LA LOUVE ET LE COLOSSE
OS 1 : LE COLOSSE
Les personnages et les lieux mentionnés appartiennent à Squarenix, je ne fais que jouer avec pour cet OS.
Pas de bêta-lecture pour cette fois^^.
Le Septième Ciel. C'était un petit bar convivial, assez bien réputé dans la ville d'Edge, situé à la périphérie de la ville-pizza de Midgar. On pouvait s'étonner de l'ambiance bonne enfant qui régnait dans le café quand les clients venaient, car l'agglomération où il se situait n'était pas très accueillante. Des rues grises, des airs mornes sur le visage des passants, des constructions de fer effectuées à partir de matériaux récupérés lors de la chute du Météore dans la ville à proximité … Sans mentionner le fait que le ciel était presque toujours couvert.
Quelques fois, la tenancière de l'endroit, Tifa Lockheart, ancienne membre d'AVALANCHE et sauveuse de Gaïa à trois reprises, se demandait pourquoi elle avait accepté l'offre de son ami et ancien chef, Barret Wallace, de rouvrir un nouveau bar. A l'origine, le premier dont elle s'occupait ne lui appartenait pas. L'ancien propriétaire –et constructeur- était un homme qui s'opposait à la Shinra. Il avait confié le Septième Ciel à Barret lorsqu'il sentait que les Turks s'intéressaient d'un peu trop près à lui. Il avait disparu dans la nature depuis, mais le corellien disait à la combattante de ne pas se faire de soucis pour lui. Le déserteur avait refait sa vie ailleurs.
D'ailleurs, Tifa ne voulait pas lui redonner ce nom lorsque le nouveau bar fut construit, lorsque la question se posa pour baptiser l'endroit. Ca lui rappelait douloureusement l'époque où elle travaillait pour le groupe d'éco-terroristes AVALANCHE. Ses doutes sur la légitimité de leurs actes. Les blessures qu'ils avaient durant leurs combats, physiques ou morales. Les dépressions face à l'absence de réaction des gens des Taudis. L'ignorance des Midgarois face à leurs actes, quand ce n'était pas du mépris ou de la moquerie, parce qu'ils osaient s'opposer à la Shinra.
Cependant, Marlène, la fille adoptive de Barret, l'avait convaincue de le faire, car dans l'ancien, ils avaient l'habitude de rire. Ils y avaient de bons souvenirs, et la petite fille de huit ans –bientôt neuf, maintenant !- tenait à les garder au plus profond de son petit cœur d'enfant.
Même si l'un d'eux leur était particulièrement douloureux : trois de leurs collègues d'AVALANCHE périrent lors de la chute de la Plaque du secteur sept. Biggs, Wedge et Jessie ne furent pas écrasés vivants par les lourds morceaux de pierre et de poutres de fer lorsque la Plaque explosa, heureusement pour eux, mais être abattus par les miliciens de la Shinra comme des chiens n'était guère mieux. Et dire qu'ils s'étaient battus pour leurs rêves … Ils l'avaient chèrement payé.
Le regard brun de la combattante s'attrista lorsqu'elle repensa à cet incident. C'était de leur faute. Ils avaient trop titillé la Shinra après avoir fait sauter deux réacteurs Mako. Et à cause d'eux, des milliers d'innocents étaient morts sous la fureur vengeresse d'Anton (1) Shinra, l'ancien Président de la société du même nom, qui fut assassiné brutalement plus tard par Sephiroth.
Non, pas Sephiroth.
L'ancien général n'avait jamais bougé du Cratère Nord où il y avait été scellé avec la tête de Jenova par cette dernière, il y a bientôt neuf années de cela, suite à sa mort (ou suicide ? Personne ne le savait) dans le réacteur Mako de Nibelheim. Son corps, charrié par les courants de la rivière de la vie, l'avait amené dans ce gouffre si profond, causé par l'atterrissage de la Calamité des Cieux. Le véritable assassin, c'était celle qu'il prenait pour sa mère. Jenova.
Étonnamment, l'ancien Président était un peu regretté. Il était vrai que la politique plutôt agressive de son fils, Rufus, avait rebuté pas mal de monde lors de la crise du Météore. Et ses actes durant la guerre contre les Incarnés de l'ancien héros de la Shinra avait augmenté la méfiance des gens à son encontre. Dissimulation de faits importants, mise en danger de la vie d'autrui … et en plus de ça, il cherchait à reformer la société de son père, au mépris de l'avis des Gaïans qui estimaient que le mot Shinra était aussi tabou que celui de Sephiroth !
Oooooh, si elle tenait ce petit malappris entre ses mains, nul doute qu'il allait voir qu'elle n'était pas DU TOUT à l'image des fantasmes des clients du bar : une femme qui se prostituerait pour maintenir à flot son Septième Ciel. Ou que tout d'un coup, elle ne sache plus se battre face à des hommes au point de se sentir troublée par leur proximité, et de les laisser faire d'elle tout ce qu'ils voulaient (2).
Elle savait que ses formes plantureuses alimentaient les ragots les plus sordides et les plus pervers sur sa personne, mais la combattante se montrait forte à leur entente, et les ignorait efficacement. Si on la cherchait, on la trouvait. Elle ne comptait plus le nombre d'hommes ivres morts qu'elle avait flanqué à la porte parce qu'ils s'étaient crus tout permis avec elle. Que les gens pensent ce qu'ils veulent. Ce n'était pas son problème. Elle en avait un plus gros.
Cloud.
Elle fronça un peu le nez en repensant à son ami d'enfance. Ils voulaient bâtir une famille après la crise du météore. Hélas les géostigmates et ses remords suite à la mort d'Aérith avaient éloigné l'ex-SOLDIER (enfin, pas vraiment, il était milicien à l'origine) à la crinière blonde, semblable à celle d'un chocobo, -elle lui en avait d'ailleurs fait la remarque une fois, sur le chemin de fer de Corel, tandis qu'ils observaient un nid de bébés cockatrices (d'ailleurs, la mère n'était pas contente et les avait attaqué)-, d'elle, et la barmaid s'était sentie blessée par ces faits. Comme si elle était incapable de l'aider à supporter son fardeau. Sans compter les livraisons, les patrouilles qu'il effectuait avec les Edgiens pour éliminer les monstres, et les heures qu'il passait à bichonner sa saleté de moto qu'il avait appelé affectueusement Fenrir …
Après tout ce temps passé à veiller sur lui lors de son accueil à AVALANCHE, de son empoisonnement à la Mako, et être restée avec lui pendant la semaine de réflexion qu'il avait imposé au groupe afin que ses membres soient sûrs de vouloir affronter Sephiroth sans compter les combats communs face aux monstres et aux SOLDIERS, voilà comment il la remerciait ! Le jeune homme vivait avec elle … tel un fantôme !
Même après la crise des géostigmates ou de l'émergence de Deepground, il continuait à être loin d'elle. Bon, d'accord, il avait le droit à sa liberté, mais tout de même … Parfois –non, pardon, souvent !- il ne la prévenait même pas de son absence ! Et s'il avait un accident, comment il se démerderait, hein ?! Si un jour, il se retrouverait amnésique ? Ou pire …
Le seul contact qu'il avait avec elle, c'était via son répondeur. Il ne décrochait jamais. A croire qu'il préférait plus entendre la voix de sa messagerie vocale que celle qu'il prétendait aimer …
Tifa soupira bruyamment. Heureusement, elle était seule dans le bar aujourd'hui, alors elle pouvait bien se permettre de faire tout le boucan qu'elle voulait … ou de laisser ses pensées vagabonder, telles des chocobos sauvages sur les plaines de Kalm. Marlène et Denzel étaient partis à l'école. Shelke, malgré l'apparence de ses neuf ans, s'était rendue à la WRO pour aider Reeve à l'aide de ses conseils précieux pour perfectionner les tactiques des unités de combat de l'organisation. Au moins, son passif en tant que Tsviet à Deepground l'aidait à s'intégrer … Et elle était devenue la nouvelle mascotte de la WRO, avec Cait Sith. Ce bon vieux Tuesti n'avait jamais abandonné sa marotte avec ses robots …
Quant à Cloud, il était encore parti pour une énième livraison pour Junon-Haut, chargé de transporter une petite statuette hors de prix pour une femme aisée. Etrangement, depuis l'attaque de l'ARME, la situation des habitants de Junon, aussi bien en haut qu'en bas, ne s'était pas arrangée … Enfin, elle n'allait pas polémiquer sur ses pairs. Déjà, elle ne voulait pas se coltiner un bon mal de crâne, mais en plus, elle s'énerverait toute seule. Souvent, elle ne comprenait pas comment, de Cetras sages et en harmonie avec la nature, ils aient régressé à ce point.
Ca la tuait quelque part de penser ça, malgré les horribles crimes qu'il avait commis, mais Sephiroth avait peut-être eut raison sur certains points. Les humains ne méritaient pas de fouler Gaïa … du moins, ceux qui n'avaient aucun respect pour la vie. Les psychopathes, les violeurs, les sadiques … Parfois, elle se surprenait à penser qu'il était dommage que les géostigmates ne se soient pas attaqués à des hommes tels que Don Cornéo. Ce vieux pervers libidineux était encore en vie (3), malgré sa chute du Da-Chao après leur course-poursuite avec Yuffie qui leur avait volé toutes leurs matérias ! Certes, il était cloué dans un fauteuil roulant tout comme Rufus, mais ça n'enlevait pas la dangerosité des deux hommes –surtout celle du Président- !
Un sourire faible étira ses lèvres rosées. Quelque part, elle enviait les porteurs des cellules de Jenova : malgré leurs différences, il fallait vraiment y aller pour les monter les uns contre les autres. La cohésion dont ils faisaient preuve même sans se parler était … ahurissante. Et elle savait que ce n'était qu'une petite partie des talents que les cellules de la Calamité des Cieux leur accordaient.
Avait-elle vu, elle aussi, la déchéance des humains ? Sans doute ne le saurait-elle jamais … Et elle ne pouvait pas se renseigner avec Cloud sur le sujet. Il était si fermé sur le sujet Sephiroth, Jenova, et les Incarnés … Bien sûr, c'était compréhensible. L'argenté le hantait énormément, et pour cause, il avait été son marionnettiste principal avec sa prétendue « Mère » pendant la crise du météore. Mais une question la hantait …
Son ami d'enfance savait la vérité sur les véritables origines du général déchu. Pourquoi, au nom de Minerva … POURQUOI n'avait-il pas essayé d'en parler à Sephiroth juste avant leur affrontement ? Pourquoi Vincent ne l'avait-il pas fait, lui aussi ?! Bon sang, encore, Cloud, elle comprendrait, mais l'ex-Turk … C'était le fils de sa bien-aimée Lucrécia ! Ils auraient pu lui montrer la vérité ! Lui prouver qu'il était vraiment humain ! Qui sait, peut-être que ça l'aurait fait douté de sa relation filiale avec Jenova …
Et l'homme aux cheveux argentés … Elle se souviendrait toute sa vie de son regard avant qu'ils ne l'affrontent. Ses yeux étaient perdus, confus … désespérés et désorientés … Comme s'il ne comprenait pas ce qu'il faisait là, mais que, forcé par les intentions hostiles à son égard émanant du groupe, il tentait de les maîtriser pour fuir … Tifa n'avait pas compris pourquoi il avait eut un tel regard, à l'époque, mais avec le recul, elle pensait que c'était parce que le contrôle de Jenova s'était considérablement réduit à sa défaite, et qu'il ne savait pas quoi faire. Le regard des possédés de la Calamité lui avait toujours fait peur. Ils avaient une étincelle si … fanatique dans le regard, si … hanté … si fou …
Une mèche brune tomba devant ses yeux et la barmaid la replaça machinalement de manière à ce qu'elle ne la gêne plus. Elle soupira, puis prit un chiffon pour nettoyer le comptoir du bar. Elle oublia sur le coup qu'elle l'avait fait il n'y avait même pas deux heures et qu'aucun client n'était venu durant ce laps de temps. Au moins, on ne pourrait pas lui reprocher que le meuble soit sale ! Ses pensées vagabondes revenaient … Cette fois sur un sujet légèrement plus récent.
Son poing se crispa légèrement sur le tissu lorsqu'elle songea malgré elle à cet homme inconnu qu'elle avait affronté dans l'église du secteur cinq, nommée par la suite l'église d'Aérith, en honneur à l'Ancienne. Là où la Cetra faisait pousser ses fleurs, avant de quitter Midgar pour vivre sa grande et unique aventure. Leur amie, qui s'était sacrifiée pour sauver Gaïa à la Capitale Oubliée, nommée Ajito, où Jenova l'avait tuée de ses propres mains à l'aide de Sephiroth … Tifa supposait qu'à ce moment-là, lui et sa « Mère » étaient en synchronisation totale pour ce meurtre horrible, dans le sens où la Cetra était sans défense, en train de prier pour invoquer le Sacre … et elle avait été assassinée brutalement. Sans avertissement. Alors qu'elle entamait à peine sa vie d'adulte.
Sephiroth –ou ce qui semblait l'être- s'était abattu sur elle telle la foudre sur un arbre, Masamune en avant. La lame avait transpercé sans résistance le corps de la jeune fille, et la barmaid se souvenait avoir plaqué ses mains sur sa bouche, les yeux écarquillés d'horreur devant la scène, pour étouffer son cri choqué. Elle se rappelait aussi de la lenteur avec laquelle le général déchu avait ôté son arme du corps de sa victime, avec un sourire tellement ironique qu'elle avait eut envie de le démolir sur le coup de la seule force de ses poings. Il avait peut-être un joli minois –elle devait bien l'avouer-, mais à cet instant précis, elle voulait lui arranger le portrait.
Cet acte horrible avait choqué tout le groupe d'aventuriers. Elle se souvenait aussi du moment après l'affrontement contre Jenova-Mort. Les adieux déchirants à Aérith, qui leur avait ôté un instant leurs forces, le temps de lui dire au revoir. Et puis leur détermination avait grimpé en flèche. La haine, aussi.
La haine …
C'était ce qui les avait fait tenir pour affronter Sephiroth et Jenova.
Parce que ce crime ne pouvait pas rester impuni.
Puis ils avaient vaincu les assassins d'Aérith, avant de se rendre à l'église du secteur 5 pour s'occuper de ses fleurs. Parce que la Cetra leur avait montré le sens du mot « vivre ». Sa gentillesse, son humour, sa compassion leur manquait, mais le groupe avait décidé d'avoir un ruban rose sur eux, en souvenir de leur amie disparue. Ensuite, Tifa, Cloud, Marlène et occasionnellement Barret se rendaient parfois à ce lieu sacré pour s'assurer que les Hespérides (4) ne meurent pas. Là où elle, Tifa Lockheart, avait connu pour la première fois de sa vie la défaite dans un combat, contre Loz. Le plus fort physiquement du trio d'Incarnés de Sephiroth.
Elle se souvenait à quel point son regard félin était hypnotique. Ce visage viril, qui cachait une âme d'enfant. D'ailleurs, les seules questions qu'il avait posées le trahissaient bien : il avait demandé si sa mère était ici et si elle et Marlène voulaient jouer. Ce corps puissamment musclé, vêtu d'une combinaison de cuir moulante qui accentuait cette apparence de colosse. Le pas calme avec lequel il était entré dans le lieu sacré, alors que son apparence devait attirer la méfiance des Edgiens.
Elle n'avait même pas sentit d'agressivité de sa part quand elle l'avait remarqué, alors qu'elle avait vu de près Sephiroth, qui en avait eut une gigantesque quand il avait décidé de les combattre. L'art martial de Zangan permettait normalement de détecter, de mesurer ensuite le degré de violence d'un adversaire, et d'y répondre en conséquence. Mais son adversaire, elle l'avait senti, n'avait pas eut la moindre intention de la tuer. Et puis ce sourire taquin qu'il lui avait adressé, avant leur échange de coups …
« Je m'amuse déjà ! »
D'ailleurs, Loz l'avait laissé mettre ses gants et mettre Marlène en sécurité, avant de se mettre en position de combat. Pleine d'ouverture, qui plus est, comparé à elle, en défense, et elle avait été surprise de pouvoir lui foutre quelques crochets par la suite. Un ennemi plus sournois que lui ne se serait même pas préoccupé de la fillette et aurait foncé droit sur elle, le temps qu'elle s'arme. Elle se remémorait aussi la souplesse avec laquelle le colosse se mouvait durant leur affrontement, à l'aise aussi bien dans les grands espaces que les plus restreints, comme l'allée droite des colonnes de pierre.
Pourtant, quand elle y repensait, elle n'avait pas du tout été mauvaise durant l'affrontement. Elle avait lancé plusieurs limites, mais ce colosse les avait soit esquivées comme sa culbute, soit encaissés comme son coup d'eau ou son météodrive. Même quand elle avait fracassé son corps contre le sol –à deux reprises !- avec violence, il s'était redressé comme si de rien n'était. Pas de bras cassé ou de côtes –bon sang, elle avait tout même appuyé sur sa cage thoracique de ses pieds !-. Pas de problème de dos, aussi, alors que c'était la partie du corps du son adversaire qui avait embrassé le sol de bois en premier … Une si grande résistance avait de quoi effrayer une personne lambda.
Elle, personnellement, avait senti comme un vertige quand il l'avait fait tournoyer avec aisance, sans compter le siège qu'elle s'était pris alors qu'il la faisait tourner comme une toupie pour l'envoyer contre le mur. Les pétales des Hespérides s'étaient envolée sous l'air de la violence du lancer, avant de retomber doucement, tels des flocons de neige délicats. Là, leurs yeux s'étaient aimantés pendant quatre à cinq secondes. Si peu mais en même temps beaucoup. Attirés l'un vers l'autre tels un papillon de nuit vers une lumière. Mais qui avait été le papillon et qui avait été la lumière, entre eux ? Elle ne saurait le dire …
C'était d'ailleurs pour ça qu'elle avait pris autant de temps pour se remettre d'aplomb et contre-attaquer. Elle lui avait placé une main sur les yeux pour l'aveugler afin de l'empêcher de la trouver, avait envoyé la tête de son adversaire percuter le sol et s'y frotter un peu avant de le propulser en l'air. Tifa l'avait rattrapé à nouveau, lui avait retourné la faveur, et l'avait envoyé de toutes ses forces fracasser le sol près de l'entrée de l'église.
Pourtant, derrière cette apparence de titan, il y avait une immense fragilité qui l'avait intriguée. Et inconsciemment, elle voulait en savoir plus sur lui. Pas pour le tuer, non … Elle n'était pas comme les Turks.
« Elle n'est pas là … » souffla-t-il d'une voix déçue à son correspondant au PHS, qu'il avait décroché après s'être relevé sans trop de casse du météodrive qu'elle lui avait infligé.
Ce qui était étonnant, car il avait atterrit droit sur les bancs de bois. Là encore, sa résistance aux coups était stupéfiante.
« Je chiale pas ! » avait-il dit ensuite avec colère à son interlocuteur, qui répondit quelque chose.
Comme elle était loin de lui, Tifa n'avait pas pu entendre ce que cette personne mystérieuse lui disait. Le visage du colosse s'était alors fermé, son regard, subitement devenu sérieux à la réplique de son correspondant. Ce simple changement de comportement en deux secondes avait d'ailleurs surpris la guerrière.
« Entendu. Je te l'amène. » avait-il conclu, avant de fermer le clapet du téléphone portable pour raccrocher.
La barmaid n'avait pas sut de qui il parlait, comme il les regardait toutes les deux. Marlène, qui l'avait rejointe en pensant que tout danger était écarté, s'était cachée derrière elle le temps de l'appel, mais la combattante s'était préparée à se donner à nouveau à fond dans le combat qui l'attendait … Cependant, Zangan ne lui avait pas appris à affronter un adversaire aussi vif. Aussi … surhumain. Et la force qu'elle avait eut il y a deux ans pour affronter Sephiroth avait fondu comme neige au soleil, vu les éraflures que Loz avait ...
Il avait vraiment joué avec elle, tel un chat devant une souris. Et c'était ça qui l'énervait le plus. Elle s'était donnée à fond durant le combat, mais lui s'y était mis sérieusement après l'appel qu'il avait reçu. Et là, elle avait été complètement prise au dépourvu par sa vitesse surhumaine. En trois secondes –un déplacement supersonique, un souffle amusé de la part de son adversaire et un coup de poing-, le combat avait été achevé. Un coup de son gant mécanique chargé d'électricité, et elle avait été incapable de bouger par la suite.
Il l'avait ensuite jetée sur les Hespérides avec nonchalance, avant de s'avancer vers elle, de se mettre presque à califourchon sur son corps et de l'attraper par le gilet sans manches qu'elle portait. Elle rougit légèrement en se rappelant à quel point cet homme l'avait troublée lorsqu'il fut au dessus d'elle pour l'achever. Il dégageait une telle aura de puissance, une délicieuse odeur de cuir et d'odeur virile mêlées …
L'homme allait se préparer à la tuer avec son gant mécanique –un Dual Hound d'après un certain Kunsel, ex-SOLDIER et un ami de feu Zack Fair (le véritable compagnon d'Aérith)- avec l'intention visible de lui placer un bon coup à la tempe qui l'aurait certainement décapitée et envoyé voler sa tête dans le décor, mais elle avait vu dans son regard qu'il hésitait à le faire.
Trois secondes, encore. Un silence profond, rompu seulement par leurs halètements de fatigue et de douleur pour la barmaid. Le regard brun, vaincu de Tifa qui rencontrait celui vert félin, soulagé que l'affrontement se soit achevé de ce dénommé Loz (selon Marlène lorsque l'enfant lui raconta ce qui s'était passé après que l'homme l'ait mise hors-jeu). Qui se perdaient l'un dans l'autre comme lorsqu'il l'avait jetée vers la porte arrière de l'église.
Marlène l'avait sauvée en jetant une matéria sur la tête de leur ennemi, mais Tifa se demandait si ce dernier l'aurait vraiment tuée. Quelque part, elle en voulait à la petite de s'être mise inconsidérément en danger, mais d'un autre côté, les Incarnés n'avaient pas fait le moindre mal à la fillette après l'avoir capturée –ce qui était étonnant, d'ailleurs-.
Il y avait tellement de choses qui avaient fait basculer ses certitudes, ce jour-là, hormis sa défaite, qui lui prouvait qu'elle avait encore beaucoup à apprendre. Le fait que Cloud pense plus à une morte qu'à elle, au point de vivre à l'église. Elle en avait comme preuves présentes une lanterne, une malle sur laquelle était posée une bande souillée de noir –la preuve typique d'un malade des géostigmates-, une tasse en fer.
Un sac de couchage marron était enroulé de manière à faire un oreiller était aussi présent, une couverture couleur sable étalée au sol en dessous pour faire un matelas sommaire, et une autre, blanche, au dessus pour se couvrir, ainsi que la caisse de matérias devant la malle –bon sang, pourquoi ne l'avait-il pas laissée au café, celle-là ?! Ca aurait évité beaucoup de soucis par la suite !- présents à proximité du lit de camp.
Il ne lui faisait même pas suffisamment confiance pour lui révéler qu'il était malade. Bon sang, elle ne l'aurait jamais flanqué à la porte ! Elle aurait tâché de l'aider du mieux qu'elle le pouvait, tout comme lui aidait Denzel, l'enfant évanoui suite à une crise de géostigmates qu'il avait trouvé près de l'église d'Aérith, et qu'ils avaient recueilli dans le bar !
Elle serra les dents. Que Titan lui en soit témoin, le dieu des artistes martiaux selon son maître feu Zangan, parfois, il y avait des claques qui se perdaient avec l'ex-SOLDIER … Non, pardon … souvent ! Et dire qu'elle l'aimait … enfin, autrefois. Depuis la rencontre avec Loz, elle n'en était plus aussi sûre … Encore un autre doute que cet affrontement lui avait apporté. Pourtant, elle n'en voulait pas à l'argenté de lui en apporter. Même s'il ne devait pas connaître sa situation, il lui avait ouvert les yeux sur la vie qu'elle menait, emplie de questions, d'incertitudes …
Il lui avait déchiré le voile de l'illusion qu'elle s'infligeait : une vie tranquille et heureuse avec Cloud. Un doux rêve qu'elle possédait depuis son adolescence, lorsque son ami d'enfance était partit pour Midgar dans le but de devenir un SOLDIER aussi célèbre que Sephiroth, alors général à ce moment-là suite à ses exploits à Wutaï. Mais l'enfant, l'adolescente en elle avait grandi trop vite, à cause du drame de Nibelheim, lorsque le héros de la Shinra devint fou. Contrairement à son compagnon. Il restait trop ancré dans le passé. Il fallait presque toujours qu'elle lui rappelle ses livraisons à tel ou tel endroit, ou qu'il manquait telle ou telle chose …
Parfois, elle le surprenait, le regard dans le vague, à contempler la statue d'ange perchée sur une poutre enjambant deux bâtiments, à proximité de chez eux, censée représenter la déesse Minerva, Gardienne de la rivière de la vie. Mais Tifa doutait qu'il pensait à la divinité, qu'il n'avait, d'ailleurs, jamais rencontré. Il songeait certainement davantage à Aérith, bien qu'il savait à présent qu'il n'était pas le véritable amour de la Cetra, depuis qu'il avait récupéré sa mémoire. Malgré les promesses du jeune homme de s'occuper à présent davantage de sa famille, la barmaid voyait toujours aussi peu son guerrier.
Elle soupira, puis baissa la tête en se mordillant la lèvre inférieure pour dissimuler ses yeux embrouillés de larmes de détresse. De désespoir. Quatre années … Ca faisait quatre putain d'années qu'elle vivait avec Cloud, et c'était comme si elle vivait seule. L'homme ne voulait pas s'impliquer dans l'éducation des enfants, hormis pour le combat. D'accord, Marlène et Denzel devaient savoir se défendre en cas d'attaque de monstres –qui devenaient plus nombreux six mois après la période nuptiale et de reproduction-, mais merde, quoi ! Pour la partie conjugale, c'était comme si c'était une corvée pour lui de dormir avec elle !
A l'origine, ils faisaient chambre à part depuis la crise du Météore, mais ils avaient ensuite investi dans un lit double après celle d'Oméga, persuadés que la Planète n'avait plus rien à craindre, à présent. Bien entendu, à ces périodes-là, Cloud ne se sentait pas prêt à avoir un enfant, à la grande peine de Tifa, qui voulait être mère. Et chaque fois qu'elle l'embrassait ou qu'elle le caressait –elle n'était pas du genre à lui sauter dessus direct pour une partie de jambes en l'air-, le jeune homme l'arrêtait et lui disait qu'il n'était pas prêt en détournant le regard, preuve de sa lâcheté. Il ne voulait sûrement pas lui avouer qu'il pensait plus à Aérith qu'à elle.
La barmaid n'était pas idiote, loin de là. Si ça continuait ainsi, elle allait passer le restant de sa vie à côté d'un nostalgique qui refusait d'avancer, et elle allait devenir aussi dépressive que lui. Elle serra les dents et essuya rageusement ces larmes traîtresses qui commençaient à dévaler son beau visage en amande du revers de la main. Il n'en était pas question ! Elle avait sa fierté, bordel ! Quelque part, elle regrettait que Loz soit mort. Il était un ennemi, certes, mais la famille avait l'air sacrément importante pour lui.
D'après Marlène, les Incarnés s'étaient bien occupés d'elle et des orphelins qu'ils avaient « kidnappés ». Ils leurs avaient donné à manger, et les avaient écartés, sûrement d'une impulsion mentale, lorsque la moto de Cloud, qui s'était renversée, avait déboulé vers les petits, pourtant sous hypnose à l'aide des cellules de Jenova que Kadaj –le chef du trio- avait déversé dans le lac où reposait Aérith. Le plus fort du trio d'argentés avait arrêté le véhicule d'une simple pression du pied, d'ailleurs.
Les orphelins n'étaient pas les enfants de la fratrie, pourtant, cela prouvait quelque chose aux yeux de Tifa : Même les suppôts de Jenova et de Sephiroth étaient capables d'agir bien plus humainement qu'elle et Cloud. Ils pouvaient être une bien meilleure famille qu'eux.
« Si seulement Loz était encore en vie … » songea-t-elle, le regard brun attristé. « Je suis sûre qu'il ferait un bien meilleur père que Cloud. »
Mais il était mort … Il s'était suicidé avec son frère, Yazoo, au sommet de la Tour Shinra, en activant toutes les matérias qu'ils possédaient en même temps pour provoquer une explosion mortelle, dans l'espoir d'emporter celui qui avait tué leur petit frère, Kadaj, avec eux. Celui qu'ils prenaient pour leur grand frère.
Cloud.
Cloud, qui n'avait rien compris.
Cloud, qui n'avait pas compris le désir du trio, aveuglé par le passé.
Elle serra les dents.
Il était hors de question qu'elle vive ainsi.
Il revenait –normalement- dans trois jours.
Le soir du quatrième jour, où il se reposerait inévitablement, elle allait exposer ses quatre vérités à celui qui prétendait l'aimer, et tant pis si ça ne lui plaisait pas !
Elle ne serait jamais une femme soumise, comme Shera avec Cid, morte des géostigmates.
Jamais.
Cette simple pensée lui faisait horreur.
Elle était faite pour le combat, occasionnellement pour servir les clients, mais plus que tout, elle voulait une famille sur qui compter.
Qui l'épaulerait.
Qui la soutiendrait, peu importait ses choix.
Qui lui accorderait sa liberté, lui permettrait de s'épanouir en tant que femme et en tant que mère.
« Oh, Minerva toute miséricordieuse, donne-moi le courage de parler à Cloud … » songea-t-elle en fixant la statue à l'extérieur avec espoir.
1) « Anton »: Prénom que je donne à l'ancien Président de la Shinra, non officiel, donc vous pouvez le prendre si vous voulez.
2) « une femme qui se prostituerait pour maintenir à flot son Septième Ciel » : Cas que je rencontre souvent dans les hentaïs que je vois (ou que je lis quand j'ai la chance de voir que c'est traduit) sur elle, quand elle ne fait pas ça avec Cornéo … Y a des jours, je me demande ce qu'ont les mecs dans la tête … Je veux bien que la vie ne soit pas facile dans FFVII, mais je vois mal Tifa faire ça :/.
3) « Ce vieux pervers libidineux était encore en vie » : Dans la nouvelle « The kids are alright » (de Kazushige Nojima et illustré par Shou Tajima, pas sorti en France aux dernières nouvelles), qui prend place un peu avant les événements d'ACC et qui parle des Turks, le héros de la nouvelle, Evan Townshend, un détective privé, vient voir Cornéo pour avoir du carburant.
4) Hespérides : Nom que je donne aux fleurs d'Aérith.
