1) L'exploration

C'était l'été sur le sol sacré d'Athéna, le temps d'étude était fini, trois jeunes gaillards d'environs six ans, se dirigèrent vers l'une des clairières.

– Nous devons choisir un chef, mes frères ! Annonça le roux.
– Moi, je suis de la famille d'Aiolios qui pourrait être le prochain Grand Pope. J'ai la naissance et la force pour être un meneur !
– Toi, tu n'es qu'un petit coq ! Tu n'es même pas plus fort que moi d'ailleurs et c'est moi qui ai le caractère pour l'autorité ! Tu piges ?
– Petit coq ? Tu vas voir Milo, j'vais te montrer !

Face à face, ils commençaient à se siffler des insultes pour finalement en venir aux mains. En s'empoignant, ils se firent tomber dans une poussière de terre qui explosait autour d'eux, ils se cognèrent alors si durement, que l'aîné dut les séparer.

– Ça suffit les deux andouilles ! Leur ordonna le français. Je suis le plus vieux, c'est donc moi qui le serait. Après tout, je suis remarquable !

– Patriarche ! S'écria Milo.

C'est à ce moment-là qu'ils entendirent du bruit venant de derrière les buissons.
– Silence, les hommes ! C'est donc bien entendu, c'est moi qui commande !

Après quelques nouvelles bousculades et lamentations, sans grande conviction le marché fut conclu et Camus fut élu.

Pendant ce temps-là, le vacarme d'à côté continuait.
– Attention, écoutez ! Leur fit-il en chuchotant, montrant l'une de ses oreilles. Nous sommes peut-être espionnés...
– On attaque chef ? Demanda Milo.
– Mais qui ? Enchaîna Aiolia.
– Tu es un nigaud ou quoi ? Ceux qui sont derrière les plantes !
– Taisez-vous ! C'est moi qui dit ! S'énerva le chef.

"On y va, les gars !" Ordonna t-il.

Sans faire le moindre bruit, se collant aux arbres, devenant des ombres, ils se faufilèrent entre les feuillages d'une végétation touffue pour se retrouver face à la cascade d'une source de l'une des rivières du Sanctuaire.

Trois paires d'yeux se glissèrent parmi la broussaille verte pour épier l'ennemi potentiel de leur royaume. Voyant leurs adversaires, ils se frottèrent les yeux, encore et encore.

– C'est des filles ! Dit Aiolia n'y croyant pas.
– Elles ne portent même pas de blouse ! Constata Milo.
– Fais voir ! Le poussa Camus... t'as raison, elles se baignent en plus, quelle chance !
– On y va ? Demanda Milo.
– J'ai pas mon maillot. Répondit tristement Aiolia.
– On n'en a pas besoin !
– Moi, j'ose pas ! Leur avoua Camus.
– Regardez ! Elles n'ont rien qui pend. Remarqua curieusement Aiolia.
Milo et Camus le contemplèrent surpris, comme s'il venait pour la première fois d'ouvrir la bouche parlant une autre langue.

– Tu ne le savais pas ? Lui demanda Milo gêné en riant.

Aiolia voulut répondre mais, il n'en eut pas le temps, car à cet instant-là, les copines se retournèrent vers eux mais ne les virent pas. Elles sortirent de l'eau une par une, se rhabillèrent pour se frayer un chemin dans la brousse verdâtre, sans apercevoir le petit monde de Camus.

Il les appela d'un signe et les informa:
– Nous allons les suivre !
La troupe se mit en marche en plongeant dans les branchages, le parfait camouflage pour ne pas être aperçus.
– Aïe !
– Chut, Aiolia ! Tu vas nous faire repérer ! Souffla Milo.
– C'est pas ma faute si cet endroit est rempli de ronces !
– Je te jure que tu vas le payer si elles nous entendent. Le prévint-il.
– Vite, ou on va les perdre ! Conclut Camus.

Les poursuivant dans leur exploration, les garçons avaient le visage rempli d'aventure, jusqu'au moment où leurs traits se figèrent. Camus n'y croyait pas, ça ne pouvait être qu'un mirage !

– Elles ont une cabane ? Les filles ont une cabane !

"Waow" firent les deux autres, admiratifs.

Devant eux se dressait une maison née des racines et des tiges allongées des branches de deux arbres, aux troncs minces dont le plafond était lui voûté d'une division de la ramification qui était recouverte de feuilles, les protégeant ainsi de la pluie.

Les garçons curieux longeaient l'édifice féerique pour découvrir un sol de couleur blanc rosé, tapissé de vieux tissus et des pétales qui tournoyaient dans l'air pour le joncher, le rendant doux au toucher des petits pieds.

Investigateurs, ils s'approchèrent pour entrevoir une fille aux cheveux courts bouclés se penchant pour ouvrir une trappe.

Camus était étonné, il ne savait pas s'il devait l'être agréablement ou pas.
– Comment ! Elles ont une cachette ! Non mais, en plus de ça, elles ont une cachette ! C'est tout de même de la provocation. Dites ce que vous voulez, c'est de la provocation !
– C'en n'est pas une chef ! C'est un garde-manger ! Découvrit Aiolia.
– J'ai faim ! Déplora Milo.

Les filles avaient réussi à creuser un trou pour cacher leurs provisions, qui était recouvert par un fin panneau de bois qui se trouvait discrètement sous l'étoffe de leur plancher. Elle sortit un butin du terrier secret: un sac rempli de fruits et de quelques confiseries.

Les garçons reculèrent pour mieux se parler à voix basse.
– J'ai faim ! Répéta Milo.
– Tu vas nous le dire combien de fois ? Lui demanda Camus.
– Et si on allait se présenter ? Proposa Aiolia.
– Se présenter ? Se présenter ! Fantastique ! "Bonjour, nous sommes des copains et nous voudrions vos bonbons!" Mais, je suis flanqué de deux simplets ou quoi ! S'énerva le roux. Et puis, après tout, pourquoi pas ? Faire un échange. Deux d'entre elles, même une, contre vous deux, et je serais gagnant !
– Hein ! Mais, t'as pas à nous parler comme ça ! S'irrita Milo.
– Je parle comme je veux ! Si vous en avez le courage, nous allons réquisitionner leur cahute !
– Réqui... qui... quoi ?

Camus n'en pouvait plus, il se cacha la tête entre les mains pour répondre.
– Confisquer, Milo ! Confisquer.
– C'est peut être des Amazones ! S'interrogea Aiolia.
– Pas possible ! Elles ont des seins et tout le monde sait qu'elles n'en gardaient qu'un ! Elles, les filles là-bas, elles en avaient deux. Tu comprends ?
– Beh ouais. Et comment tu sais ça ? Et où tu as vu ça, toi ?

Milo, fièrement, se grattant les ongles sur son petit torse lui répondit.
– Un, j'ai vu des livres sur les Amazones dans la bibliothèque du Grand Pope. J'ai même montré les illustrations à Camus, eh bien, dans certains livres, les filles ont deux seins tandis que dans celui de ces guerrières, elles n'en n'avaient plus qu'un pour mieux tirer à l'arc !
Deux, il n'y a pas une demi-heure de ça que nous les avons vues nues dans l'eau et puis tu n'es qu'un bêta, tu n'as qu'à regarder leurs hauts, on dirait qu'elles ont deux bouts de citrons qui y pendent.
– Je suis pas un bêta, espèce de noix ! Mais j'avoue, j'avais pas regardé, moi ! Enchaîna Aiolia se grattant la tête.
– Tu regardes jamais rien !
– C'est vrai, il a raison, on dirait des citrons. Trancha Camus... Bon, bon, bon . Fit-il en se passant la main sur le front. Pensons moins aux filles et plus à leurs sucreries ! De la retenue s'il vous plaît ! Il nous faut un plan !
– Quel plan ? Comme il n'y a qu'une entrée, pour la discrétion c'est loupé, je pense qu'il faut y aller en courant et leur faire peur.
– Aiolia ! Tu veux faire peur à des filles ? tonna Camus.
– C'est pas ce que je préfère mais on n'a pas d'autre choix, puisque tu n'oses pas aller te montrer à elles... Lui répondit-il.
– Franchement, s'annoncer ça ne se fait pas comme une odyssée. On est en expédition, les mecs !
Se tapant un poing dans une main, le chef continua en leur criant.
– Du nerf ! Les gars ! Quand je dis "à l'attaque" on y va.

"On y vaaaaa" s'écria Aiolia en galopant à toute vitesse.

– Mais, c'est pas ce que j'avais dit ! C'est pas ce que j'avais dit ! Se lamenta Camus.

N'ayant plus le choix, les deux derniers partirent retrouver leur ami en chemin. Ils marchaient alors le long de la cloison en la rasant le plus près possible, pour n'être ni vus ni entendus. Camus fit signe à ses éclaireurs de se placer des deux côtés de la porte, une fois les donzelles chassées, le chef ferait lui son entrée triomphante dans leur baraque.