Comment ne pas tomber raide dingue d'Alec et d'Ellie en regardant Broadchurch ? Et quoi de mieux qu'une bonne fanfiction en attendant patiemment la saison 3 ?
C'est en lisant en anglais que j'ai choisi de traduire une de celles d'Hazelmist, "When the Storm Breaks" que je trouve brillante. Voici donc son histoire en français. J'espère qu'elle vous plaira et vous fera autant voyager qu'Hazelmist l'a fait pour moi !

L'histoire se déroule après la fin de la saison 1.


La tempête avait éclaté peu de temps avant leur première rencontre, mais elle menaçait Broadchurch depuis plusieurs mois déjà.

Ellie Miller répugnait Alec Hardy avant même de le rencontrer sur la plage en ce jour tragique. Il lui avait volé sa foutue promotion. Bien sûr qu'elle le détestait. Alec Hardy ne tomba pas sous son charme non plus. Il désirait plus que tout la paix, le silence et la solitude, au lieu de quoi il était examiné, harcelé et étouffé par ce petit lieutenant de campagne, si entêté à prouver l'innocence de son petit village qu'elle pouvait foutre en l'air toute son enquête avant de l'avoir commencée.

Leur différence était telle qu'avoir réussi à travailler ensemble toute la première semaine constituait un vrai petit miracle. Il la trouvait bien trop chaleureuse, naïve et têtue, il lui paraissait froid, acerbe et distant. Il l'énervait, elle l'agaçait. Mais ils étaient portés par le même besoin désespéré de résoudre l'enquête, d'attraper l'enfoiré qui avait tué Danny Latimer. Elle avait connu ce garçon et s'y était attachée. Lui devait racheter sa conscience avant sa propre fin. En quelque sorte réunis par leur désir mutuel de rétablir la justice à n'importe quel prix, elle apprenait à se taire et à reconnaître les plus sombres aspects de l'humanité et il commençait à l'écouter en lui confiant peu à peu le poids qu'il portait sur les épaules. Petit à petit, l'hostilité qu'ils éprouvaient chacun à l'égard de l'autre se transforma en tolérance, respect, et peut-être même en confiance fragile.

59 jours plus tard, la tempête qui déchirait le village paisible emporta sa dernière victime, alors que le tueur épuisé fut rattrapé par sa propre conscience, et sortit de l'ombre pour tout avouer à Alec.

L'affaire classée, Alec pouvait enfin tourner la page. Son cœur devait pouvoir s'apaiser, maintenant que sa pénitence s'achevait. Il avait perdu son boulot et presque sacrifié sa vie dans toute cette histoire qui se terminait enfin. Il avait su, au moment où il avait examiné le corps de Danny sur la plage, qu'il donnerait tout ce qu'il lui restait pour élucider cette affaire. Mais il n'avait pas imaginé toute la douleur que ce crime pouvait engendrer, ni même pouvoir encore y perdre une partie de lui-même.

Annoncer la nouvelle à Ellie fut un véritable coup de poignard. Elle avait travaillé si dur et avait tant accompli, quand bien même le tueur au sang-froid dormait dans son lit. Si Hardy avait déjà réfléchi à sa propre chute, Ellie, elle, n'en avait eu jusqu'alors aucune raison. En quelques minutes, son mari fut accusé et éloigné pour toujours, son cœur broyé, sa famille brisée. Tout le village qui la connaissait, l'appréciait, toute cette foutu communauté qu'elle avait défendu si ardemment contre les accusations d'Hardy et contre le tueur qui logeait sous son toit lui tourna soudainement et définitivement le dos. Tout son monde fut balayé par trois mots révélateurs.

« C'était Joe »

Elle s'effondra sur place, dans la salle d'interrogatoire et Alec impuissant sut qu'aucun de ses mots ni de ses paroles ne pourrait la reconstruire. Ce qui le rendait fou.

L'ouragan du meurtre de Danny Latimer avait menacé de démolir la petite communauté de Broadchurch, mais de loin, Alec observait le village entier se réunir sur la plage et panser ses blessures. Ils se tenaient la main dans la douleur, côte à côte, allumant des feux et commémorant la vie d'un des leurs. Alec savait que malgré la peine, Broadchurch se relèverait et continuerait la route, peut-être plus forts encore et plus soudés que jamais. Il les détestait un peu pour ça, car Ellie ne les rejoindrait jamais.

L'orage éclata, et Alec accusa le contrecoup, à la dérive, encore une fois hors des sentiers battus. Cette fois Ellie était avec lui, abandonnée, dévastée et tellement seule. Il savait qu'elle ne pouvait pas regarder le passé, trop douloureux. Il était incapable de soutenir son regard car il y reconnaissait cet orage frémissant, la colère face à la trahison de son mari qui grondait encore en elle. Il ne supportait pas d'y être confronté. Car un jour, il ne serait plus là et elle ne trouverait plus qu'elle à blâmer. Il détestait la voir si vide, si isolée, si… semblable à lui-même.

Assise sur le banc, elle affirmait qu'elle s'en sortirait, donnerait aux garçons un nouveau départ. Il savait qu'elle se battrait comme une lionne pour le bien de ses enfants et réalisa alors combien il l'avait sous-estimée lors de leur première rencontre. Elle pouvait encaisser bien plus qu'il ne pouvait l'imaginer. Il se l'avoua tout bas : seule Ellie pouvait surmonter tout cela.

Quand il se tourna finalement vers elle, elle était perdue, hésitante, reconsidérant tout ce qu'elle voulait laisser derrière elle.

« On ne peut jamais revenir en arrière », chuchota-t-elle hébétée et sa voix se brisa. Elle porta ses mains à sa bouche, mais ne put retenir les sanglots plus longtemps. Elle était à des milliers de kilomètres de lui, prise dans un enfer qu'elle allait vivre encore longtemps. Elle ne semblait pas consciente de sa présence sur le banc à ses côtés… il aurait probablement dû la laisser seule à sa peine. Mais il restait.

Elle le détestait probablement, et peut-être pour de bonnes raisons. Il s'approcha tout de même un peu plus près d'elle, sur ce banc. Elle sursauta quand son épaule frôla la sienne, mais il se rapprocha davantage. Elle se déchaîna contre lui, l'insulta de tous les noms. C'était la dernière fois qu'ils se voyaient, il le savait. Peut-être lui en voulait-elle réellement, pour maintes raisons fondées. Mais quand elle s'écroula contre lui, et l'entraîna avec elle dans une terrifiante chute opaque, il sut que ses cris ne lui étaient pas adressés. Il était, finalement, le seul repère qu'il lui restait.

Il put alors deviner toute sa douleur, tant physique que mentale. Il sentit ses ongles accrochés à son manteau, déchirant les coutures alors qu'elle s'agrippait à lui. Ses larmes étaient si chaudes qu'elles lui brûlaient la peau. Chacun de ses sanglots l'écorchait à vif. Il savait désormais qu'Ellie Miller n'était pas qu'un simple morceau de bois flotté charrié par la tempête, ramené sur la côte. Elle y était encore piégée. Tout comme lui.

Il la serra un peu plus fort, pour essayer d'en échapper ensemble.

Il ne sut pas quand elle s'endormit sur son épaule, vidée de toutes ses larmes. Mais il se souvint avoir caressé son visage et senti ses doigts mouillés, salés de larmes qui auraient pu être les siennes. Epuisé, il s'adossa au dossier du banc, remarquant pour la première fois les éclaircies qui traversaient le ciel. Frissonnant, il se blottit un peu plus près d'elle à la recherche de sa chaleur, avant de fermer ses propres yeux, occultant les étoiles au-dessus de sa tête.

Il rouvrit les yeux à la lumière d'un nouveau jour pointant après la nuit sombre. De là où il était, il pouvait entendre le roulement lointain des vagues. La mer était plus calme ce jour-là, et alors que les feux s'étaient éteints quelques heures auparavant, l'odeur de la fumée flottait encore dans l'air. Tout comme la mort de Danny maintenant que l'enquête était bouclée.

« Dites-moi que c'était un cauchemar »

Elle était recroquevillée contre lui et il aurait sincèrement voulu confirmer son souhait. Mais il ne le pouvait et ne le pourrait jamais.

« Je suis désolé », soupira-t-il.

Le visage d'Ellie s'assombrit alors que son dernier espoir disparaissait, et il songea encore une fois à tout ce qu'il ne soupçonnait plus pouvoir perdre. Il se conforta, se promettant que même si la tempête était loin d'être terminée pour elle, elle n'aurait pas à l'essuyer seule. Il s'en assurerait.

« Venez », dit-il en lui secouant doucement le bras. Il se leva et lui tendit la main. Elle la prit sans réfléchir, s'appuyant dessus pour se redresser.

Ils prirent leurs cafés ensemble, en regardant le petit village endormi. Elle fut une nouvelle fois happée par ses souvenirs.

« Je ne sais plus quoi faire, après toute cette histoire », admit-elle impuissante.

« Aucun d'entre nous ne le sait », acquiesça-t-il en mentant. Il savait une chose : il la suivrait. Sa décision était prise, il l'accompagnerait, peu importe où, jusqu'à ce qu'il soit certain qu'Ellie soit en paix, l'orage derrière elle.