Je poste.

Ce sont des scènes de leur relation. Pas une fiction en bonne et du forme mais il y a quand même un début et une fin.

Il y en aura quatre ou cinq. Comme ça parle exclusivement de ce couple, ça va sûrement tomber dans le niais si c'est trop long.


The beginning of the end

Elle a commencé cette nuit-là, toute cette histoire - et peut-être même avant - avec ce cauchemar, la cause de mon abandon à la folie, et avec elle, j'ai goûté à l'ivresse désordonnée d'un autre monde ma raison avait foutu le camp.

C'est le même, celui qui m'a pourchassé sans arrêt et qui m'a hanté une bonne partie de ma jeunesse.

Dans un monde où la nuit a envahi le ciel, je cours, le souffle erratique et les yeux agrandis par la nervosité, et, sans avoir notion ni du temps ni de l'espace, toujours, alors que j'ai l'impression de faire du surplace, je cours comme un dératé à la recherche d'une lumière irréelle et protectrice qui chasserait loin de moi les démons, et cet horizon d'obscurité. Mais elle ne m'est jamais apparue car soudain, le sol se dérobe à mes pieds, je sombre dans les abysses. Je tombe, le gouffre n'a pas de fond, mais ça ne m'empêche pas de sombrer encore plus profondément. Chaque centimètre de plus qui m'entraîne me procure une douleur sans nom, comme si dans un bruit sourd et affreux, on m'enfonce un couteau en pleine poitrine, et qu'ensuite, avec un plaisir irrésistiblement sadique, on me la remue lentement, tout tendrement, cruellement de droite à gauche. J'essaie de hurler ma souffrance mais en vain, aucun son ne sort de ma bouche. Je me sens étouffer dans ma rage. Mon impuissance, mon inutilité me crève le cœur. Et ce silence est si insoutenable, si seulement je pouvais cracher ma douleur en un cri, si puissant qu'elle s'atténuerait un peu, ou du moins tellement assourdissant que ça me soulagerait. Mais je continue de tomber, la chute n'a pas de fin. Je ne peux rien faire, comme toujours.

Et brusquement, je me réveille dans un sursaut, le corps couvert de sueur.

J'ai cherché pendant longtemps à échapper à la nuit, mais la fatigue, le sommeil, ces caprices du corps ont toujours fini par emporter sur ma volonté et ma détermination. Il est impossible de rester pour toujours éveiller.

Essayant de calmer mes tremblements et les battements frénétiques de mon cœur, je commence à tourner en rond dans la chambre, avec l'allure d'un fauve en cage. Plus question de dormir à présent. Je me passe un pull sur le dos et descends dans la salle commune.

Hermione Granger est là, endormie sur ses parchemins éparpillés, sa masse de cheveux sombres l'entourant. Sa bouche entrouverte laisse couler un petit filet de salive. Je l'examine attentivement, un sourire narquois aux lèvres, penché sur son visage, comme si je me trouve face à un phénomène de foire. Granger est souvent ridicule, et s'humilie elle-même sans l'aide de personne. Je ne sais si elle l'a remarqué mais en tout cas, ça ne l'a pas empêché de continuer à être ainsi, stupidement bornée et coincée.

La pièce est glaciale, j'en frissonne. Après avoir allumer un feu dans la cheminée, je ramène un fauteuil bien confortable et m'y affale, laissant mes pieds reposés près du foyer. La chaleur remonte à moi agréablement.

Granger remue un peu, doucement réveillée par les ombres énormes des flammes dansantes. Elle s'essuie le visage, baille, se frotte les yeux, regarde autour d'elle, et ne semble pas le moins du monde surprise de me voir là.

« Qu'est ce que tu fais ici, au milieu de la nuit, Malefoy ?

- Pas tes affaires. »

Je ne la regarde toujours pas, elle non plus, elle rassemble ses affaires et les range dans son sac. Parfois Granger me met tellement hors de moi que j'ai envie de la tuer une bonne fois pour toute, d'autre fois, elle m'effraie, carrément.

Je ne sais pas pourquoi, mais depuis quelques temps, je n'arrête pas de la chercher du regard. L'avoir dans mon champ de vision m'est devenu indispensable. Je suis discret, pas question de la fixer directement, je la regarde du coin de l'œil. Savoir qu'elle se trouve dans la même pièce que moi me suffit amplement. Parfois, je me rends compte de ce que je fais, j'en frissonne d'horreur et la culpabilité m'inonde. Quel inconscient. Mais comme toutes les choses de ce monde, on s'y habitue. J'ai fini par connaître toutes ses habitudes et manies, et par détester la plupart ensuite. Elle met cinq cuillères de sucre dans son café, c'est beaucoup trop. Sa façon de lever la main vers le plafond comme un automate et de trépigner sur sa chaise m'agace, le monde entier aussi par la même occasion, y compris ses idiots de meilleurs amis. Sa démarche n'a rien de sexy, elle grignote sa plume quand elle réfléchit, elle ne sait pas monter sur les balais. Et si je disais tout ce qui ne me plaît pas, j'y passerai la nuit.

Son visage n'est pas joli, mais assez banal comme toute sa personne. Cependant, quand on y prête plus attention, on voit qu'il n'est pas déplaisant. Evidemment, si on passe outre son nez trop petit, sa bouche trop fine, son teint trop pâle, ses cheveux sauvage qui lui donne un air farouche d'amazone, et surtout ses yeux outrageusement grand – et insolents à souhait –, on y décèle une certaine harmonie dans ses traits.

« Un cauchemar ? demande-t-elle. »

J'acquiesce faiblement.

« C'était quoi ? »

Elle ose me demander ça ! Je lui lance un regard acide qui la refroidit soudain.

« Qu'est ce que tu en sais des cauchemars, Granger ? Rien. Tu les fais, tu ne dors plus quelques jours, tu les oublies, et puis c'est tout. Ca ne te traumatise pas des années et des années. »

Elle baisse les yeux.

« Tu as raison. »

Et son regard me troue la nuque. Je ne veux pas la voir, je suis trop fatigué pour résister, je ne sais pas ce que je vais faire. Et comme pour me prouver que je peux garder le contrôle, et comme un autre a déjà pris possession de moi, je me détourne quand même et rencontre ses yeux. Ils sont immenses, éclatants, droits et francs, cherchant à percer mes secrets enfouis, me faisant fondre d'un coup, tellement ils sont brûlants – pareils à des astres du ciel -, et tendrement insistant. Des vents contraires se battent en moi, comme toujours lorsqu'il s'agit d'elle. J'ai envie de les lui arracher à mains nues, et aussi de m'y noyer dedans, de baiser ses paupières. J'avais envie de la gifler passionnément, et en même temps de lui faire l'amour violemment. Les désirs se chevauchent, j'en tremble intérieurement. Vais-je perdre ma tête ?

« Ne me regarde pas comme ça, je lui demande, d'un ton presque suppliant.

- Comment ? »

Elle ne se rend pas compte de l'effet qu'elle me fait, cette sang-de-bourde, avec son air innocent de sainte oubliée par hasard d'une autre planète, ses mains blanches et purs, sa chevelure brune, indomptable.

« Comme tu le fais ! »

Elle se tait, lève les yeux au ciel.

« Toi aussi, tu me jettes des regards bizarres, je le sens, avant, je me disais que ce n'était que mon imagination qui délirait, mais non, c'était bien vrai. Parce que c'est toi, je n'ai pas cherché à comprendre, tu es un trop grand mystère pour moi, pour le monde entier.

- Toi aussi, Granger, je n'ai pas pu m'empêcher d'ajouter. »

Elle paraît sincèrement étonnée.

« C'était quoi ce cauchemar ? reprend-t-elle.

- Ca ne te regarde pas.

- Si tu veux.

- Je tombais dans le néant. »

Silence.

Bizarrement, je n'ai pas envie de le cacher. C'est si banal, je me suis souvent demandé pourquoi je réagis si violemment, pourquoi ça me terrifie autant.

« C'est vers quoi tu t'avances irrémédiablement, Malefoy. J'ai beau te détester, à te fréquenter tous les jours, je sais qu'au fond tu ne crois pas vraiment à ces causes, je veux dire ceux de Voldemort, parce que tu es tellement égoïste que ce genre de chose, ça te dépasse. Tu ne voudras jamais mourir pour quelqu'un. Tu foutras le camp à la première occasion, mais là, tu ne peux plus vraiment fuir. Malgré tout, j'ai quand même envie de t'aider. Je n'y peux rien, c'est mon fichu caractère. Tu as aussi le tien. Alors, pour la dernière fois, tu dois combattre au côté d'Harry.

- Jamais. »

Le cœur gonflant, elle ramasse sans empressement son orgueil déchiré avec une expression d'enfant abandonné qui me ferait me sentir presque coupable et s'en alla. Je sens la panique et l'angoisse montée en moi. Etrangement, ça me déchire le cœur de la voir ainsi, si abattue, si démunie. J'ai l'impression de l'avoir vraiment perdu – elle se soucie tout de même de mon cas, aussi perdu qu'il puisse l'être, moi, qui lui suis odieux et vil en tout point – et qu'après ça, elle me regardera avec un air triste, comme un fantôme qu'elle n'a pu sauver, comme un assassin qu'elle n'a pu prêcher. Je reste immobile et serre fort mes poings pour ne pas perdre contrôle et être tenter de la rattraper. A quoi bon ? Rien n'avait d'importance à présent. La vie n'avait plus rien à m'offrir, elle n'avait jamais rien eu à m'offrir de toute façon. Mais je ne veux pas mourir, et encore moins rencontrer le néant, il y avait assez d'obscurité en moi. Après tout,…je peux bien changer un peu le cours des choses, il n'avait rien à perdre, rien à gagner, - tout à emporter en enfer ou dans le vide - et au fond, je n'ai jamais cru au destin, et ces autres conneries.

« Granger. »

Elle se retourne.

Et sans un geste, sans un mot, je jette tout à ses pieds – ma peur, mes cauchemars, mon désespoir, mes hurlements sourds, mes larmes, sans cesse ravalés, et qui m'empoisonne le ventre, le noir autour de moi, tout en somme, absolument tout. Qu'elle les ramasse et qu'elle en fasse une boule, et qu'elle les porte sur ses frêles épaules jusqu'à la fin de ses jours. A ma place. Je me dis que mon égoïsme n'a plus de limite. Mais elle est assez forte pour ça, et du reste, tant pis.


Voilà. Sorte d'intro.

Comment dire… je l'ai écrit il y a assez longtemps, mon humeur a changé. Alors qu'avant j'étais plutôt satisfaite, maintenant je trouve ça niais…. Bon, de toute façon il y a un début à tout.

Un mot aussi. Toute l'idée a découlé de « 505 » de Arctic Monkeys, dernière chanson de « Favorite worst nightmare », l'idée de ce recueil je veux dire. Et c'est le titre parce que je n'avais pas d'autres idée (je le trouve assez pourri d'ailleurs).