Une autre vie..

Fic mettant en scène la vie quotidienne sur le tournage de QAF, avec pour personnages centraux, Gale et Randy. Bien entendu ceci est une totale fiction n'ayant aucun rapport avec la réalité. Par respect pour les acteurs, il n'y aura ni Lemon (ou peut-être léger), ni divulgation de vrais noms relevants de la sphère privée ou de lieux réels ayant traits à leurs vies personnelles. Seuls les autres comédiens de la série seront cités.

Chapitre 1 :

Gale venait de recevoir le synopsis que la prod lui avait envoyé par Fedex. Le pavé ouvert, il se servi un mug de café, s'assit en tailleur sur le tapis. Son agent lui avait parlé d'une nouvelle série au concept «audacieux», l'acteur tout d'abord choisi pour le rôle avait décliné pour raison de santé, obligeant la prod à chercher au plus vite un remplaçant. Il avait été retenu sur dossier et photos puis sélectionné pour le casting.

Ah ça, pour être audacieux, ça l'était... Le personnage de Brian Kinney dont il avait des chances d'endosser le costume, lui semblait riche, intense, et terriblement dérangeant... Ce n'était pas pour lui déplaire, un nouveau vrai défi professionnel manquait à sa carrière. Il s'attendait tout de même à une rude concurrence, il avait arraché l'info à une attachée de prod... Ils étaient... 30 comédiens sur le coup. Putain il allait falloir être convainquant !

L'essai devait avoir lieu au studio, ce matin là. Gale enfila un jean, un marcel blanc, il fallait frapper fort, ETRE Brian, de manière incontestable.

La seule chose à laquelle il ne s'attendait vraiment pas, c'est de se retrouver dans une salle avec seulement 2 autres postulants. Que s'était-il donc passé pour les 27 autres ?

«Partis en courant après avoir lu les 10 premières lignes du script » Souriait l'assistant qui prenait son dossier en lui indiquant de le suivre.

Dans une pièce blanche, on lui demanda cette fois là , simplement de bouger. Rien de complexe, il fallait vérifier comment il prenait la lumière, et s'il était capable de dégager autant de magnétisme que le personnage de Brian l'exigeait...

«Superbe corps, il bouge bien, démarche de félin, quelque chose dans le regard... Messieurs, je crois qu'on le tient » S'exclama le directeur de casting.

«Demain 7 h 30, studio 22»

Voilà qui semblait assez bien parti. Le premier barrage était passé.

L'assistant lui remit un script, à lire, et à apprendre pour le lendemain. Ce que fit immédiatement Gale en rentrant chez lui.

Sous ses yeux, sur ce papier blanc, se déroulait LA scène entre ce Kinney et un certain ''Justin''.

Un vent de panique saisit le comédien. Mais où donc était-il entrain de mettre les pieds ? Sa raison lui dictait de fuir. Son instinct, de rester...

Il avait vaguement expliqué à son entourage, ses amis, les grandes lignes de cette nouvelle aventure professionnelle. Tous avaient été effrayés par le sujet sulfureux... Certains disaient même qu'il risquait fort de flinguer sa carrière à jamais. Il répondait alors qu'il n'avait pas encore décroché le rôle, et que de toutes façons, cette série serait diffusée sur une chaine câblée, assez confidentielle, ça n'allait sûrement pas révolutionner les cours d'Europe !

«Venez, on va passer sur le plateau. Vous êtes prêt ?»

Ma foi, à la grâce de Dieu, mais où était donc son partenaire, celui qui devait lui donner la réplique ?

Une silhouette attendait sur le plateau, se balançant nerveusement d'un pied sur l'autre, croisant ses bras en penchant la tête.

«Mais c'est un gamin !» S'exclama intérieurement Gale, en voyant s'approcher ce petit lutin blond. Baggies trop grands lui tombant sur les reins, et T shirt dont les manches lui mangeaient les poignets.

«Bonjour, je m'appelle Randy» Lança-t-il dans un sourire étincelant.

«Gale !» La poignée de main semblait comique et incongrue, au regard de ce qu'ils étaient sensés dire et surtout faire dans cette fameuse scène. Mais bon... Il fallait bien commencer par quelque chose.

«On est sensés faire connaissance ?» Hasardait le jeune homme en souriant.

«Je sais pas... Je crois qu'ils veulent nous jeter dans le grand bain sans bouée direct» S'amusa Gale.

Pour Ron Cowen, le producteur de la série version US/Canada, le choix de cette scène n'était pas anodin, il ne fallait pas perdre de temps. Autant savoir si l'alchimie opérait ou pas. Et ça, on allait le voir tout de suite.

«Messieurs ? Vous êtes prêts ?»

Non mais bon...

Moteur !

Alors, le dialogue s'enchaîna, il fallut embrasser cette bouche couleur pétale de rose, serrer ce corps juvénile, sentir cette peau blonde... Fermer les yeux, et ne plus penser. Se laisser simplement porter.

«Couper ! C'est bon merci.»

Randy ramassait son T shirt, ôté pendant l'essai.

«Il est à l'envers» Remarqua Gale.

«Quoi ? Ah oui merci.» Il cru percevoir une légère rougeur, sur la joue de celui qu'il appelait déjà «Le gosse »

«On va s'en boire un ?» Proposa Gale.

« Ok...»

Assis à la cafétéria des studios de show time, ils se détendaient un peu devant un cappuccino.

Randy expliquait son parcours théâtral, comment il était arrivé là.

«T'as pas peur ?»

«Peur de quoi ?»

«Tu es très jeune Randy, tu as pensé à ta carrière ?»

«Ben... T'es pas un dinosaure non plus. Nous voilà partis dans le même bateau. On verra bien !»

Le gamin était simple, direct, sans artifices, il prenait cette opportunité comme on prend un train dont on ne connaît pas la destination avec... Insouciance !

Gale l'observait, intrigué par ce petit animal vif, qu'il devinait déjà espiègle, toujours en mouvement.

«Alors ? On a pas été trop à chier ?» Demandait Randy en plissant le nez.

«Je crois pas. Ils ont voulu nous tester, tu sais. Cette scène est loin d'être évidente, et à mon avis, ni la première, ni la dernière du genre. Si on est pas capable de jouer ça... Pas la peine !»

«Ah ! Tu crois qu'il faudra souvent me remettre le T shirt à l'endroit ?»

«Hé, ho... Je suis pas ton habilleuse» Répliqua Gale en bousculant le jeune homme. Leurs premiers rires partagés, des rires de nerfs qui se relâchent, de tension apaisée, de complicité naissante...

Tous les contrats avaient été signés, et pour tourner le pilote de la série, on avait fait appel à Russel Mulcahy, une grosse pointure du cinéma australien, surtout connu pour être le metteur en scène de Highlanders.

Un filage du script était organisé. La quasi totalité du casting des piliers de la série était là.

Randy s'assit en face de Gale. Sharon à sa droite, Peter à sa gauche. Tout le monde faisait connaissance.

Chacun plaisantait sur son personnage, se mettaient à s'envoyer les répliques comme s'ils étaient déjà habités par leurs rôles. La vie de la petite bande de Liberty avenue prenait forme peu à peu, imposant son univers, ses codes, ses rituels.

Toronto fut choisi pour les extérieurs. On s'installait peu à peu dans le froid Canadien.

Russel exigea ce matin là un parfait silence, et une équipe réduite... Le décors du loft de Brian était imposant, le lit trônait sur une sorte d'autel ! Les 2 acteurs, en peignoir, restaient concentrés.

Ce coup-ci, il fallait y aller. La scène avait beau être réglée comme un ballet, tous 2 tentaient d'alléger l'atmosphère.

La maquilleuse posait sur le dos de Gale, la cuisse de Randy, un peu de poudre ainsi que sur le nez du garçon.

«Vas-y, essaie d'éternuer et tu es un homme mort» Disait Gale le visage à 10 cm de la bouche du jeune homme.

«Ton coude» Répliqua Randy.

«Quoi ?»

«Il me laboure les cotes !»

«Silence... On ne bouge plus... Action !»

2 prises seulement furent nécessaires pour la scène du dé-pucelage de Justin.

Russel n'avait pas eu besoin de plus, le duo était parfait.

Gale se releva le premier, sa nudité ne lui posait pas de problème, mais celle de son jeune partenaire le souciait. À partir de ce jour, c'est lui qui lui lancerait immédiatement son peignoir, dès le signal de «cut» de la prise...

Les résultats tombèrent assez vite, le pilote de QAF US avait emporté un franc succès auprès d'un public, certes, averti mais conquis. Les premières lettres de fans étaient arrivées en masse, principalement adressée à Randy par de très jeunes spectateurs, lui faisant surtout part de leur peur du coming out, de leurs problèmes quotidiens, au lycée, dans leur famille, avec leurs parents.

Encouragée par ce bon accueil du public, la prod envisageait déjà une saison 2, les épisodes s'enchaînaient, les personnages se dessinaient, et les affinités entre acteurs commençaient à se définir.

Scott Lowell, imbattable dans le registre «second degré», était un pote de «soirées scrabble déjantées». Peter, le roi des sorties improvisées dans les rades de Toronto, animait à lui tout seul les poses déjeuners au buffet des plateaux de tournage. Gale et Randy, se provoquaient comme des gosses de 12 ans, se lançaient des paris stupides, des défis absurdes. Sharon tricotait des écharpes improbables qu'elle cherchait à fourguer à toute l'équipe et qui finissaient souvent au cou de stagiaires, ou d'aides maquilleuses n'osant pas la contrarier.

Le premier malaise se fit sentir avec Hal sparks, son personnage de Michael Novotny, meilleur ami de Brian Kinney, était supposé au départ servir de fil conducteur aux épisodes. Il était d'ailleurs, le narrateur du pilote. Seulement, entre temps, le public avait montré son attachement et son intérêt pour le «couple» formé par Brian et Justin. Et la prod avait décidé d'en faire les héros emblématiques de la série US... Sur sa lancée de personnages centraux et incontournables de la fiction. Hal n'avait pas compris ce recentrage, ou plutôt, ne voulait pas le comprendre.

Il multipliait les interviews, les reportages, les plateaux TV, monopolisant l'attention, captant la lumière sur lui. C'était un peu pénible, voire quelquefois, horripilant.

Et puis, il n'y avait pas que ça. Il semblait à Gale, que la prod avait la ferme intention de privilégier les scènes hot de sexe entre Justin et Brian, argumentant que c'était vendeur, et que le public n'attendait que ça... Le sexe, c'était la marque de fabrique de QAF ! Et Daniel Lipman avait prévenu : c'est ce qui fait vendre !

Gale avait essayé d'en parler à Randy, lui expliquant qu'il fallait aussi imposer ses limites, que son personnage était devenu incontournable, et qu'il devrait se servir de cela pour mettre un frein à ce qui lui semblait «injustifié», en clair, qu'il arrête de se faire dessaper pour un oui pour un non.

La réponse de la production avait été cruelle, et cinglante. Randy avait été embauché pour son cul, c'était son premier rôle dans un TV show, il devait s'estimer heureux, et se la fermer, c'est tout ce qu'on lui demandait.

De son coté, Randy était un peu désemparé, la série avait gagné une popularité qu'il n'avait pas prévue, bouleversant sa vie, son univers. Avant, tout était simple, il vivait à New-York, passait son temps dans ses répétitions théâtrales, ses cours de chant, il circulait anonymement dans cette foule cosmopolite, et puis S. son compagnon, lui prenait le reste du temps. Et voilà que du jour au lendemain, coupé de son milieu, à des centaines de km de sa ville, séparé des siens, il devenait un symbole, un modèle, il recevait un courrier de fans mettant leur vie entre ses mains... Lui ? Pourquoi lui ? Le phénomène QAF commençait à l'affoler... Mais le plaisir de jouer était encore le plus fort.

Alors souvent le soir, après les épuisantes journées de tournage, Gale et Randy se retrouvaient, ensemble, sur le canapé de la grande salle/réfectoire du complexe hôtelier qui était réservée à l'équipe, pour somnoler devant leur bière, délirer sur tout, discuter musique, politique, couche d'Ozone ! Mais aussi, de cette aventure incroyable, à laquelle ils ne s'attendaient pas.

Gale se montrait très attentif, paternel et rassurant, il aimait ce gamin, il se l'avouait, sans que cela ne lui pose de problème existentiel particulier. Il avait découvert au détours d'une conversation anodine, mais aussi, de coup de fils épisodiques, que Randy avait un petit ami resté à New York, un certain S. et que cela n'avait pas toujours l'air d'être simple. Mais après tout, la sienne de vie, ne l'était pas non plus... En cela, ils avaient aussi, un point commun...

Et voilà, ce qui devait être à la base une aventure professionnelle enrichissante, devenait au fil des épisodes un véritable phénomène de société. La presse, les médias, les TV, s'emballaient. Les reportages s'enchaînaient, couvertures de magasines, soirées spéciales «QAF» sur le câble. Les acteurs prenaient conscience que tout cela commençait à prendre des proportions, imprévues.

Chacun le gérait à sa façon. Peter, très militant, ne cachait pas son homosexualité et ses combats pour l'égalité des droits. Sharon, elle aussi, avait conscience du rôle «social» de la série.

Quant à Randy, il devait faire face en permanence aux questions sur son âge, sur le côté exhibitionniste de la série. Si au départ, il avait jugé la question malvenue et plutôt incongrue, il avait révélé être gay, ne pensant pas aux conséquences professionnelles que pourrait avoir un tel «aveu» pour un jeune comédien de 23 ans. Hale Sparks, avait mis les choses au clair tout de suite, il était parfaitement hétéro, fanfaronnait partout qu'un acteur digne de ce nom peut être capable de tout jouer... Gale ne disait rien, refusait de répondre à ce genre de questions intrusives, au départ, parce que il estimait que ça ne regardait personne, puis, petit à petit, parce que ça l'énervait profondément. Le trouverait-on plus «crédible» s'il disait que oui ? C'était ridicule. Il était avant tout un comédien et comme il disait souvent, «pas besoin de s'arracher la langue pour jouer le rôle d'un muet». Cette ambiguïté arrangeait la production, laisser planer le doute, c'était bon pour le business.

Les spéculations allaient bon train. L'idée fixe des tabloïds étant de savoir «who's straight who's gay ?» Ça en devenait ridicule. Randy haussait les épaules, «Qu'est-ce que ça peut leur foutre ?» Disait-il.

La pause d'été de 3 mois, avait été l'occasion pour le jeune comédien de s'engager dans une production théâtrale, «A letter from Ethel Kennedy». Cette interlude lui permettant de répéter, et de jouer un mois à Broadway quand le message tomba sur son portable «Toute la troupe est l'invitée d'honneur du Larry K. show spécial QAF sur CNN» Allons bon. Il n'était pas question qu'il fasse un allez/retour pour répondre à 3 questions... Il ferait l'émission en duplex de New York.

«Alors, c'est bon ? Tu te sens comment ?» Gale appelait Randy 2 jours avant la première.

«Dis-moi merde...» Répondit celui-ci.

«Merde, merde, merde»

«Ça va être comment chez Larry K. ?» Interrogeait le jeune homme.

«J'en sais rien... Beauf et chiant, je suppose. Mais si on ne se montre pas, ils nous coupent les couilles à la prod.» Répondait Gale. À ce moment précis, il se mordit la joue pour ne pas éventer sa surprise. En effet, il avait décidé de venir à la première de Randy, il ne lui avait rien dit, ménageant sa surprise. Alors, il avait été convenu qu'il ferait également le duplex de New York avec lui, pour le Larry K. show.

Randy était arrivé le premier dans le studio, on le maquillait, et la technique l'avait appareillé pour le duplex. Il attendait sagement que le show commence, en plaisantant avec la maquilleuse. On apporta un autre siège à coté de lui.

«On attend quelqu'un d'autre ?»

«Oui... Moi !» Gale, content de son effet de surprise, était apparu comme un diable sort de sa boite.

«Heyyyy. Qu'est-ce que tu fous à New York ? Je croyais que tu rentrais au Bled ?»

«J'ai un ami qui a une première à Broadway après demain. J'allais pas rater ça» Répondit Gale dans un clin d'œil.

Heureux? Oui Randy l'était. Depuis la fin de tournage de la saison et son retour à New York pour les répèts, il n'avait pas revu Gale. Ils s'appelaient régulièrement, se tenaient au courant. Gale lisait des scénars que lui envoyait son agents, ils en parlaient. Mais c'était un peu difficile, cette coupure, ils se manquaient, mais ne se l'avouaient pas encore. Alors, cette visite surprise remplissait le jeune homme d'une douce chaleur... Finalement, ce duplex ne serait pas aussi chiant qu'il le pensait... Gale était à ses cotés.

3, 2, 1... Antenne !

Ça y est sur l'écran de contrôle, les 2 complices regardaient le début du Larry K. show, une sorte de grand messe cathodique hebdomadaire, dans laquelle sévissait tel un empereur indétrônable depuis des dizaines d'années, le célèbre Larry K.. Son émission de diffusion nationale était incontournable, la production avait fermement insisté pour que TOUS les acteurs soient présents. Le thème de la soirée parlait de lui même : ''QAF immoral ou inoffensif ?''

Ce que n'avaient prévu ni Gale ni Randy, c'est le ton que fut donné à cette soirée par le journaliste.

Devant leurs yeux consternés, Larry K. manifestait tour à tour de la condescendance, du mépris, des sarcasmes, des allusions douteuses, des commentaires indignes. Ce mec était une saloperie d'homophobe. Cette émission était un piège grossier. Ils allaient tous tomber dedans, pris en otages.

Déjà la présentation des comédiens par le journaliste avait auguré de ce que serait la suite. Il avait énuméré les noms des acteurs en précisant pour chacun : gay, homo, homo, gay... Sidérant sur place les pauvre comédiens ! La suite ne fut qu'une succession de questions clichés, bateaux. Gale s'énervait, menaçait à chaque coupure pub de se casser de ce carnaval. Randy, jeune, sans expérience de ce type d'exercice ne savait pas quelle attitude adopter face à Larry K.

Une discussion houleuse par téléphone interposé eut lieu avec l'attaché de prod.

3,2,1... Antenne !

C'était au tour de Randy de raconter son age, son ressenti, s'extasier sur le bonheur de travailler en confiance avec une telle équipe, et bla bla bla... Gale à coté de lui grimaçait sourdement, lui disait tout bas «fuck them all !»

«Dans le rôle de Brian Kinney, Gale Harold, hétéro...» Ça commençait bien les présentations...

Gale encaissa avec un sourire crispé, puis vint la question.

«Est-ce que vous avez des regrets de vous être engagé dans un tel show ?»

La première réponse qui lui vint à l'esprit fut «connard». De plus en plus exaspéré, Gale répondit :

«Non, pas le moins du monde, c'est un honneur pour moi d'avoir un tel partenaire » En dehors du champ de la caméra, il tenait la main de Randy... Celui-ci lui murmura alors «Je t'aime». Pris par surprise, Gale rougit. Larry K. demanda alors ce qu'il avait dit... Personne n'avait clairement entendu. Dans un sourire gêné et plus ému qu'il ne l'aurait voulu, Gale avait répondu «Je ne peux pas le répéter.»...

3,2,1... Hors antenne.

L'émission était enfin terminée, Randy retirait le maquillage de son visage, assis à coté de Gale dans une petite loge. Celui-ci était au téléphone avec Sharon qui ne décolérait pas.

«Quel trou du cul ce Larry K. !» Hurlait-elle.

«Ben oui, ma belle, enfin c'est fait, on y reviendra pas. Ça va toi ? Quel temps à Miami ?»

«Pourri, je m'emmerde...» Maugréait la comédienne.

«Embrasse le petit pour moi.» Ajouta-t-elle avant de raccrocher.

Quelques poignées de mains aux techniciens du studio avant de partir.

«On va boire un coup ?» Lança Randy.

Il passèrent un long moment à discuter de cet enfoiré de Larry K., puis, la conversation prit un tour plus personnel, assez inattendu. Randy s'excusait de ne pas pouvoir recevoir Gale chez lui pour son court séjour mais, c'était petit, pas pratique et puis S. ...

Ah oui, c'est vrai,il y avait S. !

C'est la première fois que Gale appréhendait la présence réelle du fiancé fantôme. Avant il n'était qu'une voix lointaine entendue au téléphone, de très vagues allusions ici ou là. Mais ce soir, si Randy ne pouvait pas lui donner l'hospitalité c'est parce que il y avait bien un «S».

Gale était contrarié, il ne savait pas expliquer pourquoi. C'est vrai il aurait voulu passer plus de temps avec le jeune homme, faire des virées en ville, raconter des conneries, se bagarrer pour rire... Là, il était plongé dans la vie quotidienne, la réalité. Pas la bulle protectrice de Toronto...

«C'est pas grave Randy, t'inquiète, j'ai un hôtel. On va dîner ?»

«2 secondes, j'appelle S. pour le prévenir. Tu aimes Italien ?»

Gale eut peur à un moment, que Randy invite son compagnon à les rejoindre mais il ne le fit pas.

Le resto niché dans le vieux Greenwich était discret, calme, le serveur bienveillant les avait installés dans un recoin, dos à la salle.

«Ça va Randy ?» Gale était inquiet.

«oui oui, tu sais, la première, on est jamais prêt. Je suis content que tu sois là...Vraiment, ça me touche.»

Ils venaient de vivre quasi 24h/24 ensemble pendant 6 mois alors, Gale savait parfaitement que derrière le sourire de façade de Randy se cachaient des soucis dont il ne voulait pas parler. C'était pas le moment. Ce serait plus facile à Toronto... Oui Toronto.

Randy le raccompagna à son hôtel ce soir là. Ils burent un dernier verre dans sa chambre. Enfin, plutôt les flash de gin du mini bar en trinquant. Puis, Gale serra dans ses bras le jeune homme sur le départ en lui redisant «Merde, merde et merde pour demain» Et il avait fallu le laisser partir. Et boire, un 2ème flash...

Gale était arrivé assez tard au Théatre, sa place réservée au premier rang l'avait touchée. Le dernier salut achevé, il avait décidé de rejoindre Randy dans les loges pour le féliciter. Il n'était pas le seul.

Le couloir était noir de monde, un mélange d'amis, de famille, d'enfants aussi, venus congratuler leurs proches membres de la troupe. Une main extirpa Gale de la petite foule compacte.

«Ramène tes fesses, j'ai piqué une bouteille de champ !» Randy exhibait son butin, entraînant Gale dans un recoin des décors plongés dans les ténèbres.

«Des verres peut-être ?» Hasarda Gale.

«Et puis quoi encore ? Pas de super production Hollywoodienne ici ! Tu es à Big Apple !» Ironisa Randy.

Ils burent au goulot, chacun leur tour, en riant. Gale avait passé ses bras autour du cou du jeune homme et le félicitait.

«Vous allez jouer tout le mois ?»

«Mmm, mmm» Randy, la moitié de la bouteille vidée, était déjà un peu ailleurs...

Front contre front, ils ne bougeaient plus. Tapis dans l'ombre, S. observait la scène, poings serrés.

«Dans un mois, ça passe vite ! J'ai hâte... Tu as une idée de ce qu'ils nous préparent pour la suite ?»

Randy tournait sa cuillère dans son mug géant de cappucino à Kennedy Airport.

«Aucune idée. Top secret défense ! On saura au dernier moment, comme d'hab... Tu sais comment ils sont à la prod... Paranos. Ils veulent pas de fuites.» Gale s'apprêtait à embarquer pour Los Angelès.

«Bon... Et bien alors, à dans un mois. Tu vas me manquer, qui est ce que je vais bien pouvoir faire chier pendant 4 semaines ?» Plaisantait Randy.

«Je te fais confiance là dessus, tu vas bien trouver d'autres victimes...»

Accolade longue, plus longue qu'il n'était nécessaire...

En chekant son billet au desk American Airline, Gale pensa «mon vieux, ne laisse pas Brian te bouffer...»

Le tournage avait repris depuis une semaine... Aujourd'hui, on était en extérieur sur ce qui était sensé être Liberty avenue. Justin devait se frayer un chemin vers Brian dans la foule.

Les 2 comédiens étaient adossés à un camion de la régie.

«On fête l'annif de Michelle ce soir, on fait ça tranquille chez les filles, on apporte quoi ?» Disait Randy.

«Du champ ? Des cup cakes ?»

«Les 2 ! Randy merde, t'as fait une tache sur ton T shirt.»

«Pas grave, ça va pas se voir... Planque moi, v'la l'habilleuse...»

C'est avec soulagement qu'ils avaient repris leur petite routine rassurante. Levés aux aurores, filage des scénari, tournages, repas pris en commun, vie de chambrée... Si tout le monde avait apprécié le break c'est à l'unisson qu'ils célébraient le bonheur de leurs retrouvailles. Enfin... Presque.

Hale ne s'était pas arrangé, la plupart du temps, tout le monde raillait son coté «Je suis le comique de service, un vrai boute en train.»

Mais la vérité, c'est qu'il commençait à gaver la bande. Gale avait eu une altercation avec lui la veille au soir. Au cours d'une convention avec des fans, Hale avait fait le pitre, coupé la parole de ses collègues, répondu aux questions à leur place. Ça commençait sérieusement à devenir lourd ! Gale n'avait pas mâché ses mots et l'incident avait jeté un certain froid !

L'annif de Michelle était l'occasion de détendre un peu l'atmosphère...

«Randy, magne-toi, on doit être sur place à 21h !» Gale tambourinait pour la 3ème fois à la porte de la chambre du jeune homme.

«J'arrive » Un seul regard en coin suffit pour que Gale se rende compte que celui-ci venait de pleurer.

«Oh Randy ? Ça va pas ?»

«Si impec... Allez, on va faire la fête.»

SURRRRRRRRRRRRRRRPRISE !

Avaient entonné en même temps tous les comédiens de la troupe, quelques techniciens, les maquilleuses...

Michelle avait fait semblant de s'étonner, on s'était gavé de gâteaux écœurants, de champagne tiède, de bière et de vodka. En fin de soirée, Théa tentait une initiation au tango sur Peter. Sharon lisait les lignes de la main de Scott, tandis qu'un régisseur faisait une démonstration de break dance.

Randy vidait verre sur verre, les yeux mi clos.

«Oh oh, on va peut être rentrer la jeunesse...» Déclara Gale.

«On a exactement 17 marches à monter pour accéder aux bungalows, faut s'y prendre tôt si on veut arriver avant que ce soit l'heure de se lever.» Ironisa-t-il encore pour signifier aux filles qu'il prenait congé avec son fardeau blond, ivre mort.

«Allez» Dit doucement Michelle, «Et encore merci, c'était sympa... Vraiment »

«Tu veux de l'aide ?» Proposa Peter en voyant Gale tenter d'accrocher Randy à lui.

«Non c'est bon, ça devrait le faire...»

«They told me to go to rehab I say no, no, no... » Chantait Randy entre 2 hoquets.

«Voilà qu'il se prend pour Amy Winehouse... Putain, t'as pas fait les choses à moitié, toi. Ça va être top demain» Sermonnait Gale.

Ils eurent à peine de temps d'arriver dans la chambre du jeune homme, que celui-ci fit les 3 pas nécessaires pour se ruer sur la cuvette des toilettes.

«Vas-y, ça ira mieux après» Randy vomissait ses tripes en gémissant.

«Ah ben oui... T'as que ça à faire…» Tempérait Gale. Puis il alla chercher une serviette qu'il trempa dans l'eau fraiche.

«Allez, enlève-moi ça.» Il ôta le T shirt du jeune homme, le fit s'allonger sur son lit, enleva ses chaussures, puis son pantalon. Il passa la serviette sur son visage, son torse et ses bras.

«Je suis minable hein ?» Annonçait péniblement le garçon.

«Oui, on peut dire ça comme ça. Tu t'es mis minable. Allez, bois ça !» Il lui tendait un verre d'eau.

«Maintenant on dort ! Demain, debout à 7h... Au lit !» Gale rabattait la couverture sur le jeune homme qui geignait que la terre entière tournait très très vite.

«C'est ça, la terre tourne, ton lit tourne... Tout tourne sauf toi, gamin...» Pensait Gale.

Randy s'était blotti instinctivement contre lui, émettant une faible plainte avant de s'endormir.

Gale resta un moment sans bouger, posa la main sur les cheveux du jeune homme, doucement. «Qu'est-ce qui t'a fait te mettre dans un état pareil ? Hein ?» Puis il s'allongea à son tour et plongea dans le sommeil.

Quand le réveil sonna, Gale ouvrit le premier un œil, pour trouver Randy dans ses bras, profondément endormi. Il s'était passé quoi au juste, déjà ? Ah oui la cuite... Rien d'autre. C'est sûr. Non rien d'autre.

«Ho... On se réveille l'ivrogne, c'est l'heure !»

«Hein ? Quoi ?»

«Allez, debout. Vas-y doucement. On a le temps.» Gale assis sur le bord du lit, se rhabillait pour aller prendre sa douche dans sa chambre. Randy observait la scène en essayant de se rappeler de ce qui s'était passé cette nuit. Qu'est-ce que Gale foutait dans son lit ? Il avait raté un épisode ou quoi ?

Mais il n'osa pas poser la question tout de suite... Là, il fallait juste un peu se recadrer.

«Ça tourne.» Dit le jeune homme en s'asseyant à son tour, la tête entre les mains.

«Tu m'étonnes ! T'as fait régime liquide hier soir, tu te souviens ? Allez, vas prendre une douche froide, ça va te réveiller. Hop !» Rétorqua Gale.

Randy avait l'impression de peser une tonne et d'avoir la tête prise entre un marteau et une enclume.

Il se dirigea cependant vers la salle de bain.

«Bon, ça va aller, je peux te laisser ? Je dois me préparer aussi.» Lança Gale à travers la porte.

«Mmm, mm, vas-y...»

¼ d'heure plus tard, Gale venait voir où en était son partenaire. Toujours au même point prostré sous la douche.

«Tu comptes y passer la journée ?»

«Hein ? 2 secondes... C'est bon.» Randy sortait enfin de la cabine. Par un curieux réflexe de pudeur, Gale détourna la tête pendant que le jeune homme se séchait et s'habillait. C'était pourtant pas la première fois qu'il le voyait ainsi.

Le privilège de ses 20 ans ! Randy était à présent frais comme une rose, avec un mal de tête lancinant certes, mais gérable.

«Gale ?»

«Oui ?»

«Euh... On a fait quoi au juste cette nuit ?»

«?»

«Ben, on a couché ou quoi ?»

«Dis donc, t'étais peut-être bourré, mais pas moi, on s'en souviendrait, non ?» Essaya de plaisanter Gale.

Randy sourit... Oui c'est sûr, ils s'en souviendraient.

En sortant de sa chambre, Gale posa sa main dans le dos du jeune homme. Hale Sparks quittait son bungalow à ce moment là, son regard croisa le sien.

La scène qu'ils devaient tourner aujourd'hui avait lieu au Babylone et rien qu'à l'idée qu'il faudrait se taper la musique de fond, pour mettre dans l'ambiance les figurants sensés s'éclater sur le dance floor, collait déjà la migraine à Randy, qui n'était d'humeur à rien.

Hale Sparks prenait ses marques au comptoir du bar, Gale se raclait la gorge.

Moteur !

Okkkkk... Randy buttait sur les mots, on refit la prise 6 fois. «Désolé...»

«On peut pas être bon partout» Lança Hale. La remarque se voulait pleine de sous entendus, Gale le prit comme cela.

«Tu veux dire quoi, au juste ?» Demanda-t-il.

«Rien, juste qu'il faut pas s'étonner de ne pas savoir son texte quand on tient pas l'alcool, et le reste.»

Randy mit la main sur l'épaule de Gale, comme pour signifier «Laisse tomber».

Mais ce geste ne fit que confirmer Hale dans ses convictions depuis ce matin... Ces 2 là couchaient ensemble. Dès lors, il s'employa à faire des remarques plus ou moins insidieuses, plus ou moins à double sens... Les ¾ du temps, tout le monde souriait, prenait cela pour une sorte de jeu sauf les principaux intéressés, qui eux ne riaient pas. Scott, qui s'entendait bien avec Hale, lui avait suggéré de se calmer un peu, qu'après tout, ce qui se passait, ou pas, entre ces 2 là, ne regardait personne. Mais depuis que celui-ci avait enfin réalisé que les vrais symboles de cette série déjà culte étaient Brian et Justin, il avait du mal à encaisser, et plutôt que de se fondre dans le groupe solidaire et unis, il cultivait sa rancœur dans son coin.

Et puis, il y eu cette entrevue avec une journaliste, qui lui demandait comment se passait le tournage, et cette phrase malheureuse, où il avait dit que Gale et Randy n'avaient pas un comportement très professionnel, sous entendant leur supposée liaison.

Il n'en fallu pas plus pour que la rumeur se propage, comme une traînée de poudre... Tabloïds, blogs, ce fut l'affaire en cours pendant plusieurs semaines. Et les dommages collatéraux touchèrent de plein fouet Randy qui n'avait vraiment pas besoin de ça dans sa vie personnelle !

S. était d'un tempérament jaloux, et ombrageux, il avait déjà eu du mal à digérer les longues séparations, voir son compagnon nu à l'écran avec un autre homme ne l'avait pas non plus porté au Nirvana. Savoir que Randy passait le plus clair de son temps avec ce canon sur pattes de Gale Harold ne faisait pas non plus parti de ses sujets de réjouissance. De plus, la complicité évidente des 2 partenaires devenait de plus en plus difficile à supporter. Les crises, les cris, se multipliaient, la distance devenait ingérable, alors, quand comme tout le monde, il découvrit les propos de Hale, il décida d'un aller retour surprise pour Toronto...