- Sasuke ? C'est le mec le plus détestable que j'ai jamais rencontré. À plusieurs reprises j'ai eu envie de le tuer, tellement ce con est imbu de lui-même !

Je n'aurais jamais pu imaginer pouvoir dire ça un jour, mais cet abruti a raison. Moi qui ai toujours contredit sa façon de penser et de voir les choses, c'est une sacré surprise que de le rejoindre dans ses propos. Mais bon, pour une fois que l'on est d'accord tous les deux, je ne vais pas chipoter là-dessus. Ça m'arrache même un faible sourire de comprendre enfin ce à quoi il fait allusion. Et je vois du coin de l'œil que ça le réjouit aussi de voir que j'approuve ses dires.

Ce type a toujours été pour moi l'archétype du mec sans scrupule, sans vergogne et sans aucun sentiment. Après tout, c'est ce qu'il montre au monde entier, alors pourquoi me poser plus de questions sur une personne, à première vue, détestable ? Il réussit son coup en détournant l'intérêt des gens envers lui, je ne me ferais pas prier pour contrecarrer son objectif. Mais en fait, et aussi étonnant que cela puisse être, il a un soupçon d'intelligence … Ou du moins, il semblerait que mon point de vue rejoigne le sien sur un sujet, ce qui ne veut pas automatiquement dire qu'il a vraiment quelques neurones de valable. J'espère ne pas avoir trop de points communs avec lui, une surprise, c'est bien assez. Puis, me voir associer à ce genre de personne me révulse légèrement. Ok, on a ce petit point commun, si on peut appeler ça comme ça, mais ce n'est pas, pour autant, la peine d'en faire une histoire.

Quand je l'ai entendu parler pour la première fois, je me suis dit qu'un phallocrate était bien assez au sein du groupe. Pourquoi fallait-il qu'on en ramène un deuxième ? Non pas que je sois gynocrate, que ma façon de pensée soit féministe et ancrée jusqu'au bout des ongles, comme une certaine blonde à quatre couettes, mais entendre toutes ces critiques sur les femmes est un poil agaçant. Et n'importe quelle personne de sexe féminin sera d'accord avec moi. Alors, ce jour-là, rester à une distance trop proche était pour moi impossible à supporter. Lui et Shikamaru s'étaient bien trouvés sur le coup, à raconter autant de calomnies sur nous qu'à se bidonner devant une Temari qui s'essoufflait à gueuler comme un bœuf. D'accord, la voir s'époumoner devant eux était hilarant, mais savoir qu'elle ne faisait que défendre la cause des femmes m'enthousiasmait davantage. J'étais vraiment fière de ce bout de femme, et l'avoir comme amie me rendait plus que comblée.

Malheureusement, rester loin de cet être abominable à mes yeux fut infructueux. J'étais même prête à penser qu'il me suivait partout. Je sais, ma paranoïa revient au galop, mais bon, il y avait vraiment de quoi se poser des questions. Non pas que je l'évitais, après tout, il m'était quasiment indifférent, alors vouloir esquiver une personne qui n'est rien à ses yeux était complètement idiot. Mais on n'avait aucun centre d'intérêt en commun, alors comment se faisait-il que l'on se retrouve pratiquement tous les jours à se croiser de manière aussi hasardeuse ? « Le destin » me dirait une autre blonde que tout le monde reconnaîtra. Tu parles d'un destin de croiser chaque jour une personne déplaisante, qui présente autant d'éthique que de savoir vivre. Ce type était un vrai béotien, aussi méprisable que vulgaire. Alors pourquoi voudrais-je sympathiser avec ?

Je ne pense pas être quelqu'un de fermé. J'aime découvrir de nouvelles choses et de nouvelles personnes. Et j'aurais pu vouloir le connaître, mais on m'en demandait trop. Ou du moins, on en demandait trop à mon moi intérieur. Certes, comparé à ma jeunesse, j'avais un très bon contrôle de moi-même, mais me pousser dans mes retranchements était un acte déraisonnable. Et peu importe mes efforts, si un jour ça devait se passer, ça péterait à coup sûr. Surtout si ce type traînait encore dans les parages.

- Pourquoi ne lui laisses-tu pas une chance ? Il ne demande qu'à te connaître …

Ça, c'était la meilleure blague qu'avait pu me sortir Ino. J'en ai pas ri pour autant, mais je m'étais esclaffée intérieurement. Faut pas exagérer, demander l'impossible n'a jamais abouti à rien. Et ce ne sera pas demain la veille que l'impossible deviendra possible.

- Sérieux, t'es lourde, grand front. Lâche les rênes un peu, il va pas te tuer !

Et c'est moi qu'on traite de lourde, je vous jure. Se méfier des autres n'a jamais été un défaut à ce que je sache, au contraire. Surtout lorsqu'il s'agit d'un « ancien » traître. Comment peut-on en venir à ce fait d'ailleurs ? On devient un ex-traître, comme on devient un ex-membre de l'Akatsuki, ou encore un ex-ninja médecin ? Non mais, où est la comparaison sérieusement ? C'est si facile que ça de racheter ses pêchés ? Si c'était le cas, ça fait longtemps que j'aurais envoyé Sai ad patres. J'aurais bien dit Lee, mais ce gars a un si grand cœur qu'on ne peut vraiment pas lui vouloir de mal. Bon, d'accord, j'ai pardonné à Sasuke. Mais lui, c'est différent, n'est-ce pas ? Oh et puis, pourquoi me justifier ? J'aime pas ce type, j'aime pas ce type, point à la ligne.

Aujourd'hui, je crois que c'est le pire jour de ma vie. Ce qui est le comble en sachant que je fête mes dix-huit ans. Si j'avais su, d'ailleurs, ce qui allait arriver, j'aurais évité autant que possible tous mes amis pendant vingt-quatre heures non stop. Honnêtement, le pire cadeau d'anniversaire que l'on puisse offrir à une jeune fille en passe de devenir une adulte, c'était bien celui là. À quoi pensaient tous ces gens ? Je n'ai jamais eu aussi honte de ma vie. Dans d'autres circonstances, j'aurais certainement apprécié le geste, mais là c'était vraiment trop … déplacé.

Mon Dieu, à ce moment précis, je dois être rouge de gêne. Et comment ne pas l'être ? Ce type a autant de vêtements sur lui qu'un enfant qui vient de naître. Et encore ce dernier n'a pas son mot à dire. Je m'attendais à voir sortir, je ne sais pas moi, un groupe connu, un stripteaseur plus que canon, ou même Naruto, revenu de sa mission « top secrète ». Au lieu de ça, j'ai un stripteaseur, certes, mais il a oublié le « plus que canon » que j'espérais vainement. Le cadeau géant était bien plus attrayant fermé qu'ouvert. Pourquoi faut-il que cela tombe sur moi ? Je n'ai jamais demandé quoi que ce soit au bon Dieu ou au Père Noël pour les fêtes, je n'ai jamais voulu plus que des moments privilégiés avec les gens que j'aime. C'était trop ? J'aurais peut-être dû me montrer davantage égoïste dans ce cas. Vu ce qui me tombe sur la tête aujourd'hui, j'aurais pu me le permettre.

- Joyeux anniversaire, me glisse-t-il au creux de l'oreille.

Mais avant même que je ne me remette de mes émotions, un métal froid sur mon poignet gauche s'était fait sentir.

- J'espère que tu aimes mon cadeau ? Ricane-t-il, me montrant de ce fait ses canines plus qu'acérées.

Me voilà menottée pour une durée indéterminée à un traitre, un rebus de la société, un animal de la pire espèce, un monstre de chair et d'os (moi qui pensais qu'il n'était fait que d'eau), et j'en passe. Ce type m'exècre, et voir son sourire en coin, laissant apparaître une dent, me rend hors de moi. Crois-moi mon coco, tu vas regretter de t'être intéressé à moi. Foi de Sakura, tu vas souffrir …