La Déclaration

La température semblait au-dessus de la normale sur les courts de tennis du célèbre club Seigaku. Non seulement par le fait, qu'il faisait vraiment chaud, les arbres n'arrivant même plus à procurer un peu d'ombre aux joueurs ruisselants, mais qu'à côté des terrains, une vive dispute continuait maintenant depuis dix minutes.

« Sakuno, puisque je te le dis ! Vas-y n'aie pas peur, tu en as le droit après tout !

-Tu ne comprends pas Tomo-chan dit-elle toute rouge, en froissant sa jupe de ses mains, j'en suis incapable ! Me vois-tu vraiment dire à Ryoma-kun que je l'aime ? Finit-elle par crier.

Des larmes finirent par couler sur ses joues, faisant ainsi se rompre la dispute.

Tomo se rapprocha de sa meilleure amie pour la prendre dans ses bras et la bercer comme une enfant.

« Vois-tu Sakuno, je pensais, que ce serait une délivrance ! Que tu t'ôterais un poids en le lui disant.

-Et tu penses qu'il ne le sait pas déjà ? rit-elle amèrement. Je rougis à chaque fois que je le vois, et je ne cesse de paraître stupide devant lui.

-Sincèrement Sakuno, je pense qu'il ne le voit pas. Il doit bien noter tes troubles, mais je crois que Ryoma-kun ne sait pas vraiment ce qu'est l'amour. Le seul qu'il doit connaître, c'est sa passion pour le tennis. Voilà pourquoi je pense que ta déclaration pourrait un peu le secouer. Allez courage ma petite dit-elle en lui donnant une tape dans le dos.

« Merci Tomo, je suis vraiment heureuse de t'avoir pour amie.

-Je sais, moi aussi.

-Mais dis moi, tu n'en es pas amoureuse, toi aussi ?

-Peut-être un peu, mais pas autant que toi, ma petite Sakuno, moi ça me passera, alors que tu l'aimes sincèrement… »

Elles reprirent donc leur petit chemin, jusqu'à ce qu'elles aperçoivent Ryoma en train de disputer un match contre Momoshiro.

Sakuno étudia alors, pour la première fois, l'expression de Ryoma lorsqu'il jouait.

Il souriait comme jamais il ne le faisait en dehors d'un match de tennis, c'était un sourire démontrant le plaisir qu'il prenait à jouer, mais aussi à vaincre son adversaire. En effet, le Prince du tennis menait Momo-Senpai de quatre jeux à deux.

Alors que le match se terminait, donnant la victoire à Ryoma, celui-ci se tourna vers le deux spectatrices. Lors de son dernier coup, il avait été quelque peu déstabilisé par l'impression qu'un regard insistant se posait sur lui, le brûlant presque.

Ses yeux se rivèrent à ceux de Sakuno, qui rougit, mais ne baissa pas la tête.

Il se dirige a alors vers le banc, où il avait déposé ses affaires avant d'être rejoint par Momoshiro.

« Ne t'inquiète pas Echizen, je voulais juste t'échauffer un peu, je t'ai laissé gagner. Dit Momoshiro en rigolant.

-Mada mada dane lui répondit son coéquipier avec un grand sourire.

Ils sortirent donc du court où attendaient Tomo et Sakuno.

« Félicitations pour ta victoire, Ryoma-kun s'écrièrent-elles en chœur.

-Et on ne félicite pas le grand Momoshiro, qui a perdu dignement !

-Bien sûr, Momo-Senpai. »

Sakuno regarda le visage de Ryoma à la dérobée alors que tout le monde s'était mis à rire. Inexpressif. Fallait-il vraiment qu'il ait une raquette et une balle en main pour être heureux ?

Ils s'apprêtaient à repartir, quand Sakuno prit enfin son courage en mains, elle le saisit par le bras.

« Excuse moi Ryoma-kun dit-elle en rougissant, j'aimerais te parler seule à seul. Je te paye un fanta, ça te dit ? »

Ryoma consulta Momoshiro du regard, puis leva les épaules.

« Comme tu veux ».

Sakuno sourit intérieurement, une autre réponse l'aurait vraiment surprise. Ils prirent donc deux boissons au distributeur et s'installèrent sur le même banc où ils avaient fait connaissance à leur première rencontre.

Il ouvrit sa canette en but quelques gorgées.

« Qu'est ce que tu voulais me dire ? » demanda-t-il aussi froidement que d'habitude.

Cette attitude suffit à mettre Sakuno en colère. Elle n'en pouvait plus de cette froideur. Ca lui faisait tellement mal, elle avait l'impression que son cœur était submergée de tristesse. Elle se souvint des conseils de Tomo et décida de se lever.

Ryoma, surpris par ce geste plein de vigueur, la regarda étonné. Ce qu'elle devait lui dire devait être plutôt important.

Ses yeux ! Jamais elle n'avait croisé un tel regard de sa vie. Un regard assez métallique mais qui pouvait étinceler. Ses pupilles vertes aux reflets or, étaient si brillantes lorsqu'il jouait au tennis. Est-ce qu'un jour, elle aurait droit à un tel regard ?

Elle le regarda , sans rougir, sans baisser les yeux, sans ciller ne serait-ce q'une seconde et lança abruptement.

« Je m'étonne qu'avec de si grands yeux, tu puisses être aussi aveugle.

-Comment ?

-Tu deviens sourd maintenant » dit-elle en riant.

Lorsqu'elle vit le regard éberlué de son compagnon, elle fut prise d'un fou rire puis elle s'arrêta.

« Excuse moi, tu dois sûrement me trouver folle. Un jour, quand l'on se parle, je balbutie des stupidités, et là, je suis prise d'une crise de rire.

-Je te préfère dans le deuxième cas dit-il pour la première fois avec un sourire.

Les joues de Sakuno se colorèrent de rouge.

« Eh bien, j'attends que tu m'expliques en quoi je suis aveugle..

-C'est assez difficile à dire… Ryoma-kun.. je.. je t'aime !

Seul un silence lui répondit. Elle ne songea pas à le briser, mais après quelques minutes, elle se décida à parler.

« Tu as entendu ce que je t'ai dit ? demanda-t-elle inquiète de la réponse

-Oui

-Et tu ne réponds rien ? Même si je le sais déjà, tu pourrais me dire désolé Sakuno, mais je ne t'aime pas de cette façon là, ou je ne t'aime pas.. dit-elle d'une voix aiguë, sentant les larmes envahir ses yeux.

« Je ne savais pas trop quoi te répondre ! C'est la première fois, que l'on me fait une déclaration. »

Elle vint s'asseoir à ses côtés.

« Je ne te demande pas de m'aimer, seulement de cesser d'être aussi froid en ma présence. Que lorsque je recherche simplement ta compagnie, que tu ne me demandes pas sèchement ce que je veux. Je souhaite que l'on devienne de bons amis.

Car cette froideur, me fait mal atrocement là dit-elle en désignant son cœur. Ne serait-ce que de ne pas t'apercevoir un instant, dans la journée, me rend triste. Je suis certaine que ça ne t'ai jamais arrivé sinon tu ne serais pas aussi cruel avec moi. »

Ryoma regarda la jeune fille pleurer en silence à côté de lui. Cette situation le gênait, il la trouverait presque comique si la peine de Sakuno n'était pas si sincère.

-Ryuzaki-chan je ne le fais pas par exprès, je te l'assure, c 'est dans mon caractère ! Me trouves-tu plus chaleureux avec mes coéquipiers ?

-Sincèrement oui, mais là n'est pas la question. Imagine la douleur que te procurait le fait de ne pas pouvoir jouer au tennis.

A la décomposition du visage de Ryoma, elle sut qu'elle avait touché un point sensible.

-Ca te semble inconcevable je le sais. Dis toi alors, que c'est ce que je ressens quand tu m'ignores quasiment.

Elle se leva, alla mettre sa canette à la poubelle, et laissa Ryoma à ses réflexions après lui avoir souri et dit au revoir.

Celui-ci finit sa canette, fit un panier avant de se rendre au vestiaire en se murmurant à lui-même :

« Mada mada dane »