Bonjour à toutes celles et ceux qui en viendrons à me lire ! Cette histoire est un recueil d'OS en lien avec Nevra, que je pré-publie sur le forum approprié d'Eldarya, mais en prévision de contenu lime/lemon à venir je viens également la publier ici. Ne vous attendez pas à de la grosse aventure, je suis plutôt inspirée par les questions du FC de Nevra, la poésir qui émane des situations du quotidien, etc. Mais un fil rouge, une intrigue (sans suspens ou mystère) apparaîtra au fur et à mesure.

Les histoires sont publiées sans ordre chronologique (dans le développement de l'histoire).

J'espère qu'elle vous plaira, bonne lecture !


Depuis quelque temps, nous nous retrouvions hors du QG, sur une petite bute herbeuse non loin du terrier. Reste d'un soir d'été où nos pas nous avaient portés ici, au terme d'une marche où nous avions particulièrement parlé, partageant des échanges plus profonds que de coutume. Une banale promenade pour changer d'air s'était muée au fil de la soirée, de nos pas et de nos mots, en un cheminement où, partageant nos idées, nos réflexions et quelques souvenirs intimes, nos déambulations avaient fini par nous mener en haut de ce talus. Assis là, dans l'herbe épaisse, les pâles tours du QG derrière nous, une vaste étendue herbeuse s'étalait devant nos yeux, se déroulant au fil d'une pente douce qui ondulait ça et là et que la brise marine venait effleurer. Puis, la mer. Toujours calme, toujours plate. Immense. D'où nous étions assis, la plage et les falaises se dérobaient à la vue : entre l'immensité du ciel et celle de la prairie était celle de la mer. Et en cette belle journée de mai qui touchait à sa fin, nos regards se perdaient chacun dans le lointain. Trois espaces, trois aplats de couleurs violentes et entières : un vert franc, un bleu sombre et un autre encore vif et limpide, sans l'ombre d'un nuage.

Dans l'air du soir qui commençait à tomber, des odeurs montaient de la terre, révélant le parfum de plantes qui à la vue se fondaient dans cette étendue verte dont l'œil attentif pouvait discerner les nuances, changeantes au gré du vent. Arriva ce moment de la journée où il ne fait plus clair mais pas encore tout à fait sombre, lorsque le soleil a disparu à l'horizon mais que sa lumière persiste encore. « L'heure bleue », comme je l'ai appelé. Les couleurs mutent, prennent une nouvelle intensité : le vert semble devenir électrique, comme teinté de violet ou infusé d'une sorte de lumière, et il fait écho au bleu du ciel qui demeure encore particulièrement intense.

À cette heure-ci, où jour et nuit semblent se confondre, où le jour n'est pas tout à fait mort et la nuit pas encore née, nous étions assis dans l'herbe, moelleuse et grasse, goûtant en silence cette fin de journée. Je ne saurais dire si nous nous taisions du fait d'avoir tant et si bien parlé, ou si parce que nos sens étaient saisis par cette heure du jour, découvrant et appréciant ces couleurs, ces odeurs et le profond calme qui émanait de tout ce spectacle sensoriel et muet.

Assise près de lui, j'appréciais cette marche du monde silencieuse, savourant le bonheur d'être là et ce silence paisible qui succédait à nos échanges récents, leur souvenir encore vif. Même dans un autre monde la contemplation sereine d'un paysage était possible. « Là, tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté ».

Par la suite, au fil des jours qui suivirent et se succédèrent, se transformant en semaines qui devinrent des mois, cette butte devint pour chacun de nous un lieu de prédilection. Nous n'y étions plus revenus ensemble comme lors de la première fois, ni forcément à la même heure : chacun de notre côté, quand l'envie s'en faisait sentir, nous continuions à venir y profiter de la vue. Peut-être aussi du souvenir de ce premier soir qui y était attaché, où chacun s'était révélé à l'autre dans ses mots. Peut-être aussi de la présence de l'autre lorsqu'on le savait là. Il nous arrivait de se croiser, l'un et l'autre restant à distance pour ne pas interférer dans la douce contemplation de celui qui était arrivé avant nous. Puis, quittant sa rêverie, il repartait avant l'autre. Jamais encore nous n'avions échangé un mot en ce lieu.

C'était en même temps notre lieu à chacun, et notre lieu à nous : les garçons continuaient de se rendre au rocher sur la plage, mais je savais désormais où j'étais la plus susceptible de trouver Nevra seul.

Bien sûr, la vie au QG suivait son cours : missions, retrouvailles, réunions, évaluations, blagues potaches, événements divers puis missions, retrouvailles, etc. Seulement, hors des enceintes et sur cette colline dont derrière la crête ne dépassaient que les créneaux blancs du QG, Nevra et mois nous taisions. Si nous n'avions que vaguement reparlé de notre promenade, nous continuâmes de discuter, plaisanter, traîner ensemble ou avec les autres, et plus encore. Au fil du temps, une tension s'était dessinée, qui montait. Ici, face aux immensités verte et bleue de la plaine et du ciel, tout était plus simple : on se contentait d'être là, profitant de la présence de l'autre et des souvenirs qui nous liaient à ce lieu. À ce soir là. À cette première fois. À l'autre. Tel qu'il nous était apparu, dans la simplicité et la vérité de son être, derrière ses mots et l'intelligence qui les ordonnaient.