Prologue : La Fin
La chambre était blanche. Le sol était blanc, les murs étaient blancs, le plafond était blanc, les rideaux et les draps étaient blanc… Tout était si immaculé que la moindre tâche de couleur surprise pouvait faire mal aux yeux. C'est d'ailleurs l'effet que lui faisait la télé allumée quand elle détournait les yeux. Cet environnement la tuait plus que sa fichue maladie. « Leucémie », phase terminale, appelée aussi « cancer du sang ». En plus de vous tuer douloureusement en plusieurs mois, elle donnait l'immense plaisir de faire tester le teint « somnifère » à son propriétaire. Comparaison plutôt ironique, sachant qu'elle se dirigeait vers le sommeil éternel. Remarque, si ce n'était que cela, elle pouvait vivre avec une allure de vampire sans problème. Non, pour donner un peu plus de piment à la situation, il fallait aussi atrophier chacun de ses muscles et lui faire perdre sa mélanine. Cela donnait des cheveux et des iris tellement ternes qu'on la croirait morte avant l'heure. Pourtant, sa chevelure avait toujours eut du mérite avant. Maintenant, tout était caché sous une bouteille de teinture noire. Un caprice avant sa fin, avait-elle dit.
Une infirmière vint éteindre l'écran en annonçant le couvre-feu. Peu importait à Altaïr, elle n'avait pas l'impression d'avoir l'énergie pour tenir éveillé plus longtemps. Et puis, ses rêves, ces temps-ci, avaient un certain charme. Elle faisait toujours les mêmes, en deux temps.
Le premier, elle était au sommet d'une tour ou d'une péninsule. Cela pouvait être face à de grandes plaines, la mer ou même une vallée somptueuse. Elle restait à contempler l'horizon longtemps, mais elle ne saurait déterminer exactement combien de temps. Puis, à partir d'un moment, elle se retournait complètement pour faire face à un groupe armé. Il différait tout le temps. Des fois se trouvait de grandes êtres élancés, d'autre fois des petits guerriers. Quoi qu'ils étaient, elle était toujours surprise par leur présence et glissait de son piédestal vers le vide. Il lui semblait cependant que chaque nuit faisant, ils mettaient moins de temps avant de tenter de l'attraper. C'est après cette descente dont elle n'avait jamais connu la fin que la seconde partie de son rêve débutait. La plus plaisante, elle devait l'avouer. Il y avait un homme, dans une salle baignée d'une très forte lumière blanche. Elle ne pouvait s'approcher de lui pour voir son visage. Même s'il n'était que le fruit de son imagination, elle se prenait à vouloir parler plus en profondeur avec cet inconnu. Au début, à leur première rencontre, ils n'avaient rien pu se dire. Puis, après plusieurs essais, ils comprirent bien le fonctionnement de cet entretien. Il ne pouvait poser que trois questions, auxquels elle ne pouvait répondre que par un mot. Quelle sacré tordue elle était pour inventer des règles pareilles. Il réfléchissait toujours avec soin avant de parler d'une voix grave résonnant inlassablement dans cette immense pièce. Pour lui, elle mettait autant de sérieux à lui répondre :
-Comment avez-vous commencé à tester ce lien psychique ?
-Maladie, dit-elle après une seconde de réflexion.
-Comment vous sentez-vous ?
-Épuisée.
-Comment puis-je vous retrouver ?
Elle ignorait ce que cela signifiait. C'était toujours cette même question qu'il posait en dernier, avec tristesse, et cela depuis plusieurs nuits déjà. Elle n'avait jamais trouvé la bonne réponse qu'il attendait. Cette fois, s'amusant à l'idée qu'un prince charmant existe, elle lui dit le premier mot qui pour elle la définissait physiquement :
-Rouge.
Le dernier mot fut échangé et elle se réveilla un nouvelle fois dans l'horrible prison de santé. Une infirmière était déjà dans sa chambre à papoter comme quoi un visiteur était arrivé pour elle. Elle rit intérieurement en pensant à son ami imaginaire. Dommage, ce n'était que son frère grognon, mais loyal et gentil. Il ne lui ressemblait absolument pas avec son mètre quatre-vingt cinq, ses larges épaules et son léger ventre rebondit. Néanmoins, l'état déplorable d'Altaïr n'aidait pas non plus à l'identification. Quand il arrivait, c'était toujours avec un air énervé, pestant contre tous les médecins et les « pseudo » scientifiques ne pouvant rien faire pour sa petite sœur. C'était lui qui était à l'origine de l'idée d'appeler sa maladie génétique un simple cancer dans le but que ces docteurs se penchent enfin sur son cas. Stupidité qu'était cette maladie inconnue qui avait apparemment du mal à supporter tous les gaz de l'air vicié de cette planète. Elle était obligée de porter à chaque minute un masque à oxygène qui l'empêchait de parler et manger normalement. Autant placer une étiquette « Pas sa place dans ce monde » sur son front.
Steven, car c'était ainsi que son frère s'appeler, resta toute la journée à faire la conversation tout seul, mettant un point d'honneur à ne pas avoir l'air affecté, ni faire référence, à l'état de l'alitée. Les heures défilèrent plus en sa présence, c'était un maigre soulagement. Et quand venait le moment de partir, il embrassait son front en lui déclarant revenir le lendemain. Une sorte de rituel qui le rassurait plus lui qu'elle. Ce n'était pas par méchanceté qu'il faisait volontairement abstraction des larmes de peur qui perlaient sur le coin des yeux de sa sœur. Elle savait que s'il s'arrêtait sur son visage terrifié, il ne pourrait plus cacher le sien derrière un masque d'assurance.
Plus fatiguée que jamais, elle s'endormit bien avant que l'infirmière n'arrive. Le rêve s'était inversé ce soir là. Elle commençait dans la pièce éclairée au lieu des sommets. L'homme était bien là, cette fois encore. Il ne semblait pas plus surpris que cela, il ne devait pas être affecté par ce changement. Il lui posa rapidement sa première question :
-Auriez-vous un lieu précis à m'indiquer ?
Elle aurait voulu répondre quelque chose comme « Hôpital » ou « Capital », mais un brusque mal de tête l'en empêcha. Sa respiration se bloqua, elle cria on s'effondrant sur le sol. Faisait-elle une attaque pendant son sommeil ? Fourberies que voilà ! Elle aura été perverse
jusqu'au bout cette maladie. Son corps se comprimait lentement, comme attaqué par la pression de l'air. En face d'elle, l'ombre de l'homme s'agitait, semblant vouloir traverser ce mur de brume lumineuse promptement. Une métaphore sans doute de la vie voulant la retenir près d'elle. La souffrance lui faisait perdre conscience. Elle eut la chance avant sa mort d'apprendre que la vie des gens défiler vraiment devant leurs yeux en quelques secondes. Les larmes coulèrent abondamment sur joues en pensant à ses nombreux souvenirs heureux avec cette famille qu'elle aurait voulu connaître plus. Ses parents, ses frères et sœurs, Steven et ses amis à l'école. Elle était terrifiée par la mort, même après avoir enduré autant de douleurs. « Je veux pas mourir… », chuchota-t-elle faiblement sans savoir si quelqu'un l'entendrait. Ses yeux s'assombrirent et son corps fut tiré en avant. Son dernier souffle fut le soulagement de s'être débarrassé de tous ses maux et d'être enfin paix. Enfin, l'avait-elle cru sur le moment.
Oui, on s'amuse beaucoup dans ce prologue. Vous voulez encore plus bader? Lisez-le en écoutant "Anna Blue - Every time the rain comes down". C'est sur ça que je l'ai écrit, j'adore les trucs tragique c'est chaud! :p
Sur ce, je termine d'écrire le premier chapitre et je vous le poste dans pas longtemps, promis!
Esmeyralda
