À Pilgrim, toujours.

À Néo-Mirage, à ma petite Fée Valmorel, à Ashalie ma bêta pour ce chapitre (encore merci pour ta précieuse aide)

À tout ceux qui étaient d'accord et que j'ai horriblement peur de décevoir (et que je vais décevoir quand même, probablement...)

C'est euh long. Très long. Et un peu chiant. Sans doute. Au fond j'en sais trop rien.

Vous êtes prévenus. Et pour ceux qui me liront quand même ben vous êtes les patrons des patrons. Mille merci, merci, merci, merci du merci from merciland à la puissance merci.

L'histoire d'un amour fou dont les esquisses ont été éventrées. Bonne lecture. Jvous aime du fond du cosmos.

Yellow

« Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant »

Paul Verlaine, Mon Rêve Familier

Le trait de lumière qui fend sa paupière est une ligne jaune dans une nuit boueuse, l'ombre d'un store jetée contre le crépis par l'aura puissante d'un réverbère.

Trois petites lignes, cruelles, amères.

Trois petites lignes, deux noires, une jaune, un peu comme les abeilles avec lesquelles Albus aimait jouer il y a longtemps.

Trois petites lignes... Elles avaient finit par le piquer non ?

Il ne se souvient pas.

Les trois petits lignes, assassines, meurtrières, arrachent la sueur à son front, le sel à ses yeux, le rendent muet et débile, ses bras tremblants échoués comme deux navires le long de son corps.

- Comment as-tu-pu Harry ? Comment ?

Si seulement les cris pouvaient s'arrêter alors peut-être qu'il se réveillerait, qu'il se redresserait, que la voix métallique du répondeur cesserait son insupportable litanie.

Mais la litanie inhumaine n'a de cesse de lui bouffer le ventre, en extraire un acide qui grimpe le long de sa gorge, plante ses griffes dans la chair usée, troue sa poitrine qui refoule ses sanglots comme un ressac dégueulasse.

Le message se termine une énième fois. Il sait qu'elle appuiera à nouveau sur le bouton rouge du répondeur automatique et que la machine reprendra ses droits sur leurs vies. Il sait aussi que cette voix qui tombe de nulle part comme une trouée dans l'orage, adoucira la lumière de la ligne jaune et étirera le néant qui l'entoure. Puis elle effacera le monde et ses piques fragiles toute prête à se ficher dans son ventre pour se briser. Cette voix sera comme une ombre salvatrice il pourra s'y loger.

Sa voix, celle qui baigne sa tête, la remplit à ras-bord, efface les cris, les couleurs, la douleur.

Sa Voix, cet impossible rêve qui lui mange le cœur.

« Je ne comprends toujours pas pourquoi tu as pris cette décision. C'est... c'est ridicule. Je ne suis plus un enfant Harry ! Je suis capable de faire mes propres choix ! Cette fois...ça ne marche pas comme ça ! On est deux maintenant et...

Je m'en fous tu m'entends ?

Des concessions... Des putains de concessions...

Des concessions j'en ai fait toute ma vie merde! J'en ai assez. Je ne suis plus un enfant tu m'entends ? Je ne veux pas te quitter.

Je me fiche de ce qu'ils disent! Je me fiche de ce qu'ils penseront si ...

Je ne peux pas te quitter d'accord ? Sans toi … Sans toi ça en vaut pas la peine. Sans toi je suis perdu.

Fais pas ça Harry, j'ten supplie. Fais pas ça.

J'ai déjà mis assez de temps à te trouver.

Appelle-moi. Fais-le s'il te plaît.

Appelle-moi. »

Il a entendu l'orage gronder derrière le sanglot étouffé. Le bouton rouge s'éteint et une autre assiette vient se fracasser contre le carrelage neuf.

- Comment as-tu pu ? Tu n'es qu'un monstre, un vieux pervers ! Un malade ! Tu es malade Harry, tu m'entends ? Malade !

Cette fois, c'est un verre de cristal qui rejoint les débris. Un magnifique cadeau de mariage, bien plus raffiné que le bol à pois, première victime dûment choisie. Elle ne fait plus de choix désormais, c'est ce qui est là, ce qui a le malheur d'être heurté par la pulpe de ses doigts.

Ils ont pourtant l'air si semblables ces pots crevés, ces coupes éventrées, ces morceaux tranchants, répandus ainsi sur le sol noir et blanc de la cuisine. Ça ressemble à la mer, tout ce verre, et il a mal au cœur.

Ginny trempée de larmes et de sueur hurle la douleur qui fractionne son corps. Ses yeux cernés de larges oboles noires, ses joues traversées par des sillons de mascara , son cou tacheté de plaques carmin et ses cheveux emmêlés qui dansent comme les flammes d'un brasier, lui donnent les traits d'une déesse, sublime et terrifiante.

- Comment as-tu pu me faire ça ? Mais dis quelque chose ! Tu ne veux rien dire hein ?

Elle revient au pas de course dans le salon, drapé dans un pan de fureur, le fixe longuement en laissant les larmes déborder de ses yeux injectés de sang. Puis elle presse une nouvelle fois le bouton du répondeur en laissant un sourire dérangeant barrer son visage.

« Je ne comprends toujours pas pourquoi tu as pris cette décision. C'est.. c'est ridicule. Je ne suis plus un enfant Harry !

- Plus un enfant ! Plus un enfant! À dix-sept ans ! Qu'est-ce que ça veut dire hein ? Qu'est-ce que tu lui as fais?

Elle ne comprends pas, pense-t-il, que les mots n'ont plus de sens, que le temps n'a plus de sens.

Il sait qu'il existe pourtant, tout ce Temps, il existe quelque part, tournoyant au-dessus de leur toit de brique. Il sait qu'il existe comme cette voix qui le berce et qui l'entraine, le fait danser.

Tourbillon, toit de brique, encore un éclair dans le champs d'à-côté.

- Et Albus Harry ? Tu y a pensé ? As-tu seulement pensé à ton fils Harry ! Ton fils !

Quelques gouttes de salive mélangées au cognac rejoignent les éclats de vaisselle brisée. Sa main pâle valse au dessus d'une autre assiette, elle attrape une bouteille qui tremble entre ses doigts malingres et qui semble déjà arroser les murs.

Pourtant elle tient bon, ce brave petit soldat de verre, et laisse échapper les flots d'un alcool supposé salvateur dans un vieux bol de corn-flakes.

Le liquide ambré glisse contre la porcelaine, bientôt en miettes, songe-t-il, comme les autres.

L'écho du tonnerre semble faire exploser la main. Le bol s'écrase lamentablement au sol avec un bruit creux presque obscène. Autour d'eux les vitres tremblent, secouées par l'averse, et le ciel se déchire comme une feuille de papier.

Pourtant l'orage semble si loin, si indolent face à la colère de Ginny.

« Sans toi je suis perdu. »

- Dis-moi que c'est un cauchemar Harry. Dis-moi que ce n'est pas vrai.

Elle a raison au fond, c'est peut-être irréel. Cela aurait pu tout aussi bien ne jamais exister. Ses yeux dans la lumière et la lumière dans ses yeux quand un rayon traversait son regard et qu'il devenait cristal. Cent fois il aurait voulu plonger dans ce regard, couler dans ce regard, s'y perdre, s'y noyer. Il se serait laissé descendre lentement, jusqu'à la pupille noire, jusqu'au monde interdit, il se serait laissé couler comme une pierre trop lourde, recroquevillé sur lui-même, et il serait resté là à attendre, sagement.

Il aimerait rejoindre les morceaux de verres, se rouler dedans, s'y fondre. Il n'est plus que débris épars entre les éclats et le sang.

- Je ne veux pas y croire. Ce n'est qu'un cauchemar, qu'un putain de cauchemar !

« Sans toi je suis perdu. »

- Ce n'est pas vrai. Je t'en conjure dis-moi que ce n'est pas vrai Harry.

Mais sa voix est un murmure plaintif au milieu de la stupeur.

Ironie du sort; la machine s'est emballée, puis définitivement bloquée expulsant comme des battement réguliers une phrase, pourtant anodine, emballée dans la coque d'un silence abasourdi.

« Sans toi je suis perdu. »

Ginny pousse un petit cri rauque et se laisse glisser le long du frigo. Ses pieds nus raclent le sol et d'autres trainées de sang viennent se mélanger à l'alcool, infusant en petites volutes.

Aveuglé par ses larmes, l'homme vaincu se redresse. Il regarde le corps entamé de sa merveilleuse épouse, le regarde se ramasser sur lui-même comme celui d'un enfant boudeur. Une île au milieu d'un lac orangé. Un coucher de soleil sur la ville. Dehors, il pleut sans discontinuer.

– Ginny, tu.. tu vas te couper.

Un petit rire craché effleure à peine ses lèvres. Elle se retourne lentement, distingue difficilement cette silhouette humaine, tellement insignifiante, qui se dirige vers elle à petits pas mal assurés, comme si c'était les premiers.

« Sans toi je suis perdu. »

Il titube. Elle aimerait le retenir, caresser ses cheveux , glisser ses doigts dans les mèches rebelles, lui dire « tu vas y arriver mon fils, tu vas marcher. », mais elle ne sait déjà plus à qui appartient cette voix qui monte dans le lointain.

– Attends, je vais t'aider, tu saignes...

« Sans toi je suis perdu. »

Ses pieds quittent le sol, elle tourbillonne Perdue dans deux petites gouttes d'eau verdâtre, elle cherche quelqu'un sans le reconnaître.

« Sans toi je suis perdu. »

Où s'en va son rire d'adolescente mutine, insouciante, ce joli rire à peine endommagé, un peu effiloché, ce rire qu'ils partageaient, ce rire qu'elle pensait avoir perdu à jamais ? La pièce tourne comme un manège, le cristal est fissuré. Qui est cet homme au front lourd, aux mains comme des soucoupes dans lesquelles elle pourrait se lover ?

« Sans toi je suis perdu. »

Un battement de cœur, un écho. Le petit clapotement de la pluie contre la vitre.

« Sans toi je suis perdu. »

Et ces mots qui l'enlacent,

« Sans toi je suis perdu. »

Ces mots qui s'effacent,

« Sans toi je suis perdu. »

Ont le visage de d'un homme qu'elle a aimé.

- Sans toi... Sans toi je suis perdue Harry..

Une main passe sur son front brûlant, sur ses lèvres sèches et elle sourit à nouveau, elle sourit à travers la dentelles des larmes asséchées, car ses pensées ont l'odeur et le goût du cognac doré mélangé au sang pourpre.

Il marche comme si c'était la première fois. Elle s'endort dans ses bras. Il a monté doucement les escaliers, pressant son corps minuscule contre sa chaleur, l'a déposée sur le lit dans leur chambre, temple sacré il n'y avait encore pas si longtemps. Il a bandé ses pieds, essuyé ses yeux. Mais en bas, entre la cuisine et le salon, l'orage trépassé, la pluie qui frappe toujours en fines gouttelettes contre la vitre, entre le coucher de soleil et le toit de brique, une petite phrase tourbillonne encore au milieu du temps arrêté.

Il referme la porte.

« Sans toi je suis perdu. »

Et son corps qui se lasse,

« Sans toi je suis perdu. »

Son corps qui s'efface,

« Sans toi je suis perdu. »

Glisse contre le chambranle de bois comme un refuge glacé où il repose, vaincu.

À travers ses paupières mis-close il cherche la lumière, une mèche blonde qui danserait encore dans le vent, ondulerait sur un front pâle. S'il devait mourir maintenant, posé comme un meuble devant la porte de la chambre endormie, avec dans la tête l'odeur de la mèche claire, le goût salé des yeux couleur ciel, il n'aurait pas peur.

Un coin de sourire, l'angle d'une bouche, et il se jetterait, sans hésiter.

« Je ne suis plus un enfant Harry! »

Comme un cri.

« Je ne suis plus un enfant, tu m'entends ? »

Ou comme une évidence ?

Il murmure, « Harry » et même son prénom n'a plus de sens.

Alors exténué, le visage dans les mains, il s'abandonne à la houle d'un sanglot douloureux, avalé par le sol de sa propre maison.

...

...

...

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Résumé de la suite 1 : Il y a la vie et il y a le reste, les « fioritures ».

Alors salut, moi c'est Fioritures mais appelez-moi Fiori c'est plus sympa et puis ça englobe bien la vacuité du terme « sympa. »

Résumé de la suite 2 : T'façon jveux dire. Ces deux là sont trop maigres pour être malhonnêtes.

Résumé de la suite 3 : Les pérégrinations d'un Encolpe (dit « le baiseur ») et d'un Giton moderne.

Ps : « Faire le Giton » est-il plus mélodieux et ontologiquement correct que « Faire le Jacques » ? Envoie Bernard-Henri au 91212 .

À bientôt j'espère,

Votre Mamad