Bonjour à tous ! Je viens de finir de poster le Principe d'Incertitude, donc je me lance dans la publication d'une autre vieille fic, qui fait 3 chapitres, que je posterai assez régulièrement cette semaine. C'était à l'origine ma participation au concours "A la croisée des chemins" des modératrices des fanfictions d'HPF.
Il fallait écrire du point de vue d'un Moldu qui va croiser le chemin d'un fait magique. Il faut qu'il y ait un détail qui fait qu'il va réaliser que la situation est pour des moins inhabituelle (entendre "Quidditch", voir une baguette magique, etc.). Il y avait aussi des mots imposés : automatiquement, agréer, bow-window, captif et filtre (et non pas philtre, ce serait trop facile :mrgreen: ). Et surtout, le moment de la rencontre avec la magie doit être canon.
Bref, bien galère comme vous vous en doutez. Mais en réalité, je me suis vraiment amusée à écrire cette fic.
Voilà la citation de mon moment canon, qui se trouve dans le deuxième chapitre de Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban (pour ceux qui ne parlent pas anglais, c'est le moment où Harry entend parler de l'évasion de Sirius Black à la télévision moldue) : "[Harry] helped himself to a piece of toast and then looked up at the reporter on the television, who was halfway through a report on an escaped convict:
"... The public is warned that Black is armed and extremely dangerous. A special hot line has been set up, and any sighting of Black should be reported immediately."
Le titre m'a été inspiré (enfin je l'ai carrément récupéré) par un dessin d'Aquasixio sur DA, je vous conseille d'y jeter un oeil, c'est juste splendide.
Je tenais aussi à préciser que je me suis un peu inspirée d'un personnage de Danielle Martinigol (auteure aussi talentueuse que sympathique), pour créer mon OC. Je n'en dis pas plus pour ne spoiler personne, mais on se retrouvera à la fin de l'histoire pour que je vous conseille chaleureusement de lire le roman d'où vient ledit personnage.
Un immense énorme gigantesque merci à Seonne d'HPF pour son bêtatage incroyable 3
J'arrête de blablater, bonne lecture !
Helen jeta un coup d'œil à sa montre et remarqua avec grande satisfaction qu'il était dix-huit heures.
Libre, elle était enfin libre !
- Helen-chérie, est-ce que tu peux m'écrire le texte pour le journal de demain, c'est quelque chose sur un évadé de prison, tout est dans ce dossier ce sera vite fait !
- Oui bien sûr, répondit-elle à sa supérieure en tentant du mieux qu'elle pouvait de masquer l'animosité dans sa voix.
Helen-chérie, Helen-chou, elle avait tous les surnoms du monde quand il s'agissait de faire le travail à la place de Mary. Mary, la grande journaliste, dont tous les anglais connaissaient la voix... Et Helen, qui était-elle ? Celle qui trimait comme une forcenée et sans compter ses heures pour voir uniquement son nom écrit en tout petit à la fin du journal, et pour recevoir salaire de misère tous les premier du mois. Pendant ce temps, Mary, elle, se pavanait d'un dîner mondain à l'autre.
Et s'il n'y avait eu que Mary... Helen était l'esclave de toute la rédaction, la sous-fifre des sous-fifres, et quand quelqu'un n'avait pas envie de faire quelque chose, c'était automatiquement elle qui s'y collait.
Helen ouvrit le dossier, le parcourut rapidement...
- Mary, la héla-t-elle, il y a un souci !
- Lequel ? répondit sa supérieure, d'une voix bien moins mielleuse qu'avant.
Mary détestait qu'on la rappelle sur le pas de la porte. Et bien Helen, quant à elle, détestait qu'on lui ajoute du travail à la fin de sa journée, et elle n'en faisait pas un fromage.
- Ce dossier est vide, lui fit-elle remarquer. On sait juste que l'évadé se nomme Sirius Black, et qu'il a tué plusieurs personnes et qu'il est dangereux. On ne sait pas d'où il s'est échappé, ni quelles mesures ont été prises ni...
- Ecoute, chérie, ces informations viennent de très haut. Tu les mets en forme telles quelles, c'est tout. Pas de recherches, pas de compléments, rien. Fais en sorte que les gens ne se posent pas les mêmes questions que toi, c'est tout ce que je te demande. A demain.
Et elle laissa une Helen furieuse dans le placard à balais qui lui servait de bureau. Elle n'ajouta rien, et se pencha sur le dossier. Elle fit comme elle faisait toujours quand on lui donnait un travail inintéressant : elle écrivit sans réfléchir. Seulement elle sentait cet étrange chatouillement de l'âme qu'elle connaissait bien, elle n'était pas devenue journaliste pour rien... Elle le savait, c'était le démon de l'investigation, totalement endormi par la fonction qu'elle exerçait à la rédaction. Un frisson lui secoua les épaules : un dossier qui venait d'en haut, avec seulement une poignée d'informations ? Si elle creusait, elle risquait fort de perdre son poste mais... Et alors ? De toute manière, cela n'avait rien à voir avec sa vocation, écrire des notes de service et faire des cafés-filtre... Elle pouvait bien se remettre à écrire des piges, elle ne gagnerait pas beaucoup moins. Ce frisson qu'elle ressentait là, cela valait bien sa place et mille autres aussi.
Helen boucla le script pour le journal du lendemain et reprit le dossier.
- Alors, Sirius Black, qu'as-tu à m'apprendre ? murmura-t-elle.
Pas grand-chose, elle devait l'avouer. Seulement, il y avait un numéro à contacter si on apercevait l'évadé. Helen sourit. Il était temps de mentir un peu.
- Miss, je vous conseille de laisser tomber. Ce genre de choses nous dépasse, vous et moi. Cessez de nous faire perdre notre temps. Si vous n'avez pas de témoignage à apporter...
- Mais vous faites bien quelque chose avec vos témoignages !
- Nous devons juste communiquer les noms à un numéro inconnu. Nous ne gérons rien parce les ordres viennent d'en haut. Vous devriez rester prudente. Maintenant, laissez-vous travailler. Au revoir Miss !
Helen sortit du commissariat en maugréant. Elle n'aurait pas dû être aussi franche. Elle aurait dû faire semblant d'avoir vu ce Sirius Black. Quelle piètre journaliste elle faisait...
Elle frissonna une fois encore. Elle avait l'impression de toucher du bout des doigts un mystère qui la dépassait et cela faisait pulser l'adrénaline dans ses veines. Elle trouverait, même si pour cela, elle devait entrer par effraction dans le commissariat pour voler des dossiers.
- Miss ! entendit-elle appeler quand elle fut dans la rue.
Elle se retourna par réflexe, peu convaincue que c'était après elle qu'on en avait. C'était un jeune homme un peu banal, cheveux châtains et yeux bleus-gris, taille moyennes, vêtements passe-partout.
- Miss ! s'exclama-t-il en la rejoignant, moi aussi je trouve ça étrange. L'évadé, je veux dire.
Helen s'arrêta.
- Je suis stagiaire au commissariat, cette histoire m'intrigue mais on m'a dit que je devais m'occuper de mes affaires, que ce type de secrets était fréquent et que si je voulais faire carrière dans la police il valait mieux que je la boucle. Vous êtes journaliste, c'est ça ?
Helen hocha la tête. Le jeune homme avait parlé à une vitesse affolante, comme s'il avait peur qu'elle s'enfuie en courant avant d'avoir entendu la fin de ce qu'il avait à lui dire. Elle lui sourit.
- Helen, se présenta-t-elle en tendant la main.
Il la serra sans hésiter.
- Jack, répondit-il. Il est tard, ça vous dit de manger un morceau ? On pourrait échanger nos hypothèses...
Helen faillit refuser, songeant à une mauvaise technique de drague... Et puis, elle changea d'avis : s'il s'avérait être l'un de ces dragueurs lourdingues, elle pourrait toujours l'éconduire.
Ils s'installèrent dans une minuscule pizzeria miteuse, et ce fut Jack qui entama la conversation.
- J'ai cherché dans les bases de données quand mon tuteur prenait sa pause. Pas de Sirius Black parmi les criminels référencés, s'il était en prison au Royaume-Uni, c'était dans le plus grand secret. Pas de procès, pas d'enquête, rien. Si ça se trouve, il n'est pas un meurtrier, ou bien il n'a jamais été arrêté.
- Si ça se trouve, renchérit Helen, il n'existe pas du tout.
- Ça, j'en doute. Si cet évadé était une construction, ils l'auraient appelé John Smith, pas Sirius Black. Qui s'appelle « Sirius » ?
- Effectivement, concéda la journaliste. Cela dit, ça le rend plus facile à chercher.
Ils terminèrent leur repas sans avancer d'informations capitales, et se quittèrent en se promettant de se tenir au courant de leurs recherches.
Quand elle rentra chez elle, Helen était totalement euphorique. Avec un allié dans la police, elle ne doutait pas de parvenir à mettre la main sur ce mystérieux Sirius Black. Elle avait tellement hâte d'en découvrir plus qu'elle ne ferma pas l'œil de la nuit.
Elle arriva à la rédaction à l'aube : elle était sûre qu'elle y serait quasiment seule, ses collègues arrivaient en général sous les coups de dix heures. Il n'y avait avant le milieu de la matinée que les stagiaires de permanence, qui couvraient les actualités nocturnes. Ils ne la dérangeraient pas. Elle s'installa dans son bureau et alluma l'ordinateur qui s'y trouvait. Elle avait beau être l'esclave de ses collègues, elle disposait de la même technologie que les autres. Elle se connecta à internet. L'outil était encore balbutiant, mais un bon journaliste se dotait de tous les outils à disposition. La recherche « Sirius Black » ne donna pas grand-chose : un billet assez acerbe sur l'inefficacité du système carcéral, quelques sites d'informations qui n'avaient pas plus d'éléments qu'elle... Il paraissait évident qu'ils avaient tous reçu le même dossier.
Il n'y avait plus qu'à espérer que la base de données de la police soit plus efficace.
Elle tenta, pour se donner bonne conscience, une recherche sur le mot « Sirius », et apprit que c'était le nom d'une étoile dont elle nota soigneusement les symboliques, au cas où quelqu'un aurait inventé ce nom pour une raison ou pour une autre : c'était l'étoile principale de la constellation du grand chien. Helen étouffa un rire en se disant qu'ils cherchaient un grand chien noir, si l'on en croyait le patronyme de l'évadé...
Par précaution, et par désœuvrement, puisque c'était ça ou travailler sur le gros dossier que lui avait confié Mary juste avant de lui donner celui sur Black, elle consulta les actualités sur les chiens errants et envoya un mail à Jack pour lui demander de consulter les dépositions à ce sujet. Il la prendrait sans doute pour une idiote, mais ils n'avaient aucune piste, mieux valait explorer toutes les hypothèses. Sa recherche sur le nom Black ne donna pas grand-chose non plus : le mot était bien trop répandu pour qu'internet puisse lui apprendre quoi que ce soit.
Elle termina sa petite enquête personnelle interrogeant le stagiaire d'astreinte, qui était sur le point de terminer sa garde nocturne. Elle devait faire vite : sa responsable allait bientôt arriver et l'ensevelir sous les corvées.
Le jeune homme, répondant au nom de Hugo, avait l'air de n'avoir qu'une envie : rentrer chez lui. Helen décréta qu'il pourrait bien attendre cinq minutes :
- Est-ce qu'il y a eu du neuf sur Sirius Black, l'évadé de prison ?
La jeune journaliste sursauta quand une main peu amicale se posa sur son épaule.
- Helen-chérie, fit Mary d'une voix blanche, ne t'avais-je pas dit de laisser tomber cette histoire ? Si je t'y reprends, je serai obligée d'en parler au directeur.
La souffre-douleur de l'équipe soupira.
- Je me contentais de m'informer, au cas où il faudrait compléter le bulletin que j'ai écrit hier soir.
Mary prit un air pincé, visiblement vexée de ne rien trouver à lui reprocher.
- Eh bien, conclut-elle, abstiens-toi d'avoir ce genre d'initiatives sur cette affaire, à l'avenir. Je t'ai dit que le dossier était sensible. Tiens-t'en loin.
Helen acquiesça avec une sincérité feinte, et attaqua sa journée de travail avec une énergie diminuée. La perspective d'écrire des notes ennuyeuses pendant des heures avant de pouvoir reprendre ses recherches la démoralisait et faisait peser sur elle la fatigue accumulée au cours de la nuit blanche qu'elle venait de passer. Elle consacra toute la fin de l'après-midi à la mise en forme les notes que lui avait confiées sa supérieure, afin d'en faire des mails présentables, ne faisant souvent rien d'autre qu'ajouter « Cher untel/unetelle » au début, et « Je vous prie d'agréer l'expression de mes sentiments les plus distingués » à la fin.
Un mail, toutefois, lui redonna le sourire au cours de l'après-midi :
« J'ai trouvé quelque chose. On se retrouve à 19h à la pizzeria d'hier ? Jack. »
Helen répondit puis supprima le mail, pour plus de sûreté. Elle avait l'impression d'être James Bond, Sherlock Holmes, Hercule Poirot, qu'importe... Il lui semblait effleurer un immense secret, qui dépassait sans doute la personne et les crimes supposés de Sirius Black : que l'Etat tentait-il de leur cacher ? Elle frissonna pour la énième fois depuis la veille.
Quand elle découvrirait enfin ce que cachait cette affaire, rien ne pourrait l'empêcher de la révéler à tous.
Elle deviendrait plus célèbre encore que Mary, car elle ne doutait pas que la mise au jour de ce secret-là changerait le destin et le visage de leur société.
Elle brûlait d'envie d'écrire cet article qui bouleverserait le monde.
- Alors qu'est-ce que vous avez ?
Jack la regarda d'un air espiègle, et entreprit de couper méthodiquement sa calzone. Il aimait visiblement jouer sur le suspense. Helen lui sourit, agacée. Il aurait fait un bon journaliste, mais ça, elle n'allait sûrement pas le lui dire. Il n'avait pas besoin d'être encouragé, et surtout, elle brûlait d'avoir accès aux informations qu'il lui avait promises.
- Bon, vous crachez le morceau ?
Il finit de mâcher son morceau de pizza avant d'articuler :
- Ce ne serait pas très poli.
Ce ne fut qu'après un regard assassin supplémentaire qu'il capitula.
- Alors, j'ai cherché dans plusieurs bases si on avait des traces d'un Sirius Black ou d'une famille Black, et j'ai aussi creusé votre histoire de grand chien noir, là. Et il se trouve que de nombreux riverains ont signalé un grand chien noir, errant, qui a l'air de progresser assez rapidement, comme s'il fuyait quelque chose. L'animal serait maigre, craintif et agressif, et aucune des équipes de fourrières dépêchées n'a pour l'instant réussi à l'attraper.
- Je vous rappelle qu'on cherche un évadé de prison, pas un chien errant, intervint Helen.
- Oui, laissez-moi finir. Je n'aurais pas particulièrement fait attention si ça n'avait pas concordé étrangement avec mes autres recherches. Je vous avais dit qu'il n'y avait aucun Sirius Black sur les registres de nos prisons. En revanche, il y a une mention d'un certain Sirius Black sur le dossier d'adoption d'un orphelin, nommé Harry Potter, et qui est allé vivre chez sa tante parce que le fameux Sirius Black était en prison.
- Vous avez dit que cela concordait...
- Oui, regardez, j'ai placé sur une carte les localisations des différents signalements de riverains, par rapport au chien noir. Et il semble se déplacer méthodiquement d'ici, vers le Surrey. Le Surrey où sont domiciliés Harry Potter, son oncle, sa tante et son cousin.
Helen resta coite. Elle ne voyait pas de sens possible à tout cela. Ils cherchaient un homme pas un chien, et même si la coïncidence était étonnante... Cela restait bien étrange. Comment faire le lien entre ces éléments ? Elle avait de plus en plus l'impression que quelque chose lui échappait. La clef de tout cela, elle le savait, était au-delà de Sirius Black et son hypothétique évasion. L'explication venait, elle en était sûre, de ces étranges coïncidences que la jeune femme ne parvenait pas à expliquer.
- Sirius Black est peut-être un surnom, tenta-t-elle. A cause du chien... Peut-être que l'évadé le protège, et que c'est pour ça qu'on n'arrive pas à l'attraper.
- Un chien, en prison ?
- Vous voyez une autre explication ?
Ils finirent leurs pizzas en silence, ruminant les mystères de cette étrange affaire. Ils n'avaient pas beaucoup d'expérience, mais c'était de toute évidence le cas le plus compliqué qu'ils aient eu à traiter. Lorsque les assiettes furent vides et que la nourriture ne fut plus un prétexte au silence, Jack relança la conversation :
- Du coup, on fait quoi ?
- Le chien a l'air d'aller dans le Surrey non ? Et puis, au pire, on peut toujours voir avec la famille de ce Harry Potter.
- Vous voudriez aller dans le Surrey ? s'étrangla Jack.
- Vous avez mieux à faire ? Je ne travaille pas demain.
- Et si on tombe sur le véritable Sirius Black ?
- Vous êtes policier, oui ou non ? Si on tombe sur le véritable Sirius Black, on se démerde, voilà ce qu'on fait. Et surtout, on tire cette histoire au clair avant de le filer aux flics.
Helen imaginait déjà la tête de la police si elle publiait son article avant même qu'ils interrogent le fameux évadé. Ce serait le scoop du siècle...
Jack eut l'air un peu dépassé par les événements mais n'osa rien répliquer. Helen le remercia pour ses recherches efficaces, et ils se donnèrent rendez-vous pour le lendemain, à l'aube, prêts pour une expédition hautement dangereuse dans le Surrey.
La jeune journaliste passa une nouvelle nuit blanche, mais l'adrénaline la tenait éveillée, et elle ne pensait pas qu'elle souffriait de la fatigue le lendemain, malgré les dizaines d'heures passées sans dormir qui commençaient à s'aligner.
Quand elle retrouva Jack devant son commissariat, ce dernier paraissait armé jusqu'aux dents. Visiblement, le programme qu'elle lui avait exposé ne le rassurait qu'à moitié.
- Vous avez une arme ? remarqua-t-elle tandis qu'il lui donnait un gilet pare-balle fort inutile pour le moment.
- C'est une fausse, les stagiaires n'ont pas le droit de s'en servir, mais j'ai plusieurs bombes anti agressions, un couteau et...
- Un couteau ? vous savez, si on découpe le mec, on finira en prison, et on n'aura même l'occasion de le cuisiner un peu.
Jack se mit à pouffer, et Helen se rendit compte de ce qu'elle venait de dire.
- Je ne voulais pas dire le cuisiner comme ça, je voulais dire l'interroger... Oh ! Mais arrêtez de rire ! Allez, en voiture, on a assez à faire.
Le quartier dans lequel ils arrivèrent était très tranquille, trop tranquille, d'après Helen. Un quartier résidentiel, rues calmes, aires de jeu vides, et maisons ornées de bow-windows. Un endroit ennuyeux à mourir, selon les standards de la jeune journaliste. Quand ils stationnèrent devant le 4, Privet Drive, à Little Whinging, Helen révisa son jugement. Les habitants de cette maison étaient plus qu'ennuyeux. Ils étaient la banalité incarnée : une grande femme maigre qui espionnait les voisins, un enfant obèse et un homme plus gros encore, à l'air aigri. Seul le second enfant, un petit garçon aux cheveux noirs en bataille et aux lunettes rondes, lui inspirait de la sympathie. Helen jugea qu'il devait s'agir du fameux Harry Potter.
Jack et elle se concertèrent. Fallait-il sonner pour leur poser des questions ? Vu le profil des habitants de cette maison banale dans un quartier banal, cela n'était pas la peine mais... qui ne tente rien n'a rien.
Helen retira son gilet pare-balle, malgré le regard autoritaire de Jack, et se hasarda à sonner.
- Bonjour Mrs Dursley, je suis journaliste et je voulais avoir votre avis sur l'évadé de prison, Sirius Black, je ne sais pas si vous en avez entendu parler...
- J'en ai entendu parler, mais je n'ai rien à dire, cracha la femme blonde qui lui avait ouvert.
Helen remarqua qu'elle jetait un regard angoissé vers l'intérieur, comme si elle avait peur que les autres entendent.
- Au revoir, ajouta-t-elle en fermant la porte brusquement.
La jeune journaliste se hasarda à coller l'oreille contre le panneau de la porte :
- C'était encore un démarcheur, crachait la voix de Mrs Dursley.
- Tu sais ce que j'en pense, grognait une voix d'homme. Que ça devrait être interdit ! Embêter les gens un samedi...
Helen fit demi-tour et regagna la voiture, racontant ses observations à Jack.
- Pas d'info mais c'est louche, conclut-t-elle.
Ils restèrent stationnés dans les environs, et guettèrent la présence d'un gros chien noir, ou d'un homme à l'air louche... La journée n'en finissait pas. Ils grignotèrent, écoutèrent de la musique, se racontèrent des blagues, et leurs enfance respectives, mais les heures furent longues, et ils craignirent de s'être trompés dans leurs calculs. Cependant, si le chien continuait au même rythme, il devait arriver ce jour-là, Helen en était sûre... Peut-être avaient-ils suivi une chimère, peut-être le chien n'existait-il pas plus que ce Sirius Black qu'on ne trouvait dans aucun dossier de la police ?
Ils étaient sur le point de repartir, épuisés et découragés, quand, au crépuscule, une silhouette sombre se dessina dans la rue.
- On y va, souffla la jeune femme.
Jack la suivit sans rien dire, mais il n'avait pas fait cinq pas dans la rue qu'il voulait déjà faire demi-tour.
- J'ai oublié le couteau, s'excusa-t-il.
- Pas le temps, grogna Helen, on fera sans. Allez !
La silhouette qu'ils avaient vue était bien celle d'un gros chien noir, qui aurait pu être massif s'il n'avait pas été si maigre. Helen frissonna. La bête ressemblait à un présage de mort, d'autant plus sombre qu'elle était famélique.
- Comment on fait ? souffla Jack.
- On l'attrape, ça attirera peut-être son maître...
Jack grogna quelque chose qui ressemblait à « mais comment veut-elle attraper un monstre pareil ? », mais elle ne répondit pas. Elle non plus n'en avait pas la moindre idée, merci bien.
Ils commencèrent par pister le chien doucement, sans le lui montrer, espérant trouver un moyen de l'acculer. Ils avaient préparé une cage dans le coffre de la voiture, mais encore fallait-il réussir à l'y attirer.
Jack eut soudain la bonne idée. Il fouilla dans sa poche et trouva les restes de son sandwich : un peu de fromage, une demi tranche de bacon, un peu de pain. Confiant, il s'approcha du chien, la main tendue et les victuailles bien en évidence. Il fit un signe de tête à Helen pour qu'elle profite de la diversion pour attraper la bête... En espérant ne pas se faire arracher le bras au passage.
Avec la nourriture, Jack parvint à l'attirer dans un cul-de-sac entre deux maisons. La faim semblait aveugler l'animal, qui le suivit sans hésiter une seconde. Il tendit la main pour que la bête mange le bacon, en prenant garde à bien tendre et serrer les doigts pour ne pas risquer d'en perdre un au passage.
Helen, pendant ce temps, s'approcha à pas de loup, et passa la boucle d'une laisse à lasso autour du cou de l'animal. Quand ce dernier s'en rendit compte, il s'agita, essaya de mordre. Mais il était si faible et si maigre que ses tentatives restèrent vaines. Helen en avait mal au cœur... Sirius Black ou non, elle essaierait d'adopter cette pauvre bête. On ne pouvait pas décemment laisser un être vivant dans un tel état.
Au bout de quelques secondes, le chien cessa de se débattre. Il se passa alors quelque chose de si incroyable qu'Helen crut un instant qu'elle s'était endormie dans la voiture et que rien de tout cela n'était réel. Mais le fait même d'avoir cette pensée la convainquit du contraire. Elle fixa alors la silhouette du chien qui se brouillait. En quelques secondes, un homme était accroupi là, vêtu de haillons, hagard, aussi décharné et désespéré que l'animal dont il avait pris la place.
