Il n'avait qu'une envie : tout foutre en l'air. Leur dire d'aller se faire voir. Il ne pouvait plus continuer comme ça. Avec cette pression constante sur ses épaules, ce poids qui le fait ployer toujours un peu plus. Il doit s'occuper d'eux, mais chaque jour, la peine devient de plus en plus pesante. Pourquoi lui et pas un autre ? Pourquoi est-ce que cela lui retombes dessus ? Il a tout donné, il a fait ce qu'il a pus. Mais finalement, tout s'écroules autour de lui. Et sur lui. Ils ne supportent plus les regards qu'on lui porte. Des regards haineux. Au début, il ne comprenait pas pourquoi. Mais maintenant, il a saisit. Parfaitement. On l'évite. On évite de le toucher. On ne le regarde plus dans les yeux. Mais des qu'il a le dos tourné, il entend les murmures. De mépris. De haine. D'hypocrisie. Et il n'en peut plus. Il ne sait pas comment font les autres pour vivre avec ça tout les jours. Les autres le comprennent. Mais eux, ceux qu'il pensait être de sa famille, lui disent qu'ils ne le reconnaissent pas. Que ce n'était pas son genre.

« ALLEZ-VOUS FAIRE FOUTRE. »

On le regarde. Choqués. Il a crié. De toutes ses forces. Il a craché ses poumons. Il a craché son désespoir. Sa haine. L'injuste. Son incompréhension. On le regarde, désemparés. Puis les regards changent. Et la revoilà, la haine. Il les regarde droit dans les yeux. Les regards se détournent. Il fait partie de ceux la, maintenant. Ceux qu'on méprise. Parce qu'il n'est pas comme les autres. Il n'est pas un mouton, fier de l'être. Il s'est affirmé. Et on le méprise pour cela. On le juge. A cause d'un seul petit mot.

Gay.

Homosexuel.

Tout ça pour ça. Il aime, comme tout le monde. Mais il n'aime pas comme il faut. Alors on le méprise. On le met dans une boite peinte en rouge, sur laquelle est écrit « Marginal ». Il n'est plus comme eux mais comme les autres.

Il ne sait plus s'il doit en rire ou en pleurer. Il devient fou. Il rit. Il pleure. Il crie. Il se débat contre cette haine qui l'oppresse. Il ne sait plus quoi faire de tout ça. De ses regards haineux qui s'enfoncent en lui comme des poignards. De ces propos murmurés dans son dos, assez fort pourtant, pour que cela s'inscrive au fer rouge dans son esprit. Il pleure. Il pleure toutes les larmes de son corps. Il était reconnu. Il devient un inconnu. Il devient un homosexuel. Un gay. Un homme qui aime les hommes. Quelqu'un qui n'est donc pas normal. « Et dire qu'il nous l'a caché pendant tout ce temps. » « Ah, mais attends, j'ai déjà dormis une fois avec lui après une soirée bien arrosée… » « C'est contagieux ? » « Il me fait peur maintenant. » « Il a le sida, c'est sur. »

Il rit. Rire démoniaque. Rire de fou. Il les regarde tous. Et il rit. Il ouvre sa bouche bien grande, il montre ses dents, les yeux roulent dans leurs orbites. Il rit. La gorge déployée. Les bras écarté. Il rit. Un rire nerveux. Un rire désespéré. Un rire fou. Un rire d'homme malheureux. Un rire qui fait mal au fond de la gorge. Qui racle. Qui gronde. Un rire qui se transforme en cri. Un cri de désespoir. Un cri qui protège. Qui créée une barrière entre eux et lui. Les gens s'écartent. S'enfuit.

Le cri s'arrête. Les larmes coulent.

Il regarde autour de lui. Il est seul. Tout seul. Comme au début. Il était aimé de tous. Il est maintenant détesté de tous. Et ce n'est pas plus mal. La solitude, elle, ne le mépriseras pas. Ne le haïras pas. Elle l'acceptera tel qu'il est.

La solution face à la haine.

La solitude.

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