-Hé, minable, attend moi ! Attend moi j'te dis !
Depuis combien de temps, déjà, suivait-elle ses pas ? Combien de journées, de nuits avait-elle passées à ses côtés (ou plutôt à poursuivre son dos) ? Depuis tout ce temps, il ne lui avait que peu porté d'attention. Il refusait d'accéder à sa demande de revanche. Et ça l'énervait. Son indifférence lui tapait sur les nerfs.
-Crétin, reviens ! continua-t-elle de crier.
Parce que crier était la seule chose qu'elle puisse faire pour qu'il l'entende. Qu'il la remarque. Qu'il réalise sa présence. Qu'il ne l'oublie pas.
Ainsi, elle continua de le suivre en rouspétant à tout va, contre tout, pour tout et n'importe quoi. Le sable, le temps, la distance, la chaleur, lui, ce sale minable… rien n'échappait au crible de la critique. Et elle continuait, inlassablement. Mais au fond, elle ne disait qu'une seule chose : « regarde-moi ! ».
Il marcha pendant un moment en faisant mine de ne pas l'entendre. Et finalement, excédé, il finit par s'arrêter et se tourner vers elle :
-Tokito, c'est inutile de me suivre, je te l'ai déjà dit. Je ne me battrai pas contre toi. En plus, je suis forcé d'être gentil parce que tu es une fille…
-N'importe quoi ! Ca ne change rien du tout ! Le fait que je sois une fille ne change absolument pas ce que je suis. Tu n'as pas à te montrer plus indulgent et viens plutôt te battre ! Que je sois une fille ne modifie en rien la situation, crétin !
-Bien sûr que si, ça la modifie, répliqua Akira.
Sur ces paroles, il planta un doux baiser sur ses lèvres. Ce fut bref, rapide, presque éclair. Néanmoins, ce court moment sembla être une éternité pour les deux jeunes gens.
-Si tu n'avais pas été une fille, il y aurait certaines choses que je n'aurais pas pu faire.
Il lui adressa l'un de ses irrésistibles sourires avant de se remettre en route. Choquée par ce qui venait de se passer, Tokito se laissa distancer. Mais le jeune homme s'arrêter de nouveau :
-Alors ? Tu viens ? Sinon, je te laisse plantée là !
-Abruti, attend moi !
Elle repartit en courant. Pour la première fois, il l'attendait réellement. Il la regardait venir à lui. Il lui ouvrait presque les bras. Et puis ce baiser…
Pour la première fois depuis longtemps, Tokito se dit que finalement, être une fille n'était pas si mal.