FAIS-MOI SAIGNER PART 1


Un jeune garçon était allongé sur le côté, dans un lit aux couvertures blanches. Il fixait la lune à travers la grande fenêtre de sa chambre, recroquevillé en petite boule. Il était soulagé d'être là, emmitouflé dans ses doudous, le corps et l'âme en paix, au chaud contre lui-même. Ce soir il n'avait pas besoin de donner son corps à des étrangers pour pouvoir manger, et c'était ça qui le soulageait.

Depuis que son salopard de frère l'avait laissé en prenant tout l'argent, sa vie était devenue un enfer. Heureusement qu'il lui avait au moins laissé la maison, sinon, il aurait dix-sept ans et déjà il serait à la rue. Mais ce n'était pas mieux, il le savait. Il devait manger, s'habiller…Et tout ça n'était pas gratuit, dans cette grande ville. Il allait à l'école, il avait besoin du matériel nécessaire…

…L'école… Plus rien n'était comme avant. Il ne savait même plus ce qui le soutenait, ce qui le retenait à continuer d'aller à l'école, sachant que le soir, au lieu d'étudier, au lieu de travailler, au lieu de se retrouver entre amis comme les autres adolescents de son âge, lui, il allait dans ce foutu bar pour se faire de l'argent d'une façon horrible. C'était le seul moyen qu'il avait pour gagner assez et pouvoir continuer de vivre normalement, sans qu'on ne se doute qu'il n'était encore un enfant et que déjà on lui avait volé sa virginité.

Sasuke Uchiha était un jeune garçon normal, du moins, le jour. Il était même populaire à son école. Tout le monde voulait être comme lui – beau, talentueux – et tout le monde l'admirait. Pourtant, lui il savait que ces pauvres crétins n'avaient rien du tout à lui envié. Il n'était qu'un prostitué délaissé par son propre frère! Au collège, toutes les filles lui courraient après, voulaient qu'on les voit accrochées à son bras, et tout les gars étaient jaloux. Tout les gars... c'était vite parler. Il y en avait quand même quelques uns qui étaient sympa et qu'il considérait comme ses amis.

Ce fut l'air glacial d'un matin d'octobre qui réveilla le jeune ténébreux le lendemain matin. La nuit dernière, il avait du ouvert la fenêtre parce qu'il avait l'impression d'étouffer. Il se leva d'un pas endormis et ferma la fenêtre avant que sa maison ne se transforme en calotte glacière. Vêtu d'un léger pyjama, c'est-à-dire un pantalon sport et rien au dessus, il passa devant la salle de bain, se dit qu'il était trop fatigué pour prendre une douche, puis descendit au rez-de-chaussée. Sa maison était si immense que parfois il se demandait ce qu'il faisait dedans. Lui, si petit dans ce si grand manoir. Il était terriblement seul et même s'il avait quelques amis, jamais il n'invitait qui que ce soit.

Lorsque son pied toucha la dernière marche de l'escalier, il lâcha un profond soupir et regarda encore une fois ce qu'il avait sous les yeux. Un grand salon, avec deux sofas placés devant un foyer. Des cadres reposaient sur les murs. Les photos étaient barbouillées au crayon de feutre noir. Sasuke leva ses yeux noirs charbons vers elles et émit un pauvre grognement qui se perdit dans sa gorge. Il se souvenait de quand il avait dessiné par-dessus ces photos-là. Il devait avoir quatorze ou quinze ans. Itachi, son grand-frère, l'avait abandonné en ne lui laissant que cette immense maison bourrée de souvenirs et de bons moments passés entre frère, de plus que c'était quelques semaines après le décès de leurs parents. Depuis ce jour-là, Sasuke était seul. Bon, il y avait le collège là où quelques amis lui étaient fidèle, et où toutes les filles semblaient prêtes à finir la soirée dans son lit, mais rien ne lui redonnerait sa famille, l'enfance heureuse qu'il avait connu à une époque, et ça…

Maintenant assis sur la dernière marche, Sasuke ne s'était pas rendu compte que, ce matin encore, cette nostalgie maladive avait eut raison de lui.

Derechef, il grogna et partit se faire quelque chose à manger. Son ventre criait famine mais les armoires étaient vides. Pas de céréales, pas de pain, pas de jus de fruit. Tout ce qu'il y avait, c'était une petite pomme qui semblait mûre, qui traînait au fond d'un tiroir du frigo. Sasuke la prit avec une grimace de dégoût, réalisant que les deux dernières semaines s'étaient écoulées beaucoup trop vite et que ce soir, il allait devoir se rendre , pour faire ça avec un autre inconnu et ainsi avoir de l'argent pour deux autres semaines.

Il se retint de taper sur le petit fruit et ainsi le faire éclater, et le passa doucement à l'eau. Il mangea cette délicieuse pomme et la dégusta jusqu'au noyau. Assis au bout de la longue table en bois d'ébène, il soupira. C'était ridicule, tout ça. Il se leva et regarda l'heure. Plus que quarante-cinq minutes et il serait à l'école, à écouter soit le discours ennuyant des profs ou les déclarations d'amours presque quotidiennes de toutes les filles de l'école. Enfin, pas d'Hinata. Cette fille était bien la seule à l'aimer comme il l'était : un garçon – un humain! – normal et non un dieu grecque! Elle était si différente des autres. Elle était sa meilleure amie, sa sœur de cœur. Mais, elle comme tout ses autres amis, ne savait pas qu'il… qu'il donnait son corps en échange de l'argent. C'était son secret à lui, et personne ne le saurait jamais.

Il pensa aux examens auxquels il n'avait pas étudier pendant qu'il s'habillait. Il mit un tee-shirt noir à manche longue, et un jeans noir. Le noir était sa couleur fétiche; discrète et passe partout. Il chaussa ses pieds de converses – toujours et encore noir – et redescendit prendre son sac et sa veste. La journée allait être longue, et ce soir il devait aller… . Quels genres d'hommes allaient y être cette fois? Des vieillards pervers qui lui feraient atrocement mal parce qu'ils seraient saouls, en plus de puer l'alcool? Il avait d'avance envie de vomir, mais il cessa d'y penser et ouvrit la porte, laissant le vent froid de l'automne ramener ses cheveux de jais vers l'arrière. Il mit ses écouteurs, mit son lecteur mp3 en marche.

Trente minutes et quelques chansons plus tard, il vit son collège se dresser lentement à l'horizon. Il s'approcha dans la cour et vit quelques visages qu'il connaissait vaguement. Il adresse un sourire ça et là, puis pénétra l'école. Il se rendit à sa case et la déverrouilla.

- Hé! Si ce n'est pas mon meilleur pote! Fit une voix.

Le jeune homme n'eut même pas besoin de se retourner, il continua de chercher ses cartables et livres, sachant que dans quelques secondes, il recevrait une tape amicale dans le dos.

Et voilà.

- Ça va, vieux?

Il se retourna pour croiser le regard de son meilleur ami : Kiba. Un garçon bruyant aux cheveux bruns. Il avait un visage aux traits fins, mais un sourire moqueur et hautain. Il se croyait supérieur à tous, y comprit les profs et les adultes. C'était sans doute pourquoi il était viré de l'école deux fois par mois, en moyenne. Sasuke sourit.

- Pas trop mal.

Son ami s'appuya sur la case voisine, regardant les passants autour pendant que Sasuke semblait chercher quelque chose. Kiba attendit, un immense sourire qui ne quitta pas son visage jusqu'à ce que Sasuke soit tout à lui.

Ils commencèrent à marcher vers leur premier cours.

- Alors! T'as fais quoi de beau pendant le week-end? Lança Kiba alors qu'ils s'installaient tout les deux à leur place habituelle.

Sasuke soupira et mit ses coudes sur la table de son compagnon – celle derrière la sienne. Dos à la fenêtre, il se pencha vers son ami qui en fit de même, ainsi ils pouvaient parler tranquillement jusqu'à l'arrivé des autres élèves et du prof. Sasuke n'eut à peine le temps de regarder un peu partout s'il ne verrait pas arriver Hinata que Kiba s'était déjà mis à lui raconter en détail son week-end. Il était, entre autre, allé à un party où il y avait beaucoup, beaucoup de filles. Kiba était un de ces gars qui ne parlent que de sexe et encore de sexe sans pourtant l'avoir déjà fait. Il parlait beaucoup mais il n'agissait pas beaucoup.

La petite Hinata finit par arriver. Elle n'était pas très grande, mais elle était vraiment très belle. De grands yeux blancs décoraient son visage d'ange et elle avait de longs cheveux noirs. Sa peau était aussi blanche que celle de Sasuke. Elle s'installa près de lui, et le cours débuta lorsque le prof fut arrivé.

- C'est partit pour une trois heures et quinze minutes d'ennui totale! S'écria silencieusement Kiba.

Sasuke étouffa un rire sans se retourner. Celui-là, il était irrécupérable.

Comme l'avait dit Kiba, trois heures et quinze minutes plus tard, la cloche sonna pour annoncer le second cours, et tout se passa exactement de la même manière. Les élèves vagabondaient dans les couloirs, attendant le son de la cloche pour retourner dans leurs locaux et ainsi attendre encore trois autres heures avant de pouvoir aller manger.

En compagnie de Kiba, Sasuke gagna les vestiaires. Le cours de gym était le cours le plus facile et relaxant : le prof les laissait toujours faire ce que bon leur semblait. Mais aujourd'hui, quelque chose n'allait pas. Lorsqu'il arriva aux vestiaires, Sasuke vit, au fond, près de la porte de la piscine, une foule de personne qui formait un cercle. Tout ce beau monde criait en balançant leur bras d'un côté et de l'autre, comme pour encourager quelqu'un.

- Encore une bagarre? Bon dieu! Ça ne finira jamais dans cet école, râla Kiba en se dirigeant vers les cabines, ignorant le vacarme que faisait ces élèves.

Mais Sasuke restait planté là, regardant la scène. Kiba revint sur ses pas et lui passa une main devant les yeux.

- Il y a quelqu'un là-dedans?

Sasuke secoua la tête et regarda brièvement son ami avant de reporter son attention sur la bagarre. Kiba soupira tandis que Sasuke avança et bouscula quelques élèves pour se frayer un chemin. Au milieu, un grand blond tabassait un pauvre gars déjà amoché. Sasuke le reconnut. Il ne se souvenait plus de son nom mais il savait que gars-là n'était pas apprécié du tout. Il était un profiteur qui se tapait une fille à chaque week-end, qui volait de l'argent, qui embêtait les plus jeunes dans les écoles primaires du quartier. Une brute que personne n'osait jamais régler le compte. Et là, aujourd'hui, il payait enfin pour tout le mal qu'il causait. C'était sans doute pourquoi tout le monde sifflait et criait. Mais ce blond… c'était qui? Sasuke fronça les sourcils et poussa un grand gars qui tentait de le bousculer. Il s'arrêta près des deux garçons. Le blond dominait la bataille. L'autre, par terre, gisait dans son sang, il fallait que ça arrête! Même si ce n'était pas le meilleur des gars, il ne méritait quand même pas ça!

Kiba, derrière, regarda la scène, attendant que son ami revienne. Il savait que si Sasuke s'en mêlait, la bataille s'arrêterait sur le champ. Sasuke était un élève assez populaire et respecté par presque tous, et quand il voulait quelque chose, il l'avait.

- Hey, toi là! Cria ce dernier à l'adresse du blond qui frappait sans retenue les côtes de sa victime avec l'un de ses pieds.

Dès que sa voix forte et autoritaire fut entendue, les cris cessèrent, les sifflements aussi. Le grand blond – jusque là inconnu par Sasuke – s'arrêta aussi et tourna la tête vers lui. Sasuke figea net. Ce regard. Ce n'était pas humain, ça! Ces yeux froids, sans émotions, presque sauvages. Jamais encore il n'avait vu un regard de ce genre, comme s'il allait sortir un revolver de nulle part et le tuer sur le champ. Mais oui, ce regard, il l'avait déjà vu. Sasuke fronça les sourcils, tandis que le blond le regardait encore. Méchant. Il semblait si méchant. Sasuke avait déjà vu cette fureur, cette envie de tuer… Il eut un désagréable frisson et se reprit, sachant que tous les élèves autour étaient toujours là, captivés par la scène. Il baissa la tête vers le garçon qui gisait au sol. Celui-ci semblait le remercier du regard, pendant ce temps où son agresseur ne le frappait plus.

- Dégage, dit simplement Sasuke avant de tourner les talons et de s'adresser maintenant à la foule. Il n'y a plus rien à voir, dégagez!

Les gardes de sécurité arrivèrent et emmenèrent le blond, tandis que sa victime fut emmenée à l'infirmerie. Des profs – qui avaient assistés au spectacle, impuissants – ordonnèrent aux élèves de se changer rapidement et de gagner le gymnase pour que les cours puissent commencer.

Sasuke rejoint vite son ami, qui attendait derrière, déjà prêt et habillé pour le cours de gym.

- C'était qui ce gars? Demanda-t-il.

Sasuke tenta d'oublier – tout en se changeant – cette lueur qu'il avait vue dans les yeux azurs du blond. Tant de haine et d'envie de sang. Il se souvenait du même regard dans les yeux de son frère, la nuit où il l'avait quitté. À nouveau, il frissonna.

- Ça doit être un nouveau… Je ne sais pas. Je ne l'ai jamais vu, en tout cas, répondit Sasuke en fourrant ses choses dans une case et en se dirigeant à pas rapides au gymnase.

Kiba le suivit sans broncher. Quand Sasuke faisait la tête comme ça, c'était que quelque chose l'agaçait. Mais quoi? Il se dit que ne pas l'embêter serait bien, pour le moment. Il le suivit jusqu'au cours de gym et le prof commença.

La journée prit fin assez vite. Sasuke était de plus en plus nerveux. Tellement qu'il en avait oublié l'incident de ce matin, dans les vestiaires. Il quitta le collège et ses amis pour retourner chez lui. Il devait se préparer pour quelqu'un qu'il ne connaissait pas encore. Pour le vieillard qui mettrait ses mains sur son corps.

Il soupira et ouvrit la porte de sa grande maison. Il était frigorifié et ça n'avait rien à voir avec la température. Son cœur battait la chamade, sa tête tournait. Il décida de se laisser tomber sur le sofa et d'attendre que ses étourdissements passent. Il plia les genoux contre son torse et cacha son visage dans ses mains.

Courage… Encore quelques mois et j'aurai mon diplôme… j'aurai un emploi et je n'aurai plus besoin de faire ça… pensa-t-il.

Un petit moment s'écoula ainsi, et il finit par prendre une douche bien fraîche. Il avait si faim que plus d'une fois il se tint le ventre, agenouillé dans la baignoire. Il en criait presque tellement cette vie était dure à mener, tellement il voudrait tout abandonner et se laisser mourir tranquillement. Mais il y avait ses amis qui tenaient à lui, et il savait ce que c'était que de souffrir, de perdre un être cher, et il ne voulait pas infliger cela à qui que ce soit. Puis il y avait son frère, à qui il ne ferait jamais le plaisir de céder. Il s'était promis de vivre jusqu'au jour où il le retrouverait pour lui demander pourquoi. Pourquoi lui?

Il sortit et s'habilla lentement, le corps tremblant et dégoulinant. Longtemps il fixa son reflet dans le miroir. Cheveux noirs, peau clair, yeux couleur charbon. Il se haïssait. Il se haïssait seulement parce qu'à chaque fois qu'il se regardait, il revoyait son frère. Il revoyait ce salaud qu'il, malgré lui, n'arrivait pas à haïr.

Son téléphone portable se mit à résonner alors qu'il descendait les escaliers. Il se dépêcha et réussit à répondre avant qu'il ne cesse de sonner. Il le porta à son oreille.

- Allô?

- Salut, vieux! Ça va?

Sasuke se dirigea vers la fenêtre et poussa le rideau pour regarder dehors. Le ciel noircissait. La nuit allait bientôt tombée. Non ça n'allait pas. Mais encore une fois, il mentit à son ami.

- Super.

- Dis moi, tu fais quelque chose de spécial ce soir?

Sasuke n'en revenait pas. Il lui demandait réellement de sortir, là? Un mince sourire prit possession de ses lèvres et il se laissa tomber sur une chaise de la cuisine.

- Je… Pourquoi?

- Bah, mon cousin nous invite à un party ce soir. Je n'ai pas envie d'y aller seul. Je ne connais pas vraiment les amis de mon cousin et bon… tu viens? On pourra se taper plein de belles filles! Qu'est-ce t'en dis, vieux?

Le jeune homme se pinça les lèvres et son sourire disparu lentement. Même s'il n'aimait pas la façon de penser de son ami – les filles n'étaient pas un divertissement! – il aurait tant voulu y aller pour ne serait-ce que s'amuser. Mais il allait bientôt tomber s'il ne mangeait pas et il devait à tout prix allé se chercher un peu d'argent.

Il regarda dehors à nouveau, l'air songeur. Il soupira et reprit la parole.

- Ce n'est pas l'envie qui manque. Je… je ne peux pas. Je suis désolé.

Kiba mit un moment à répondre.

- Tu sors ce soir?

- Si on veut…

- Bah! L'interrompit-il. Il était plus que temps mon vieux, avec toutes ces nanas qui n'attendent que ça! Alors, c'est qui?

Sasuke lâcha un rire amer.

- Pas une sortie de ce genre, Kiba. Non je…

Il chercha une manière de dire ce qu'il allait faire sans avouer qu'il couchait avec des inconnus pour de l'argent – Kiba n'accepterait jamais. Il trouva.

- …je travail.

- Tu travail? Bah… pourquoi?

- Je vis seul, idiot.

Kiba n'était pas idiot. Plutôt naïf et joueur. Mais il n'était pas idiot. Sasuke aimait bien l'entendre raconter n'importe quoi, ça lui remontait le moral, ça l'aidait à oublier la vie qu'il avait, à l'insu de tous ses amis qui ignoraient.

- Je dois y aller, maintenant. À demain, Kiba.

- Sois prudent, vieux. Tu peux être maladroit quand tu veux!

- Très drôle.

- Aller, à demain.

- Amuses-toi…

Kiba avait déjà raccroché. Sasuke en fit de même, la mine triste. Ça n'aurait pas pu tomber un autre jour? Il avait enfin l'occasion de s'amuser avec ses amis – enfin, les amis du cousin de son ami – et il fallait qu'il ait à faire… ça, le même jour.

D'exaspération, il laissa sa tête tomber sur la table. Son front atterrit sur la surface en bois de celle-ci et il soupira longuement avant de se relever, mettre sa veste noire et quitter sa maison, l'estomac noué et la gorge en feu.


Pendant ce temps là, au fond d'une ruelle, deux hommes semblaient discuter avidement. Les bras croisés sur son torse, celui qui faisait dos au mur ne paraissait pas effrayé par cette bande prête à le tuer à n'importe quel moment. C'était le blond qui tabassait un élève ce matin même au collège du quartier. Deux ou trois autres hommes restaient derrières l'homme aux cheveux noirs, tenant chacun un revolver, prêt à tirer.

- Comment ça, tu n'as pas réussis à le localiser? Ce n'est pourtant pas compliquer! Mais merde! T'as quoi dans le crâne?

Le blond restait impassible. Son interlocuteur avait de longs cheveux noirs attachés en queue basse, et des yeux noirs. Sa peau laiteuse et ses traits fins – ressemblant presqu'à un visage de femme – lui faisait penser à quelqu'un qu'il avait vu ou croiser quelque part. Mais qui? Quelqu'un dans la foule, tout à l'heure, quelqu'un qui le regardait battre ce crétin? Oui! Le blond se souvint. Celui qui lui avait crié d'arrêter et de ficher le camp. C'était lui qu'il cherchait, lui qu'il devait trouver et tuer.

- À bien y penser, commença-t-il et le brun l'écouta cette fois, je crois l'avoir vu.

Le brun, sur le point de péter les plombs, se retourna pour faire signe aux deux autres de baisser leurs armes. Il se retourna à nouveau vers le blond, et sans dire mot, l'encouragea à continuer.

- Ton frère, il te ressemble?

- Ouais, en plus jeune et en plus stupide, ouais. Tu penses l'avoir vu ou tu dis ça seulement pour éviter de te faire éclater la cervelle?

Le blond regarda les deux autres derrières, et un sourire mauvais se dessina sur ses lèvres fines et humides.

- Non, dit-il simplement.

- Qu'est-ce qui te fais rire comme ça alors?

Le sourire du blond s'élargit et il lâcha un rire à en faire dresser les poils sur le corps. Il était si diabolique que n'importe qui ici préfèrerait se couper la main plutôt que d'avoir à faire à lui.

- J'ai seulement battu à mort le mauvais gars.

- C'n'était pas mon frère?

- Maintenant que j'y pense, non. Ton frère, si je me fis à votre ressemblance… était quelque part dans la pièce.

L'homme aux cheveux noirs ne dit rien. Il le regarda un moment, puis il tourna les talons.

- Si tu n'as pas assez de couilles pour le tuer et me ramener sa tête… Je ne donne pas cher de ta peau.

Il disparu avec ses deux acolytes. Le blond demeura longtemps immobile, les bras sur la poitrine, un sourire moqueur aux lèvres. Alors ce gamin aux cheveux noirs, dans les vestiaires tout à l'heure, c'était le frangin d'Itachi?

Le blond se mit à rire pour lui-même. Ça allait être un jeu d'enfant. Les gamins dans son genre, il se les faisait les deux doigts dans le nez. Mais bon, après tout, il n'était pas un tueur à gage pour rien.


- Vas-y bébé, enlève tout!

Sasuke grimaça et déboutonna sa chemise blanche sous la demande de celui qui remplirait son frigo cette semaine. Il se déshabilla donc avec une envie de vomir. Il ferma les yeux et essaya d'oublier qu'en ce moment même, il aurait pu être auprès de Kiba et dans un endroit bien plus rassurant. Quelque part où il s'amuserait, et non ici, à amuser les autres, ce vieux pervers, entre autre, qui n'arrêtait pas de vouloir le toucher et le saouler. Sasuke n'aimait pas l'alcool, et encore moins le fait d'être ivre pendant que… Il ravala sa salive et se laissa allonger sur le lit, priant, espérant silencieusement que tout ça soit finit bien vite.

La lune, encore ce soir, était bien haute et pleine dans le ciel. Il la regarda pendant que des mains parcouraient son corps et une présence douloureuse et étrangère se démenait en lui, sauvagement, comme s'il n'avait aucune limite. Jamais il n'avait eu aussi mal. Mais c'était lui qui voulait ça. Il était consentant et n'avait aucune raison de se plaindre. Mais cette douleur, elle ne partirait jamais…

Le vieillard poussait un râlement rauque à chaque allé et retour, et lui il subissait silencieusement, retenant ses larmes au moins jusqu'à ce qu'il soit rentré chez lui. À chaque fois il pleurait, c'était plus fort que lui. Mais à chaque deux semaines il revenait parce qu'il n'avait pas le choix, c'était ça où la rue, et dans la rue il n'aurait jamais sa chance de revoir un jour son frère et d'avoir des réponses à ses questions.

Il finit par pouvoir se relever, avec cette impression d'être humilié et souillé de l'intérieur. Il essuya rapidement le sang sur ses jambes et ses cuisses avec ses mains, et il se rhabilla pendant que le vieux en faisait de même, n'ayant que son pantalon à reboutonner. Il avait ce sourire fier et cochon scotché au visage. Sasuke le regardait fiévreusement et haineusement. Il n'arrivait toujours pas à croire qu'il se donnait tout entier à ce genre d'homme. Qu'est-ce qu'il avait fait à Dieu pour mériter ça?

- Tiens, bois ça, bébé.

Sasuke releva les yeux après avoir remit son dernier vêtement. Un verre d'eau. Non. Ce n'était pas de l'eau. C'était surement de l'alcool ou une substance quelconque mais ça n'était certainement pas de l'eau, et même si tel serait le cas, il n'aurait jamais la stupidité d'y goûter pour le savoir!

Il se contenta de repousser la proposition du vieil homme du regard. Celui-ci fronça les sourcils et grogna en reposant le verre sous son nez. Sasuke lui lança un regard noir avant de se mettre debout avec peine.

- Donnez-moi mon argent, dit-il entre ses dents.

Il bouillait de rage. Si cet homme avait osez faire de lui son jouet sans un sous en échange, alors il ne savait pas comment il ferait pour se défouler. Une envie de meurtre lui monta à la gorge et il voulut lui sauter dessus telle une bête enrager, le griffer jusqu'à ce que mort s'ensuive, mais il se retint.

L'homme bu d'une traite le liquide et regarda Sasuke ensuite, souriant.

- Tu vois, bébé? Ce n'est pas empoisonné! Vas-y, bois!

- Donnez-moi mon argent! Lança-t-il, sur le bord de craquer.

- Ça va, te fâche pas.

Il lui balança quelques vingt dollars et Sasuke les cacha dans sa veste, tremblant. Il attendit que le vieil homme soit partit pour quitter à son tour. Ses jambes tremblaient sans cesse et tout ce qu'il voulait, c'était s'arrêter quelque part pour manger, puis rentrer chez lui pour effacer les traces qu'avait laissées cet homme en prenant une douche fraîche.

Encore un peu dans les vapes, il tourna sur la mauvaise rue et se retrouva dans une ruelle. Dès qu'il comprit qu'il s'était trompé de coin de rue, il s'arrêta pour faire demi-tour mais quelque chose attira son attention.

- S'il vous plait! Arrêtez! Je vous en pris!

Un pauvre homme criait, un peu plus loin. Sasuke plissa les yeux et se cacha derrière une poubelle. Il s'agenouilla et se plaça assez proche pour pouvoir voir ce qui se passait là-bas. Il s'agenouilla et se pencha.

Un grand blond tenait un revolver contre la tempe d'un homme agenouillé comme lui, tremblant et transpirant de peur. Sasuke fronça les sourcils. Ce blond, c'était le même que ce matin, au collège! Son cœur manqua un battement et son sang se glaça dans ses veines quand il vit cette arme, qu'il tenait avec assurance, sans même trembler, comme s'il avait l'habitude de telle menace. Sasuke reconnut alors l'autre homme : son voisin. Il suppliait le blond de ne pas le tuer et Sasuke devint pâle comme un mort. Allait-il être témoin d'un meurtre, là maintenant? Il oublia la douleur que ce vieil homme venait de lui infligée et serra les poings. S'il faisait le moindre bruit, le blond le tuerait sans doute, mais en même temps, il était incapable de bouger.

- Répond! Hurla le blond, vraiment, vraiment très fâché.

- Je… je n'ai aucune idée d'où il est, je vous le jure! Ne… ne me tuez pas!

Un coup de feu retentit et Sasuke ferma les yeux. Non! Il n'avait quand même pas… Il rouvrit les yeux et vit le blond prendre le cadavre dans ses bras, pour le jeter ensuite dans le coffre de sa voiture, garer à quelques mètres de là, dans cette même ruelle. Le cœur de Sasuke battait la chamade. Jamais de sa vie il n'avait assisté à ce genre de crime. Il avait vu un homme mourir! Son voisin, qui plus est! Pourquoi donc, son voisin? À ce qu'il sache, il n'avait jamais rien fait de mal. Mais un détail retenait toujours la curiosité de Sasuke. Le blond. Qui était-il? Il allait à l'école, le jour, il tuait la nuit… C'était quoi ça?

Il releva la tête pour voir le blond revenir sur ses pas et ramasser son arme qu'il avait laissé tomber au sol.

- Tu peux sortir de ta cachette, si tu crois que je ne t'avais pas vu.

Sasuke ouvrit grand les yeux. Comment? Il ne savait pas trop s'il devait se montrer… Allait-il se faire tuer? Il se mit debout lentement, tremblant. Le blond avait un sourire mauvais. Un sourire de… de tueur, pensa-t-il ensuite avec peur.

Sasuke décida de soutenir son regard. Un long silence s'ensuivit, et le jeune Uchiha en profita pour le reluquer de la tête au pied. Il était grand, à peu près comme lui, sinon plus. Il avait des cheveux blonds et un visage aux traits durs, méchants, sournois. Un sourire moqueur et hautin le rendant encore plus effrayant. Sasuke ravala sa salive et le défia du regard. Il était un homme après tout, il n'allait pas s'enfuir en courant comme une fillette… Même si c'était la seule chose à laquelle il pensait, s'en aller loin…

Il secoua la tête et revint au présent quand il vit le tueur s'approcher de lui, lentement. Plus il approchait, Sasuke pu confirmer ses dires : le blond était légèrement plus grand.

- Écoute-moi bien gamin, commença-t-il d'une voix sensuelle mais tout aussi grave et effrayante, tu dis à quelqu'un que j'ai tué ce gars, et tu finis comme lui. Je me suis fais comprendre?

Sasuke fronça les sourcils. Gamin? Pour qui il se prenait, celui-là? Si ça se trouve, il avait le même âge que lui!

Pendant que l'Uchiha bouillait intérieurement, le blond ne cessait de sourire. Le petit frère d'Itachi. C'était vrai qu'en le regardant, il avait les même traits fins, le même visage, les même yeux sombres et les même cheveux. Il pouvait le tuer, là maintenant. Il pouvait remplir sa mission et lui enlever la vie, mais il ne le faisait pas. Il préférait faire durer le supplice, le faire souffrir et le tuer par petit feu. C'était sa façon préféré de tuer. Il sourit encore et toujours en voyant que le jeune garçon n'aimait pas le surnom qu'il lui avait donné. Gamin… Oui, il allait s'amuser avec ce gamin.


À SUIVRE .....