PROLOGUE

" L'homme est le plus cruel de tous les animaux, il est le seul capable d'infliger une douleur à ses congénères sans autres motif que le plaisir"
Mark Twain

Encore quelques minutes, juste quelques minutes à passer près de lui, avant de se rendre compte qu'il ne représente plus rien, juste une chose sans âme, sans importance, une chose à jeter comme un viel objet dont l'utilité est dépassé, sans intérêt, …le jeter comme un rebus….comme il l'a fait avec les autres, la lassitude de leur présence l'ayant obligé à commettre l'irréparable…

Encore quelques minutes, une ou deux tout au plus, il n'en mérite pas plus…il lui a offert ces derniers jours, 4 jours auprès de lui et il n'a pas su en profiter…idiot …il le hait désormais et sa haine a transformer sa violence en exutoire, lui a découplé ses forces et sa rage…contre sa victime.

Mais là il s'offre l'ultime plaisir de rester encore à ses côtés quelques minutes , le regarder rendre son dernier souffle, regarder son sang tomber gouttes à gouttes sur le sol, former une tâche de plus en plus grande, de plus en plus épaisse…de plus en plus délectable.

Il se penche sur lui, effleurant ses lèvres pâles de ses doigts, puis se penche encore un peu plus, posant ses lèvres sur celles de sa victime, goûtant les dernières gouttes de sang qui glisse de cette bouche à jamais silencieuse.

Sentir, humer une dernière fois encore la senteur parfumé du sang qui s'écoule de ses veines, de ses orifices, de ses membres …Sentir son corps, sentir la vie qui part loin de son « invité »…et l'entendre encore supplier, prier, appeler. Il vient de mourir sous ses mains, lui, le Puissant, il le laisse mourir sans aucun espoir de revoir les siens, abandonné à con bon vouloir.

Il détache les liens qui maintiennent encore ce jeune étudiant sur la chaise et son corps tombe à même le sol, sans vie, sans plus de sons, sans plus de mouvements saccadés. C'est terminé, tout est terminé…ca lui a pris des heures pour l'achever…

Puis il repense aux autres, à tous ces autres qui n'ont pas voulu voir en lui le Maître, leur Maître, voir en lui un mentor …à jamais…

Une sourde colère monte en lui immédiatement. POURQUOI ? Pourquoi aucun n'accepte son sort ? Ils ne lui conviennent pas, ils ne sont jamais pas à la hauteur de ses attentes…ils ne méritent aucune pitié, aucun geste de réconfort de sa part. Des infâmes, dans un monde d'infâmes…ils ne méritent pas la vie qui leur promettait…non, tous des lâches…des apeurés, des pervertis….la Société leur a volé ce fluide d'innocence et de beauté qu'il recherche chez chacune de ses victimes. Ils ne voulent pas comprendre qu'il faut respecter les règles, ils ne veulent pas lui donner ce qu'il attend d'eux …

AUCUN D'EUX NE MERITAIENT DE VIVRE AUPRES DU PUISSANT ...

Il y a bien eu ce jeune homme au regard si bleu…il n'aurait peut être jamais du se trouver là sur son terrain de chasse, mais Le Diable lui a envoyé, il le sait, il l'a lu dans son regard, dans ses gestes maladroits….le diable lui a offert l'ange qui le sauverait de sa déchéance…il y a cru, l'imaginant capable de siéger là à ses côtés, tel un Dieu dominant l'humanité, décidant d'un geste tout simple du doigt qui serait celui qui vivrait, qui serait celui qui mourrait…mais il l'a déçu, l'ordure, le mécréant, l'impur…sa peau, son odeur l'a écoeuré.

Regarde, regarde toi, là…si tu avais écouté mes mots, mes envies…regardes toi tu n'es plus qu'un immonde tas de chair, un corps inerte, décharné.

Il le regarde encore une fois, allongé dans un bain de sang, son sang, un sang impur qu'il va devoir nettoyer pour ne pas ternir sa demeure.

Il sourit machiavéliquement et s'allonge quelques instants près de sa 8ème victime, posant sa main puissante sur la chevelure ensanglanté de ce jeune inculte, lui passant les doigts dedans, le berçant de nouveau comme pour le rassurer. Il peut encore se repaître de ses cris, de ses murmures aussi quand leur intimité a été si proche du but…il grogne avec mécontentement

Il a joui, oui…il a aimé sentir son sexe se durcir en le caressant, en lui volant ce qu'il a de plus innocent en lui. Puis la torture, la torture, oh oui …doux cris d'impuissance qui lui étaient parvenus de cette bouche parfaite, des supplices qui s'étaient vite transformés en hurlements, puis en pleurs, en supplications encore et encore jusqu'à ce que son corps, son âme n'est plus la force de lui résister à lui, le Puissant, le Maître des lieux. Il a exulté avec encore plus de soupirs et de désirs .

Ses deux autres victimes ne lui ont pas procuré autant de bonheur, une telle libération . Il devra choisir avec plus d'attention ceux qui auront l'honneur de partager son existence…

Il hurle, un son rauque, gluturral.

Il a besoin de quelqu'un, près de lui, qui va devenir son autre, qui va devenir son ombre…il doit repartir à la chasse…maintenant, tout de suite, le goût de son amertume devenant trop puissant au fond de sa gorge…

Il sourit de nouveau en passant devant le miroir du couloir. Il passe un peigne fin dans ses cheveux, touche son visage mal rasé puis attrape son pardessus, réajuste son chapeau et sort en silence.

7h00 du matin. Il est l'heure d'aller au travail. Ses collègues l'attendent. Aujourd'hui, la journée va certainement être encore bien morose.