Kate était postée à sa fenêtre. Il faisait nuit depuis longtemps. La rue ne comportait que trois ou quatre réverbères, tout au plus. La visibilité était mauvais et on ne pouvait dire assurément qui passait. Pourtant, elle était sûre de l'avoir vu. Il était entré dans la maison d'en face. Une jolie maisonnette, semblable à toutes les autres du lotissement, mais décorée de belles roses et de divers autres plantes que la propriétaire semblait très bien entretenir. D'ailleurs, celle-ci était très discrète. On ne la voyait pas souvent. Il arrivait que Kate la croise lorsqu'elle partait faire ses courses. Souvent, dans ces moments-là, elle était en train de jardiner un peu ou de lire au soleil. En temps de pluie, elle ne montrait pas le bout de son nez. Kate ne savait plus très bien comment elle s'appelait. Ariane ? Hadriana ? Amaria ? Un nom bizarre dans ce goût là en tout cas... Elle était une belle femme, jeune -un peu plus jeune que Kate- blonde aux yeux émeraude. Sorcière, elle aussi. C'était pour ça qu'il était entré chez elle.
Kate fixait la maison d'en face. Elle attendait le moment fatidique où un rapide éclaire vert zébrerai la ciel, annonçant la fin. Mais rien. Une lumière était allumée à l'étage. Certainement que la voisine était dans sa chambre. Insouciante du danger. Ne sachant pas qu'il marchait à l'étage en dessous, baguette prête, sourire cruel aux lèvres. Kate savait qu'elle était sang-de-bourbe, comme on dit. Née de deux parents Moldus. Raison de plus pour qu'il veuille la tuer. Mais rien ne semblait venir.
Tout à coups, des bruits de pas. La femme se retourna et vit son mari arriver dans le salon.
-Tu ne viens pas te coucher ? demanda-t-il.
-Il est là, répondit-elle d'une voix éteinte.
-Tu es sûre ? Tu l'as vu ?
-Je suis sûre que c'est lui que j'ai vu entrer dans la maison d'en face. Il est là pour elle, cette fois. Parce qu'elle est sang-de-bourbe et qu'il a décidé de tous les éliminer.
-Il l'a tuée ?
-Je n'ai rien vu... Mais... J'ai peur. Si jamais l'envie lui prenait de continuer... Si jamais...
Son mari la prit dans ses bras.
-Il faut être courageuse, Kate. Si jamais il vient, nous lèverons notre baguette et nous nous battrons. Même si cela ne sert à rien. Au moins, nous ne mourrons pas passifs.
-Mais pour elle (elle désigna la maison d'en face), nous ne pouvons rien faire ?
-A quoi cela servirait ? Nul ne peut le vaincre, tu le sais. Nous ne lui arrivons même pas à la cheville.
Petit silence. Kate tourna à nouveau la tête vers la fenêtre. La lumière à l'étage était éteinte. il y avait peut-être eu l'éclair vert tandis qu'elle parlait avec son mari. Elle ne l'avait pas vu.
-Viens. Viens te coucher, murmura l'homme, entraînant sa femme vers la chambre. Nous irons demain, voir, pour le corps.
-Nous sommes lâches...
-Je sais. Mais quoique nous fassions, ça se soldera par un échec inévitable.
La voisine d'en face était morte. Kate baissa la tête, pleine de honte. Il avait dû repartir. Il n'était pas venu chez eux. Ce n'était pas leur tour. Pas encore...
Dans l'obscurité d'une chambre, un couple faisait l'amour. Cela faisait un moment, qu'ils ne s'étaient pas vus. Ils ne savaient même pas s'ils s'aimaient toujours. Mais bon, pour la forme, il fallait bien qu'ils passent cette nuit ensemble. Peut-être serait-ce la dernière... Aucun des deux ne pouvait le dire avec certitude.
Elle le regardait, dans la pénombre. A quoi pouvait-il bien penser ? Où était-il depuis tout ce temps ? Remarque... elle avait l'habitude qu'il parte, qu'il revienne et qu'il reparte à nouveau. Mais jamais il ne lui racontait ce qu'il faisait, où il allait, qui il fréquentait. Quand ils se retrouvaient, ils ne passaient pas plus d'une nuit ensemble. Elle savait que lorsqu'elle se réveillerait, le lendemain, il serait déjà loin. Voguant vers son destin. Peut-être qu'il ne reviendrait plus.
Elle ne l'attendait jamais longtemps. S'il tardait trop à la retrouver, elle se prenait un autre amant. Elle passait un petit temps avec lui, jusqu'à ce qu'il se lasse d'elle -ou vice versa- ou que l'autre reparaisse. C'était comme ça, leur vie. Il faisait peut-être pareil, de son côté.
Lorsque leur deux corps s'écroulèrent l'un sur l'autre, elle bascula sur le côté, s'enroulant dans le drap défait. Il haletait. Il la regarda. Il voyait sa silhouette se découpant dans la pénombre. Il sourit. Il s'approcha d'elle et passa son bras autour de son corps. Ensemble, ils s'endormirent. A quand la prochaine fois ?
