J'ai honte de montrer ce tatouage, même s'il est de loin mon préféré. Un chien et un cerf. Voilà ce qui trône sur mon épaule depuis des années maintenant.

Tout remonte au 1er Juin 1976. On fêtait la victoire de Gryffondor à la coupe de Quidditch. Les Lions avaient gagné 320 à 60 face à Poufsouffle. Non seulement une coupe en argent massif au nom de la Maison allait rejoindre les autres trophées dans la vitrine du 3e étage, mais c'était aussi, sans vantardise aucune, le plus beau match de la saison...

Comment ne pas se souvenir cette soirée? La fête était telle que tous les habitants des tableaux se réunissaient en masse dans les petits cadres de la salle commune pour voir comment les Gryffondors fêtaient leur victoire.

Titubant, un flacon d'encre dans une main, une bouteille de Whisky-pur-Feu dans l'autre, je vois encore James s'approcher du fauteuil sur lequel j'étais assis, tout sourire. Un sourire qui en disait long...

Des années plus tard, je me demande encore ce qui m'avait pris d'accepter qu'il se serve de mon bras comme d'un parchemin. Cornedrue était peut-être mon meilleur ami, mais il n'était décidément pas le meilleur dessinateur que je connaissais. Oh non. Mais bon, la fête battait son plein; l'alcool était aussi de la partie (dois-je préciser que cet alcool fut apporté en douce des Trois Balais par James et moi? Que Merlin bénisse la Carte du Maraudeur et ses passages secrets !)

Ainsi, pendant une bonne demi-heure, James s'amusa à gribouiller sur mon bras, tout en buvant et en riant tout seul. Je n'y faisais pas vraiment attention, je l'avoue. D'abord, je ne sentais rien. Ensuite, quand une demi-douzaine de filles danse devant vous, vous avez forcément l'esprit ailleurs que sur votre meilleur ami qui vous dessine sur le bras...

Merlin, je me souviens encore de ma découverte le lendemain! Après un réveil des plus difficiles, j'arrive tant bien que mal à la salle de bain pour me doucher et essayer de me remettre les idées en place. L'image de James insistant pour que je regarde ce qu'il venait de dessiner sur mon bras me vint à l'esprit. Après un bref regard sur mon bras, je constatai que je ne me trompais pas. J'avais beau me frotter le bras comme un forcené, ce stupide dessin ne partait pas. Ce n'est qu'en revenant dans le dortoir et en trouvant les gars morts de rire que je devinai que cette histoire de tatouage était bien plus grave que ce ne que je pouvais l'imaginer. En me voyant, ils essayèrent tous de garder leur sérieux. James avait à la main la même bouteille d'encre que la veille, mais cette fois à moitié vide. Il me la tendit en même temps qu'un "désolé, vieux".

Intrigué, je pris le flacon d'encre et lus l'étiquette: "Permanencre - Zonko". Merde.

Je me souviens du sale quart d'heure que passa Cornedrue ce matin-là. Mémorable. Les rares élèves de la salle commune m'entendirent hurler sur mon meilleur ami pendant un bon quart d'heure, sans m'arrêter. Quoique quand j'y pense, ça lui a un peu rendu service de se faire crier dessus: Lyly était plutôt contente qu'il "s'en prenne enfin à des abrutis comme Black" plutôt qu'à d'autres. Merci Sirius.

C'est vrai que ce chien à trois pattes et ce cerf à lunettes n'ont pas fière allure. Je ris en me remémorant leur histoire, même si celle-ci me laisse un goût amer... Le hasard fait bien les choses; ce "stupide dessin" est tout ce qu'il me reste de mon meilleur ami, et pour rien au monde je ne voudrais qu'il me quitte.