Il faisait nuit noir quand elle ouvrit les yeux. Elle pouvait penser ça car cette foutue chouette n'avait pas arrêté de hululer et elle arrivait à voir via des fenêtres rectangulaires qu'elle était dans un grand bâtiment bien sombre grâce à des lampadaires une lumière triste et timide qui donnait à cet endroit un côté glauque au possible.
Et puis elle se rendit compte qu'elle ne savait pas où elle était. Elle découvrait avec horreur dans quelle situation elle se trouvait. Elle était attachée par des menottes avec une longue chaîne tendue entre chaque main et des liens en plastique aux pieds pour rajouter un peu plus d'exotisme au lieu, elle était entourée de produits inflammables et elle avait un colis hyper lourd et hyper louche sur les genoux. Elle avait vu le second film Batman de Nolan et ça sentait mauvais quand les gens se réveillaient dans un entrepôt avec des barils autour d'eux.
Elle était gâtée. Le sociopathe qui l'avait amené ici lui avait fait de beaux cadeaux.
Elle ne se souvenait pas depuis combien de temps elle était ici. Mais à première vue, elle ne ressentait aucunes douleurs donc son ravisseur était un gentil qui préférait faire ça de façon délicate, afin de pas abîmer le produit quoi. Il y avait juste ce fourmillement dans ses jambes et ses pieds qui attestait d'une longue immobilité.
Elle se demanda alors si hurler à la mort des « à l'aide » était une bonne idée, si tenter de se lever de cette chaise était une bonne idée. Mais que faire sinon ? Quand allait-elle revoir la lumière du jour si elle n'agissait pas ?
Elle décida alors de hurler en espérant qu'un miracle se produise. Du genre Saint Esprit qui illumine l'agneau égaré voyez. Elle osa penser que quelqu'un allait l'entendre et que cette personne viendrait la sauver. Elle« osa » tout simplement. C'était une preuve de courage pour elle : crier à pleine voix, elle qui avait longtemps été silencieuse quand son mari passait ses nerfs sur elle et la rabaissait plus bas que terre elle avait pris du courage depuis qu'elle l'avait quitté et sa vie s'était comme transformée. C'était juste triste pour elle qu'elle se retrouve ici alors que tout allait pour le mieux.
Elle hurla un long moment en attendant le miracle et resta immobile face au silence qui lui répondait.
Qu'est ce qu'elle espérait ? Elle n'était pas dans une série qui passait sur la BBC où la disparue se faisait retrouver par le flic ténébreux de la série, la portant dans ses bras comme le ferait n'importe quel héros. Non, notre personnage était plus du genre à étoffer les faits divers macabres.
Que pouvait-elle vraiment faire ?
Elle n'osait pas bouger à cause du colis sur ses genoux qui était, après qu'elle est verifiée, une bombe artisanale, sur ses genoux. Allait-elle exploser si elle faisait un trop grand mouvement ? Est-ce qu'il y avait quelqu'un qui l'observait et qui attendait le bon moment pour tout faire péter ?
Alors qu'elle faisait un travail sur sa respiration afin de ne pas céder à la panique trop vite, une musique retentit près d'elle. C'était de la musique classique, le Ave Maria de Schubert. C'était proche d'elle, ultra proche car c'était en fait sur elle.
C'était un téléphone portable des années 2000, le souvenir des téléphones à clapés et du bug de l'an 2000 lui revinrent à l'esprit, qui était dans la poche intérieure de sa veste. Enfin, plutôt la veste qu'elle portait car elle n'était manifestement pas à elle.
Ses mains, toujours maintenues par les bracelets en métal, arrivaient à peine à atteindre le téléphone – qu'il était malin son ravisseur – et elle ne pouvait pas se gratter le nez à moins de faire la contorsionniste. Elle avait même l'occasion de répondre mais elle préféra la rater, savoir qui l'appelait vraiment et si elle allait exploser ou pas.
C'était un certain « Imperator » qui l'avait appelé. Dans sa tête, elle se disait qu'elle avait bien fait de ne pas répondre à cet appel surtout avec un mec qui s'appelait comme ça ça sentait le jeu de rôle qui finissait mal. Alors qu'elle regardait le répertoire où il y avait qu'un seul nom, Imperator donc, elle comprit rapidos qu'elle ne pouvait pas taper le moindre numéros vu que les touches du clavier ne répondaient de rien.
Elle reçut un message. Le petit téléphone vibra dans ses mains tremblantes et son sang se glaça : « Réponds à mon appel, je suis prêt à discuter ».
Le téléphone sonna une deuxième fois et elle appuya sur le petit téléphone vert, il fallait bien qu'elle réponde à cet appel, non ? Autant savoir ce qui allait advenir, autant savoir si elle allait revoir la lumière du jour d'ici peu ou avoir pour derniers souvenirs la lumière artificielle des lampadaires.
Ce fut une voix chaleureuse qu'elle eut au bout du fil et bêtement, son cœur rata un battement, son cerveau pensant dur comme fer que c'était la voix d'un sauveur providentiel.
– Vous me répondez enfin.
– Que me voulez-vous ? (demanda-t-elle, hésitante, afin de ne pas froisser le psycho qui lui téléphonait)
– Oh, vous le savez très bien Madeleine.
Elle sursauta quand elle entendit son prénom. Son agresseur était quelqu'un de bien informé. Elle inspira profondément, prenant sur elle afin que la panique ne la fasse pas exploser.
Quand à « vous le savez très bien », c'était le mystère de la nuit : elle savait des choses, certes mais elles n'étaient pas en rapport avec les affaires d'un psychopathe.
– Que me voulez-vous ? (répéta-t-elle en essayant de s'affirmer)
– Un service rendu. Vous devez bien vous souvenir qu'un certain Marengo vous a aidé lorsque vous êtes arrivée au poste de police le visage tuméfié.
Cela remontait il y a bien trois ans. Ce jour là, son mari avait cogné trop fort : il lui avait cassé le nez, la pommette et avait fait en sorte que son visage soit entièrement bleue et violet. Elle n'était pas allée à l'hôpital comme elle faisait habituellement, elle était allée jusqu'à un commissariat de quartier et avait demandé à porter plainte contre son enfoiré de mari. C'était la première fois en dix ans de mariage et en sept ans de passage à tabac qu'elle avait eu le courage de faire ce pas, de se montrer dans cet état au monde entier. Et un flic en costard l'avait accueilli et l'avait écouté pendant deux heures et ce psycho était en train de dire que c'était lui l'amour de policier qui l'avait soutenu jusqu'à faire juger son mari ? C'était une blague ?
– Vous êtes en train de me faire du chantage ?
– Non. Comme je viens de dire, un prêté pour un rendu. (La voix de l'homme se fit plus sifflante) C'est quand même grâce à ce Marengo que ce mari, un peu trop violent, a arrêté de vous prendre pour une piñata.
– C'était son métier de m'aider si je ne m'abuse, enfin « votre » métier.
– Tout service mérite salaire comme on dit. Et je n'étais que de passage donc ce n'était pas vraiment mon métier, j'ai juste rendu un service à une femme en détresse.
– C'est un kidnapping doublé de chantage.
– Toujours les grands mots (soupira-t-il) J'ai besoin que vous me rendiez un service, c'est tout et vu que je ne veux pas que vous me poursuiviez en justice – vu que vous avez pris goût à ça – je me suis dit que ce serait parfait comme endroit pour discuter.
– Et vous ajoutez une contrainte, genre ma mort, pour que je fasse ce que vous dites.
– Parfaitement ! (s'écria-t-il)
Même si elle ne voulait rendre ce service, elle allait être obligé. Elle inspira profondément et pria pour que ce soit pas une folie qui l'entraînerait en prison avant la case cimetière.
– Que dois-je faire ? (Demanda-t-elle)
– Vous revenez à la raison, ça fait plaisir ! (Commenta l'homme qui semblait boire du thé)
– Vous me laissez pas trop le choix.
– Pas faux. J'espère que vous êtes toute ouïe.
Elle savait que ce qui allait suivre n'allait pas lui plaire. Elle savait qu'elle n'était qu'un pion que ce mec bougeait et sur laquelle il faisait pression c'était facile de faire pression avec une bombe sur les genoux après tout. Au fond d'elle, elle savait qu'elle ferait n'importe quoi pour fuir cet endroit, pour ne jamais revoir ce mari trop con, pour continuer sa petite vie tranquille comme avant. Au fond d'elle, elle savait que toutes ces choses étaient de magnifiques illusions mais la nature humaine la poussait à espérer qu'elles se produisent en même temps que le jour se lève.
En écoutant attentivement, elle signa le pacte que le diable lui tendait.
Il traînait en robe de chambre dans son appartement. Il tournait en rond comme un lion en cage, subissant un ennui terrible qui lui pesait sur les épaules, marchant afin de ne pas sombrer dans les méandres de l'inactivité qui planait au-dessus de lui. Il faisait donc les cents pas depuis 3h du matin et il était presque 5h du matin maintenant.
Sa rue, Baker street, dormait encore. Seul le ronron des moteurs lasses des taxis venaient faire peur aux chats qui s'aventuraient un peu trop sur le bord du trottoir, ils détalaient comme des lapins vers les ruelles sombres où de petits yeux jaunes observaient l'endroit endormi avant de disparaître complètement dans les ténèbres.
L'appartement était bien vide depuis quelque temps et il avait du mal à s'habituer à ce silence pesant, à cette routine qui l'assassinait un peu plus chaque jour. Et puis, il y avait ce fauteuil en cuir brun qui passait le temps de façon paisible, oubliant la sensation d'une personne sur lui, oubliant son propriétaire et la façon dont il s'asseyait.
Quand il arrêtait de marcher, c'était soit pour boire une gorgée de thé froid soit pour regarder avec attention l'écran de son ordinateur portable. Cet ordinateur avait plusieurs onglets d'ouverts mais un seul était utilisé par l'homme en robe de chambre, c'était une page dédiée à toutes les personnes souhaitant l'aide d'un individu exceptionnel capable de résoudre n'importe quelle enquête répondant au nom de Sherlock Holmes. Il en avait de la chance car c'était lui l'être extraordinaire qui avait aidé Scotland Yard sur de nombreuses affaires, il avait tenu tête à un génie du crime et à une dominatrice au rouge à lèvre impeccable il n'avait plus à prouver qu'il était l'être le plus intelligent du monde. Mais malgré sa réputation, il s'ennuyait ferme et il cherchait donc des clients potentiels afin d'occuper ses journées.
Mais même ça lui rappelait un passé cher à son cœur, tout de suite chaleureux quand il y pensait, qui lui manquait terriblement même s'il se voilait souvent la face à propos de ça. Avant, ce n'était pas lui qui choisissait le gros des clients, il ne faisait que trier et repartait se coucher sur la banquette en s'enroulant dans sa robe de chambre.
Faire un caprice sur les clients sans intérêts alors qu'il était seul n'était d'aucune utilité et il ne retirait aucun plaisir d'embêter Madame Hudson, la propriétaire de son appartement, à une heure aussi tardive.
Il se jeta sur la banquette en râlant. Les profils qu'il avait mis de côté étaient terriblement banales, ils n'avaient rien d'exceptionnels, ils n'allumaient pas en lui cette petite flammèche comme auparavant.
Son regard se posa sur le fauteuil déserté. C'était triste à voir et à supporter cette absence abyssale qu'il avait crée en partant de cet appartement.
Il était une partie heureuse de son passé. De belles années de chasse aux criminels qu'il avait partagé avec celui qui s'asseyait sur ce fauteuil en cuir. Son nom avait partagé la une des journaux avec celui de Sherlock, un certain John Watson voyez, un docteur hanté par la guerre, qui avait trouvé en Sherlock l'adrénaline qui manquait dans sa vie. Et puis le bon docteur avait rencontré une jolie jeune femme bien mystérieuse et une très bonne menteuse qui était devenue la femme de sa vie.
Il y avait eu beaucoup de changements dans la vie de Sherlock. Sa vie avait été transformée dans plusieurs sens, il avait découvert des gens extraordinaires qui lui correspondaient parfaitement sa vie s'était illuminée d'une belle façon grâce à John et il lui en était redevable à vie.
Et puis John était parti vivre avec Mary, laissant cet appartement de nouveau vide. Bon, Sherlock lui avait aussi fait croire qu'il était mort donc le bon vieux docteur avait dû faire son deuil en choisissant de refaire sa vie avec la douce Mary.
Sherlock soupira et se roula en boule sur la banquette. Il devait aller de l'avant, il avait toujours fait ça et ce n'était pas John qui allait le faire changer à ce point il devait juste se réadapter à faire cavalier seul de nouveau.
Et alors qu'il faisait le tri des clients dans sa tête, son « palais mental », il se laissa emporter doucement par Morphée après tout, une machine avait aussi besoin de recharger ses batteries.
Lestrade était debout au beau milieu de la nuit et avec un gilet en kevlar sur le dos, son arme au poing et accompagné des forces spéciales anglaises ce n'était pas comme ça qu'il prévoyait ses sorties nocturnes habituellement. Généralement, elles étaient beaucoup plus calmes du style une bière devant sa télé.
L'homme aux cheveux poivres avait été pris au dépourvu par cette sortie « surprise », organisée au dernier moment par ses supérieurs qui voulaient que la chose soit réglée le plus rapidement et le plus proprement possible. Ce fut tellement soudain que ses cheveux n'avaient pas eu le coup de brosse habituel, son haleine sentait encore la bière et de l'alcool dans le sang était idéal pour une affaire musclée Lestrade regretta seulement d'avoir des responsabilités et d'être un gardien de l'ordre et blablabla.
La cavalerie attendait les ordres de leur chef tandis que Lestrade se mettait au jus sur l'affaire. Le problème était le suivant : la police avait été appelé par un homme disant qu'il avait vu des jeunes entrer dans la zone industrielle amenés une fille. Puis ils avaient reçu un appel d'une femme disant qu'il y avait du grabuge dans les entrepôts et qu'elle voyait les jeunes d'où elle était car elle était avec eux, elle leur déclara qu'ils étaient armés et qu'ils semblaient pas être des enfants de choeur. Lestrade fut surpris par cet appel, ok pour les jeunes mais pourquoi la fille, qui était avec eux, appelait ? C'était quoi cette dénonciation ? Scotland Yard n'avait pas pu s'empêcher d'ignorer cet appel c'était donc pourquoi les petites mains en jaunes fluo étaient présentes et avaient troqué leurs stylos contre des armes à feu. Quand à la présence de Lestrade, c'était à cause de congés parentales d'un collègue et le « non » catégorique des supérieurs pour lui trouver un remplaçant – même le stagiaire avait été refusé – donc Lestrade devait le remplacer étant donné que le service était en sous effectif.
Le chef des forces spécial enfila son casque et passa devant ses troupes suivant de Lestrade et de son pistolet ridicule comparé à l'attirail de guerre des hommes en noirs.
Les forces spéciales se divisèrent en trois groupes afin que les trois entrepôts de la zone soient couverts et des hommes en plus allèrent faire le tour complet de la zone afin de choper les éventuels fuyards. Les forces spéciales allaient se replier sur les intrus et aucuns ne pourraient s'échapper.
Les pas des hommes résonnaient peu à peu comme un grondement d'un lointain orage.
Le premier entrepôt était entièrement vide, pas une seule boîte en carton, pas un seul débris par terre, pas un seul signe que quelqu'un stockait dans cet endroit. Un soldat lâcha un « zone clair » dans la radio commune à tout le monde et le groupe de celui-ci alla combler le groupe de Lestrade qui s'apprêtait à ouvrir le second entrepôt. Le bâtiment était aussi grand que le dernier où les soldats s'acharnaient pour l'ouvrir, comme bloquer de l'intérieur par quelques sacripants l'homme en tête de ligne du groupe de Lestrade défonça la porte d'un coup de pied puissant et jeta une grenade flash. Après l'explosion de lumière, les hommes fouillèrent l'entrepôt sous toutes ses coutures et ne trouvèrent rien d'autres que des boîtes oubliées datant des années 2000 sans que personne n'ait jamais fait de procédure pour récupérer tout ce merdier. Alors que les mots « zone clair » venaient d'être prononcés, les collègues demandèrent de l'aide car « ça sentait mauvais dans le dernier entrepôt ». Lestrade alla regarder par lui-même et remarqua des barils empilés les uns sur les autres et tous entendirent des sanglots pas si loin que ça.
La fille.
La fille était au milieu des barils où sur chacun d'eux était peint une flamme blanche.
Ça sentait terriblement mauvais oui.
Le groupe entra dans l'entrepôt tandis que Lestrade faisait son possible pour rester à l'entrée de l'entrepôt comme on lui avait ordonné.
– Cet entrepôt est gigantesque. Aucune trace de la fille (déclara un soldat dans le talkie-walkie)
Les forces spéciales bougeaient comme des ombres, avec rapidité et efficacité, passant comme des flashs, survolant grâce à leurs foulées aériennes c'était merveilleux de les voir se déployer ainsi telle une meute.
Le soldat du groupe, le plus petit mais aussi le plus rapide, avançait comme jamais dans cet entrepôt et scannait chaque endroit où il passait une grande précision et avec attention. Il faisait son job à la perfection et ses supérieurs étaient fiers de lui, et proches de lui donner la promotion qu'il voulait tant c'est pas comme s'il avait donné plusieurs années de sa vie à son job quoi. L'homme en noir se faufila entre les barils en faisant en sorte qu'aucun ne tombe, il pensait à plusieurs choses à ce moment là : réussir sa mission et ainsi pouvoir rentrer chez lui retrouver sa petite amie.
Et puis il la vit.
La fille était au milieu de barils, assise sur une chaise, la tête baissée et ses longs cheveux recouvraient son buste jusqu'à ses genoux.
Il déglutit et attrapa son talkie-walkie :
– J'ai trouvé la fille. Elle est au centre de l'entrepôt.
Son message fut claire et concis. Les autres commencèrent à procéder à créer une zone de sécurité. C'était un rituel. Et cela se faisant, tous les hommes en noirs allaient se retrouver peu à peu au centre, se refermant comme une coquille sur la victime.
Lestrade eut un soupir de soulagement : c'était une opération rondement bien menée et tout sera bientôt plié, il pourra rentrer chez lui et retrouver sa bière.
Le soldat, celui qui voulait sa promotion, se trouvait à seulement quelques pas de la femme qui n'avait toujours pas levé la tête comme si elle était inconsciente. Il voyait les autres se rapprochaient et il eut ce geste : il leva la main vers le plafond, geste que tous virent et tous s'arrêtèrent en même temps. L'homme en noir voulait vérifier si elle ne cachait rien, si ce n'était pas un piège. C'était une bonne idée et pas si con que ça au final car c'était tellement facile que ça en sentait mauvais.
Il s'approcha de la fille en la tenant en joue avec son arme comme si la fille allait sortir de derrière sa chevelure un putain de bazooka mais c'était la procédure et c'était avec cette précaution là qu'il avait survécu à un bon nombre d'opérations. Il poussa avec le bout du canon de son fusil d'assaut le crâne de la fille : aucune réaction. Soit cette fille était une putain de souche de bois, soit elle jouait super bien la comédie, soit son agresseur l'avait super bien sonné notre soldat s'approcha encore un peu plus et poussa du bout des doigts les cheveux de la fille.
Il vit les paupières de la femme grande ouverte et la cascade de cheveux cachait bel et bien quelque chose : une foutue bombe.
Elle renifla bruyamment tout en gardant la tête basse.
– Il a dit que tout allait bien se passer.
– Il y a une bombe avec la fille. Il y a une bombe avec la fille.
– Il a promis que tout allait bien se passer, qu'il fallait juste que je passe un message.
Lestrade écoutait la conversation et un long frisson parcourut son échine.
– Qui ? Quel message ? (demanda l'homme en noir en attendant les ordres de son supérieur, à l'extérieur, qui avait fait voler le plan de la zone en hurlant des insultes)
– « Je suis de retour, je t'ai manqué ? » (elle fit une pause et elle releva enfin la tête et regarda tout autour d'elle, balayant du regard les forces spéciales à la recherche de quelque chose de plus précis) Je l'ai fait, je l'ai fait (hurlait-elle)
Lestrade bondissait sur place à l'extérieur de l'entrepôt.
Il sentait que quelque chose n'allait pas, que quelque chose venait de se briser. La tranquillité de cette opération menée de façon studieuse allait volé en éclat son instinct le trompait rarement.
La fille pleurait. Elle sanglotait violemment même.
Le soldat ne comprenait pas sa réaction, ok, c'étaient les nerfs de la fille qui lâchaient, c'était tout à fait normal.
Elle pleurait, certes, mais elle avait quand même une foutue bombe sur les genoux et des larmichettes n'allaient pas résoudre le problème.
– Pourquoi est-ce que je l'ai cru sérieux ? (Elle se mit à hurler. C'était de la colère qui la faisait trembler maintenant)
Et puis elle s'arrêta et regarda droit dans les yeux l'homme en noir, traversant de son regard de jade la visière fumée de l'homme.
– Pourquoi est-ce que j'ai cru qu'il me laisserait partir ? J'étais un sujet trop compromettant, j'allais le gêner.
L'homme en noir vit quelque chose dans le regard de la fille, une étincelle qui s'était éteinte, une lueur d'espoir qui avait fini par mourir c'était de la résignation pure et simple.
Et puis le téléphone sonna.
L'agent des forces spéciales eut à peine le temps de bouger qu'elle avait déjà le portable à l'oreille. Elle écoutait attentivement et l'homme en noir vit le visage de la victime se décomposait :
– Je suis sincèrement désolée (dit-elle en passant sa main libre sur son visage)
Le soldat ne comprenait pas ce qu'elle voulait dire jusqu'à qu'il voit les diodes de la bombe devenir folles.
Il eut simplement le temps de gueuler quelque chose du genre « ça va péter » avant de courir le plus rapidement possible. La plupart des gens dans l'entrepôt et à l'extérieur eurent le même réflexe que lui : courir le plus vite et le plus loin possible en espérant que le souffle de l'explosion ne fasse que brûler le pantalon et non disloquer son corps.
La bombe explosa finalement, soufflant tout sur son passage, faisant de cet entrepôt un merveilleux souvenir et la Une des journaux.
