1_ Premier jour
Les quatre gardiens de la prison s'avancèrent dans la grande salle et firent face aux étroites cellules creusées dans le mur. Dedans s'agitaient des prisonniers REDs. Ils avaient été capturés par les BLUs après leur défaite puis enfermés dans la « BLU Prison Mercenaries ». L'équipe des gardiens était plutôt réduite, ils manquaient d'effectif, mais ils n'avaient jamais failli à leur mission. D'un côté, si un prisonnier n'obéissait pas, il était tué sur le champ. Sauf exception.
Soldier, gardien en chef, observait les nouveaux prisonniers installés sur deux étages de là où il était, mains dans le dos.
-Ouvrez nous ! Lâchez nous ! criaient quelques Scouts derrière leurs barreaux.
À côté de lui se tenait son fidèle ami Engineer, un fusil à pompe à la main. Le petit homme lui donna un coup de coude et lui demanda :
-Dis-moi, Solly, y'a d'nouvelles tête là-d'dans on dirait, non ?
-Affirmatif ! C'est la première fois qu'on a un Spy et un Pyro ! Ne baisse pas ta garde, ils peuvent être redoutable… Sniper ! Garde un œil sur ce lâche de Spy ! Je n'voudrais pas qu'il s'échappe ! aboya le militaire.
-Pas d'problème mon pote, fit le tireur d'élite, son fusil en main.
Soldier baissa la tête vers son ami et le vit qui souriait :
-T'as déjà repéré ton bonheur ?
-On dirait b'en, le Pyro m'intéresse, lui répondit simplement l'ingénieur.
-Tu joues avec le feu là ! plaisanta l'autre.
-J'aime bien les nouveautés, les p'tits Scouts me cassent les pieds…
-C'est bon, c'est bon, j'te l'offre ! C'est bien pour te faire plaisir !
-Héhéhé ! T'es un véritable ami, Solly !
Ils partagèrent un rire puis le chef ordonna de nouveau au Sniper de ne pas tuer le pyromane prisonnier. Il acquiesça de la tête pour toute réponse et Soldier partit, suivit du silencieux Medic en blouse blanche.
Spy observait depuis sa cellule les quatre gardiens complotant. Son collègue Pyro était dans la même geôle et il se tourna vers lui :
-Je ne sais pas ce qu'ils mijotent mais j'ai comme l'impression que nous serons leurs premières cibles… Il faudra faire attention…
Le pyromane, assis paresseusement sur le banc qui leur servait de lit, hocha la tête en silence. L'espion lança un regard inquiet à son coéquipier avant de s'agenouiller près de lui :
-Ne t'en fais pas, mon ami, ça va aller, tu es un vrai dur à cuir, non ?
L'incendiaire posa une main sur l'épaule de l'homme bien habillé et fit un signe de tête comme quoi tout allait bien.
-Arrête, je suis conscient que ça ne va pas être facile pour moi, je… je m'en veux qu'on ne puisse pas vraiment faire autrement…
L'autre lui donna une petite tape sur la joue et fit plusieurs gestes avec ses mains et ses doigts.
-Oui, on ne peut pas faire confiance aux autres prisonniers, ils pourraient tout faire flancher mais… S'il t'arrive quoi que ce soit, je m'en voudrais toute ma vie, tu le sais, mon ami, continuait-il avec un sourire triste.
Un souffle s'échappa du masque à gaz, et l'homme en combinaison ignifuge serra son compagnon dans ses bras. Celui-ci lui rendit la pareille en lui tapotant le dos au passage puis ils s'écartèrent en entendant des pas dans l'escalier qui menait à leur couloir. C'était l'ingénieur, son fusil à pompe ramené sur l'épaule.
Il s'arrêta juste devant leur porte et leur sourit gentiment :
-C'est bien la première fois que j'vois vos classes dans c'te prison ! Comment ça s'fait qu'on vous r'trouve là ?
-Ne lui répond pas, Pyro, nous n'avons pas à traiter avec ce genre de personne, répondit Spy en regardant le gardien de haut.
Pyro ne dit rien, mais il regarda longuement l'homme de l'autre côté des barreaux. Il devait être plus petit que lui cependant, il était plus large il ne serait pas facile de prendre le dessus sur lui en cas de bagarre. Comme tout ingénieur, il portait des lunettes de soudure et un casque jaune était attaché à sa ceinture. Mais l'habituelle salopette de la classe avait été remplacée par une chemise blanche rentrée dans un pantalon noir à bretelles. Une cravate noire lui enserrant le cou lui donnait également une carrure moins bourrue il avait une allure séduisante. On aurait dit un Engineer s'étant pris pour un Spy.
-Je n'vais pas vous manger, vous savez, fit le mécano avec un drôle de regard.
-Ça c'est toi qui nous le dis…
-Pas d'problème, on s'retrouve tout à l'heure t'façon, héhé ! Pas d'bêtise Spy, not' Snip est sur l'coup.
Il leur accorda un clin d'œil et repartit laissant les prisonniers plutôt perplexes.
-Aucune classe ce type ! cracha Spy
Une sonnerie retentit et toutes les portes s'ouvrirent.
-TOUT L'MONDE SUR LA LIGNE JAUNE DOS AUX CELLULES ET QU'ÇA SAUTE ! aboya Soldier.
Tous les prisonniers sortirent et avancèrent jusqu'à la ligne jaune tracée au sol. Ils devaient être douze en tout et il n'y avait pratiquement que des Scouts et des Soldiers. Il y avait également deux tireurs d'élite dans le rang. Pyro et Spy étaient en effet les seuls représentants de leur classe. Ils étaient également les seuls qui provenaient de Dustbowl, ils ne reconnaissaient aucuns visages parmi les autres détenus.
-VOUS ALLEZ TOUS ME SUIVRE ET EN RANG SANS BOUSCULER ! LE PREMIER QUI S'APPROCHE TROP PRÈS DE MOI JE LUI EXPLOSE LA CERVELLE, JE NE LE RÉPÉTERAI PAS !
Le gardien en chef ouvrit la voie dans le couloir de gauche, suivit de l'ingénieur marchant à reculons, prêt à tirer sur un éventuel rebelle. Medic, armé de son pistolet à seringues, fermait la marche avec un air méfiant. Le Sniper, lui, suivait le mouvement de haut, se promenant sur une passerelle qui longeait le mur.
Un Scout, prit de panique, sortit du rang et détala dans le sens inverse. Il bouscula Medic, fit trois pas et s'écroula par terre. Une belle en pleine tête.
-Ça c'est fait, annonça le militaire à l'avant avec un sourire.
Spy se tourna discrètement vers son collègue derrière lui et lui laissa le temps de lire la peur sur son visage. Le Français était terriblement mal à l'aise, il ne voyait pas le moyen de fuir. Il n'avait ni arme, comme tous prisonniers, ni kit de déguisement, ni de quoi se rendre invisible. Il ne savait même pas encore où récupérer ses affaires personnelles.
Leurs gardiens les emmenèrent à l'extérieur dans une grande coure divisée en plusieurs parties par des carrés de grillage. Ils entrèrent dans l'un d'eux et découvrir deux longs parapets de bois formant un couloir au milieu du quel le sol était de terre battue.
On positionna les prisonniers en ligne et Soldier leur fit face pour leur donner quelques explications :
-Ici vous n'êtes pas en camp de vacances, les filles, ici vous êtes en prison et ici, c'est nous qui décidons, c'est bien clair ?!
Engineer avança d'un pas, non loin du démarreur de feu, et ajouta :
-Faites oui si s'avez compris !
-OUI ! firent les prisonniers en cœur.
-Eh, toi le Pyro ! J'ai pas été assez audible pour tes petites oreilles caché ?! T'as peut être pas d'oreilles ?!
Le concerné agita les mains.
-Mais qu'est c'qu'il fout ce clown !? s'impatienta le chef de prison.
-Ahem, puis-je me permettre ? interrompit Spy
-J'crois pas qu'on t'ai sonné, branleur, fit Sniper derrière lui.
-Laisse le parler, dit calmement le Texan.
-Mon collègue pyromane est dans l'incapacité de vous parler à moins que l'un d'entre vous ait appris le langage des signes.
Il y eut un silence puis l'homme de guerre se tourna vers son ami :
-Tu les choisis toi, hein ?
Engineer haussa les épaules avec un sourire et… il se prit un coup de poing en pleine figure. Il recula d'un pas, le nez en sang. Puis il se prit un autre coup, une droite cette fois.
Les REDs commençaient à s'agiter. Certains tentèrent une évasion, pensant que les gardiens étaient suffisamment distraits. Mais un soldat et un jeune garçon roulèrent sur le sol, l'un avec un trou dans la tête l'autre avec une seringue calmante dans le postérieur. Ceci fit rameuter le troupeau rouge, empêchant l'espion de se faufiler hors du champ de vision de l'ennemi.
Lorsqu'il se tourna vers son collègue, celui-ci était au sol. Le gardien au casque de fer lui avait fait une clef de bras. L'ingénieur était debout, à côté, une main sur son nez ensanglanté, l'autre sur l'épaule de Soldier pour tenter de le calmer.
Spy eut un pincement au cœur pour le pauvre pyromane écrasé sous le poids du grand homme, incapable de se débattre. Allait-il le tuer ? Sa mort n'aurait même pas servie à ce que lui puisse s'enfuir. Mais personne ne vint coller son canon contre le masque à gaz. Le médecin le piqua juste d'un calmant avant de le menotter. Il vit le mécano chuchoter quelque chose à l'oreille de l'Allemand. « Oh Pyro… Que vont-ils te faire… »
-Maintenant que ce petit trou du cul est neutralisé, vous allez TOUS, je dis bien TOUS, traverser ce petit champ de mines ! reprit Soldier de nouveau devant la petite troupe.
Lorsque Pyro se réveilla, il constata que ses menottes étaient imbriquées à un crochet surélevé par un système de poulie. Heureusement, il touchait le sol, mais il n'était pas assez grand pour libéré ses mains de l'esse. Il fit tinter les chaines qui lui maintenaient les bras en l'air en essayant de se dépêtrer du piège et sursauta lorsqu'il entendit un rire derrière lui.
Alors l'ingénieur lui fit face et lui fit lever la tête de sa grosse main.
-T'as une sacrée droite, petit, j'n'aurais pas dû baisser ma garde ! fit-il avec un sourire, mais les règles sont les règles ! T'as merdé, t'dois payer.
Il haussa les épaules et lâcha la tête du pyromane qui grogna. Il fit le tour du prisonnier et tira un peu sur la combinaison ignifuge.
-J'sais qu'ta combinaison n'fait pas l'poids face aux balles mais elle a l'air p'tôt résistante… Il n'y a qu'un moyen de l'savoir : la tester !
Il eut un rire si sadique qu'un frisson parcourra tout le corps du RED. Celui-ci l'entendit se déplacer et actionner des leviers. Une grosse machine siffla et Pyro commença à prendre peur.
-Comme tu l'vois, mon garçon, j'suis un peu paresseux, j'aime bien utiliser des machines… Après tout, j'suis ingénieurs, hm !
Alors l'engin démarra et le prisonnier sentit quelque chose lui cingler le dos avec force. Il retint un cri, serrant les dents aussi fort qu'il pouvait. Il entendit des rouages tourner puis il reçut un deuxième coup. Il s'agissait en fait d'une grande lanière de cuire large comme trois doigts qui, actionnée par la machine en un mouvement circulaire et vertical, faisait office de fouet. La claque venait toutes les sept secondes.
Engineer revint auprès de sa victime et observa longuement le tissu. Après plusieurs coups, il put même savourer les cris stridents de son prisonnier qui ne pouvait plus contenir sa douleur. La combinaison commençait à s'user.
Enfin elle craqua. Mais trop peu à l'avis du mécano.
Il laissa la machine fonctionner pendant près d'un quart d'heure. Il pouvait à présent voir la chair à vif à travers les fentes dans la combinaison rouge.
L'ingénieur poussa de nouveau quelques leviers et le moteur s'arrêta. Il entendait mieux à présent le souffle difficile du pyromane ainsi que ses petits gémissements. Il ne se tenait plus sur ses pieds et se laissait pendre au crochet. Le tortionnaire reprit place devant lui et lui souleva la tête avec douceur pour lui embrasser le front et lui dire calmement :
-Que ça te serve de leçon.
Il partit actionner une manivelle qui fit descendre le corps qu'il prit dans ses bras. En temps normal, il aurait trainé sa victime par les menottes jusqu'à sa cellule. Mais cette fois, il passa un bras sous ses jambe, un autre derrière ses épaules et il le souleva. Il eut un air attendrit en sentant le corps trembler contre lui.
Il fut aidé par son collègue Medic pour le remettre dans sa geôle et il donna une dernière caresse à l'incendiaire sous les yeux horrifié du Spy avant de repartir en claquant la grille.
Spy attendit que les gardiens soient partit pour prendre le masque à gaz dans ses mains :
-Oh Pyro, mon ami, je suis vraiment désolé ! Tu n'aurais pas dû ! Que t'a-t-il fait, mon Dieu…
Le blessé signa faiblement :
« Je recommencerai et cette fois tu t'échapperas. »
-Non, non, non, je…
« J'ai pris ma décision »
-Tête de mule… soupira Spy désolé.
Il le couvrit précautionneusement de sa veste et lui caressa la tête jusqu'à ce qu'il s'endorme. Il savait qu'il ne pourrait pas lui faire changer d'avis. Il savait aussi qu'au moins l'un d'entre eux devait sortir d'ici. Mais il ne supportait pas cette situation, il ne supportait pas que son ami souffre inutilement.
