fois à l'éprouvante réalité : l'amour ne s'expliquait pas avec des chiffres. Ou, si la chose était possible, Inui n'en trouvait pas la logique.

Pour la première fois de sa vie, il commençait à douter de ses propres capacités d'analyse.