Coucou nos petits Pères Noël en chocolat !

Bienvenue dans l'histoire d'Antoine Wiertz, un Cracmol pas tout à fait comme les autres… Cette fiction fera environ 7 chapitres si on respecte notre découpage (Ahah).

Pour ceux qui ne connaissent pas notre univers, il n'est pas nécessaire d'avoir lu le premier tome de La Voie Oubliée (LVO pour les intimes) pour lire cette fiction mais n'hésitez pas à la lire avant celle-ci si vous voulez vous éviter des spoilers pour plus tard :)

LVO vous manquait ? Après le dernier chapitre et l'épilogue, vous avez envie d'en savoir plus ? Ahahah, vous allez être servis car voici l'histoire de l'homme le plus étrange et mystérieux de la première partie de LVO… Antoine Wiertz, le Concierge !

Êtes-vous prêts à plonger dans son histoire ? Alors installez-vous confortablement et c'est parti !


L'HISTOIRE D'ANTOINE WIERTZ ou comment un Cracmol prend le pouvoir


Chapitre 1 : Tout est mal qui commence mal


Pétronille Louvier et Gottfried Wiertz se sont aimés dès le premier regard. Pour eux, c'était une évidence.

Gottfried, né et élevé au Royaume-Uni non loin de chez ses tantes et grand-mère maternelle, aimait voyager à travers l'Europe, en particulier en Allemagne, terre d'origine de son père. Il avait décidé de passer quelque temps en France l'été de ses vingt-quatre ans pour profiter de la culture sorcière et moldue de ce pays.

Hébergé chez un ami de ses parents non loin de Versailles à la fin du mois de juillet, alors qu'il faisait une chaleur épouvantable, il s'était rendu avec la famille de ce dernier dans un village sorcier de la forêt de Brocéliande, Skirioù-Druidhean, pour échapper à la canicule, se promener au milieu des arbres et se baigner dans les cascades.

C'était dans la boutique de matériel de Quidditch qu'il l'avait vue pour la première fois. Il était entré, avait mis du temps à s'accoutumer à l'obscurité de la pièce et avait commencé à inspecter les outils de réparation de balais proposés et leur prix. En effet, le sien tirait un peu à gauche dans les virages et cela devenait particulièrement handicapant lorsqu'il traversait des turbulences.

Une voix s'était élevée derrière lui, demandant "Je peux faire quelque chose pour vous ? ". Gottfried s'était retourné, ne comprenant pas un mot de ce que venait de prononcer la jeune femme qui lui faisait face, une magnifique blonde auréolée de la lumière transperçant la vitrine du magasin. Il en était resté bouche bée d'émerveillement et d'incompréhension. " Oh, vous ne devez pas parler français… How can I help you ? " avait-elle tenté dans un anglais teinté d'un délicieux accent.

Gottfried avait subitement oublié son balai et ses problèmes de trajectoire et avait invité celle qui deviendrait sa femme à dîner, pour ne plus jamais la quitter.

L'union avait été rapidement programmée à l'équinoxe du printemps suivant, comme le voulait la tradition des sorciers du village d'origine de Pétronille et un an plus tard, le 26 mars 1984, naissait Antoine. Antoine Wiertz. Le garçon qui deviendrait Concierge de l'école de sorcellerie de Poudlard des années plus tard, mais… Le chemin qui le mènerait à son destin ne serait pas de ceux tracés à l'avance…


Peu après la naissance d'Antoine, ses parents et lui déménagèrent en Ecosse, dans un village sorcier qui avait presque disparu suite à la chute de Voldemort. Les habitants avaient presque tous fui vers des villes plus grandes et plus sûres, à l'étranger, ou bien étaient morts au combat ou emprisonnés.

Antoine n'avait pas beaucoup d'amis lorsqu'il était encore tout petit. Les seuls enfants de son âge qu'il côtoyait étaient ses cousins germains côté paternel. Ils n'étaient pas tendres avec lui. Il était le plus jeune alors il était toujours celui qui avait le mauvais rôle dans leurs grands jeux.

Un matin quelques jours après l'anniversaire de ses quatre ans, Antoine entendit un bruit inhabituel dans le village si calme jusqu'alors. Il dévala les escaliers aussi vite que lui permettaient ses petites jambes d'enfant et colla son nez à la fenêtre du salon pour découvrir, oh surprise !, que de nouveaux habitants étaient en train d'emménager dans la maison juste en face de la sienne. Et il lui sembla… Oui, c'était bien ça ! Un garçon de son âge voletait autour de ses parents sur un mini-balai alors qu'ils déchargaient leurs affaires d'une énorme caisse qui avait dû servir de Portoloin-Déménageur.

- Maman, maman, papa ! Venez voir ça ! hurla le petit garçon en courant dans la chambre de ses parents pour leur sauter dessus.

- Hum…

- On dort, mon ange, qu'est-ce qu'il se passe ?

- Venez voir, venez voir, venez voir. Il y a, il y a, il y a des, des, des…

- Calme-toi, Antoine, l'apaisa sa mère qui venait de se redresser pour l'attirer vers lui et lui caressait maintenant les cheveux. Alors, qu'y a-t-il ?

- Des gens qui emménagent juste en face ! Et il y a un petit garçon de mon âge !

- Oh mais c'est super, nous irons les saluer après le petit déjeuner, d'accord ?

- Maintenant, maintenant, maintenant !

- Antoine, intervint son père de sa grosse voix grave. Nous allons au moins leur laisser le temps de s'installer chez eux, d'accord ? Nous n'allons tout de même pas les déranger de si bonne heure, encore vêtus de nos pyjamas et le ventre grondant de faim alors qu'ils font léviter des meubles dans tous les sens. Tu n'es pas d'accord ?

- Si… répondit un Antoine renfrogné et fronçant les sourcils. Mais ils ont peut-être déjà fini ! termina-t-il en retrouvant le sourire, plein d'espoir et provoquant l'hilarité de ses parents.

Le petit garçon avait la même impatience qu'un matin de Noël. Le petit déjeuner, sa douche et celles de ses parents lui parurent durer des heures si bien qu'au milieu de la matinée, il avait tellement couru partout pour essayer de faire accélérer le mouvement qu'il s'endormit sur le canapé.

Pétronille vint le réveiller pour qu'il puisse souhaiter la bienvenue à leurs nouveaux voisins. Cette perspective le sortit du sommeil aussi sûrement qu'une douche froide et il sautilla dans l'allée de la maison d'en face, devançant ses parents qui lui avaient donné l'autorisation de frapper lui-même à la porte. Celle-ci s'ouvrit sur une petite femme rousse et athlétique. Derrière ses jambes se tenait un petit garçon tout aussi roux qu'elle et au visage constellé de taches de son. Ce dernier se mit à tirer la jupe de sa mère qui était en train de discuter avec les parents d'Antoine, qui n'accordait aucune attention aux affaires des adultes.

- Maman, maman…

- Oui ?

- Est-ce que je peux lui montrer ma collection de cartes Chocogrenouilles ? S'il te plaît, demanda-t-il en pointant Antoine du doigt.

- Oui, si ses parents veulent bien.

- Accordé.

Il ne fallut pas un mot de plus de la part de Gottfried pour qu'Antoine se rue à l'intérieur de la maison, suivant le rouquin qui deviendrait son seul et meilleur ami : Tom Shepley, fils des deux meilleurs joueurs de Quidditch de l'époque.


Le jour de ses sept ans fut la journée la plus difficile de l'enfance d'Antoine. C'est le jour où il se rendit compte qu'il ne serait jamais un sorcier.

Il n'avait jusque là montré aucune prédisposition pour la magie, contrairement à Tom qui, dès l'âge de cinq ans, avait fait exploser un miroir parce qu'il avait été contrarié de ne pas pouvoir monter sur un vrai balai de course.

Entouré de toute sa famille ainsi que ses cousins dont certains allaient commencer leur scolarité à Poudlard à la rentrée suivante, il souffla ses bougies sans grand enthousiasme. Il savait désormais. Il en avait déjà parlé avec ses parents. Il savait qu'il était Cracmol. Il y avait très peu de chance que ce ne soit pas le cas.

Ce jour-là, ses cousins ne prirent même pas la peine de l'intégrer à leurs jeux habituels d'Aurors contre Mages Noirs ou de Fléreur perché.

Ils se contentèrent de l'ignorer.

Heureusement que Tom était là. Il saisit la main d'Antoine au moment où personne ne le regardait pour le traîner dans le jardin, sous l'arbre préféré des petits garçons.

- Regarde ! fit Tom en pointant les branches hautes de l'arbre.

- Bah quoi ? Je sais très bien qu'il y a un arbre ici, on vient là tous les jours… répondit-il en croisant les bras, refusant de lever la tête.

- Mais regarde, je te dis !

Tom lui tira le bras encore une fois, le forçant à lui obéir. Antoine jeta un oeil vers le sommet du chêne et découvrit le plus beau cadeau qu'on ait pu lui faire jusqu'à présent. Une superbe cabane en bois, avec une échelle, un ponton, des fenêtres et tout !

- Wouah, c'est génial, mais… Mais…

- J'ai demandé à mes parents et aux tiens si on pouvait avoir une cabane pour ton anniversaire. Ils ont accepté et ils ont tout fabriqué dans la nuit ! Je les ai un peu aidés pour peindre l'écriteau.

- "Cette cabane est réservée au génialissime Antoine Wiertz et à son acolyte Tom Shepley". Wouah ! s'exclama encore une fois le garçon, incapable de bouger.

- Allez viens, on monte !

Les enfants se jetèrent à l'assaut des échelons avec énergie et atteignirent sans le moindre effort la cabane. C'était la plus belle cabane en bois dans un arbre au monde, Antoine en était persuadé.

- On fait une partie de Dames explosives ?

- Oh oui !

C'est ainsi que pendant un peu plus de deux ans, la cabane dans le chêne devint le terrain de jeu préféré d'Antoine et Tom.


Mois de juin 1993. Antoine et Tom avaient alors 9 ans. Tom auraient plutôt dit 9 ans et demi le concernant parce qu'il était né au mois de janvier et à cet âge le "et demi" change tout. Cela le rapprochait de sa rentrée à Poudlard qui aurait lieu deux ans et deux mois plus tard, si tout se passait bien.

Cette perspective déprimait Antoine. Ses parents avaient déjà prévus de l'envoyer prendre des cours dans un collège moldu auquel il pourrait se rendre en bus à partir d'un arrêt dans un village voisin. Cela ne l'enchantait guère mais il était bien conscient qu'il fallait bien qu'il apprenne des choses lui aussi et qu'il se fasse des amis un peu moins… Enfin un peu plus… Comme lui.

Le 15 juin, comme tous les matins, Antoine alla frapper à la porte des Shepley pour que Tom vienne jouer avec lui dans la cabane. C'est sa mère qui ouvrit, le visage ravagé par les larmes et des cernes tombant jusqu'au milieu des joues.

- Bon-bonjour Madame. Est-ce que Tom…

Il fut interrompu par un violent sanglot de la maman de son ami. Le père de ce dernier apparut à son tour dans l'embrasure de la porte, les traits tirés et le regard vide.

- Antoine… Tom est… Très malade.

La nouvelle lui fit l'effet d'un coup de poing dans l'estomac.

- Mais, qu'est-ce qu'il a ?

- Le guérisseur vient de partir. Il a une scrofulite. La maladie s'est déclarée cette nuit.

- Il va guérir, n'est-ce pas ?

La mère de Tom éclata à nouveau en sanglots et partit en courant vers le fond de la maison. Son mari s'accroupit devant Antoine et lui attrapa l'épaule fermement, comme pour lui intimer de rester fort. Le coeur du jeune garçon battait à tout rompre. Il appréhendait plus que tout la réponse à sa question.

- Il y a plusieurs formes de scrofulite et apparamment, celle qu'a contractée Tom...

L'homme s'arrêta de parler un instant, comme s'il voulait s'empêcher de pleurer lui aussi.

- C'est la forme la plus grave. Il ne pourra pas guérir. Il… ne lui reste que quelques jours.

Antoine se figea. Il ne se rappela pas de ce qui se passa dans les heures qui suivirent. Il avait dû s'évanouir car il se réveilla dans le canapé de son salon, recouvert d'une couverture épaisse, la tête sur les genoux de sa maman. Il resta longtemps allongé là, ne comprenant pas tout ce qui se passait ou ne le voulant pas.

Il ne revit Tom que le jour de son enterrement, le jour du solstice d'été. Il ne reconnut pas dans cette figure pâle et inanimée le garçon qu'il avait connu, si joyeux, si courageux et espiègle. C'était le visage de ce garçon-là dont il voulait se souvenir. Pas de celui porté en terre.

Il perdit ce jour-là son meilleur ami mais également une part de lui-même. Son innocence.


1997. Voldemort était de retour officiellement depuis plus d'un an et le Ministère de la Magie était désormais tombé entre ses mains. La panique montait dans tout le pays. Gottfried avait peur pour son fils Cracmol, pour sa femme de sang-mêlé et étrangère, et dans une moindre mesure pour lui-même, fervent défenseur des droits des Cracmols et des Moldus depuis plusieurs années. Autant dire qu'ils étaient dans le collimateur du pouvoir et qu'il était préférable pour eux de fuir le Royaume-Uni avant qu'ils soient emprisonnés ou tués.

C'est ainsi qu'au début de l'automne 1997, la famille Wiertz prit une décision qui changea le cours de son destin pour toujours. Ils devaient partir. Ils avaient tout prévu. Il leur fallait rejoindre la demeure familiale française de Pétronille à Skirioù-Druidhean, inhabitée depuis la mort de ses parents cinq ans plus tôt.

Antoine avait treize ans et s'apprêtait à rentrer en classe de quatrième lorsque ses parents lui annoncèrent la nouvelle. Il fut surpris mais pas tant que ça. Il sentit quelque chose changer en lui, comme si la peur qui s'était immiscée dans son être pendant plus d'une année jusqu'à présent avait décidé de s'échapper pour laisser place à un intense soulagement. Ils allaient quitter le pays et la menace qui pesait sur eux en permanence.

Ils préparèrent des bagages très légers, contenant le strict minimum pour survivre deux jours, y compris quelques vivres. Un matin, à l'aube, car tous les grands voyages débutent à l'aube, ils quittèrent leur maison pour se rendre à l'arrêt de bus du village moldu voisin. Antoine s'empêcha de regarder une dernière fois la maison qui l'avait vu grandir et devenir un adolescent. Dans laquelle il venait de laisser tous ses jeux, ses vêtements, ses cours, ses souvenirs. Sauf un. Il gardait toujours précieusement l'écriteau de la cabane en bois, rétréci magiquement par son père et monté sur un bracelet de cuir qui ne quittait jamais son poignet.

Ils prirent le bus en direction de Glasgow. Il n'avait pas d'autre choix que d'utiliser des moyens de transport non magiques à cause des nombreux contrôles effectués. En plus de cela, Pétronille ne supportait pas le transplanage. Elle n'utilisait que celui d'escorte et uniquement en cas d'urgence. Cependant, une rumeur menaçait ceux qui voyageaient par la terre. Des Rafleurs se seraient spécialisés dans la traque des sorciers ou apparentés fuyant leurs convocations au Ministère, mais ça, Pétronille et Gottfried n'en touchèrent pas un mot à Antoine, de peur de le faire paniquer.

Ils prirent le train sans trop de difficultés jusqu'à Bristol puis un autre bus jusqu'à Poole, sur la côte. Il plantèrent leur tente enchantée dans le bois le plus proche du port. Ils ne pouvaient pas dormir à l'hôtel car leur stock d'argent moldu était juste suffisant pour leur permettre de payer leurs différents trajets. Heureusement, ils avaient déjà tous des passeports et des cartes d'identité moldues parce qu'ils allaient souvent en France et en Allemagne rendre visite à leur famille.

L'embarquement sur leur bateau pour Cherbourg était prévu dans la nuit à trois heures heures. Ils dormirent tous les uns contre les autres, plus pour se sentir en sécurité que pour se tenir chaud, la tente étant chauffée magiquement. Une fois en France, ils pourraient enfin prendre le bus magique local pour arriver directement à destination.

Pétronille réveilla doucement son fils d'une caresse sur la joue aux alentours de deux heures. Ils devaient ranger leurs affaires et se préparer à partir, en prenant garde à ne laisser aucune trace de leur passage derrière eux.

Ils se mirent en route vers le port, leurs souffles formant des nuages de gouttelettes d'eau autour de leurs visages. Antoine s'appuyait sur ses parents, tellement fatigué qu'il s'endormait presque en marchant.

Ils parvinrent enfin à destination et attendirent l'ouverture du guichet d'embarquement. Ils n'étaient pas les seuls. Quelques dizaines de personnes les entouraient, les enfants dormant dans les bras de leurs parents, les jeunes couples sur les genoux l'un de l'autre.

- Maman, combien de temps va durer la traversée ?

- Environ cinq heures.

- Et à quelle heure on va partir ?

- Je pense que le bateau sortira du port vers trois heures et demi. Je crois que l'embarquement des voitures commençait plus tôt que celui des passagers à pied.

- D'accord… J'ai hâte qu'on soit en France. Je n'ai pas peur, hein ! se défendit Antoine, peu convaincu et tremblotant. Mais j'ai hâte d'arriver à Skirioù-Druidhean. On n'y est pas allés depuis la mort de Papidou et Maminou.

- Moi aussi, j'ai hâte mon ange. Moi aussi…

Antoine ne reprit pas sa mère lorsqu'elle l'appela "mon ange". Pourtant, depuis un an ou deux, il ne supportait plus ce surnom qu'il trouvait trop gamin. Cette fois, il la laissa faire. Il était redevenu un petit enfant et il avait besoin de tout l'amour de ses parents. Il n'était pas si grand finalement. Treize ans, c'est à la fois beaucoup et très peu…

- Mesdames et Messieurs, je vous invite à vous présenter à l'une des trois portes d'embarquement, munis de vos billets et de vos pièces d'identité. Merci.

La voix avait jailli très fortement du haut parleur situé juste au-dessus de la famille Wiertz, qui sursauta dans un bel ensemble. Ils n'avaient pas tellement besoin de surprise.

- C'est parti pour la France ! Pétronille, tu peux attraper les billets dans la poche arrière de mon sac à dos ? Merci, mon amour. Fiston, prends un peu le sac à dos de ta mère, ça la déchargera, elle l'a porté pendant toute la marche.

- Oui, Papa, je m'en charge !

Content d'avoir une responsabilité dans le voyage, Antoine se chargea avec enthousiasme du bagage et suivit ses parents sur la rampe leur permettant d'accéder au bateau. Le couple assis à côté d'eux pendant leur attente les suivit, ainsi qu'une longue file derrière eux.

- Bonjour, je vous souhaite une bonne traversée. Bonjour, bonne traversée. Très bien merci, bonne traversée.

Une fois à l'intérieur du bateau, ils cherchèrent la cabine qu'ils avaient réservée afin de pouvoir dormir un peu avant d'arriver.

- C04, C04… Ah, la voilà !

- Je vois que nous sommes voisins de cabine, lança une voix non loin d'eux.

Il s'agissait du couple qui les suivait déjà depuis la file d'attente.

- Ah, bonjour ! En effet. J'espère que le bateau ne tanguera pas trop, que l'on puisse dormir.

Le couple s'approcha d'eux.

- Je l'espère aussi ! Enfin, dit l'homme en glissant sa main dans sa veste, peut-être n'en sera-t-il pas de même vous concernant !

Il dégaina une baguette magique de sa poche intérieure, imité par son acolyte. Gottfried s'interposa entre eux et sa famille.

- Expelliarmus !

Les baguettes de Gottfried et Pétronille s'envolèrent pour atterrir dans les mains des intrus.

- Qu'est-ce que vous voulez ? Lâchez ces baguettes.

- Vous n'avez pas l'air d'être en mesure de vous défendre. On a bien entendu que vous cherchiez à fuir vers Skirioù-Druidhean. Des comme vous, on en attrape tous les jours dans ce bateau. On amasse une vraie petite fortune à ramener des Sang de Bourbe, des Sang-Mêlé, des Cracmols et autres traîtres à leur sang au Ministère.

Des Rafleurs !

- Baissez vos baguettes, je vous dis ! Nous partons seulement en vacances !

- Bien sûr, des sorciers prenant le bateau. C'est tout à fait plausible. Surtout qu'on a vérifié le fichier. Je pense que nous avons affaire à…

- A la famille Wiertz, chef. Père traître à son sang, mère sang-mêlé et fils probablement Cracmol. Il n'est répertorié dans aucune école de magie.

- Bonne pioche. Une prise comme ça, ça peut rapporter au bas mot une bonne centaine de Gallions.

- Ne touchez pas à un cheveu de ma famille ou sinon !

- Sinon quoi ? Vous croyiez vraiment que …

Pendant que le Rafleur parlait, Pétronille chuchota "A trois, on part en courant pour les disperser et se donner du temps. Antoine, tu suis ton père, il te fera transplaner. Il reviendra me chercher après."

- Un…

- Belle baguette sinon Madame, vous l'avez probablement volée, non ?

- Deux…

- Après vous savez, je suis pas particulièrement raciste, je fais ça surtout pour l'argent.

- Trois !

Gottfried sauta sur les Rafleurs et décocha un coup de poing dans le sternum de l'homme et un coup de pied dans le menton de la femme. Ils laissèrent échapper les baguettes du couple que Gottfried rattrapa. Il garda sa propre baguette et lança l'autre à sa femme qui la saisit au vol. Gottfried et Pétronille, après un regard douloureux mais déterminé, se mirent à courir chacun dans une direction opposée, Antoine courant devant son père qui le couvrait. Des sortilèges fusaient entre leur poursuivant et son père alors qu'ils cherchaient un recoin où s'arrêter pour transplaner.

En pleine course, au détour d'un couloir, Gottfried saisit la main de son fils. Antoine fut soudain victime d'une violente nausée. Il ne distinguait plus le haut du bas, tout était flou. Moins d'une seconde plus tard, il trébucha sur un sol dur et froid.

Un silence étrange les entourait. Antoine leva les yeux vers son père et regarda autour de lui.

- Je nous ai faits transplaner dans la forêt de Brocéliande. Ne bouge surtout pas, je reviens tout de suite avec ta mère.

- Attends Papa, je…

Gottfried disparut dans un clac sonore.

- … t'aime.

Antoine se retrouva seul. Il décida de s'appuyer contre l'arbre le plus proche. La pleine lune éclairait la forêt autour de lui. Il frissonna, espérant que ses parents ne tarderaient pas à apparaître sous ses yeux.

Les minutes lui parurent des heures. Les bruits des animaux nocturnes étaient effrayants. Antoine avait déjà fait un peu de camping mais jamais il ne s'était retrouvé aussi isolé.

Soudain, un nouveau clac retentit, le faisant sursauter. Son coeur rata un battement. Son père était penché sur une silhouette allongée sur le sol. Il pleurait.

Antoine s'approcha. Du sang dégoulinait de l'arcade sourcilière de son père et ses vêtements semblaient déchirés par endroits. La silhouette, c'était sa mère. Mais elle ne bougeait pas.

- Papa, parvint-il à articuler d'une voix tremblante. Maman… Elle… elle dort ?

Gottfried secoua la tête sans prendre la peine d'ouvrir la bouche. Il attrapa Antoine par la taille. Ce dernier s'écroula à moitié sur les genoux de son père qui le serra très fort dans ses bras. Une mare de sang grandissait autour des cheveux de Pétronille. Gottfried ferma les yeux de sa femme dans un geste délicat, débordant d'amour, comme s'il avait peur de lui faire mal.

Puis ils restèrent ainsi longtemps. Antoine n'aurait su dire combien de temps. Il finit par s'endormir et son père l'enroula dans sa veste et le déposa au pied d'un arbre, à quelques mètres du cadavre de sa mère.

Quand Antoine se réveilla, il vit Gottfried une pelle à la main, creusant avec rage le trou qui servirait de tombe à celle qu'il avait aimée et qu'il continuerait à aimer toute sa vie. Son visage était furieux. La lumière de la lune se refléta dans la larme qui naquit au coin de son oeil pour disparaître dans le creux de sa joue.

A ce moment précis, Antoine n'aurait pas pu croire que le soleil se lèverait à nouveau au matin. Pour lui, tout ne serait qu'obscurité à présent car selon lui, il avait tué sa mère. Si seulement il n'avait pas parlé de Skirioù-Druidhean, jamais tout cela ne serait arrivé, il en était certain. Et s'il avait été sorcier, tout aurait été beaucoup plus simple. Il aurait pu la défendre. Oui, tout était de sa faute...