22 février 1981
Je viens d'atterrir dans une rue du Londres sorcier, alertée par ma brûlure au poignet. Le bracelet s'est mis à chauffer et j'ai compris. Ils étaient en danger de mort. Ce bracelet magique que nous portons tous les trois, ce bracelet qui nous préviens si l'un d'entre nous a besoin d'aide. Normalement c'était pour mon accouchement, mais là, c'est pour quelque chose d'horrible qu'il me brûle. Je le touche et je transplane. Je viens d'arriver à quelques mètres d'un rassemblement d'aurors. Je ne m'approche pas plus prêt, c'est trop risqué. Je sens mon cœur battre bien trop vite, je garde les yeux grands ouverts, si je bats une fois des paupières je vais pleurer. Le bracelet est maintenant glacé, et cela me fait beaucoup plus mal que quand il brûlait… Je serre les dents et me cache dans une ruelle adjacente, et un froid glacial m'envahit, ils sont morts, je le sais, je le sens. Je manque de m'effondrer quand je vois passer leurs corps dans des brancards, un passant me demande si ça va, d'un informulé je l'envoie contre le mur. Je ne suis pas d'humeur.
Retenant mes larmes je transplane chez moi. Je rentre dans la chambre vide, les draps du lit sont froids, et ils ne seront plus jamais chauds. Je m'effondre dans ce lit, inspirant à plein nez l'odeur qu'ils ont laissé, elle n'est plus aussi forte qu'avant. Comme un mur, la réalité me frappe. Ils sont morts, et je suis seule. Evan et mon cher William sont morts. Ils sont morts et moi je reste seule et enceinte. Je pleure sans m'en rendre compte, je n'arrive pas à m'arrêter. J'ai l'impression de me noyer dans un océan de tristesse, dans des draps froids, dans le vide qui m'assaille.
Je voudrais ne jamais me réveiller, mais la douleur m'en empêche. Mon bras est en feu, le Seigneur des Ténèbres nous appelle, mais je ne répondrais pas à l'appel, je ne réponds plus à l'appel depuis quelques temps.
Je n'ai plus de force, plus d'envie. La douleur est telle que je pleure encore, ou peut-être est-ce la tristesse. Je crois qu'elle me fait encore plus mal que la douleur. J'ai quand même pris une décision, je vais aller à la morgue, leur dire en revoir. Je me lève sans envie et m'habille. Je me maquille même, j'essaie de me faire belle pour eux, mais avec mes cernes et mes yeux rouges, cela semble impossible.
Je me rends au Ministère par cheminée, ma capuche rabattue sur la tête, je ne veux pas qu'on me reconnaisse, il y a trop de Mangemorts infiltrés au Ministère, même s'ils doivent être aux pieds du Seigneur à ce moment-là, on n'est jamais trop prudent. Je m'inquiète moins des Aurors, on se bat avec notre cagoule.
Je calque mon pas sur celui des autres, je suis devenue très douée pour passer inaperçu, une de mes principales missions chez les Mangemorts était l'infiltration. J'arrive rapidement à la morgue, je sors ma baguette et jette un Impero à la secrétaire, qui me laisse entrer avec ses yeux vides. Je stupéfixe le magicomage légiste ainsi que ses deux assistants. J'ouvre tous les tiroirs, tombant sur des corps affreusement mutilés, mais cela ne me choque plus maintenant. Finalement je les trouve, ils sont beaux, c'est comme s'ils dormaient, les Aurors ne les ont pas abîmés, sans doute un Avada Kedavra. Ils sont encore habillés et je récupère les bracelets en les embrassant tendrement. Mes larmes tombent sur leurs corps froid et je les serre contre moi en sanglotant, pour la toute dernière fois. Mais le temps presse et je referme à regret les tiroirs. Je me dépêche de trouver le formulaire de leur enterrement. Je falsifie les papiers pour qu'ils soient enterrés ensembles, une seule tombe pour deux Mangemorts, je pense au budget du Ministère moi, ils devraient me remercier. Un gloussement s'échappe de mes lèvres.
Je change aussi l'adresse du cimetière pour celui où mon enterrement est déjà prévu. Il n'y aura ni cérémonie, ni pierres tombales, les Mangemorts ne le méritent pas, nous sommes des monstres après tout. Je pointe ma baguette contre les médecins et leur efface la mémoire, on est jamais trop prudent.
Je retourne chez moi, dans cet appartement triste et froid. Je m'allonge tristement sur mon lit. Je ne peux même plus pleurer, je n'ai plus de larmes en moi. Pourtant je dois m'hydrater, c'est important pour les enfants. Si je ne les avais pas, je me suiciderais, remarque je pourrais quand même… Quel avenir pour des enfants de Mangemorts ?
Aucun. Même si les Mangemorts gagnent, je n'aurai pas ma place du côté des vainqueurs, je les ais reniés. Ma vie ne tient qu'à un fil maintenant qu'ils sont morts.
La journée passe beaucoup trop lentement, je ne fais que dormir, pleurer et me réveiller en sursaut à cause de la douleur à mon bras. Je me rappelle quand le Seigneur des Ténèbres a appris que j'étais enceinte, il a essayé de les tuer, par pur plaisir. Je dois mon salut à une attaque surprise de l'Ordre. C'était il y a deux jours. Et depuis je me cache, Evan et William venait me rejoindre en secret, le Seigneur des Ténèbres a été beaucoup occupé ces derniers temps, l'Ordre a repris du poil de la bête, mais il a aussi perdu de nombreux combattants.
La douleur me réveille, elle est pire que ce que je n'ai jamais connu, elle si puissante que je suis incapable de faire autre chose qu'hurler à la mort. La douleur s'arrête bien trop brusquement, c'est bizarre. J'écoute le silence autour de moi, et je ressens une perturbation dans les sorts de protection. Ils sont là ! Je saisis rapidement ma baguette, prête à me défendre, prête à tuer pour survivre. J'envoie un Avada sur la première personne qui ouvre la porte avant de me protéger derrière mon armoire renforcée magiquement. Ils ne sont plus que trois. Je sais qu'ils n'utiliseront pas d'Avada Kedavra, le maître ne veut vivante, pour me torture à sa guise. Et c'est à mon avantage, moi je peux les tuer. Je respire un grand coup et commence la bataille. Je crois reconnaître la voix de Théophraste Nott et la corpulence de Colin Avery. Le troisième doit être une nouvelle recrue, dommage pour lui, il vient de mourir, après m'avoir frappé sans mesure. Je n'arrive pas à me résoudre à tuer mes amis, et eux non plus apparemment, vu que leurs Doloris, ne me font pas assez mal. Je vois les meubles exploser les uns après les autres, et je sens une montée d'adrénaline qui me redonne suffisamment de force pour les envoyer au tapis. Seulement quelques secondes mais c'est suffisant pour que je me précipite dans la cheminée et disparaisse dans une gerbe de flammes vertes.
Je me retrouve dans mon ancien appartement, j'aurai pu aller chez Queenie ou Zoey, mais je ne veux pas les mettre en danger. Je me précipite dans la rue, transplane dans un village du Pays de Galles où j'ai passé des vacances il y a longtemps. Pour rentrer dans le premier hôtel que je vois.
Je n'ai même pas de vêtements de rechange. Qu'importe, de toute manière il y a plus important. Je m'effondre sur mon lit et m'endors en pleurant.
Quand je me réveille, le jour se lève, et un hibou m'apporte La Gazette du Sorcier. La Une brise mes dernières barrières.
MASSACRE DE LA FAMILLE YAXLEY PAR LES MANGEMORTS, LE FILS SEUL SURVIVANT.
Ce meurtre est arrivé hier dans la nuit, ce sont des moldus qui ont aperçu de la fumée sur la colline où était le Manoir Yaxley. Ils ont appelés des pompiers (des moldus spécialistes des incendies). Ils sont arrivés en même temps que les Aurors qui leur ont pris l'affaire. Les corps semblent avoir été gravement mutilés, même si cela est difficile à dire à partir de restes carbonisés. Trois corps ont été retrouvés, nous supposons que ce sont Aliénor et Harold Yaxley, ainsi que leur fille, Michelle Yaxley. Cette dernière n'avait que vingt ans. Son frère se dit ''dévasté et anéanti'', il se dit ''déterminé à lutter avec encore plus de force contre les Mangemorts.'' En effet, la marque des Ténèbres flottait autour de la maison. Nous adressons toutes nos condoléances aux amis et aux proches. Les Aurors ne veulent pas s'exprimer.
Je jette au loin le journal, de toute manière je n'arrivais plus à lire à travers mes larmes. Le reste de l'article est composé de photos et des hauts faits de mon père. Je vois mon frère qui pleure, enfin qui fait semblant, il est fidèle au Seigneur des Ténèbres, même s'il ne porte pas la marque. Je me demande qui est le troisième corps, le Seigneur des Ténèbres doit savoir que je ne suis pas morte... Il est bien trop puissant. Et si c'est le cas je suis en danger, enfin comme depuis deux jours. Je dois réfléchir à un plan pour m'en sortir, mais pas tout de suite, je veux encore m'apitoyer sur mon sort avant de lutter pour ma survie.
Il faut que je fasse quelque chose, je dois me mettre en sécurité, ils me retrouveront qu'importe où je sois. Je ne peux même pas quitter le pays, le Ministère est aux mains du Seigneur des Ténèbres et je serais tué avant de passer la frontière. Je dois aller dans un endroit extrêmement protégé. Soudain, un souvenir diffus m'envahit, je me rappelle de ce que nous avait dit Dumbledore : ''Poudlard pourra toujours vous accueillir''.
