Diclaimer : Tout ce qui touche de près ou de loin à la ville de Sin City appartient à Franck Miller, que ce soit les personnages ou la ville elle-même.


Ça fait déjà un petit moment que je voulais poster cette fanfic mais la rubrique n'était pas crée. Sûrement que la sortie du film a joué. :p

Voici donc le premier chapitre de cette fic. Ça va vous paraître bizarre mais chaque chapitre seront indépendant les uns des autres et sans lien aucun. (normalement) En fait, j'adopte plus ou moins le même style narratif que Miller à travers ses albums à savoir à chaque fois des héros et histoires différents.

Ce premier chapitre met en scène un personnage de ma conception ("l'Homme de main") un porte flingue sans nom travaillant pour la famille Roark. Ce chapitre nous narre ses débuts et est assez court.


Première fois.

De tous les endroits des bas fonds de Sin City, le dépotoir n'était pas le moins reluisant. Il n'empêche qu'il sentait la pisse. Et l'odeur d'alcool fort, mélangé à la crasse que les badauds portaient constamment sur eux, était parfaitement répugnante. Mais sous ces deux odeurs prédominantes, tout un petit royaume olfactif s'était constitué. Il s'exhalait par tous les orifices des ordures des habitants de Sin City. Ordures au sens propre, bien sur, mais aussi figuré. En effet, l'endroit, abandonné de tous sauf des plus minables et des gangsters, revêtait la singulière utilité de servir de tombeau aux assassinés.

Ce n'était pas le pire de tous les endroits, mais ce n'était pas le meilleur non plus. Et pourtant j'y étais.

Nestor Nash, Samuel Stone et moi-même formions un espèce de Triangle des Bermudes autour d'un pauvre type, un gamin, qui n'avait pas voulu payer sa dose de crack quotidienne à Roark. C'était ma troisième sortie en compagnie des deux hommes de main. C'était aussi mon baptême du feu, la première fois que je n'allais pas me contenter de regarder. Je le savais. Et, pendant que Stone martelait les cotes du garçon avec le bout coqué de ses rangers, j'avalais péniblement ma salive en songeant à ce qui n'allait pas tarder à se produire.

Le bruit s'intensifia, quelques vertèbres venaient de céder sous les injonctions sévères des rangers de Stone. Le gamin poussa un cri plaintif. Nash se baissa et les pris par les cheveux. Puis lentement, sans lâcher l'épaisse tignasse blonde qu'il avait dans la main, il mit le gosse à genou. Stone ne put résister. Dans un dernier mouvement rageur il écrasa la semelle de sa rangers gauche contre la mâchoire du garçon. Le choc fut si violent qu'il se mordit la langue jusqu'à se la couper, et un petit bout de chair rose ensanglanté tomba sur le sol avant d'être éclaboussé d'une hémoglobine aussi rouge que le tréfonds de la pupille du diable. Le gamin porta les mains à sa bouche, on pouvait lire dans ces yeux une surprise teinté d'une étrange lueur de tristesse. Il aurait voulut dire quelques chose en cet instant je pense. Mais il ne le pouvait pas. Il ne le pourrait jamais plus.

Nash grogna une réprimande à l'attention de Stone. Je n'ai pas saisi. En revanche je pris l'énorme crosse du 357 magnum que me tendait Nestor. L'heure était venue. Je vérifiai brièvement le barillet, dans l'intention de retarder quelque peu l'échéance. Pas pour le garçon. Il était foutu de toute manière… Mais pour moi.

Plein.

Le cliquetis sourd du barillet se refermant sur le corps de l'arme se fit entendre. Avec un geste précautionneux j'alignais l'énorme calibre sur la tempe du jeune homme. Stone mâchouillait son chewing-gum. Habitude qu'il avait conservée, comme ses bottes, de l'armée. Je haïssais ces mastications incessantes. Chaque «pop» provoqué par l'explosion d'une bulle de gomme brisait une barrière dans mon esprit. Nash s'alluma une cigarette. Je jetai un regard à notre petit groupe. Si je me positionnai légèrement sur la gauche, je pouvais faire gicler la cervelle du blondinet sur les chausses de Stone. Pas sur que mon coup le dérange. Mais qui ne tente rien n'a rien. J'établie mon nouvel axe de tir.

Le chuintement du chien qui s'arme. Le bruit de la douille qui se place face au percuteur.

Le gamin pleurait. Alors que ses larmes ruisselaient de ses joues jusqu'à sa mâchoire brisée et se mélangeait avec son sang, je songeai qu'il était triste de finir sa vie comme ça. Finir à bout de souffle, sans plus aucune force pour tenter quelque chose ni plus aucune volonté pour se résigner complètement. Il allait devoir faire vite.

Je pris une grande respiration en laissant s'engouffrer l'air purulent du dépotoir à l'intérieur de mon organisme. Ainsi, je savourais ce qu'il me restait comme instant d'une approximative innocence. J'étais sur le seuil de la porte, et comme ces jeunes flics qui ne savent pas s'ils vont, un jour, devoir franchir celle d'un bar sordide pour aller cuver la détresse de leur boulot, je me décidai à la franchir.

Le claquement sec du percuteur qui s'abat sur la douille.

Je n'ai pas entendu la détonation, juste le bruit du chien, mordant sa victime, « et par un savant jeu de domino en faisant une autre ». L'angle était bon. L'épaisse cervelle grise du blondinet, quelques mèches de cheveux dorés et des gouttelettes de sang chaud vinrent s'écraser sur les rangers de Stone. Même son blue jean's Levis en pris un coup. Ça le fit rire. Dommage.

Les dernières cendres de la cigarette de Nash virent se mélanger au festin sanguinolent que je venais d'offrir au vers, aux corbeaux ou, éventuellement, aux clochards les plus affamés.

C'était la première fois que je tuais. C'était sûrement pas la dernière. Sin City, cette ville pourris jusqu'à la moelle, révèle tout.

L'homme de Main.