-Êtes-vous sûr que séparer ces deux enfants soient une bonne chose, Albus?

-Nous ne pouvons pas imposer aux Dursley de s'occuper de deux enfants. Harry... Harry suffit.

-Mais enfin, ces... Ces moldus sont leurs oncles et tantes!

-Vous vous trompez, très chère. Pétunia est la tante de Harry. Pas celle de sa demie-sœur.

La professeur de métamorphose avait oublié ce détail, en effet. Cependant, elle continuait à ne pas trouver juste l'idée que Mary pourrisse dans un orphelinat, sorcier ou pas, alors que Harry aurait un foyer.

-Dans quel... dans quel orphelinat allez-vous mettre la petite? Demanda-t-elle en manquant de s'étrangler

-Je vais lui trouver une place à l'institut des sorciers de Salem.

-Aux états unis? Albus, c'est à l'autre bout du monde!

-Ma chère Minerva, comme je vous l'ai déjà expliqué, je doute que Tom Jedusor ait vraiment disparu. Il y a des … points à éclaircir sur cette histoire mais je suis persuadé que tôt ou tard, il reviendra. Et ce jour là, je serai plus rassuré de savoir qu'au moins un des deux petits Potter vit en sureté.

Minerva MacGonagall, si elle s'était écoutée, aurait hurlé à l'injustice. Aurait crié qu'elle aurait été prête à tout, même, s'il l'avait fallu, à s'occuper de Juliette Potter elle-même. Mais voilà, Dumbledore était tout de même quelqu'un.

-Alors c'est exactement cela que nous allons faire, Minerva.

-Albus...

A présent, l'enseignante avait les larmes aux yeux.

-Vous ne pouvez décemment pas laisser cette petite... cette petite fille dans un... dans un orphelinat infâme.

-Ne vous posez pas de questions sur cette décision. Mais tenez votre promesse. Officiellement, Juliette Potter est morte alors qu'elle n'était pas encore née, dans le ventre de sa mère.

-Oui. Officiellement, Juliette Potter est décédée... avant que la maîtresse de Potter ait pu la mettre au monde. J'ai compris.

La gorge sèche, le ventre noué, Minerva MacGonagall transplana loin de tout ça. Déjà que si leurs parents avaient été vivants, l'histoire aurait été complexe. Mais alors, maintenant qu'ils sont morts, elle n'osait même pas y songer.

À peu près dix ans plus tard, Harry Potter avait fait son entrée à l'école des sorciers, et pour lui, tout était nouveau.

Il avait courageusement sauvée une camarade de classe d'un troll, avait affronté un professeur de défense contre les forces du mal investit par le mal, fait face à un cerbère et était rentré dans l'équipe de Quidditch de sa maison. Poudlard.
Au cours de la seconde année, il n'avait rien fait d'autre que de battre un basilique et de couper quelques branches à un saule cogneur centenaire (pitoyable).

Douze ans après son abandon, Harry Potter entrait donc en troisième année après avoir appris qu'un certain Sirius Black, évadé de la prison d'Azkaban, voulait sa peau.

Cette année nous intéresse particulièrement parce que c'est l'année où arrive à Poudlard le professeur Lupin.

Rémus Lupin était, lorsqu'il était encore en vie, le meilleur ami de James Potter et, accompagné de Sirius Black, ils formaient une bande communément appelée « les Maraudeurs ».

De son côté, MacGonagall allait en moyenne une fois tous les noëls et une fois toutes les rentrées scolaires parler à Dumbledore histoire de lui rappeler que quelque part, Juliette était seule. Pour une raison qui lui échappait, elle n'arrive pas à démordre de l'idée que Juliette serait bien mieux à Poudlard. C'est pourquoi, malgré les interdictions de Dumbledore, Minerva entretenait une correspondance régulière avec l'enfant. Et là encore, entrant en contradiction avec les directives de Dumbledore, elle expliqua la situation à Rémus Lupin.

Celui-ci était un homme honnête. Droit et courageux. Et s'il est vrai que quelques jours par mois il peut être un peu plus irritable que la normale, c'était un homme qui méritait d'avoir une vie. Or, s'occuper d'une enfant, n'était-ce pas une forme de mode de vie?

-Je... Vous m'annoncez dans la même minute que James a eu un enfant dont je n'ai jamais entendu parlé, et que ce serait une bonne idée que je m'en occupe. Minerva, c'est un peu dur à...

-Rémus! Potter est seule...

Elle renonça aux mots et fouilla dans la poche intérieure de sa cape. Et en tira une photo. Rémus tint la photo entre ses doigts pendant un très long moment l'air complètement incrédule.

-Il faut... Minerva... il faut que je réfléchisse.

-En la laissant pourrir là-bas c'est exactement comme si vous laissiez pourrir une partie de James.

Elle était consciente qu'elle y allait fort. Mais enfin... aux grandes convictions les grands moyens.

-Vous ne pouvez pas me mettre sur le dos cette responsabilité, dit-il en tendant la photo vers la professeur de métamorphose.

-Je croyais pourtant que les Gryffondor avaient plus de courage, Rémus. Gardez la photo. Je vous en fait cadeau.

Les vraies histoires ne se construisent pas en quelques semaines, d'autant plus que Rémus Lupin était quelqu'un d'inquiet. De méfiant. De soucieux.

Les premières semaines, la photo était restée dans la poche de sa cape sans qu'il ne lui jette un regard.

Plus tard, il l'avait gardée toute une nuit entre les doigts, puis l'avait glissée dans son porte-feuille pour la protéger. Plusieurs mois plus tard, elle avait eu le droit d'être mise sous cadre posée sur son bureau. Puis enfin sur sa table de chevet.

Le grand jour arriva enfin. Il prit du parchemin et sortit une plume.

Juliette,

Que dire? Il laissa le papier sur le bureau. C'était au moment précis où Severus Rogue ramenait Harry avec la carte du maraudeur en lui expliquant qu'il y devait bien y avoir de la magie noire dans ce papier.

Rémus Lupin parut choqué. Mais il réussit à conserver son calme et demanda à Severus de s'en aller. Il récupéra la carte. Et la posa sur son bureau.

-Harry, j'ai une question à te poser qui est assez... Assez personnelle. Je sais que tu as des amis et que tu vis chez les Dursley mais... Est-ce que... est-ce que tu te sens seul?

Harry dut réfléchir une minute. Se sentait-il seul?

-Je crois que oui. Mais c'est rare.

-Et quand ça arrive... ça... ça te fait du mal?

-Oui. Mais... ça arrive de moins en moins souvent.

-Très bien. Retourne te coucher maintenant.

Rémus Lupin resta seul dans son bureau à cogiter pendant un long moment.

-Au fait, professeur, la carte ne marche pas.

-Qu'est-ce qui te fait dire ça?

-J'ai lu le nom de Peter Pettigrew.

Quand il entendit ça, Rémus Lupin oublia totalement la demie sœur de Harry.

Un mois plus tard, environ, on retrouva Sirius Black et dans le cœur de Harry, on fit en sorte qu'il n'y ait plus de brouillard.

Au dernier jour de l'année scolaire, Minerva revint voir Rémus Lupin pour lui demander ce qu'il comptait faire, finalement pour cette petite.

-Maintenant que... maintenant que le jour a été fait sur l'affaire Black, je crois que Harry ne se sentira pas seul de ci-tôt. Il ne vaut peut-être pas forcément mieux de faire ressurgir Juliette comme un vieux cadavre oublié dans un placard.

-Rémus, je ne disais pas tant ça pour Harry Potter que pour vous même, vous savez?

-Je le conçois, Minerva, mais...

-Rémus. Je ne vous l'ai pas dit mais... Mais j'écris de temps en temps à cette petite. Je ne veux pas vous … Vous culpabilisez beaucoup plus que ce que votre caractère soucieux s'inflige déjà de lui même. Alors je vais vous dire la vérité. Là-bas, elle a des amis. Elle vit bien. Elle mange trois repas par jour, elle est autant... maraudeuse que quand vous l'étiez. Si vous voulez, j'ai son dossier scolaire dans mon bureau. Mais Rémus, elle se sent seule. Harry n'a déjà pas grand chose. Un parrain qu'il ne voit jamais, une famille de moldus qui se comporte comme... comme des bourreaux par moments, un cousin qui... qui ne fait rien pour être proche de lui et ses amis sorciers ne... ne peuvent pas être en contact en permanence avec lui lorsqu'ils ne sont pas à Poudlard. Elle n'a rien de tout ça. Elle n'a eu aucun écho de qui étaient ses parents. Elle ne sait absolument pas qui était James Potter et qui étaient ses meilleurs amis. D'autre part, si Dumbledore pense que laisser Juliette sur un autre continent pourrait la sauvegarder, je pense que c'est tout l'inverse. Voldemort est toujours plus malin que ce que nous parvenons à l'anticiper et s'il s'attaque à elle, elle ne saura même pas... même pas pourquoi!

-Je crois, Minerva, que vous n'ignorez pas le fait que je ne reviendrai pas à Poudlard l'an prochain. Et je n'aurais pas de revenus suffisants pour...

-Le coffre des Potter est plein! Le ministère facilite les adoptions, vous le savez! D'autre part, je suis certain que le professeur Rogue et moi-même lui fourniront déjà tout ce dont elle aura besoin à Poudlard.

-Pourquoi Rogue?

-Parce que Rogue est son oncle. Vous savez très bien que la maîtresse de James était Lucinda Rogue, la sœur de ce chez Severus...

-Non. Ça, je ne le...

-C'est pas grave, je vous le dit. Severus Rogue est son oncle et il m'a clairement promis que si sa nièce était adoptée il s'occuperait des frais de scolarité.

-Alors pourquoi il ne l'adopte pas?

-Rémus, vos facultés mentales vous font défaut ce matin? Voldemort est sûr le point de revenir! Croyez-vous que ça fasse bon genre d'être le père adoptif de l'incarnation de son pire ennemi?

« Euhhhh non » voulait répondre Rémus au lieu de quoi il hocha la tête frénétiquement pour se signaler à lui même qu'il avait été idiot.

-Je... Je vais me laisser encore un peu de temps pour réfléchir. Je sais que je suis long mais... Mais il faut que je... Il faut que je m'installe.

-Dumbledore a certifié que si vous adoptiez la petite, médisances ou pas, il vous garderait un poste à Poudlard.

-... Je vous contacterai cet été sans faute. J'ai trouvé un appartement à Loutry Ste Chaspoule, pas loin de chez les Weasley.

-C'est très bien, si vous faites les choses rapidement, les petits Potter pourront faire connaissance pendant l'été!

-J'ai encore rien dit...

-Nous verrons bien.

Et la sorcière sortit du bureau.