Assise sur ces foutues dalles humides, toisant mon bourreau du regard, je me demandai ce que j'allais encore devoir faire pour qu'il m'accorde son pardon. Autrefois, je n'aurai jamais imploré le pardon d'un être aussi méprisable mais désormais, plus rien n'était comme avant, je n'étais plus que la moitié de moi-même. Cette mauvaise moitié qui me donnait envie de vomir à chaque fois que mon regard croisait l'unique miroir qui trônait dans cet infâme prison qui était devenue ma demeure. J'étais seule, terriblement seule, seule contre mes démons et ceux de mon bourreau. Cette fois-ci personne ne viendrait me secourir, personne ne viendrait me sauver de mon bourreau, sauver cette infâme créature que j'étais devenue. Car je n'étais plus un être humain, je n'étais plus que la loque partiellement vivante que cet homme avait fait de moi. Après 11 mois de captivité on ne vivait plus vraiment, ou du moins on survivait. On essayait de se raccrocher, tant bien que mal, aux souvenirs heureux de son existence, mais après 11 mois ces souvenirs me paraissaient loin, comme enfouis dans le plus petit et le plus inaccessible recoin de ma mémoire. Je ne pouvais plus, je ne voulais plus vivre. Respirer me semblait si difficile et j'avais toujours cette impression de ne pouvoir étancher ma soif mais si je buvais… Comme cette entaille sur le palais qui ne peut cicatriser que si on cesse de la lécher, mais on ne peut pas… (Petit clin d'œil à Fight Club, un film génial ). Comme toujours, je baissais la tête, instinctivement. Mes réflexes d'ancienne rouge et or m'auraient sûrement dicté de ne pas trembler, de regarder mon bourreau droit dans les yeux et de demeurer inébranlable face à l'être immonde qui se tenait devant moi, mais tout cela me semblait maintenant si loin.

Mon bourreau me fixait de son regard argenté comme cherchant la faiblesse qui me ferait plier, mais il n'arrivait pas à voir que j'étais cette faiblesse, que mon être tout entier n'était désormais qu'une plaie béante qui ne retournerait sûrement jamais sur la voie de la guérison. Il approcha sa main de mon visage, et, sûrement par instinct de survie, mon corps entier se tendit et je reculai, m'écrasant contre le mur dur et froid qui me retenait. Finalement, il s'abaissa pour se mettre à ma hauteur et me prit le visage entre ses longs doigts, avec force, relevant mon menton pour m'obliger à le regarder. Ses yeux durs et froids, ne cessaient de me fixer, détaillant chaque parcelle de ce visage qu'il avait si soigneusement abîmé comme pour voir l'étendue des dégâts. Comme si il ne les connaissait pas déjà… Il en était l'auteur et parfois je croyais même voir une certaine fierté dans son regard alors qu'il passait ses doigts si les longues entailles qui parsemait désormais ma peau. Durant un instant, mon bourreau parut incertain. Alors qu'il me lâchait enfin le visage, je pris à deux mains ce qu'il me restait de courage et dit, non sans sentir le tremblement que ma voix émettait déjà ;

- J'imagine que tu es fier du résultat…

Mon bourreau me jeta un regard des plus glacials et déjà, les 11 mois que j'avais passés en sa présence me disaient que ce regard ne présageait rien de bon pour moi. Il leva sa baguette, la tournant dans ma direction. Il ne m'avait jamais infligé d' « endoloris », ni aucun des trois sorts impardonnables. Je m'étais toujours demandé pourquoi il ne le faisait pas mais je n'avais jamais trouvé la réponse à ma question, car n'étais-ce pas ce que faisait les mangemorts ? Je m'apprêtai déjà à recevoir « ma punition », et, contre toute attente, il ne m'infligea pas la correction à laquelle je m'étais déjà résolu, mais un sortilège de guérison. Je sentis alors les plaies qui recouvraient mon visage se refermer instantanément. A quoi jouait-il ? Pourquoi me gardait-il désespérément en vie alors que mon cœur ne demandait qu'à cesser de battre ? Pourquoi fallait-il qu'il rende toujours les choses aussi compliquées ? Tellement de questions auxquelles je ne trouverais sûrement jamais de réponses.

Alors que je m'enfonçai un peu plus contre le mur glacial sans même songer à sa présence, je sentis son regard me transpercer de part en part. Peut-être restait-il pou attendre ce remerciement qui ne viendrait jamais… Que voulait-il de plus ? Je m'étais assez soumise, je ne pouvais pas courber le dos d'avantages.

- Tu devrais manger.

Sa voix glaciale retentis pour la première fois de la journée dans le cachot, cette voix qui ne laissait transparaître aucun sentiment mais qui montrait toute la dureté de son cœur malgré elle. Sans que je sache réellement pourquoi, des larmes commencèrent à ruisseler sur mon visage pâle, laissant des traînées noires le long de mes joues. Mes nerfs lâchaient, je ne pouvais plus. Ma volonté m'avait laissé tout comme mon courage. L'espoir n'est pas permis dans un cachot… Mon bourreau me fixa de ses deux pupilles métalliques, sans ciller. Son regard était insupportable, exactement comme tout ce qui était ici. Cette pièce, ce miroir, ces foutues dalles, ce mur froid, lui… Tout ça ne m'inspirait que dégoût et répulsion… Comme m'étais-je retrouvée ici ? Je m'étais faite avoir comme une débutante… Pourquoi avait-il fallu que je le suive, lui.

FlashBack

Une forte odeur d'alcool et de transpiration. Qu'est-ce que je fous ici ? Je n'en ai pas la moindre idée. Peut-être que ce bar miteux m'offre la chaleur que je n'ai pas su acquérir des bras de mon amant. Je pouvais ramasser mes déceptions amoureuses à la pelle. Mais, aucune, nan, aucune encore ne m'avait fait aussi mal que celle qui venait de se produire. Une rupture, encore une. Celle-ci était différente, Harry m'avait juste sourit et pris dans ses bras avant de me dire qu'il valait mieux qu'on se sépare pour mon « bien-être personnel «. J'avais attendu tellement longtemps que le « héro de Poudlard » ne me considère plus comme la petite Miss je-sais-tout que j'étais durant mes deux premières années à l'école de sorcellerie. Et c'est enfin en 7ème année qu'il avait portée les yeux sur moi pour la première fois…

Et voilà où je me retrouvai 5 ans après. Dans un bar miteux à boire mon 8ème verre de Whisky Pur Feu. J'étais définitivement pathétique. Alors que j'achevai de finir mon verre, un jeune homme vint s'asseoir à côté de moi. Je détournai mon regard du verre pour le porter sur l'homme dont la beauté semblait irradier. Je plissai les yeux, semblant reconnaître ce visage si parfait, mais, je n'y parvins pas. IL commanda un Whisky Pur Feu et daigna porter son attention sur moi, la jeune fille échevelée qui avait certainement bu, non pas un, mais plusieurs verres de trop. Je le vis esquisser un sourire en coin devant le spectacle désolant qui se déroulait devant ses yeux. Finalement, je payai le barmaid et me levai tant bien que mal de mon tabouret, titubant durant le court trajet qui me menait aux toilettes. Je marchai dans un couloir seulement éclairé d'une faible lumière rouge, me tenant, tantôt sur le mur droit, tantôt sur le gauche. Pourquoi l'alcool me rendait-il si lamentable à voir. Je continuai ma route sinueuse vers les toilettes quand soudain, je trébuchai. Brassant l'air avec mes bras, je m'attendis à faire une chute mémorable, la tête en avant, mais soudain, de puissants bras vinrent me rattraper et je me retrouvai plaquer contre le torse du bel inconnu du comptoir. Je souris malgré moi, et me retournai, m'apprêtant à le remercier. Mais, contre toute attente, l'homme me plaqua contre le mur avec force, encerclant d'une main mes poignets et les mettant au dessus de ma tête. Mon corps si près du sien, je pouvais entendre les battements de son cœur. Je n'étais pas effrayée, je ne repoussais pas cet inconnu et je sentais déjà le désir danser en moi. Le regard de l'homme sembla s'attarder sur mes lèvres, puis finalement les captura avec exigence. Je répondis à son baiser, montrant toute l'ardeur dont j'étais capable. Ou peut-être était-ce le désespoir ? L'homme me relâcha les poignets, mes mains vinrent entourer son cou et mes jambes s'enroulèrent autour de sa taille. Après quelques baisers fiévreux et quelques attouchements peu catholiques, il me relâcha finalement et me prit par la main, m'entraînant vers la sortie du bar…

FlashBack

C'était mes seuls souvenirs. Le lendemain je m'étais retrouvé ici et mon calvaire avait commencé… Mes pensées furent soudain interrompues par un claquement de porte sonore. Mon bourreau était parti et je n'y avais pas fait attention. Chaque fois, j'espérais qu'il ne revienne jamais mais à chaque fois, il était là. Il passait énormément de temps ici, avec moi. Ma vie se jouait selon son humeur, il pouvait passer une journée entière dans le cachot avec moi sans rien faire tout comme il pouvait y rester deux heures en me lançant des sortilèges de torture de son crû. Je n'avais jamais compris pourquoi il m'avait embrassé dans ce bar. Lui qui me haïssait à un point qui dépassait l'entendement. Pourquoi m'avait-il embrassé dans ce bar pour ensuite m'enfermer ici alors qu'il ne me touchait jamais de ses mains.

Très vite mes pensées se transformèrent en songes et je m'endormis, recroquevillée sur moi-même, sur les foutues dalles humides de mon cachot.