Résumé complet : Que se serait-il passé si Severus Rogue n'avait pas eu le courage d'aller trouver Dumbledore pour lui demander de protéger Lily ? Quelles conséquences cela aurait-il pu avoir pour le monde sorcier et pour Rogue lui-même ?

Aurait-il été récompensé pour son dévouement au Seigneur des Ténèbres ? Aurait-il su mettre de côté ses remords pour profiter de cette récompense ?

Voici le récit d'une journée dans la vie d'un homme qui a tout sacrifié à ses ambitions.

Disclaimer : Le personnage de Severus Snape/Rogue ainsi que l'ensemble de l'univers « potterien » appartiennent à JK Rowling. L'auteur de ce texte n'en retire aucun profit financier.

Warning : Ce texte est classé M parce qu'il aborde des thèmes dits « adultes », notamment, l'esclavage sexuel. Cependant, il ne contient pas de scènes de sexe ou de violence détaillées.

Un très grand merci à la merveilleuse Haru Nonaka et à la délicieuse Psycho Sbaf pour leurs encouragements et commentaires !

Un énorme merci à la prodigieuse bagin31 pour le beta-reading !

Le premier paragraphe du texte est directement inspiré de la phrase qui ouvre le chapitre 2 de Maître et Marguerite, roman écrit par M. Boulgakov. Dans sa version d'origine (en russe), cette phrase est d'une perfection qui ne cesse de fasciner. En voici la traduction :

«A l'aube du 14e jour du mois de Nisan, vêtu d'un manteau blanc à doublure rouge sang et avançant de sa démarche traînante de cavalier, sous le péristyle séparant les deux ailes du palais d'Hérode le Grand fit son apparition le procurateur de Judée, Ponce Pilate. »

Si vous n'avez pas fait d'orgasme esthétique, c'est seulement parce que c'est une traduction, faite par humble-moi.

Bonne lecture, si le cœur vous en dit !


Qui sait ?

Au matin du 4e jour du mois d'Octobre 1990, vêtu d'une robe noire à triple liseré d'argent et avançant de la démarche assurée de celui qui n'a pas usurpé le succès, sous les voûtes de l'imposante salle d'audience de sa résidence officielle fit son apparition le Gouverneur en chef de la Grande-ville sorcière de Londres, Severus Snape.

Plus que tout au monde, le Gouverneur détestait l'odeur de vanille. Or, celle-ci le poursuivait depuis qu'il s'était levé à l'aube et cela ne présageait rien de bon. Lorsqu'il avait ouvert la porte-fenêtre de sa chambre qui donnait sur un coin du grand jardin de sa résidence, il avait eu l'impression que les feuilles jaunies qui jonchaient la pelouse et les chemins exhalaient cette senteur écœurante et sucrée, une odeur de décomposition. Les effluves détestés se mêlaient aussi à l'odeur de son café matinal et à celle du savon de sa toilette.

L'odeur de vanille qui poursuivait le Gouverneur en chef annonçait une crise d'un mal étrange, dont il souffrait depuis plusieurs années. Bientôt, très bientôt, dans une heure peut-être, une migraine s'emparerait de lui. Elle voyagerait depuis ses tempes jusque derrières ses yeux, puis, envahirait son crâne. Il souffrirait ainsi toute la journée et, le soir, il s'allongerait sur son lit et attendrait l'accès de convulsions qui réduirait son corps à l'état de pantin dont la douleur serait le seul maître.

Cette maladie rongeait le Gouverneur depuis le jour où la mère de l'Elu avait trouvé la mort. D'ailleurs, aujourd'hui l'on parlait plutôt de « pseudo-élu » et on accompagnait ces mots d'un sourire dédaigneux, car l'enfant avait rapidement rejoint sa génitrice.

Le Gouverneur en chef se souvenait bien de ce soir-là : un affrontement avec un groupe de membres de l'Ordre du Phénix dans les locaux du Ministère. Un groupe dont elle faisait partie. Lorsqu'il eut été clair que les Mangemorts avaient l'avantage, lorsque les quelques survivants avaient été encerclés, le Seigneur arrêta le combat. Il désigna au futur Gouverneur cette femme aux yeux si doux et que le Gouverneur avait tant adorée et lui dit :

« Si tu me prouves ton dévouement maintenant, ma confiance te sera acquise à tout jamais et tu connaîtras gloire et richesse à mes côtés. Si tu échoues, la douleur et la mort seront ton lot. »

Qui dirait avec certitude : « Je sais que j'aurais fait le bon choix ! » ? Un fou ou un vantard. D'ailleurs, qu'est-ce que cela veut dire, « le bon choix » ?

Le Gouverneur avait prouvé son dévouement, était rentré chez lui et, au petit matin, la maladie avait frappé pour la première fois.

En y réfléchissant, cela aurait pu se passer différemment. Le Gouverneur n'avait-il pas songé à une façon de prévenir la femme aux yeux doux du danger qui la guettait ? Il ne l'avait pas fait en fin de compte. Mais cela aurait-il changé quelque chose ? Il fallait être lucide : à cette époque déjà Lord Voldemort était le mage le plus puissant de sa génération. Même si elle s'était moins exposée, il aurait fini par l'atteindre. Et, après tout, elle avait fait son choix, elle aussi : un choix qui s'était cruellement imposé au Gouverneur.

Tout cela était maintenant tellement loin, dans une autre vie.

Son secrétaire l'attendait déjà dans la salle d'audience et avait déposé sur une table près de son fauteuil plusieurs rouleaux de parchemin. Il s'agissait des affaires que le Gouverneur devrait juger ce matin. Il contempla le tas de rouleaux avec mécontentement et le secrétaire pâlit d'inquiétude.

Comme le Gouverneur s'avançait vers son fauteuil, ses yeux tombèrent sur l'immense carte de Londres qui recouvrait le mur du fond de la salle. Londres, la première ville sur terre à population exclusivement sorcière. Il y avait cinq ans déjà, les Moldus en avaient été chassés, tout comme du reste des Comtés Sud de l'Angleterre et parqués au Nord et en Ecosse. A la communauté internationale Moldue il fut habilement expliqué que cette nouvelle organisation était le résultat d'un référendum au cours duquel les deux composantes du peuple anglais qu'étaient les sorciers et les Moldus avaient décidé souverainement de se partager le territoire de cette façon. Le gouvernement de Lord Voldemort comptait même un ministre des affaires Moldues, lui-même Moldu et, bien sûr, manipulé en permanence.

La carte représentait non seulement les rues et les places mais aussi les habitants désignés par autant de petits points qui bougeaient, se déplaçaient sans cesse, grouillaient çà et là, ce qui, de loin, donnait l'impression qu'il s'agissait non pas d'une ville mais d'un étrange être vivant, une bête magique semblable à une araignée ou une pieuvre.

D'habitude, lorsqu'il voyait cela, le Gouverneur éprouvait un sentiment de fierté et de puissance. Il n'avait que trente ans, après tout, et une telle responsabilité à un si jeune âge était un phénomène exceptionnel. Oui, les bontés du Seigneur étaient vraiment grandes. Le Gouverneur était présenté partout comme l'Homme qui avait découvert la « fausse prophétie » et aidé le Seigneur à anéantir le pseudo-élu au sang de bourbe. Il faisait partie du cercle des conseillers les plus proches du Seigneur, du petit groupe de ceux qui étaient autorisés à arborer le triple liseré d'argent sur leurs robes.

Cependant, aujourd'hui, tout cela lui était égal. Le grouillement de la carte de Londres donnait la nausée au Gouverneur et la douleur commençait à lui vriller les tempes. Il fallait à tout prix essayer de bouger la tête le moins possible.

Il s'assit et tendit la main dans laquelle le secrétaire fit léviter un premier rouleau de parchemin. Une lumière blanche et sans soleil, la lumière du matin d'automne, éclairait impitoyablement la pièce à travers de grandes baies vitrées. Il semblait au Gouverneur que c'était cette lumière même qui exhalait l'odeur abhorrée de vanille, celle de la femme aux yeux doux.

Le Gouverneur grimaça et dit : « Faites entrer. »

Les gardes amenèrent trois personnes : un homme d'une soixantaine d'années à l'air désespéré, une femme qui tenait à peine debout et une fille qui ne pouvait avoir plus de quinze ans. Un vrai portrait de famille, une toile de maître qui se serait intitulée « Au bord du gouffre »…

Le gouverneur réprima un rictus parce qu'il sentit que cela allait lui faire encore plus mal à la tête. Son regard fut soudain attiré par la fille. Ses longs cheveux roux et ondulés, même si, visiblement, ils n'avaient été ni lavés, ni peignés depuis un moment, scintillaient doucement dans la morne lumière matinale. Sous cette masse à moitié sauvage, sa figure paraissait encore plus maigre et plus fatiguée qu'elle ne l'était en réalité, ses yeux – plus grands et plus désespérés. D'immenses puits de peur et de mélancolie. Des puits d'eau verte…

Le gouverneur jeta un coup d'œil au parchemin, mais les lettres dansaient devant ses yeux.

- Noms, statuts, chefs d'accusation, s'enquit-il d'une voix monocorde.

Le jeune officier entré avec les gardes et les prisonniers déroula à son tour un parchemin et se mit à lire d'une voix impassible :

- Lovecraft Andrew, né le 15 Février 1932 à Londres. Sang-pur deuxième catégorie. Accusé d'atteinte à la sécurité publique et de recel d'objets dangereux pour la sécurité publique.

Lovecraft Emily, née le 7 Novembre 1940 à Plymouth. Sang-pur troisième catégorie. Accusée de complicité d'atteinte à la sécurité publique et de recel d'objets dangereux pour la sécurité publique.

Lovecraft Lucy, née le 19 Mars 1975 à Londres. Sang-pur troisième catégorie. Accusée de complicité d'atteinte à la sécurité publique, de recel et de diffusion d'objets dangereux pour la sécurité publique.

A savoir : l'accusé Andrew Lovecraft et sa femme sont soupçonnés d'avoir donné asile et protection à leur fils aîné, George Lovecraft, membre du groupe terroriste nommé « l'Ordre du Phénix » ainsi qu'à un de ses complices entre le 15 et le 17 Août de cette année, selon le témoignage de leurs voisins. Par ailleurs, ont été confisqués au domicile de la famille Lovecraft des tracts du groupe terroriste en question, du matériel utilisé pour la fabrication d'explosifs et des fonds destinés très probablement au financement d'attentats. De plus, l'accusée Lucy Lovecraft aurait été vue par des témoins en train de tenter de diffuser les tracts susmentionnés.

La femme se mit soudain à sangloter frénétiquement et à bêler :

- Oh, Monsieur le Gouverneur, c'est faux ! Lucy n'a jamais rien fait de tel. Elle en est tout bonnement incapable ! Oh, regardez-la, Monsieur le Gouverneur ! Ma fille a tout juste quinze ans! Ayez pitié, Monsieur le Gouverneur !

L'officier ne sourcilla pas :

« Accusée, veuillez vous taire, s'il vous plaît. Vous aurez la possibilité de faire des observations quand j'aurai fini d'exposer. »

Visiblement, la femme était prête à s'écrouler par terre. Son mari la retenait avec grand-peine.

La fille avait les yeux baissés. Sa peau rappelait au Gouverneur la première neige des hivers de son enfance dans les bas-quartiers de Manchester : si immaculée au début, si rapidement métamorphosée en une masse grisâtre et boueuse. Les gamins du voisinage tentaient quand même de faire des boules de neige avec cette mélasse dégoûtante, comme si c'était de la vraie neige, celle des images d'Epinal, celle de leurs rêves. Le petit garçon chétif que le Gouverneur était alors constituait souvent la cible privilégiée de ces projectiles.

Dans quel camp d'internement écossais étaient aujourd'hui ces gamins Moldus ?

L'officier finit de lire son rapport. Il baissa le parchemin et ajouta d'un air imperturbable:

« Nous n'avons pas pu obtenir de preuves tangibles permettant de prouver l'appartenance de la famille Lovecraft au groupe terroriste de l'Ordre du Phénix, mais il paraît tout-à-fait clair qu'ils ont, au moins ponctuellement, aidé des membres avérés de la susdite organisation. »

Le Gouverneur se dit que si lui-même se sentait souvent indifférent par lassitude, l'indifférence du jeune homme était étudiée, appliquée. C'était l'impassibilité du fonctionnaire, conscient et fier de son rôle de rouage indispensable de la puissante et implacable machine de l'administration. Dans sa naïve jeunesse, il trouvait encore du plaisir à ces jeux-là. Pauvre petit.

Le Gouverneur ouvrit la bouche pour poser une question, mais la femme se remit à geindre de plus belle. Le Gouverneur ne comprenait même plus ce qu'elle disait. Sa voix était comme cette masse froide et visqueuse qu'une main experte de gamin des rues lui avait lancée en pleine figure tant de fois.

- Faites-la asseoir, enfin !

Les gardes avancèrent une chaise. Elle s'écroula dessus. Immédiatement, sa fille se mit à genoux près d'elle pour lui prendre les mains. Oh, image touchante.

Le Gouverneur reprit :

- Lieutenant, si ces personnes sont accusées d'attenter à la sécurité publique, elles relèvent normalement de la compétence des services de Sûreté Nationale du Seigneur, pas de la mienne. Qu'est-ce qu'elles fabriquent là ?

A l'évocation de la Sûreté Nationale, les trois accusés se figèrent perceptiblement. Eh oui, ils avaient eu beaucoup de chance d'être tombés entre les mains de sa police municipale qui était à peu-près bien élevée, surtout en comparaison avec les bouchers de la Sûreté.

Le lieutenant ne se démonta presque pas :

- Monsieur, nous avions de bonnes raisons de penser que l'attentat projeté visait Londres. L'affaire concerne donc spécifiquement la sûreté municipale.

Oui, certes… Visiblement, le petit voulait surtout faire du chiffre et du zèle. Le Gouverneur se souvint soudain du dernier attentat commis en plein centre de Londres et sur les lieux duquel il s'était rendu. Un bâtiment au flanc éventré, l'odeur de chair brûlée, des visages hagards. Il eut envie d'entendre la voix de la fille :

- Alors, expliquez-moi, Miss Lovecraft, demanda-t-il soudain, au grand étonnement de l'officier. « Comment cela se fait-il que les actions de « l'Ordre du Phénix » fassent autant d'innocentes victimes civiles ? Pourquoi est-ce que « l'Ordre » ne me vise pas moi, par exemple, ma résidence. Ce serait autrement plus impressionnant et efficace. Ou bien, est-ce trop difficile pour vos petits camarades ? Seraient-ils de petits joueurs ? »

La fille avait l'air terrorisée. Elle se mit à marmonner quelque chose d'une voix à peine audible.

De toute évidence, elle ne faisait pas partie de l'Ordre et n'avait jamais diffusé aucun tract. C'était juste une petite victime muette parmi d'autres, rien de plus. Qu'éprouvait-il à cette pensée ? De la pitié ? Du mépris ? De la fatigue ?

Le Gouverneur continua l'interrogatoire, mais c'était surtout la fille qui occupait son esprit, sa beauté mal lavée et exsangue, ses airs de pureté souillée gratuitement. Il lui semblait désormais que c'était elle qui exhalait l'odeur de vanille et il se souvint de l'époque où c'était son odeur préférée, associée à la femme aux yeux doux.

Le jeune officier soumit à son examen les tracts confisqués où l'on pouvait lire en lettres de feu « La liberté renaîtra de ses cendres » et les transcriptions des témoignages des voisins. Rien de bien extraordinaire, en somme. Aucun des trois accusés ne savait probablement rien sur l'attentat projeté. Son mal de crâne reprenait soudain de plus belle. Il annonça sa décision.

Les parents étaient condamnés à vingt ans de travaux forcés pour recel d'objets dangereux et complicité ponctuelle. La fille était mineure. Elle était de sang pur, même si ce n'était que de la troisième catégorie. Elle irait à l'Institution Ste-Prudence pour orphelins de sang pur.

Sa mère était visiblement prête à se traîner aux pieds du Gouverneur en signe de reconnaissance. La malheureuse. Ste-Prudence était peut-être pire que les travaux forcés. L'orphelinat se trouvait en rase campagne du Lancashire et, selon les rumeurs, était légèrement plus supportable que l'enfer. On y envoyait systématiquement les enfants de condamnés ainsi que les orphelins pauvres mais suffisamment purs de sang. Ils étaient enfermés et presque livrés à eux-mêmes : à peine nourris, à peine soignés. A leur arrivée, les spécimens les plus présentables des deux sexes étaient sélectionnés pour fournir les bordels de luxe londoniens.

Les bordels de la Grande métropole sorcière de Londres étaient aussi sous la surveillance du Gouverneur. Les Moldus et les Sang-de-Bourbe y étaient strictement proscrits. Le Gouverneur avait mollement essayé d'imposer aussi une condition de majorité, mais on lui signifia en haut lieu qu'il fallait avoir l'esprit large et tolérant et se préoccuper, de toute façon, de choses plus importantes.

Il avait été gentiment convié, une fois, dans un de ces établissements. Tout y respirait un luxe indécent, les filles étaient habillées d'une telle façon qu'elles auraient eu l'air moins obscène si elles avaient été totalement nues. Il se souvenait particulièrement de l'une d'entre elles. Un bandeau dissimulait un de ses yeux et, sur le velours noir, un œil grand-ouvert était brodé avec des pierres précieuses. A la demande du Gouverneur, on lui expliqua que c'était la nièce du célèbre « auror » Alastor Maugrey, emprisonné et exécuté quelques années auparavant, qu'elle était déjà arrivée borgne dans l'établissement mais qu'elle avait beaucoup de succès auprès des clients les plus blasés.

Le Gouverneur avait très envie d'aller s'allonger et de fermer les yeux. Les gardes emmenèrent les prisonniers. Le Gouverneur ordonna à l'officier de rester :

- Vous secouerez encore un peu le père et la mère : ils savent peut-être tout de même quelque chose. La lutte pour la sécurité de Londres doit être notre priorité. Vous me laisserez la fille : je l'interrogerai moi-même et je l'expédierai ensuite à l'orphelinat. Vous pouvez disposer.

L'officier conserva son air impassible, mais il n'en pensait sûrement pas moins. « Je l'interrogerai moi-même ». Cela devait fleurer bon l'abus de pouvoir et la concupiscence blasée que l'on tente de ranimer grâce au spectacle des larmes versées par l'innocence impunément bafouée ! Le Gouverneur ne nourrissait sûrement pas de telles intentions. Cependant, l'idée que quelqu'un dans sa position pût agir ainsi ne l'horrifiait pas pour autant. Sans doute, cela était-il dans l'ordre des choses : le plus fort usait du plus faible à sa guise, pour ses intérêts et son plaisir.

Mais que comptait-il, lui, tirer de cette fille ? Allait-il mettre dans son lit une enfant de quinze ans parce qu'elle ressemblait à la femme aux yeux doux ? Non. Ou peut-être bien que si ? Allait-il l'envoyer à la cuisine faire la vaisselle avec les elfes de maison ? Le Gouverneur se sentait comme s'il avait volé une chose dans un incongru mais irrésistible accès de cleptomanie et en avait maintenant honte, ne sachant absolument pas quoi faire de cette babiole qui ne lui était d'aucune utilité et semblait lui brûler les mains.

Une fois la matinée passée dans un brouillard de douleur lancinante, il se retira dans son bureau et fit appeler son intendante.

- Vous trouverez une jeune fille dans l'antichambre, lui déclara-t-il en se massant avec lassitude la tempe gauche. « Donnez-lui à manger et rendez-la présentable. Qu'elle soit chez moi ce soir, quand je serai rentré du Ministère. »

- Faut-il lui mettre un collier, Monsieur le Gouverneur, s'enquit froidement la domestique.

- Quoi ? Sur le coup, il ne comprit pas la question.

- Monsieur, je voulais savoir si c'était une nouvelle esclave. Si c'est le cas, je devrai l'installer quelque part et lui fournir un collier avec vos initiales, comme pour tous les autres.

- Ah, oui, en effet… Oui, c'est cela, il fit un geste vague. « Trouvez-lui un collier. »


Suite et fin au Chapitre 2

Souvenez-vous que l'auteur, ce petit animal farouche au poil soyeux et aux grands yeux suppliants, ne vit pas que de création et d'eau fraîche, mais aussi de reviews…

Autrement dit, je serais ravie de connaître vos impressions, critiques et avis, positifs comme négatifs !