The Tourette's, the paranoiac and the apathetic

Cette histoire est une fiction longue à point de vue multiple. Chaque chapitre sera narré par un des trois personnage principaux, et chaque changement de point de vue sera indiqué.


Chapitre 1 - Tweek

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Mince, encore loupé. Le bouton a glissé de mes doigts et je dois recommencer. Courage Tweek, plus qu'un et je serai prêt. Je mets toujours énormément de temps à m'habiller parce que mes mains tremblent trop pour pouvoir boutonner mes habits, mais je préfère quand même les chemises aux t-shirts. Je déteste tout ce qui s'enfile par le col. Imaginez : je pourrais rester bloqué et m'étouffer ! Mon dieu !

_Tweek.

_Ah !

Mon cri, aigu et perçant, est accompagné d'un sursaut. Durant un quart de seconde, je vois ma propre mort arriver, mais je me calme lorsque je m'aperçois qu'il ne s'agit que de Craig.

_Tu es prêt ? Demande-t-il

_Pr-presque, il faut que je -ngh- attache le dernier bouton.

Le regard du brun descend lentement le long de la boutonnière et s'arrête le seul qui n'est pas encore à sa place. C'est celui situé juste au niveau du nombril, celui avec lequel j'ai toujours eu le plus de mal. Craig soupira et le ferme lui-même, ce qui me fait légèrement rougir.

_On y va ?

_Ngh, oui.

Je ramasse ma sacoche et nous sortons. Nous marchons, lui à pas lents et réguliers, moi je tressaute, aussi nerveux qu'à mon habitude.

_Tu-tu voulais faire quoi déjà ? Je demande lorsque nous approchons du centre-ville.

_Aller dans un magasin.

Typiquement le genre de réponse que donne Craig. Évidentes, bêtes, mais dites avec une voix si froide et ferme qu'immanquablement, c'est son interlocuteur qui se sent bête, moi toujours plus que les autres. Ça l'amuse, je crois.

_Nan mais p-pourquoi tu as besoin de moi ?

_Je dois acheter un cadeau à ma sœur, pour son anniversaire.

_Ah ! Tu aurais mieux fait de demander à une fille alors. Wendy ou Bebe.

_Tu sais bien que j'aime pas les filles. Rétorque-t-il.

Vrai. Craig est gay et il déteste toute personne de sexe féminin (en dehors de sa mère et de sa petite sœur Ruby). Il dit qu'elles sont bavardes, vaines et hypocrites. Je ne sais pas si c'est vrai, mais ce qui est sûr c'est que moi aussi je n'aime pas traîner avec des filles. Je veux dire, elles me terrifient, elles sont incompréhensibles !

L'espace d'une seconde, je me demande si je ne devrais pas être vexé par la réflexion de mon ami. Ne venait-il pas de sous-entendre que j'étais ce qui s'approchait le plus d'une fille ? Il voulait que je l'aide à choisir un cadeau pour sa sœur, quand même. Il devait sans doute se moquer de moi... ou peut-être pas. Il était sérieux ? Il s'attendait vraiment à ce que je le conseille ? Mon dieu c'est beaucoup trop de pression ! Craig passe une main dans mes cheveux et dit :

_T'inquiète, si je t'ai demandé de venir c'est parce que je sais que tu ne peux pas me mentir.

Parfois, je me demande s'il ne lit pas dans mes pensées. Il devine toujours ce qu'il y a dans ma tête sans que j'ai à dire quoi que ce soit ; mais bon, c'est peut-être parce mon naturel nerveux affiche tout ce que je pense sur les traits de mon visage.

_On est arrivé.

Je lève les yeux et vois la grande enseigne rouge. H&M, indique-t-elle.

_Craig non ! Tu sais que je – ngh – déteste les grands magasins comme celui-là ! Je plaide.

_Tweek, il est dix heures du matin, réplique-t-il en brandissant sa montre sous mon nez, à cette heure-là y'a personne. J'ai fait l'effort de me lever pour qu'on puisse venir dès l'ouverture alors toi tu fais l'effort d'entrer là-dedans.

_Ah !

Il ignore mon petit cri de surprise habituel et nous entrons. Je sais ce que les gens pensent : ils doivent se dire que Craig ne m'apprécie pas vraiment et qu'il se sert de moi, ou alors, que c'est moi qui le colle, mais ils se trompent. Aussi étrange, froid, monotone et apathique qu'il soit, je sais que Craig m'aime bien, sinon, il m'aurait éjecté de sa vie depuis longtemps. Craig n'est pas le genre de garçon qui s'embarrasse des conventions, des politesses, de la diplomatie. Il se moque que quelque chose ''ne se fasse pas'' et n'hésite jamais à dire ce qu'il pense. Il est un des seuls à tenir tête à Cartman, il n'a peur de rien ni de personne et je l'admire pour cela.

_Tu vois, y'a pas un chat. Lâche-t-il nonchalamment. Il est vrai qu'à une heure aussi matinale, il y a plus de vendeurs que de clients. Nous nous rendons directement au rayon pour adolescente et jetons vaguement un œil à la recherche de quelque chose qui pourrait plaire à la petite.

_Tiens, ça ! Dis-je en pointant du doigt un mannequin en hauteur (en priant de toutes mes forces pour que la femme de plastique ne deviennent pas une furie animée, vexée par mon impolitesse !)

_Ton doigt tremble tellement que je ne sais pas si tu me montres la jupe ou le t-shirt.

_La j- la – ngh – jupe ! Gah !

Je ne sais pas ce que j'ai aujourd'hui, je me sens particulièrement nerveux et angoissé. Mauvais karma sans doute. Craig a dû le remarquer car il prend ma main et la serre fort, ça me calme. Craig est mon modèle, mon repère et mon meilleur ami. C'est également la personne dont je suis amoureux depuis plusieurs mois, mais ça, il n'est pas au courant. Un jour je le lui dirai, mais je n'en ai pas encore eu le courage. Il s'avance vers l'article que je lui ai montré et s'étire pour saisir l'étiquette.

_Dix-neuf euros quatre-vingt-dix-neuf. 'Tain ça fait cher.

_Mais je suis sûr que Ruby – ngh – l'adorerait.

Je lui prends des mains pour qu'il la voit mieux. C'est une jupe en jean rouge avec des étoiles, des taches et des bavures blanches. C'est tout à fait le style de sa petite sœur.

_C'est vrai qu'elle n'est pas mal. Concède-t-il.

_Je donne la moitié si tu -ngh- veux.

_C'est ma sœur Tweek.

_C'est un peu la mienne aussi.

Il sourit. Comme je suis fils unique, j'ai toujours considéré les enfants Tucker comme ma fratrie. Craig et moi sommes amis depuis toujours, je venais souvent chez lui quand il gardait sa sœur, alors avec les années, elle est un petit peu devenue la mienne.

_Allez d'accord. On fait moitié-moitié.

Je souris à mon tour. Nous traversons la boutique en direction des caisses quand une voix attire notre attention.

_Bite !

Je sursaute tandis qu'un imperceptible sourire se dessine sur les lèvres de Craig.

_Sale con ! Merde !

Le sourire s'agrandit. Craig s'immobilise, il semble attendre quelque chose.

_Enculé !

Craig se retourne enfin vers la source de cette voix. C'est un garçon de notre age, blond, pas très grand. Il examine un pantalon noir qu'il tient entre les mains. Il a l'air tout à fait ordinaire sauf qu'un juron sort de sa bouche toutes les cinq secondes.

_Enfoiré de merde ! Continue-t-il. Effrayant. Je suis sur le point de demander à Craig que nous partions vite mais je m'aperçois qu'il n'est plus là. Il marche en direction de ce blond qui crie des grossièretés.

_Thomas ! S'exclame mon brun, tu es revenu à South Park ?

_Craig ! Oui je – Salope ! - suis rentré la semaine dernière.

_C'est super, tu es inscrit au lycée ?

_Oui. Merde !

Inutile de préciser qu'il est extrêmement rare que de nouveaux élèves arrivent au lycée de notre petite ville, en particulier en dernière année. Je m'approche d'eux, encore plus méfiant que d'habitude, tout en écoutant leur conversation.

_J'étais parti vivre en Caroline du Sud avec mon père mais je ne m'entendais pas avec sa nouvelle femme alors – bordel ! – je suis retourné vivre ici chez ma mère.

_Cool. T'es venu t'acheter des fringues ?

_Ouais. Je préfère venir à l'ouverture, tu sais, y'a pas trop de monde. Enfoiré de merde !

_Nous aussi, à cause de lui, là. Répond le brun en me désignant d'un rapide mouvement de tête.

Instinctivement, je me retranche derrière Craig, mais c'est trop tard, celui qu'il appelle Thomas m'a vu. Il penche la tête et me sourit.

_Salut, dit-il, on se connaît non ?

_Je, je, je, je crois. Je bégaye.

_Tweek est aussi de South Park, explique Craig, ses parents tiennent le Tweek Bros. On est venu acheter un cadeau pour ma sœur, on va payer et ensuite on va y boire un café, tu veux venir avec nous ?

_Avec plaisir. Enculé !

_Ah ! Je ne peux m'empêcher de crier. Thomas se tourne vers moi et rit. C'est un rire attendri, légèrement compatissant. Ça me vexe et m'intrigue à la fois. Nous nous rendons à la caisse. Les deux autres continuent de discuter. Craig ne semble pas perturbé par le fait que Thomas crie des gros mots en plein milieu de ses phrases. Je crois que c'est parce qu'il est malade, il ne peut pas s'en empêcher. J'ai beau le savoir, ça me fait aussi peur qu'il y a dix ans. Il me semble que ce Thomas et Craig ont été très amis à cette époque, moi je traînais plutôt avec la bande à Stan, je ne l'ai pas tellement fréquenté du coup. Donc, je ne le connais pas, ce qui est déjà une source de stress, mais en plus avec cette espèce de... tic, il m'effraie carrément. Le pire c'est que Craig semble ravi de le voir là et je sens une pointe de jalousie percer mon cœur.

_Mais – Pute ! - dîtes moi, vous sortez ensemble vous deux ? Demande soudainement Thomas.

_Non, pourquoi ? Répond simplement Craig.

_Vous vous tenez la main depuis tout à l'heure. Fait remarquer le blond.

_Oh, c'est parce que Tweek est du genre nerveux

Thomas fronce les sourcils. Il s'apprête à dire quelque chose mais il est coupé par la sonnette de la porte. Nous venons d'entrer chez Harbuck. En tant que futur propriétaire, je fais signe à mes parents et m'installe directement derrière le comptoir pour faire nos boissons. Je commence à préparer quand je réalise que je ne sais même pas ce que veut Thomas. Craig, je le connais par cœur, je sais qu'il a envie d'un chocolat au cacao amer avec de la mousse de lait sur le dessus. Je me tourne vers mes deux amis :

_T-t- gah ! - Thomas, tu veux quoi ?

_Un mocka au lait s'il te plaît. Avec un sucre.

Je l'aurais parié. J'avais deviné dès la première seconde qu'il était du genre café au lait. Je fais nos trois boissons et file m'asseoir avec eux, en prenant garde de ne pas renverser le plateau comme cela m'arrive si souvent. Ce Thomas me rend vraiment nerveux.

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A suivre


Revu et corrigé le 19 / 01 / 2017