Auteur : Maeglin Súrion

Précision : Hiei/Kurama et aussi Keiko/Yusuke sous-entendu.

Disclaimer : malheureusement pour moi et heureusement pour vous, les personnages ne m'appartiennent pas. Ils sont à Yoshihiro Togashi. Eh ouais. Il y a beaucoup trop d'injustices dans ce monde.

Infos : Les mots accentués et les phrases qui sont censées êtres dans une autre langue que celle parlée par nos amis (à savoir, le japonais) sont en italique. Les pensées des personnages sont en italique également et entre guillemets.

Bonne lecture ! J'espère que cette nouvelle fic vous plaira autant que j'ai eu plaisir à l'écrire :-)

Un peu de douceur dans ce monde de brutes...


Carpe diem

« Yusuke, Kuwabara, contactez Kurama et Hiei, j'ai quelque chose d'important à vous dire à tous. »

Un court silence suivit la demande de Genkai.

« Qu'est-ce que tu veux nous dire ?

― Yusuke, tu le saura en même temps que les autres. Contactez-les. Ouste ! »

Peu convaincu, Urameshi sortit son téléphone et composa le numéro de Kurama qui décrocha au bout de la quatrième sonnerie.

« Oui, Yusuke ?

― Salut Kurama ! Dis, je suis chargé par Genkai de te faire venir chez elle right now ! Elle voudrait nous dire un truc qu'elle refuse de nous dire si on n'est pas tous là.

― Rien de grave j'espère ?

― Elle ne veut rien nous dire...

― Bon, j'arrive.

― Euh, du coup, si tu pouvais ramener Hiei... Comme il n'a pas de téléphone, je peux pas le joindre, ajouta-t-il précipitamment.

― Ok, je m'en occupe.

― Merci, à toute !

― Ciao. »

Le mazoku raccrocha et hocha la tête.

« Il arrive et il s'occupe de contacter Hiei.

― Parfait, dit Genkai en se servant une tasse de thé. Je veux aussi Keiko, Yukina et Shizuru. Yusuke, va chercher les filles dans le jardin et toi, Kuwabara, appelle ta sœur. »

Elle coupa court à ses protestations avec un regard perçant et il s'exécuta.

« Elle prend le premier train pour l'orée de la forêt.

― Très bien, tu iras la chercher. »

De son côté, Kurama vidait son sèche-linge en même temps qu'il finissait de se brosser les dents, les deux n'étant pas particulièrement compatibles. Il posa la bassine à linge sur le sèche-linge et retourna finir de se nettoyer les dents dans la salle de bain du rez-de-chaussée. Il monta ensuite se changer puis, fin prêt, sortit chercher Hiei. Il le trouva dans un haut cerisier au cœur du parc de Mushiyori.

« Hiei ? Descends un moment s'il-te-plaît. »

Après un silence de quelques secondes, un doux bruissement de feuilles se fit entendre et Hiei sauta de l'arbre à quelques centimètres de Kurama. Tendu, celui-ci décida tout de même de ne pas reculer si Hiei n'aimait pas la promiscuité, il avait qu'à bouger lui-même...

« Bonjour, Hiei.

― Hn. Bonjour. Qu'est-ce que tu veux ?

― Genkai veut nous voir, maintenant. »

Il sentit le rouge lui monter aux joues et le masqua avec toute sa volonté. Il aimait passionnément Hiei depuis de nombreuses années et le sentir aussi près était à la fois délicieux et abominable. Ce dernier, étonnement, ne semblait pas gêné par la proximité. Kurama, nerveux, relança le sujet.

« On y va ? »

Au bout d'un moment pendant lequel le koorime sembla ailleurs, celui-ci finit par accepter.

« Hn. Allons-y. »

Deux heures plus tard, tout le monde était réuni dans une grande pièce de la villa de Genkai. Assis en rond, ils s'attendaient à ce qu'elle leur annonce la fin du monde à grand renfort de pluies de poissons et de mers de sang, avec son air grave et solennel.

Après avoir pris quelques gorgées de thé, elle reposa son bol et rouvrit les yeux pour les toiser l'un après l'autre. Au bout d'un moment qui leur parut interminable, la phrase tomba.

« Demain matin, à six heures pétantes, vous partez avec moi pour le grand Sekai Park ! »

Elle avait haussé le ton tout le long de sa phrase et la finit en tapant joyeusement des mains. Les autres restèrent interdits. Hiei ouvrit des yeux globuleux mais aucun son ne franchit ses lèvres. Curieusement, ce fut Kuwabara qui réagit le premier.

« Sekai Park ? Mais c'est TROP GÉNIAL ! » hurla-t-il en sautant sur ses pieds.

Le cri de Kuwabara déclencha une réaction en chaîne. Yusuke sauta en l'air et commença à danser en rond avec Kuwabara. Le visage de Keiko s'éclaira d'un large sourire et Shizuru soupira devant l'idiotie ambiante diffusée par les deux nigauds avant de sourire à Genkai. Kurama eut un rire nerveux et morigéna leur maître :

« Tu n'as pas honte de nous faire des frayeurs comme celle-ci ? On a bien cru que tu allais nous annoncer une horrible nouvelle avec ton air grave ! »

Il jeta un coup d'œil circulaire et s'aperçut que, si Hiei et Yukina semblaient avoir littéralement été figés, les autres avaient déjà oublié l'air grave en question. Il soupira.

« Justement, le taquina-t-elle avec un clin d'œil.

― Ce n'est pas drôle, Genkai, dit-il en secouant la tête. Mais je suis heureux que tu nous ait annoncé ça plutôt que l'anéantissement des Trois Mondes...

― Non, non, ça, ce sera pour une prochaine fois. »

Excédé, Kurama renonça à la réprimander et tourna la tête vers un Hiei qui avait l'air un peu perdu. Il se pencha légèrement pour accrocher son regard.

« Tu verras Hiei, c'est sympa les parcs d'attractions, surtout celui-ci, dit-il avec un tendre sourire.

― Très sympa même ! intervint Genkai. Yusuke, Kuwabara, on se calme maintenant ! Yukina, Hiei, vous verrez, les parcs d'attraction, c'est chouette. En plus celui-là est construit sur la thématique des pays du monde et il y a plein de restaurants avec des spécialités très variées. »

Cette dernière partie s'adressait particulièrement à Hiei mais celui-ci ne réagit pas. Impatients mais obéissants, Yusuke et Kuwabara se rassirent.

« Bien. Je vous attends donc chez moi à six heures demain matin. Soyez à l'heure. On part en voiture à six heures pour y être à l'ouverture du parc à neuf heures. »

Subitement, le jaganshi se réveilla :

« Trois heures de route, grommela-t-il, c'est à l'autre bout de la planète ton truc ? »

L'ignorant, Genkai poursuivit :

« Mettez des vêtements qui ne deviennent pas transparents quand ils sont mouillés, il y a des attractions qui risquent de nous asperger, mais étant donné la température annoncée, ça sera assez bienvenu !

― C'est clair ! L'Océanide et l'Atlantide sont trop géniaux ! s'exclama Kuwabara.

― Et la descente des rapides ! Ça, c'est top ! ajouta Yusuke.

― Donc, repris calmement Genkai, habillez-vous en conséquence et ne soyez pas en retard ! Sur ce, je vous libère ! Dormez bien et à demain ! »

Elle se leva et écarta les mains d'un air joyeux. Yusuke et Kuwabara sautèrent sur leurs pieds, survoltés. Amusée, Keiko entreprit de calmer son petit ami pendant que Shizuru embarquait son frère et sa folie loin de Yukina.

Hiei quant à lui était en pleine réflexion sur la journée du lendemain : plein de ningen, Yusuke, Kuwabara, Keiko, Yukina, Genkai, Shizuru et surtout Kurama... Tant de facteurs qui allaient à la fois lui donner envie et l'empêcher de s'amuser. Ses amis le rendaient nerveux. Les rares fois où il avait commencé à se détendre et à s'amuser, une pique de Kuwabara lui en avait coupé l'envie. Quant à Kurama... lorsqu'il était avec lui, il n'avait qu'une envie : lui sauter dessus et l'embrasser. Genkai le tira de sa rêverie.

« Hiei, essaye de te trouver des vêtements humains pour demain.

― Hn.

― Si tu veux bien Hiei, je t'aiderai, glissa Kurama.

― Comment ça ?

― Il est cinq heures, les magasins sont encore tous ouverts. Je te propose un rapide shopping histoire de te trouver une tenue, qu'en dis-tu ? »

N'obtenant aucune réponse, Kurama accrocha à nouveau le regard du koorime.

« Hiei ?

― Hn. D'accord. »

À la fois surpris et heureux qu'il accepte, Kurama sourit largement.

« Parfait. On y va ? »

Le jaganshi haussa les épaules et Kurama l'entraîna vers la grouillante Mushiyori des soirs d'été. Étonnement, Hiei ne faisait pas montre d'une mauvaise volonté particulière. Il essayait ce que lui proposait Kurama sans rechigner, mais quand il lui demandait son avis, il n'obtenait que de brefs « Hn. ». Devant l'étonnante coopération de Hiei, le yoko en profita pour lui acheter quelques autres petites choses. Quand ils sortirent du dernier magasin, le concerné risqua un regard peu convaincu vers les sachets. Devinant sa pensée, Kurama précisa :

« C'est pas uniquement pour demain.

― Hn. Je te rappelle que j'ai pas d'armoire...

― Moi, j'en ai une. D'ailleurs je t'ai déjà dit que tu pouvais venir chez moi quand tu voulais...

― Hn. »

« Tu parles que je vais venir chez toi... Ce serait une torture... mais en même temps, c'est terriblement tentant... » se dit Hiei.

Kurama n'ajouta rien mais sourit. Il amena Hiei chez lui où il déballa les vêtements et coupa les étiquettes.

« Je les mets ici, dit-il en indiquant une zone de sa penderie. Et ça, c'est pour demain, ajouta-t-il en posant des sous-vêtements, un jean noir et un t-shirt rouge et noir sur sa chaise de bureau. Tu n'auras qu'à passer chez moi demain matin pour te changer et on ira ensemble chez Genkai.

Hiei jeta un regard circulaire dans la chambre de Kurama : chaude, douillette, bien ordonnée, accueillante. Le lit deux places en son centre lui tendait les bras et il eut un pincement au cœur en pensant que son lit à lui se composait d'une branche noueuse, froide et dure. Au bout d'un moment de lourd silence, le kitsune posa une question qu'il regretta à la seconde même où elle franchit ses lèvres.

« Si tu veux passer la nuit ici, tu peux rester. »

Pris au dépourvu, Hiei le fixa puis marmonna :

« Hn. Non, fait trop chaud ici. À demain. »

Avant que Kurama ait pu ajouter quoi que ce soit, son ami était parti. Il alla à la fenêtre et souffla un « Bonne nuit, Hiei » pour lequel il n'espérait et n'eut aucune réponse.

La nuit, un violent orage éclata au nord de Mushiyori. Bien qu'étant en bordure de la perturbation, la ville fut largement secouée par les rafales et les roulements de tonnerre. De fait, Hiei passa une très mauvaise nuit, esseulé, réveillé et trempé jusqu'aux os. Lorsqu'il frappa à la fenêtre de Kurama le lendemain, c'est un rouquin aux larges cernes qui vint lui ouvrir.

« B'jour.

― Hn ! »

Kurama se réveilla totalement en découvrant l'air pitoyable du démon.

« Viens, entre. Tu es trempé, va prendre une douche, je mettrais tes vêtements à sécher. »

De mauvaise humeur, Hiei s'exécuta sans se fendre d'un remerciement. Une douche chaude ne pouvait que lui faire du bien. Pendant qu'il se lavait, le kitsune vint chercher ses vêtements pour les mettre à sécher. Il déposa la tenue préparée la veille sur le rebord de la baignoire et ressortit. Dix minutes plus tard, un Hiei propre, sec et habillé émergea de la salle de bain. Kurama ouvrit de grands yeux.

« Hiei ! Tu as oublié le bandage !

― Hn ? Quel bandage ?

― Le Dragon. » dit-t-il dans un souffle.

Le concerné jeta un coup d'œil surpris à son bras droit autour duquel s'enroulait le Kokuryuha, la forme au repos de son attaque la plus puissante : l'Onde de Feu du Dragon Noir. Il secoua la tête d'un air détaché.

« Ne t'inquiète pas, il y a bien un bandage. »

Devant l'air dubitatif de Kurama, il ajouta :

« Tu te souviens des entraves spirituelles avec lesquelles Yusuke s'entraînait ? »

Kurama hocha la tête.

« C'est le même principe : une fois posé, il devient invisible sans pour autant perdre en efficacité. Avec Genkai, on a bidouillé ce nouveau système de bandage parce que je ne pouvais plus supporter l'autre. »

Pour illustrer ses propos, il passa la main gauche par-dessus la droite et fit apparaître le sceau qui retenait le Dragon. Il l'arracha et le bandage apparu.

« Je vois, ingénieux. Et nettement plus esthétique. On dirait un simple tatouage.

― Hn. »

Toujours de mauvais poil, le jaganshi remonta légèrement son pantalon et ferma sa ceinture, histoire de mettre un terme à la conversation. Le message fut bien compris.

« Si tu es prêt, alors on peut y aller. »

Il indiqua la porte de sa chambre à Hiei qui se tourna vers son épée, posée contre le mur.

« Ne t'inquiète pas, personne ne viendra la prendre. Les seules autres personnes qui ont les clefs sont ma mère et mon beau-père et ils sont en vacances. Par ailleurs, je te rappelle que cet appartement est la propriété d'un youkai et est parsemé de plantes toutes plus aimables les unes que les autres. »

Hiei retint un sourire et sortit sans rien dire. Kurama le suivit peu après.

À six heures moins dix, tout le monde était dans les starting-blocks devant la villa de Genkai qui avait acheté un Combi il y a peu pour ce genre d'occasions.

« Bien ! On va pouvoir y aller – ça va être génial ! Shizuru, tu viens devant avec moi. Au milieu, je veux Yukina, Keiko et Yusuke et derrière, Kuwabara, Hiei et Kurama. Aussi, avant que quiconque ne s'amuse à protester, reprit-elle sévèrement devant l'air outré de deux bonhommes en particuliers, aujourd'hui est un jour où l'on s'amuse et où l'on profite ! De fait, le premier à faire une remarque désobligeante à un autre aura affaire à moi, et plutôt deux fois qu'une ! Suis-je claire ? Bien ! En voiture ! »

De mauvaise grâce, Kuwabara s'assit à côté de Hiei et boucla sa ceinture sous un regard rouge courroucé.

« Tout doux derrière... » les menaça leur maître.

Elle mit la radio et entama une discussion avec Shizuru. Dans le fond, bien que Hiei soit mal vissé et qu'il doive se farcir Kuwabara, il commençait à dodeliner de la tête. Après plusieurs claquements désagréables, il tourna ses yeux de sang vers le ningen. S'il avait eu des fusils à la place, Kazuma serait mort sur le coup.

« Tu vas arrêter ça oui !

― Quoi ? Mais je m'ennuie !

― Kuwabara, Hiei a raison, soupira Genkai, c'est pénible. Prends un bouquin, ta console ou je ne sais pas quoi d'autre mais arrête avec ces bruits, c'est pire que la sonnerie du réveil !

― Tiens ! Et nous emmerde plus ! lança sa sœur en jetant une console de jeu par-dessus la tête de Keiko. Je savais que tu oublierais de la prendre alors j'y ai pensé à ta place. Joue et ferme-la. »

Le ningen fit la moue mais retrouva sa bonne humeur en découvrant le jeu inséré à l'intérieur. Il l'alluma, coupa le son et commença à jouer. Yukina retourna à son livre et Keiko à la contemplation du paysage à travers le pare-brise. Yusuke alternait entre deux paysages : la campagne japonaise et le décolleté de Keiko. Quand elle s'en aperçu, elle lui mit une gifle.

Hiei, trop heureux que Kuwabara se taise enfin et bercé par la voix douce du chanteur du groupe L'Arc~en~Ciel sur leur chanson Dear, lutta à nouveau et finit par s'endormir. À un virage, sa tête retomba sur l'épaule de Kurama. Surpris, celui-ci tourna la sienne vers lui et rougit visiblement. Amusée, Genkai intervint :

« On dirait qu'il y en a un qui finit sa nuit ! En même temps, ajouta-t-elle plus doucement, avec l'orage qu'il y a eu, ça ne m'étonnerait pas qu'il n'ait pas fermé l'œil.

― Oui, il y a des chances, approuva Kurama après avoir repris contenance. Je le réveillerai quand on arrivera.

― Oui, laisse-le dormir. De toute façon on en a pour un moment. »

Effectivement, le temps était long et la thématique de la radio douce et relaxante. Au bout de deux heures de trajet, Kurama s'endormit à son tour après une longue lutte. Son cou se détendit et sa tête alla reposer sur celle de Hiei. Genkai, qui observait la scène dans le rétroviseur, sourit et échangea un regard entendu avec Shizuru. Les deux jeunes hommes étaient bien naïfs de croire que leurs sentiments réciproques échappaient à ces deux roublardes !

À dix minutes du parc, Genkai demanda à Kuwabara de réveiller les presque-tourtereaux.

« Réveille-les s'il-te-plaît. Gentiment ! »

Après avoir attentivement évaluer la situation en se retenant de rire, le ningen tendit maladroitement la main et la posa sur l'épaule de Hiei qu'il secoua doucement.

« Hiei ? Eh, Hiei ! Réveille-toi... »

La réponse qui lui parvint était plus un grognement qu'autre chose mais le jeune homme finit par ouvrir des yeux embrumés.

« Hn ?

― On arrive. Si tu veux bien réveiller Kurama... »

Encore ensommeillé, Hiei prit soudain conscience de la position de sa tête et de celle de Kurama. Il rougit et apprécia discrètement ce contact qu'il prolongea le plus possible en relevant discrètement la tête du kitsune avec son front.

« Kurama ? Réveille-toi, dit-il d'une voix douce.

― Hum... Hein ? Quoi ? »

Se rendant compte de la situation, le démon renard se redressa et empêcha difficilement le rouge de lui monter aux joues.

« Mince ! J'ai dormi aussi ?

― Oui, environ une heure. Le record est détenu par Hiei qui a dormi près de trois heures ! On applaudit Hiei. »

Les félicitations de Yusuke tombèrent à plat.

« Vous étiez tout mignons à dormir comme ça ! On aurait dit un joli petit couple ! » les charia Keiko.

Kurama manqua de s'étouffer avec l'air qu'il respirait et Hiei devint pâle.

« Allez, repris Genkai, réveillez-vous parce qu'on arrive, soyez en forme compagnons ! »

L'oxygène et le sang circulèrent à nouveau dans les corps des deux amis et ils se détendirent un peu, heureux de changer de sujet. Kuwabara et Yusuke avaient déjà oublié leur posture et étaient collés aux vitres comme des chiens, guettant l'apparition de la première partie du parc.

« Ça y est ! On arrive ! s'exclamèrent-ils en chœur.

― On s'en était un petit peu aperçu... » marmonna Shizuru.

Genkai ne supportait pas la cigarette et n'admettait pas que l'on fume en sa présence dans un espace confiné. Pour Shizuru, trois heures sans fumer n'était pas du domaine du possible et elle commençait à devenir particulièrement irritable. À peine eut-elle posé le pied sur le sol du parking qu'elle en alluma une et tira une longue bouffée. Ses amis lui lancèrent un regard réprobateur qu'elle ignora royalement. Hiei et Yukina quant à eux fixaient le grand huit avec un air ahuri.

S'il ne comportait aucun looping, le Ride of Steel était particulièrement impressionnant, surtout sa descente de plus de soixante mètres quasiment à la verticale et une vitesse de pointe de cent-trente kilomètres heure. Le train de ningen hurlants passa devant les yeux exorbités des deux koorime.

« Bienvenue à Sekai Park ! lança Genkai à l'intention des jumeaux. Le Ride est impressionnant mais il n'y a pas que ce genre de bestioles dans ce parc, fort heureusement.

― Comment ça « heureusement » ? C'est trop sensas les montagnes russes !

― Je suis très mais alors très loin de partager ton opinion Kuwabara.

― Hiei, t'aimes la vitesse non ? intervint Yusuke. Tu viens avec nous là-dessus ? »

Le jaganshi le regarda comme s'il venait de lui demander de sauter d'un pont d'une voiture en marche pour atterrir dans un verre d'eau.

« Quoi ? Là-dessus ? Je ne monte pas sur cette chose !

― Mais c'est trop génial ! s'écria Kuwabara.

― Mauviette. » glissa Yusuke.

Hiei ouvrit la bouche pour répliquer mais Kurama intervint :

« Je crois que les sensations fortes n'attirent qu'une minorité ici.

― Ouais, deux gugus, approuva Shizuru.

― Pas de panique, clama solennellement Genkai. Entrons dans le parc, nous verrons tout ça après. Voici vos tickets. »

Hiei, hypnotisé par cet environnement des plus bizarres, fut entraîné par Kurama qui prit son ticket et s'occupa de le valider avant de le lui mettre dans les mains.

« Hn. J'en fais quoi maintenant ?

― Tu le mets dans une de tes poches. Tu le gardes sur toi, répondit Genkai. Bien, Yusuke, Kuwabara, je suppose que vous voulez profiter du fait qu'il y ait encore peu de monde pour aller sur le Ride ? Bon. Moi je propose que vous y alliez de votre côté pendant que nous, entre gens normaux, nous pourrions par exemple aller au cinéma 4D, juste là.

― 4D ? intervint machinalement Hiei.

― Oui, son, image, relief, mais aussi odeurs et sensations ! C'est high-tech et c'est trop bien, j'y suis allée une fois, argumenta Keiko. Je suis partante !

― Moi aussi ! s'enthousiasma Yukina.

― Ça a l'air sympa votre truc. Je viens aussi, ajouta Shizuru. »

Ne sachant que répondre et peu attiré par la perspective d'un film, Hiei se surprit à observer Kurama. Au bout d'un moment, ce dernier croisa son regard et prit une décision.

« Honnêtement, je ne suis pas venu dans un parc d'attractions pour aller voir un film, commença-t-il. Tu veux venir avec moi, Hiei ? »

Enchanté, le concerné eut grande peine à dissimuler son enthousiasme mais hocha la tête d'un air égal.

« Oui, je viens.

― Parfait, reprit Genkai. Trois intérêts différents, trois groupes ! C'est en gros ce que j'avais prévu, dit-elle en faisant un clin d'œil à Shizuru. Yusuke, Kuwabara, vous n'avez qu'à aller vous faire peur sur ces horribles choses. Les filles, venez avec moi, on va se faire un film entre copines et plein d'autres trucs bien zens. Kurama, Hiei, bonne balade de votre côté ! »

Les deux ningen foncèrent ventre à terre se mettre dans la fille déjà dense du grand huit tandis que les filles se dirigeaient calmement vers le cinéma.

« Viens Hiei, on va commencer par le fond du parc. Tout le monde se précipite sur les attractions à l'entrée : ça sera plus calme. On va prendre le train. »

Perplexe, le brun le suivit jusqu'à un petit train jaune qui avait tout l'air d'être un très grand jouet. Kurama monta dans l'un des wagonnets et Hiei s'installa à côté de lui.

« Au fait, ne te sens pas obligé de m'accompagner si tu as envie de faire autre chose.

― Je n'ai aucune envie de faire du rodéo avec ces deux zouaves et un film ne me tente pas. Je préfère venir avec toi.

― Tu me rassures. Je ne voudrais pas te forcer... Je n'aime pas les attractions à sensations fortes, aussi tu n'as pas besoin de t'inquiéter quant aux endroits dans lesquels je vais t'emmener. »

Hiei ne répondit pas mais amorça un sourire qui fit bondir le cœur de Kurama. Il s'interrompit lorsqu'un couple et leur jeune garçon vinrent s'asseoir en face d'eux. Kurama leur fit un bref sourire quoique vexé mais Hiei ne broncha pas. Au bout d'un moment le garçonnet se mit à s'amuser à donner des coups de pieds dans les genoux de Hiei. Ce dernier lui jeta un regard noir qui le transperça et sa voix profonde et glaciale le cloua sur place :

« Arrête ça immédiatement. »

Terrorisé, le garçonnet baissa les yeux et hocha la tête. Hiei laissa peser ses yeux sur le gamin encore quelques instants puis pris sur lui et les tourna dans le même sens que ceux de Kurama.

« Regarde, Hiei. »

Sans savoir de quoi son ami parlait, le jaganshi scruta le petit bois qu'ils traversaient et distingua de faux animaux. Il lança un regard interrogatif à Kurama.

« C'est un décor, lui dit-t-il. Comme c'est un parc à thème, ils s'appliquent à recréer certains environnements. »

Curieux, Hiei hocha la tête et continua d'observer les alentours, jetant au passage un nouveau regard noir au garnement qui se tassa au fond de la banquette. Il mit quelques secondes à réaliser que Kurama lui avait parlé en français...

« Pourquoi tu me parles en français ?

Parce que je sais que tu le comprends, répondit-il en souriant, et que ce que j'ai à te dire ne regarde pas ces gens. »

Il passa la main dans ses cheveux et en sortit discrètement un livre : Notre-Dame de Paris de Victor Hugo.

« Je l'ai pris pour le sécher : il était dans ta cape. J'ai des plantes plutôt douées en récupération de livres abîmés par l'eau. J'ai oublié de le sortir ce matin mais je voulais te demander si je pouvais te l'emprunter. J'aimerai beaucoup le relire.

Hn. Si tu veux.

Merci. » lui dit-il en remettant discrètement le livre derrière le rideau flamboyant.

Le jaganshi ne répondit pas et le silence se réinstalla alors qu'il promenait son regard sur les choses particulièrement bizarres qui défilaient aux côtés du train. Il avait déjà vu un parc d'attractions, il y en avait un à Mushiyori, mais cela n'avait rien à voir. Celui-ci était au moins dix fois plus grand et très extravagant.

« Au fait, où as-tu appris le français ?

Hn. En lisant.

Tu es déjà allé en France ? »

Hiei retint un grognement mécontent. Il aurait bien aimé que le professeur de français qui lui servait d'ami cesse de le questionner et qu'il lui explique plutôt ce qu'il voyait.

« Oui. Quelques fois.

Comment ? Où ? »

Le koorime lui jeta un regard réprobateur qui disait clairement « Veux-tu bien me lâcher ? » mais c'était sans compter sur le côté particulièrement buté de Kurama.

« A pieds. Ou par téléportation quand j'avais pas envie de marcher. Surtout vers Paris. J'ai aussi fait un saut rapide dans le Pays de la Loire, mais c'est tout. »

« C'est vrai que Hiei peut se téléporter... » se rappela Kurama.

« J'aimerai beaucoup aller en France, dit-il pensivement. Tu m'emmènerais dis ? Je n'ai pas la capacité de me téléporter. »

Hiei haussa les épaules.

« Si tu veux, mais je te préviens : je n'ai jamais tenté la téléportation avec quelqu'un.

Peu importe. J'ai toute confiance en toi. »

Le roux sourit sincèrement et Hiei se perdit dans ses pensées. Aller en France avec Kurama... Certes, ils s'intéressent aux mêmes choses et ils parlent tous les deux français, mais cela voudrait aussi dire une présence quasi permanente et une promiscuité à la fois délicieuse et terrible. Comme présentement...

La voix criarde du conducteur le tira de sa rêverie.

« C'est là qu'on descend. » lui dit le yoko.

Sans répondre, Hiei se pencha pour voir en dessous du toit bas du wagonnet et écarquilla les yeux. Une grosse enseigne clignotante affichait les mots « BLUE TWISTER » au-dessus d'une entrée imposante, juste devant un grand huit à loopings. Devinant les pensées de son ami, Kurama lui toucha le bras.

« Ne t'inquiète pas, ce n'est pas là qu'on va !

― Hn ! J'aime autant ! »

Un sourire lui répondit. Le train-jouet s'arrêta dans un crissement et la plupart des passagers descendirent. Hiei se déplia avec plaisir. Le train n'était pas particulièrement confortable et il avait passé le voyage à se tourner dans tous les sens pour regarder partout. Il se retourna en sentant la main de Kurama sur son épaule.

« Je te propose un petit déjeuner, qu'en dis-tu ? »

Devant l'air interrogatif de son ami, Kurama désigna sa gauche.

« On est dans le quartier islandais. Chaque quartier est thématisé suivant un pays bien précis, avec des attractions en rapport avec ledit pays et des bars, restaurants et cafés, avec des spécialités de là-bas. Je t'invite. » ajouta-t-il en l'entraînant à l'intérieur, vers le comptoir.

Si la caissière avait un fort accent islandais, elle parlait assez bien japonais et très bien anglais. Kurama n'eut aucun mal à commander leurs deux cafés et jus d'oranges, ainsi que quelques pâtisseries.

Ils s'installèrent sur la terrasse, parallèlement au Blue Twister sur lequel filait un train plein de ningen hurlants. À cette vue, Hiei secoua la tête. Il ne comprenait pas comment on pouvait aller se faire peur volontairement sur des machines de ce genre.

« Itadakimasu ! » s'exclama joyeusement le rouquin avant de commencer à manger.

Hiei ne répondit pas mais sourit. C'était drôle de voir ce légendaire démon renard autrefois réputé pour sa grande cruauté s'attacher à des traditions futiles comme celle qui précède chaque repas même très bref. Il avait bien changé ! Mais il n'était pas le seul. Le jaganshi aussi avait changé. Il était moins froid, moins orgueilleux, plus... sentimental ? Il attachait désormais beaucoup plus d'importance à ce que ressentaient ses amis, à ce qu'ils pensaient de lui. Surtout à ce que Kurama pensait de lui, à vrai dire.

Perdu dans ses pensées, il ne vit pas tout de suite que Kurama l'observait, bien qu'il le regardât dans les yeux.

« Quoi ? »

Son ton désagréable l'étonna lui-même mais le kitsune passa outre.

« Tu es content d'être ici ? »

Surpris par la question, Hiei laissa ses yeux divaguer de droite et de gauche avant de répondre d'un air assez maladroit.

« Oui. »

Le large sourire qui éclaira le visage de son ami lui mit du baume au cœur. Il ne vivait que pour ça : les sourires de Kurama. Il eut un frisson et se força à retourner à son petit déjeuner pour éviter de rougir et tâcher de garder son masque impassible. Le roux n'insista pas et but son café en jetant de temps à autre un coup d'œil vers le grand huit. Au bout de quelques minutes, il se décida à expliquer ses projets immédiats à Hiei.

« Après tout ça, je te propose de traîner un peu du côté du quartier grec. Il y a aussi une montagne russe mais elle est beaucoup plus tranquille que les deux qu'on a vu jusque-là. J'étais déjà dessus et j'avais bien aimé. Par contre, ça mouille un peu ! mais vu la chaleur, ça ne peut que nous faire du bien. »

Il fit une pause pour observer une éventuelle réaction mais, n'obtenant rien, il reprit :

« J'ai aussi envie de t'emmener dans le Sífonas, un manège pendulaire qui consiste en une sorte de pièce, comme une pièce de maison, avec meubles et compagnie, qui tourne sur elle-même. Nous, on est assis au centre sur une sorte de balancier et la pièce tourne autour de nous. On y perd ses repères. C'est assez déroutant mais c'est une chose à faire.

― Ça a l'air... bizarre...

― Ça l'est. Tu veux essayer ?

― D'accord, dit-il après un court silence. Emmène-moi où tu veux, je suivrais. »

À la fin de sa phrase, Hiei faillit rougir. Le sens en était bien plus large que le parc d'attractions. Si le double sens n'échappa pas à Kurama, il mit cela sur le compte de sa propre imagination – beaucoup trop fertile en ce qui concernait Hiei – et reprit, enthousiaste :

« Parfait. Tu vas voir, ce sera une belle journée ! »

Un sourire échappa à la vigilance de Hiei et souleva les commissures de ses lèvres. Il hocha la tête. Oui ça allait sans doute être bien, mais si seulement ils pouvaient... Hiei ne pouvait se permettre autre chose que de le rêver. Kurama ne voudrait jamais d'un Enfant Maudit tel que lui, mais rien que le fait d'avoir Kurama pour lui tout seul était déjà fantastique car c'était pour lui la seule chose qu'il aurait jamais.

Ils ne mirent pas longtemps à terminer leur petit déjeuner islandais et le koorime se laissa entraîner vers le quartier grec tout proche. Ils débouchèrent juste en face de l'Océanide, la montagne russe dont Kurama avait parlé. C'est vrai qu'elle n'était pas très haute, mais elle avait une bonne descente. Hiei eut quelques hésitations mais décida de passer outre : c'était une autre occasion de passer du temps avec Kurama. Ce dernier l'entraîna d'abord vers un bâtiment allongé et dépouillé de style grec sur lequel figurait en lettres stylisées l'inscription « Sífonas ».

Une fois à l'intérieur, Kurama invita Hiei à s'asseoir. Il se trouvait vers le milieu du balancier, assit à côté d'un homme d'une trentaine d'année, visiblement étranger. La pièce était assez grande, avec des fresques, des colonnes, des tapis et des plats évoquant une maison de la Grèce antique. Lorsque tout le monde fut installé, une barre de sécurité leur descendit sur les genoux et une musique s'enclencha. Rapidement, la pièce se mit à tourner sur elle-même autour de la balançoire qui oscillait elle aussi d'avant en arrière. Malgré le fait qu'elle ne se retournait à aucun moment, on en était totalement dérouté et on avait l'impression de faire des saltos avec la pièce comme si on se trouvait dans un tambour de machine à laver.

Kurama profita du fait que Hiei soit occupé à scruter les moindres recoins de la pièce pour lui effleurer la main d'un geste tendre. Lorsque le koorime tourna la tête vers lui, il fit mine de ne pas s'en être rendu compte et garda la tête tournée vers le côté opposé.

« Si seulement tu l'avais fait exprès... » pensa tristement Hiei.

Il écarta un peu sa jambe gauche qui vint se caler contre celle du kitsune, l'air de rien, mais celui-ci ne réagit pas. Le balancier fit encore deux-trois mouvements puis s'arrêta. Lorsqu'il se leva, Kurama fit l'étourdit pour retomber vers son siège et se rattraper en posant sa main sur la cuisse de Hiei. Ce dernier l'aida à se remettre d'aplomb, laissant glisser sa main le long de son bras avant de le lâcher.

« Tombes pas.

― Ça va, merci. Je me suis juste levé un peu vite. »

« J'espère que je n'en fait pas un peu trop... On dirait une grosse greluche complètement débile... Oh et puis merde, si il faut ça ! » se dit Kurama en sortant du manège.

« Alors, tu l'as trouvé comment, le Sífonas ?

― Assez... étrange. Drôle de baraque, ajouta Hiei avec une pointe d'humour.

― Tu l'as dit ! »

Ils s'écartèrent du bâtiment pour se retrouver devant l'arrivée de l'Océanide. Un visiteur debout devant un gros dauphin en plastique arrosait les passagers du bateau avec la bête qui n'était rien d'autre qu'un grand pistolet à eau.

« Un petit plongeon ?

― Allez. »

Cette fois, la queue était plus conséquente, une vingtaine de minutes, mais ce n'était rien comparé aux jours d'affluence, ce que Kurama ne manqua pas de préciser à un Hiei peu patient.

« Les ningen attendent vraiment des heures pour faire un tour de... quoi ? Une minute ?

― Hiei, le reprit discrètement Kurama, ne les appelle pas comme ça, tu es censé en être un aussi ! Et oui, ils attendent des heures pour ça. Ça vaut quand même le coup, ce n'est pas tous les jours qu'on vient dans ce genre d'endroits. »

Comme toujours, les arguments de Kurama étaient en acier. Hiei renonça et se contenta de hocher la tête en signe d'acceptation. Contrairement à ce à quoi il s'attendait, le groupe avança assez vite et serpenta entre de hauts murs qui étaient en fait une reproduction du palais de Cnossos, en Crète.

Arrivés dans la grande salle qui permettait d'embarquer sur les bateaux, les visiteurs se firent canaliser dans les différentes files qui menaient aux différentes rangées des bateaux. Hiei et Kurama se retrouvèrent à l'avant, le jaganshi au bord de gauche, Kurama à sa droite et deux jeunes japonais à son côté.

« Navré Hiei mais tu te retrouves à la place la plus exposée aux gerbes d'eau...

― Hn. Pas grave. J'ai chaud. »

Au signe du kitsune, il leva les bras pour permettre à la barre de sécurité de s'abaisser. Quelques secondes plus tard, la machine s'ébranla et ils glissèrent d'abord calmement sur l'eau entre des murs et des épaves de bateaux en cale sèche jusqu'à un tapis roulant qui les mit sur les rails. Tout en haut, la barque s'inclina et piqua du nez. Hiei serra les dents. Il n'avait jamais eu confiance en les inventions ningen et le fait qu'il soit cloué à celle-là par la barre ne lui plaisait pas. Cependant, Kurama avait l'air content et c'était tout ce qui lui importait. Ils glissèrent et partirent directement dans un virage à gauche, puis un autre encore plus long qui les fit remonter en gagnant en vitesse. La main de Hiei agrippa la barre dans un réflexe lors d'un à-coup, contre celle de Kurama. Ce dernier posa la sienne sur celle de son ami.

« Ne t'inquiète pas, c'est solide.

― Hn. Je n'ai pas peur. »

Sans répondre, le rouquin caressa brièvement le dessus de la main de Hiei en retirant la sienne et la reposa exactement à son emplacement d'origine. Crispé, le jeune homme aux cheveux sauvages malmenés par le vent ne se rendit compte de rien.

Dans les virages, le wagon s'inclinait beaucoup vers l'extérieur et Hiei se demanda s'ils n'allaient pas finir dans l'eau. Après un nouveau virage, le bateau quitta les rails et entra dans l'eau. Il ralentit fortement et se mit à flotter paisiblement vers une nouvelle montée. Tout en haut, ils partirent lentement dans un virage à droite puis, sans crier gare, le bateau piqua du nez et descendit à vive allure vers une grotte. En voyant l'eau bouillonnante en bas, Hiei ferma les yeux par réflexe. La barque plongea dedans et remonta immédiatement pour franchir une bosse et sortir à l'air libre dans de nouvelles gerbes.

Mouillé, Hiei rouvrit un œil puis les deux, se demandant si c'était bien fini. Il avait le haut de la poitrine et du dos mouillé, de même que la jambe gauche. Kurama quant à lui, riait en secouant son t-shirt, unilatéralement gorgé d'eau.

« Ouh ! Ça fait du bien dis !

― On peut dire que c'est rafraîchissant.

― C'était sympa, non ? »

Le sourire que lui fit Kurama hypnotisa Hiei. Il hocha machinalement la tête sans dire un mot. Lentement, le petit navire glissa devant le ponton des touristes et entra dans un temple dorique contenant la salle dont ils étaient partis. En sortant, Hiei décolla un peu son t-shirt de sa peau mouillée et l'essora. Le kitsune savoura la vue de sa peau dorée humide et remarqua une marque noire sur son épaule. Il s'approcha et souleva la courte manche.

« Ah ! Tu as un tatouage ? »

Surpris, Hiei ne sut d'abord que dire. Il avait oublié qu'en manches courtes, Kurama avait toutes les chances de voir cette petite œuvre...

« Hn. »

Le jeune homme pencha un peu la tête et détailla le dessin d'un noir parfait. C'était un joli rinceau enroulé de façon assez lâche autour d'une fine flèche dirigée vers l'avant.

« Il est très réussi, j'adore.

― Merci, souffla Hiei.

― Tu l'as depuis longtemps ?

― Quelques mois.

― Shigure ?

― Évidemment. »

Kurama sourit. Ça l'aurait aussi étonné que Hiei laisse quelqu'un d'autre que le chirurgien des Ténèbres lui faire une quelconque modification corporelle. Il regarda à nouveau le tatouage. Il semblait être du même style que le traditionnel cœur percé d'une flèche que beaucoup d'hommes ont sur leur bras, mais à la place du cœur, il y avait une plante. Une plante... Le cou du jeune homme se tendit. Et si le rinceau le représentait, lui ?

Hiei était intérieurement pris de panique. Il savait pertinemment que Kurama était intelligent, très intelligent même. Comment ne pourrait-il pas faire le lien entre ce tatouage banal et lui ? Il redescendit sa manche et ébouriffa ses cheveux, faisant tomber des gouttelettes.

« Au fait ! J'y pense, s'exclama Kurama pour changer de sujet, viens. »

Sans plus d'explications, il mena Hiei vers un stand où se massaient de nombreuses personnes. Il leur fraya un chemin dans les ningen et désigna une télévision du doigt. À son grand désespoir, Hiei y découvrit une photo de la descente : les passagers de l'embarcation les bras levés, un grand sourire sur le visage, Kurama inclu, et lui, les yeux fermés, la tête rentrée dans les épaules et les mains fermement agrippées à la barre. Bonjour l'image du démon puissant. Il réalisa soudain que les autres passagers allaient acheter ladite photo et auraient les deux amis dans leur album souvenir. Cette idée lui déplu au plus haut point.

« S'il vous plaît ? Je voudrai la cinquante-cinq. » demanda le kitsune.

Le photographe lui imprima la photo et la plaça dans une pochette cartonnée portant le nom de l'attraction et la date.

« Voilà, 2 150 yens je vous prie. Merci.

― Merci, bonne journée. »

Il ressorti Hiei de la foule. Ce dernier fut rassuré de constater qu'aucun des passagers de leur bateau n'avait acheté la photo. C'était déjà ça. Il risqua un coup d'œil vers l'exemplaire de Kurama.

« Hn. C'était vraiment nécessaire ?

― Excuse-moi, lui dit-il en souriant, j'ai oublié de te prévenir qu'une photo était prise dans la dernière descente de chaque montagne russe. »

Les yeux rouges le toisèrent d'un air soupçonneux mais aucune remarque ne vint.

« Je la trouve super.

― Hn !

― Hiei ! Ne te vexe pas. De toute manière, il y en aura d'autres. »

Il lui fit un clin d'œil et Hiei soupira. Manquait plus que ça ! Qu'est-ce qu'il ne fallait pas faire par amour, quand même !

À l'écart de la foule, le roux rangea discrètement la photo dans ses cheveux et prit une grande inspiration.

« Dans le quartier espagnol, juste là, il n'y a rien qui puisse nous intéresser. Un spectacle est donné dans l'arène chaque jour mais je ne pense pas que cela te fasse envie. C'est une sorte de pièce de théâtre avec hommes et chevaux. À part ça, on peut aller dans l'autrichien juste à côté, on y trouve des trucs plus intéressants.

― Hn. Te suis. »

Lui tournant le dos, Kurama fit une grimace.

« Aïe. J'espère que je ne l'ai pas trop refroidi avec mon coup de la photo... » espéra-t-il.

Rapidement, Hiei vint à sa hauteur et ils traversèrent la mini-Espagne. En passant devant l'arène, ils croisèrent une calèche tirée par deux gros chevaux percherons. Leurs sabots ferrés résonnaient sur le macadam. Attiré comme par un aimant, le démon du feu passa doucement le revers de ses doigts sur les naseaux veloutés d'un des étalons. Il sourit quand le cheval mit les oreilles en avant. Kurama l'attendit patiemment mais ne releva pas, trop heureux d'avoir été témoin de cet instant furtif de douceur chez Hiei.

Ils passèrent sous un arc fleurit et entrèrent dans la petite Autriche. Kurama mena habilement son ami dans un endroit qu'il aimait bien : Le Monde Magique des Diamants. Un endroit aménagé pour un parcours scénique avec de nombreuses imitations de pierres précieuses qui donnent une ambiance particulière. Occupé à regarder partout, Hiei ne remarqua pas quand le bras du kitsune se colla au sien. Vaine tentative que Kurama décida de renouveler plus tard.

En sortant, il désigna l'Express.

« J'aime bien ce petit train, on y va ?

― D'accord. »

La file était assez longue mais se désengorgea vite. Ils prirent place dans le train qui partit à bonne allure dans plusieurs virages. Il entra ensuite dans la pièce du parcours scénique dans laquelle ils étaient passés à pieds tout à l'heure. Le train passa à proximité d'une gerbe de feu puis ressortit pour filer vers la gare qu'il passa sans s'arrêter.

« Ce train effectue toujours deux tours. » expliqua Kurama.

À l'arrivé, Hiei se rendit compte qu'il commençait à apprécier les parcs d'attractions. Il fut d'ailleurs ravi d'apprendre que cette attraction-ci ne comportait pas de photo. Mené par un yoko motivé, ils passèrent dans le Bōken no sekai, un petit quartier à part avec deux attractions relaxantes.

« Regarde, ça va faire du bien après toutes ces émotions ! Qu'en dis-tu ?

― Ça a l'air sympa, approuva Hiei.

― Viens, commençons par l'African Quest, c'est le plus long et il n'y a presque personne. »

Obéissant, le koorime le suivit jusqu'au Mark Twain, l'un des deux navires qui faisaient le tour du lac. Le fait qu'il y ait peu de monde leur permit d'avoir une rangée pour eux seuls et ils en profitèrent pour s'étaler. En posant la main sur la banquette pour réajuster sa position, Hiei effleura celle de Kurama. Il la retira sans trop de hâte et reprit sa contemplation du paysage. De grands et vieux arbres le bordaient et ils avaient une vue panoramique sur le petit Univers. Kurama montra les autres bateaux à Hiei.

« C'est l'autre parcours zen : le Jungle Quest. C'est sympa, avec des scènes d'animatroniques. »

Le jaganshi montra qu'il écoutait d'un signe de tête et retourna à sa contemplation. Le tour se faisait au rythme lent du bateau à vapeur et ce laps de temps ne faisait que les mettre mal à l'aise : le silence s'était installé et tous deux avaient envie d'effleurer l'autre sans oser le faire. Finalement, l'embarcation passa devant le rocher aux éléphants. De la trompe d'un d'entre eux jaillit un jet d'eau qui tomba à quelques mètres du Mark Twain. Ils purent apercevoir le quai.

« Ce n'est pas trop tôt », pensa Hiei.

Hors du bateau, Kurama jugea bon de reporter à plus tard la croisière dans la jungle et invita son ami à passer en Scandinavie. Il avait faim bien qu'il ne soit pas encore midi et c'était une zone qui comportait des restaurants intéressants et pas mal d'autres choses susceptibles de plaire à Hiei.

Ce dernier, qui marchait le nez en l'air, ne remarqua pas tout de suite que Kurama s'était arrêté. Il revint sur ses pas et l'interrogea du regard. Sans répondre, le roux désigna quelque chose derrière Hiei d'un signe de tête.

Il se retourna et découvrit une immense sculpture de grand requin blanc empêtré dans un filet de pêche et suspendu la tête en bas contre un mur. Des gens se faisaient prendre en photo avec lui ou dans sa gueule grande ouverte. Quand les ningen se furent écartés, il s'approcha, quelque peu dubitatif pour toucher la bête. Kurama prit discrètement une photo.

« Tu veux bien me prendre en photo avec ? Ça va être drôle.

― Hn.

― Tu appuie là quand tu...

― Je connais ! »

Kurama laissa son petit compact dans les mains du youkai et fila se placer sous le requin. Il mit un genou à terre et leva les mains pour les placer de part et d'autre de sa gueule ouverte. Il bascula sa tête en arrière avec une expression de fausse terreur sur le visage. Hiei se retint difficilement de rire et prit deux photos dont une en gros plan. Le kitsune éclata de rire en découvrant la scène.

« Ah oui, à ce point là, quand même ! Merci. À ton tour ! »

Il poussa Hiei vers la bête. Après un court moment d'hésitation, celui-ci s'approcha et regarda à l'intérieur de la gueule pleine de dents. Il tira un peu dessus pour s'assurer de la solidité de l'ensemble puis plaça ses bras contre les parois internes de la bouche du requin, se souleva du sol et leva les jambes d'une façon désordonnée, comme si il était entrain de se faire gober. Hilare, Kurama prit plusieurs clichés tandis que Hiei changeait de position. Pour finir, il sortit le haut de son corps d'un côté et les jambes de l'autre, laissant les bras à l'intérieur, tournant la tête en arrière vers la tête du squale. Le kitsune prit une énième photo, croyant difficilement ce qu'il voyait.

Hiei finit par retoucher terre et alla voir l'ampleur du désastre sur l'écran de l'appareil. Voyant la scène, il ne put s'empêcher de rire nerveusement.

« Tu es un sacré modèle ! C'était trop bien ! »

Kurama éteignit le petit compact et le remit dans sa housse protectrice. Désignant le Lakshuset, il ajouta :

« Ça te dis de casser la croûte ? Leurs sandwichs au poisson sont de véritables tueries. »

Comme si Hiei pouvait passer à côté d'une occasion de manger...

« Et comment ! »

Cette fois-ci, le premier devant le comptoir n'était pas Kurama. Leurs sandwichs achetés, ils allèrent les grignoter au dessus des rapides. De grosses bouées rondes pleines de ningen bruyants et trempés passaient sous eux à vive allure. La bouche pleine, Kurama expliqua :

« C'est le Fjord Rafting. Je crois que c'est l'attraction où la file d'attente est la plus longue en été dans ce parc. Deux heures en moyenne. »

Devant l'air absolument effaré de Hiei, il ajouta :

« Ne t'en fais pas, je crois qu'on a été assez mouillé pour le moment. »

Il prit une autre bouchée de poisson et en apprécia longuement la saveur, les yeux dans le vague. Au bout d'un moment, il déglutit et dit :

« Pour le repas de midi, je t'emmènerai à la Petite France, un restaurant français dans le quartier... français. Le chef est français, ça sera comme là-bas !

― Chouette ! » laissa échapper le koorime, trop heureux de constater que le sandwich scandinave n'était qu'un en-cas.

Amusé, Kurama hocha la tête avec un regard l'air de dire : « T'as eu peur qu'on ne mange que ça hein ? » et Hiei haussa les épaules dans un geste qu'il voulait faussement dédaigneux qui fit rire le kitsune. Hiei sourit également quand il su que son ami ne regardait pas. Il commençait à se détendre et à pleinement profiter des moments qu'il passait avec Kurama, ayant décidé de les savourer autant que possible. Sous eux, deux bouées se percutèrent ce qui eut pour seul effet de faire rire les ningen à leur bord.

« Qu'est-ce que tu penses du sandwich ?

― Pas mal. Où on va après ? »

Heureux que le jaganshi s'y intéresse, Kurama cacha difficilement son enthousiasme.

« On peut se balader un peu dans le quartier scandinave, il y a des tas de trucs sympas dont un magasin de souvenirs vikings, une église norvégienne en bois, ou encore une petite tour panoramique sur le thème des contes d'Andersen.

― Ça a l'air bien. » approuva Hiei.

Il termina son sandwich et fit une boule de son papier et de sa serviette. Son ami se pencha vers lui et le poussa légèrement de l'épaule.

« On y va ? »

Un signe de tête lui répondit par l'affirmative. Après avoir mis leurs déchets à la poubelle la plus proche, ils retournèrent dans la grande rue bordée de bâtiments pittoresques. L'église en bois se dressa soudain sur leur côté, grande, sombre et austère. Après un regard entendu, ils pénétrèrent dans l'édifice et firent silence. Hiei avait toujours eu un faible pour les architectures de ce genre et observait tout avec la plus grande attention. La nef n'était pas très longue ni très large. Les deux bas-côtés étaient séparé d'elle par des arcatures sur lesquelles reposait un niveau de galerie. L'ambiance était feutrée et les fresques christiques colorées.

« Apparemment, dit Kurama quand ils furent ressortis, c'est la réplique exacte d'une église de Norvège. Très belle architecture.

― Et belle décoration.

― Aussi.

― Ah ! Regarde, le magasin viking. »

Il fit deux vaines tentatives pour prononcer le nom du magasin de souvenirs mais finit par renoncer sous les ricanements de Hiei.

« C'est ça, marre-toi ! Prononce-le si tu l'ose ! »

Après un silence pendant lequel Hiei lut attentivement l'enseigne du Wiking Haithabu, il prit une grande inspiration comme si il allait expliquer l'origine de l'Univers là tout de suite, et se rata.

« Finalement, non. » conclu-t-il.

En plein fou rire, Kurama leva les bras en signe d'abandon.

« Tant pis ! Entrons. »

« Mon Dieu mais que n'ai-je pas raté en passant si peu de moments de ce genre avec lui ? Est-ce là le vrai Hiei ? Celui qui se cache obstinément derrière le masque froid du Monstre aux Cent Yeux ? Je l'espère de tout cœur. » pensa furtivement Minamino.

Au milieu des peluches, porte-clefs et autres breloques trônait fièrement un phare gris et blanc. Autour de lui se trouvaient des paniers avec des coquillages, crabes et étoiles de mers séchés. Soudainement, Hiei sentit une présence sur son épaule droite et tourna la tête pour se retrouver nez à nez avec une peluche dauphin aux yeux de merlan frit. Il recula, amusé et le regard taquin, et leva une corne de vache comme si il voulait trinquer.

« A la tienne, l'ami.

― Sympa comme vaisselle de table. »

Hiei se détourna pour remettre le récipient à sa place et Kurama l'interpella.

« Et que dis tu de ça ? »

Il se retourna pour découvrir un rouquin – on ne renie pas indéfiniment ses origines – coiffé d'un casque cornu de Viking, une arme en mousse à la main.

« Même pas peur ! » dit fermement le brun sans ciller, un sourcil levé.

Kurama fit une moue mauvaise et comique avant de poser le casque et de prendre deux porte-clefs différents et une boule à neige.

« Je vais prendre ça pour mes parents et mon frère, ça leur fera un petit souvenir. »

Il retourna la boule à neige et sourit en voyant la poudre retomber.

« J'aime bien ces choses là. Shuichi les collectionne je suis prêt à parier qu'il ne l'a pas encore celle-là. »

Il la donna à Hiei qui tendait la main vers lui. Le koorime fut surpris par le poids de la boule. La retournant, il attendit que la neige se pose sur le haut pour la remettre d'aplomb.

« C'est assez hypnotisant.

― C'est vrai. Quelque chose te tente ? »

Hiei fit « non » de la tête et ils passèrent en caisse. Une fois encore, les objets passèrent derrière le voile ondoyant des cheveux du kitsune.

Les créateurs du Sekai Park s'étaient donné du mal pour les décors. Les quartiers étaient tous très attrayants rien que pour le plaisir des yeux. Et puis tous ces snacks et restaurants laissaient planer de délicieuses odeurs dans l'air. Des odeurs qui donnaient faim.

« On est assez loin du quartier français, mais je te propose d'y aller directement pour manger. Après, on pourra faire quelques manèges de ce quartier avant de revenir sur nos pas : les quartiers de la Suisse, de la Russie et des Pays-Bas sont très intéressants.

― Oui, ça me va. »

En chemin, ils passèrent devant le Thunder Dolphin. Kurama s'arrêta et attrapa doucement le bras de Hiei.

― On ne repassera pas par le Japon, ça te dis d'y aller vite fait ? La queue est assez courte.

― D'accord, va pour une autre douche.

― Avec la chaleur qu'il fait ! »

Ils allèrent se placer derrière les ningen puis Hiei dit :

« C'est drôle, la rame tourne en haut de la pente...

― Oui, il y a un plateau tournant qui la place dans le sens contraire de la marche. On passe ensuite le creux en marche arrière pour arriver sur le second plateau qui nous remet dans le bon sens pour le splash final. »

Ils passèrent dans un bateau baptisé le Iruka puis dans une grotte avant d'arriver dans la gare thématisée en récif sous-marin. À nouveau canalisés, ils prirent place dans la deuxième rangée. Cette fois, c'était Kurama qui se retrouvait au bord, Hiei étant assit juste à côté du garnement du train jaune. Ce dernier, le reconnaissant, se tint coi et se blotti contre son père. Le bateau se mit en branle et partit directement dans une longue et lente montée vers la première plate-forme tournante.

Tout en haut, la barque s'arrêta face au vide et se mit à tourner vers la gauche. Elle s'arrêta à nouveau avant de glisser en arrière. Elle prit rapidement le creux et remonta vers l'autre plateau. Là encore, elle tourna vers la gauche. Quand elle s'ébranla à nouveau, Kurama saisit le bras de Hiei et le leva pendant qu'ils descendaient.

« Fais un sourire pour la photo ! » lança-t-il.

Il n'obtint qu'un regard mi-outré mi-étonné et une tête à mettre dans les annales qu'il ne découvrirait qu'une fois en bas. Une bosse les fit remonter et plonger dans l'eau qui éclaboussa la totalité de l'embarcation. Kurama et Hiei se retrouvèrent logés à la même enseigne avec le haut du corps trempé. Mystérieusement, leurs têtes étaient demeurées sèches.

Kurama abandonna Hiei un instant et parti vers la maisonnette du photographe et, sur l'un des nombreux écrans, découvrit leur photo. La scène était cocasse. Il s'empressa d'acheter la photo et alla la montrer à Hiei resté au bord de l'eau pour voir descendre les autres – et surtout pour retarder le plus possible la vision d'horreur qui allait suivre. Quand le kitsune lui montra la photo, il fit la moue.

« Encore une autre abomination !

― Arrête, elle est très bien ! Et puis je t'avais dit qu'il y avait des photos dans les montagnes russes.

― Hn ! J'avais oublié.

― Manger ? » susurra Kurama.

Hiei soupira, lui jeta un regard en coin avant de se remettre à marcher. Son ami le rattrapa mais n'ajouta rien. Le soleil tapait dur et les vingt minutes qu'ils mirent pour arriver au quartier français suffirent largement à les sécher.

« Bienvenue en France, lança Kurama, amusé, en écartant les bras.

― C'est quoi la grosse boule là-bas ?

― C'est le Spaceball, un grand huit dans le noir. Très peu pour nous, je crois.

― Tu crois bien !

― Viens, la Petite France est juste là. »

Il mena Hiei vers le restaurant déjà bien engorgé.

« Mince, c'est vrai que c'est l'heure de pointe... J'espère qu'ils auront encore une place pour nous... » pensa Kurama.

Ils furent accueillis par un serveur bilingue qui les salua dans les deux langues et leur trouva une place le long du mur. Il leur donna le menu et prit les apéritifs.

« Ça m'a l'air bien bon tout ça !

― Oui, tu prends quoi ?

― Hum... l'escalope panée me tente bien. Je pense que je vais prendre ça, dit Kurama. Et toi ?

― Steak maître d'hôtel.

― Excellent choix. »

Rapidement, le serveur revint avec les apéritifs et prit leur commande. Quelques minutes passèrent sans qu'ils ne sachent quoi se dire, évitant de se regarder dans les yeux et laissant leur regard se perdre sur les autres tables. Finalement, Kurama leva son verre.

« A la journée que nous passons ensemble ! » osa-t-il.

Hiei leva rapidement le sien et rectifia :

« A la bonne journée que nous passons ensemble. »

Ils trinquèrent et burent une gorgée. Le kitsune eut un sourire tendre.

« Tu trouves vraiment que c'est une bonne journée ?

― Oui. C'est rare que l'on passe du temps ensemble toi et moi, souffla Hiei après un silence.

― Un peu trop non ? On devrait faire ça plus souvent.

― Je suis bien d'accord. » approuva Hiei avec un sourire.

Le sang de Kurama ne fit qu'un tour : les sourires de Hiei étaient rares, mais celui-ci était particulièrement... ambigu ? Et charmeur aussi. Les yeux verts glissèrent vers ces lèvres qui avaient l'air si douces. Le jaganshi sembla vouloir dire quelque chose mais le serveur rompit le charme en apportant les plats.

« Voilà ! Bon appétit !

Merci. » dirent-ils machinalement.

Il repartit vers une autre table et les jeunes gens réajustèrent leur position sur leurs chaises.

« Bon appétit ! »se dirent-ils en chœur en prenant leurs couverts.

Après quelques bouchées et presque simultanément, chacun proposa à l'autre de goûter son plat. Cette spontanéité les fit sourire et chacun coupa un bout de viande qu'il passa à l'autre. Quand Hiei prit la fourchette de Kurama, il laissa discrètement glisser ses lèvres sur le métal qui avait déjà rencontré celles de son ami.

« Pas mauvais.

― La même. On reviendra. » dit Kurama en hochant solennellement la tête.

Les viandes ne survirent pas longtemps dans cet environnement hostile. Les frites et autres légumes non plus d'ailleurs. La dernière bouchée engloutie, les deux compères s'appuyèrent d'un même mouvement sur le dossier de leur chaise.

« Bonjour l'image, se moqua Hiei.

― Deux ventres bien tendus, je trouve que c'est une belle image. » argumenta Kurama.

Ne trouvant rien à redire, Hiei prit une gorgée d'eau plate histoire de faire descendre le reste et aperçu le serveur qui revenait déjà à la charge.

« Eh bien, il y a un sacré débit ici... » se dit-il alors que l'homme s'approchait par cabotage.

« Ça s'est bien passé ? s'enquit-il poliment.

Très bien, merci » répondit Kurama tandis que Hiei fixait les assiettes l'air de dire « A ton avis ? ».

Il les débarrassa et demanda si ils souhaitaient la carte des desserts, ce à quoi ils répondirent par l'affirmative.

Alors qu'ils scrutaient la carte, les ventres se réveillèrent et réclamèrent des desserts en gargouillant. Ils échangèrent un regard amusé.

« Laisse-moi deviner, murmura Kurama, tarte aux myrtilles meringuée ? »

Hiei le regarda comme si un œil était soudain apparu au milieu de son front.

« Comment as tu su ?

― Je te connais, figure-toi. » le taquina-t-il.

Hiei ferma à demi les yeux. À charge de revanche...

« Quant à moi, je prendrais...

― Le moelleux au chocolat, termina Hiei.

― Qu, commença le roux, stupéfait. Très bien, un partout ! »

Le démon de feu hocha lentement la tête d'un air de provocation.

« Vous avez choisi ? intervint le serveur, sortant de nulle part.

Oui, souffla Hiei, agacé par ses apparitions intempestives. Un moelleux au chocolat et une tarte aux myrtilles, s'il-vous-plaît.

Tout de suite. » dit-il en reprenant les cartes.

Hiei profita que l'attention de son ami soit dirigée vers le restaurant grouillant pour l'observer tranquillement et détailler ce visage qu'il aimait tant. La journée avait très bien commencé et il passait d'excellents moments avec Kurama. Il avait même l'impression qu'il pouvait avoir une chance... mais peut-être était-ce là seulement le fruit de son imagination.

Les desserts passèrent comme une lettre à la poste bien que les ventres soient déjà bien remplis et Kurama demanda l'addition et paya. Lorsqu'ils ressortirent, ils accueillirent le soleil avec bonheur malgré la chaleur : la foule du restaurant avait fini de leur faire franchir leur pallier de saturation.

Le quartier français avait un aspect calme et apaisant, à l'image de la belle France, avec son plan d'eau, ses canards et ses bancs de bois avec leurs amoureux. Kurama entraîna Hiei devant une sorte d'entrée de grotte surmontée d'une tête de tyrannosaure en animatronique. Le jaganshi considéra la bête d'un œil circonspect.

« C'est L'Univers de l'Énergie, un manège sympa qui nous amène à l'époque où ont vécu les dinosaures. J'adore cet endroit. C'est calme et ça nous aidera à digérer !

Hiei n'objecta rien et le suivit d'un bon pas, sans oser préciser que toute attraction à sensation si peu forte soit-elle était proscrite pendant au moins une heure, le temps de tasser ce french dish quelque peu copieux...

Ils passèrent dans d'étroites galeries où se tenait une exposition sur les énergies renouvelables et remontèrent le temps jusqu'à la file sur le plateau tournant qui permettait de monter dans les gondoles de deux places sans que le manège soit obligé de stopper. Ils s'assirent et baissèrent la barre de sécurité.

« Les dinosaures font un peu faux mais l'attraction a dix-neuf ans c'est sympa, tu verras. »

Hiei hocha la tête tandis qu'ils passaient une porte pour déboucher dans une jungle luxuriante et sombre où résonnaient de nombreux cris inquiétants. Sur leur gauche, un petit dimétrodon les accueilli avec un air peu engageant et les gondoles oscillèrent de droite et de gauche. Sur leur droite apparu entre les fougères le flanc d'un immense sauropode dont on ne voyait pas le bout. Ils découvrirent sa tête quelques mètres plus loin, au dessus d'un nid d'où sortait déjà un nouveau-né.

« C'est pas mal hein ? demanda Kurama en criant pour couvrir les bruitages.

― Oui ! J'aime bien. » mentit Hiei.

En réalité, il s'intéressait bien plus à la manière de draguer Kurama qu'à l'attraction. Il posa sa main sur la banquette de plastique, tout près de celle du kitsune. La gondole pivota vers la gauche pour les mettre face à un dinosaure à bec de canard en plein repas et un ptéranodon aux ailes ouvertes. Au dessus d'eux, un archéoptéryx coloré faisait des ronds en glatissant. À nouveau, le véhicule pivota et Hiei en profita pour passer quelques doigts par dessus ceux de Kurama. Au début, le yoko ne réagit pas visiblement même si il avait cessé de respirer, tendu comme un arc. Il reprit sa respiration à un rythme rapide et allait pousser davantage sa main sous celle de Hiei mais celui-ci la retira. Déçu, Kurama l'observa du coin de l'œil mais le jaganshi restait impassible.

Sur les côtés, des fentes dans le mur laissaient voir une lumière rougeoyante et un bruit d'écoulement qui suggéraient de la lave en fusion vomie par un volcan en éruption. La gondole les tourna vers un stégosaure imposant et mugissant dont la queue épineuse se balançait paresseusement près des rails. Soudain, un vol de petits dinosaures à plumes passa en piaillant au dessus de leurs têtes, ils étaient montés sur un cylindre qui leur faisait faire des saltos. Hiei, absorbé par ses réflexions au sujet de Kurama, sursauta et jeta un coup d'œil inquiet au-dessus de lui.

Ils passèrent lentement sous un grand ptéranodon au long bec tourné vers eux, puis leur véhicule pivota encore et les plaça dos à la marche. Soudain, la gondole tourna brusquement face à la gueule béante d'un tyrannosaure rugissant et ils se retrouvèrent presque l'un sur l'autre. En se redressant, ils tombèrent en arrêt : leurs visages n'étaient qu'à quelques millimètres l'un de l'autre. Tous deux rougirent mais cela passa inaperçu dans l'obscurité. Hésitants, les regards se baissèrent vers les lèvres attirantes et se croisèrent plusieurs fois. N'y tenant plus et quasi simultanément, ils fermèrent à demi les yeux et inclinèrent la tête pour s'embrasser.

Au moment où leurs lèvres se frôlèrent, ils furent projetés contre le fond de la gondole à la vieille mécanique qui pivotait vivement une nouvelle fois pour les mettre devant le plateau tournant par lequel ils devaient descendre. Confus et quelque peu désorientés, ils obéirent machinalement au personnel qui les invita à emprunter la sortie.


A suivre... to be continued... toussa toussa.

Voilà pour le chapitre 1 ! Bon, rassurez-vous, même si les bonnes (ou pas) vielles habitudes ont la vie dure, cette fois-ci, pas besoin d'attendre 2000 ans pour lire la suite. Elle est déjà écrite. Si ça c'est pas incroyable...


Au fait, certains auront peut-être reconnu le parc où se passe l'histoire... En fait, mon "Sekai Park" est basé sur un parc bien réel : Europa Park, situé à Rust, en Allemagne. C'est bieeeen loin du Japon, alors il a légèrement été délocalisé (ah, la magie de la fiction). J'ai modifié les noms des attractions et j'ai un peu chamboulé l'ordre des quartiers.

Je vous le conseille, c'est vraiment un chouette parc. Il y a plusieurs années que j'y étais, mais l'agencement en quartiers selon les pays est une très bonne idée.


Au fait, quelques petites précisions :

2 150 yens équivalent environ à 18 euros. Ben vi hein, c'est pas donné les extras des parcs d'attractions.

Le terme "ningen" signifie "humain" en japonais. Sachant que Hiei et Kurama sont des "youkai", des démons, pour eux, les humains sont une autre espèce.

Pour celles et ceux qui ne sont pas particulièrement au courant de l'histoire mère de Yû Yû Hakusho, Kurama a une sorte de dimension parallèle dans sa longue tignasse rousse. C'est de là qu'il sort les plantes et autres bidules dont il se sert notamment pour attaquer. C'est un maître des plantes, il les contrôle. Hiei est un démon du feu mais originaire du Pays des Glaces ou Royaume de Koorime. Kuwabara et Shizuru sont frère et sœur et humains avec une haute sensibilité aux énergies spirituelles. Yukina est la sœur jumelle de Hiei. Genkai est le maître d'arme de Yusuke et Kuwabara. Keiko est la petite amie de Yusuke et est humaine. Et, enfin, Yusuke est mi-humain mi-démon, c'est un "mazoku". Voilà pour la minute culture !


J'espère que ça vous plaît pour le moment !

J'avais besoin d'un truc meugnon. Et vous ?

N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez !

Vous m'avez manqué, petits (et grands) lecteurs/rices :')

Maeglin