Prologue : Enfin libre – 1er décembre

Elle ne se souvenait plus que l'Olympe fût aussi beau en hiver. Un fin manteau neigeux recouvrait toute la cité grecque, lui donnant un aspect encore plus féérique qu'en été.

Ici, adossée à l'une des fenêtre de l'un des salons du grand de tous les palais, juché sur le sommet du mont Olympe, Perséphone pouvait embrasser du regard l'ensemble du paysage. Il englobait les dizaines de palais à plusieurs étages, l'amphithéâtre en pierre, le Colisée, l'hippodrome ainsi que les nombreuses rues sinueuses qui serpentaient la cité et grouillaient d'esprits de la nature en tout genre et de divinités mineurs. D'où elle était, il lui était possible de voir un marché en plein air aux tentes de toutes les couleurs dont les effluves de nourritures plus alléchantes les unes que les autres venaient titiller ses narines. Elle pouvait, également, sentir les parfums des jardins en fleurs et entendre la douce musique qui s'échappait de nombreuses fenêtres.

La jeune déesse fut sortie de ses pensées par sa mère qui lui demanda :

- A quoi penses-tu ?

Avant de répondre, elle prit le temps d'observer la pièce et les personnes présentes. Il s'agissait d'un salon exclusivement réservé au temps du thé. Comme attendu dans un tel lieu, la salle était grande et les murs peints d'une belle couleur crème donnaient un côté très chaleureux à l'ensemble. Elle possédait en son centre une immense table ronde en acajou. Autour de celle-ci se trouvait la maitresse de ces lieux : Héra, la reine des Dieux. Avec sa longue robe aux couleurs des plumes d'un paon et ses longs cheveux argentés tressés et rassemblés sur son épaule, elle était tout bonnement sublime. La souveraine avait enlevé sa couronne dans l'intimité de ses appartements.

A sa droite, se tenait fièrement la déesse de l'amour, Aphrodite, occupée à se remaquiller. Son apparence, comme d'habitude, changeait sans cesse : tantôt brune aux yeux bleus, tantôt rousse aux yeux verts.

Juste à côté d'elle, Hécate mélangeait tranquillement son café au lait. Pour l'occasion, elle avait revêtu qu'un seul corps, il est vrai que pour s'asseoir c'était plus pratique que quand on en a trois.

Puis, à la gauche de la reine des cieux, il y avait la mère de Perséphone : Déméter, la déesse des moissons. Elle était habillée d'une robe verte sobre et avait coiffé ses cheveux bruns en un chignon bas. Depuis quelques jours, elle abordait un sourire heureux et intarissable, ce qui la rendait plus belle que jamais.

Perséphone, ayant fini son observation, prit le siège vacant entre sa tante et sa mère et répondit enfin :

- Je me disais que l'Olympe en hiver m'avait terriblement manqué.

- Mais, maintenant, tu pourras le voir autant que tu voudras, la rassura sa mère. Je ne le laisserai plus t'emmener dans cet endroit lugubre. Tu n'auras pas à supporter cet être répugnant, je te le promets.

Elles s'échangèrent un sourire avant que la déesse de l'amour ne les interrompe.

- Quand même, s'exclama-t-elle distraitement, concentrée sur sa manucure, il est d'un laid ! C'est surement le seul dieu que je n'ai jamais mis dans mon lit. Pas qu'il me résisterait, hein. Mais, entre lui et Cerbère, je ne sais pas lequel j'ai le plus envie d'embrasser ? Elle prit quelques secondes pour réfléchir et poursuivit : Quoi qu'entre un chien et une larve, je choisirais le chien. Donc, je préfère embrasser Cerbère ? Finit-elle avec un sourire mauvais, récoltant des ricanements chez les deux déesses mineures et Déméter ainsi qu'un sourire poli de la part d'Héra.

- Ses cheveux sont une horreur, on dirait les tentacules d'une pieuvre, rajouta Hécate déclenchant un nouvel éclat de rire. Est-ce l'on parle de sa barbe ?

- Ah non s'il te plait n'évoque pas cette chose, supplia faussement Déméter en riant.

- Mais le pire c'est sans doute son caractère, se plaignit Perséphone. Il est cruel, colérique, injuste et surtout il est d'une idiotie impressionnante. Des rires s'envolèrent à nouveau.

- Zeus dit toujours qu'il passe son temps à comploter pour renverser l'Olympe, c'est vrai ? demanda Héra.

- Pour ça il faudrait déjà qu'il sache compter, répliqua la déesse des moissons.

Toutes rirent une fois de plus, à l'exception de la reine des Dieux qui se contenta de sourire.