Pour commencer, je voudrais préciser que c'est ma première fiction sur ce groupe, et que je ne suis absolument pas une experte en la matière. Je m'excuse donc auprès des puristes, si jamais incohérence par rapport à leur parcours musical il y a. J'ai écris cette fiction sur ce groupe uniquement car une idée a germer dans mon esprit, à la suite d'une discussion avec Clara, à qui je dédis cette histoire. Sur ce bonne lecture, et... j'aurais besoin d'avoir quelques avis, pour savoir si elle vaux la peine d'être continuer !
Kaléidoscope
Acte de déchéance n°1
« Qu'est-ce-qui faisait de moi un membre à part entière de ce groupe ? Faisais-je réellement partie de ce groupe ? Je ne trouvais aucune réponse au déferlement incessant de questions qui irriguait mon cerveau. Je n'étais qu'une entité vide de conscience, vide de ma raison. Je n'étais plus qu'un automate à leur image, je ne savais plus anticiper des réactions... Je me retrouvais incapable de pouvoir convenablement réagir. Je n'étais qu'une machine qui se levait le matin, pour se rendormir le soir. Que faisais-je le reste du temps ? Rien. Il me semblait que j'étais déjà mort. »
« On est rien de rien, que du vide, que du vent,
sûr qu'on est rien, rien, que des morts, que des morts vivants. »
La porte du studio claqua une cinquième fois, faisant pénétrer une légère brise fraîche et revigorante dans l'habitat oppressant. Les instruments étaient posés négligemment çà et là, il y en avait bon nombre pourtant... et cet arrangement désordonné, qui aurait pu paraître intimiste, ne rendait en réalité l'ambiance de la pièce que plus insupportable qu'elle ne l'était déjà. Reita poussa d'un geste las l'une des éternelles guitares posées sur l'un des canapés puis s'assit sur ce dernier, le faisant grincer sans sommation. Il aurait aimé soupirer. Soupirer pour exprimer ce qu'il ressentait. Soupirer pour signifier aux autres qu'il était bien là, qu'il venait bien de pénétrer dans la pièce, et qu'il n'aurait pas été trop demander de recevoir une salutation de chacune des personnes déjà présentes ici. Néanmoins, il savait pertinemment qu'il était inutile de trop en espérer de ses collègues, et se contenta donc de croiser habilement ses jambes en tailleurs, prenant une pose confortable. Ses orbes brillants d'affliction tombèrent sur le calendrier affiché à quelques mètres de là, qui tenait par la force du saint esprit... La punaise le supportant menaçait de tomber à chaque instant, un peu comme le cœur de Reita menaçait de s'arrêter à chaque geste, à chaque parole des quatre autres jeunes hommes présent dans la salle. Mais personne ne bougeait, chacun restait dans son coin favoris, à s'occuper de ses petites affaires, à travailler sans qu'il n'y ait aucune interaction entre aucun d'entre eux. Personne n'avait même daigné le réprimander pour son retard... Est-ce-que son absence aurait de toute manière changée quoi que ce soit ? Bien sûr que non.
Cette simple pensée ramena Reita à la réalité.
Quelle réalité ? Celle qui était éternelle... Celle qui faisait qu'il était assis là à cet instant même, qu'il était obligé de côtoyer ces quatre autres personnes tous les jours. Cette dure et triste réalité qui lui faisait détester un peu plus, à chaque seconde, le choix qu'il avait fait, dix ans à peine plus tôt. Pourquoi avait-il donc accepté de rentrer dans ce groupe de musique ? Pourquoi avait-il voulut faire de sa passion son métier ? Bien des erreurs étaient commise dans une vie, mais celles de Reita étaient irréversibles. Inoubliables. Ces erreurs lui étaient rappelées chaque jour de sa morose existence, et il ne pouvait que regretter, jour après jour. Si, au début, les fans l'avaient contenté, jouer de la basse l'avait contenté, il n'en était plus rien aujourd'hui. Il en venait même à se demander comment il avait pu faire pour tenir aussi longtemps ? Quoi que... Durant quelques années, l'ambiance n'avait pas été si mauvaise que cela. En vérité, ces quatre jeunes avaient même pu être compté comme ses amis. Il les avait appréciés, adorés, même... Longtemps ? Il ne se souvenait plus à quel moment exact leurs relations s'étaient dégradées, mais il avait l'impression que leur bons souvenirs s'étaient envolés avec leur bonne humeur, leur bonne entente. Il peinait même à se rappeler des moments joyeux qu'ils avaient bien pu passer ensemble... Ne restait que quelques réminiscences absurdes. Des réminiscences sans aucune logique, qui ne formaient pas même une histoire. Sa vie ne se résumait donc qu'à gratter interminablement sur du papier des notes de musique, qu'à les jouer, qu'à redescendre de scène puis rentrer chez lui, dans son appartement vide...
« -Je me casse ! »
La voix d'Aoi claqua dans les airs en un son sec que le bassiste insupportait. Il ferma d'ailleurs instantanément ses paupières, comme pour chercher à fuir cette désagréable résonance, mais les rouvrit aussi tôt, mue pour une vigueur qu'il ne se connaissait plus depuis bien longtemps.
« -Et la chanson ? Nous devions faire ensemble les arrangements aujourd'hui. Je te rappelle que nous l'enregistrons dans deux semaines à peine ! »
Reita se tourna vers le leader pour tenter de trouver appui, mais cela faisait bien longtemps que Kai ne se souciait plus du travail qu'ils avaient en commun. Le ton méprisant de son autre collègue investi alors de nouveau la pièce :
« -Je fais part à Monsieur 'je-suis-toujours-en-retard', que nous avons décidé, bien avant que tu ne sois là, que nous nous chargerons des arrangements chacun de notre côté, et que nous mettrions ensuite le tout en commun.
-Sans nous ajuster ?
-Sans nous ajuster. »
C'était Kai qui venait enfin de se manifester, lançant un regard noir au bassiste. Il détestait par-dessus tout que quelqu'un conteste ses décisions, surtout si cela venait de Reita. Ce dernier arrivait toujours en retard, s'il voulait pouvoir avoir son mot à dire, il n'avait qu'à...
« -De toute manière ça ne devrait pas trop te gêner, vu ton implication dans le groupe. »
...être à l'heure, comme tout le monde. Mais cette dernière réplique eut le don de faire sortir le bassiste de ses gonds. S'il y avait bien une chose qu'on ne pouvait pas lui reprocher, s'était la manière acharnée avec laquelle il s'impliquait dans la vie du groupe. Il était toujours le premier à accepter les programmes chargés que leur fournissait leur manager et se tuait toujours à la tâche. Il était toujours le premier à proposer des chansons à revoir, lors des répétitions, les autres trouvant cela bien trop superficiel, et non nécessaire. Les quatre autres The Gazette pensaient être assez parfait pour ne pas avoir besoin de répéter, encore moins juste avant un concert. Que Kai ose alors énoncer de tel propos ne pouvait que le mettre hors de lui. Néanmoins, une fois qu'il fut levé, les poings serrés et tous les visages de ses collègues tournés vers lui, il ne sût quoi dire. Comment se défendre, face à ces visages neutres, à ces visages insignifiants ? Tous les yeux tournés vers lui n'inspiraient qu'à l'ignorance. Reita se savait incapable de lutter. Les autres membres de son groupe se fichaient bien de sa réponse, de toute manière... Ils avaient tous un avis bien arrêté sur ce qu'ils pensaient du bassiste, et peu importaient les arguments de défenses qu'il pourrait leur servir, aucun ne l'écouterait véritablement.
« -Très bien. » finit alors par dire Aoi. « Je m'en vais donc. »
Puis, quelques secondes plus tard, la porte claqua à nouveau, et tous les regards retournèrent à leurs occupations... Tous sauf un, que Reita ne remarqua pas. Il se croyait oublié de tous. Il se croyait seul à survivre à ce calvaire. L'était-il réellement ? Il n'en savait rien. Il était persuadé que oui. Alors, sans plus attendre, il se saisit de la housse qu'il avait posé un peu plus tôt non loin du canapé, et s'en alla à son tour. Que pouvait-il faire, de toute manière ? A quoi bon rester ici ? Il pouvait tout aussi bien travailler chez lui... Cette chanson... dont il ne connaissait même pas totalement les paroles, puisque le chanteur avait refusé de les révéler maintenant... dont il ignorait les lignes de guitare et de batterie de ses autres collègues. Comment greffer sa propre partition de basse dans un entrelacs d'autres notes qu'il ignorait totalement ? Il était impossible de créer à partir de rien, lorsqu'il existait déjà une base à une chanson. Il ne pouvait malheureusement pas se glisser dans l'esprit de ses collègues pour y trouver un air, non... Il se souvenait juste vaguement de quelques intonations que Ruki avait bien voulu chanter, quelques jours plus tôt. Mais comment continuer d'écrire sa propre musique, si elle n'avait plus aucun rapport avec celle des autres ? Ils n'étaient plus un groupe, il le savait... et cet événement le prouvait totalement. Leur musique courait à sa perte, leur groupe n'avait plus aucun intérêt... Même si cette musique plairait sans aucun doute à leurs fans, dans le cœur de Reita, resteraient à jamais gravées les conditions dans lesquelles elle s'était écrite. Comment pourrait-il donc la jouer, sur scène ? Comment pourrait-il tout donner, tout en sachant que cette chanson ne représentait absolument rien pour lui ? Absolument rien si ce n'était ce point de rupture inévitable, cette envie accrue de jour en jour, d'heure en heure, de minute en minute, de seconde en seconde, de partir... Quitter ce groupe, pour toujours.
Mais les quitter, l'oserait-il ?
Malgré tout ce qu'il pourrait penser, The Gazette représentait dix années de sa vie, dix années qu'il ne pouvait décemment pas effacer d'un revers de manche. Cependant, pouvait-il vraiment continuer de supporter cette ambiance si lourde, si mauvaise ? Pourrait-il continuer de haïr de chacun de ses pores, ces quatre personnes ? Tiendrait-il le coup, pour dix autres années encore... Que dis-je... Pour l'éternité ! Parce que cela représentait l'éternité que de rester à leurs côtés. Le temps passait si lentement, si insidieusement, qu'il avait l'impression que cent ans déjà s'étaient écoulés depuis la création de leur groupe. Et il se sentait si mal, si torturé. Il suait la souffrance par la moindre de ses cellules. Cette situation commençait sérieusement à le tuer à petit feu... Non, il était déjà mort. De l'intérieur. Il n'était plus qu'une coquille vide, dépourvue d'avis, dépourvue de jugement, dépourvue d'envie. Il ne savait plus quoi penser, plus quel geste agencer, plus quelle parole prononcer. Il n'était pas devenu l'ombre de lui-même, non... Il était bien moins qu'une ombre. Une ombre appartenait à un être vivant, et lui, ne l'était plus. Il était un déchet caché bien au fond d'une poubelle, ne se manifestant pas, n'observant que de loin la décadence de sa propre vie, la déchéance de son âme. Il se sentait pieds et poings liés, comme s'il lui était impossible de se mouvoir, comme s'il ne pouvait que regarder sans rien faire, le spectacle de sa vie défiler devant ses propres yeux. Il sentait parfaitement que son cœur s'effritait, que ses sentiments partaient en vrille, que son existence n'avait plus aucun sens. Mais il ne réagissait pas. Il restait stoïque a laisser le temps faire son œuvre. Ses actions n'étaient dictées que machinalement... Il marchait parce qu'il devait marcher. Il mangeait parce qu'il devait manger. Il jouait parce qu'on lui demandait de jouer. Tout ceci n'était plus que des gestes qu'il effectuait mécaniquement, comme le robot qu'il était. Il n'était qu'un mouton dans une bergerie, entouré de chiens de troupeaux là pour le guider. Sans eux il n'était rien.
The Gazette, quoi qu'il en dise, demeurait son but.
Alors il rentra chez lui à pas lent, et s'installa à son bureau. Il sortit du papier à musique, et griffonna durant des heures entières des notes, les unes à la suite des autres. Des tonnes de feuilles raturées jonchaient le sol, et ce ne fut que lorsque le résultat lui plût, qu'il cessa son affaire. S'étirant longuement, bougeant ses membres ankylosés, il plia la partition pour la glisser dans une enveloppe, et sur le devant de cette dernière, il écrivit :
« Aux membres de The Gazette. »
Reita se leva ensuite, et alla déposer le bout de papier sur la table de son salon. Après cela, il s'éclipsa dans sa salle de bain, prenant une douche salvatrice et se préparant avec lenteur. Tous ses gestes étaient lents. Tous. Il n'arrivait plus à être animé par aucune passion. C'était fini, terminé. Il ne savait pas véritablement ce qui se passerait après cela... Ce que ses décisions pourraient avoir comme répercutions sur l'avenir... Il ne savait même pas vers quel contrées sa fuite l'emmènerait.
Une fois prêt, le bassiste jeta dans un vieux sac à dos le strict nécessaire vital, ainsi que quelques billets de monnaies, et claqua la porte de son appartement derrière lui, sans même la fermer. A quoi bon ? Cet antre n'appartenait désormais plus à personne... Tout du moins, ce qui restait à l'intérieur n'était pas ce dont il avait besoin pour vivre, non...
Ce dont il avait besoin pour vivre, c'était d'un peu d'amour, de reconnaissance.
Alors qu'il montait dans le premier train arrivé à quai, son téléphone sonna plusieurs fois. Il jeta un vague regard à l'écran de ce dernier, constatant que Ruki essayait de le joindre depuis plus d'une heure déjà. Sachant pertinemment que cet appel n'avait qu'un unique but futile, il enfouit l'appareil bien au fond de sa poche, et ignora avec une facilité déconcertante les vibrations naissant contre sa cuisse.
Le train démarra.
« De peur que tout s'écroule ,
Je n'ai rien dit ,
Je n'ai rien fait »
« Je ne savais pas ce qui avait bien pu arriver... Je ne comprenais rien à tout cela, mais j'avais l'infime espoir qu'il décroche ce téléphone... Je voulais entendre sa voix me dire qu'il y avait encore de l'espoir, encore ne serait-ce qu'un mince filet d'espoir... Mais j'ignorais à ce moment-là, que lui-même n'en avait plus aucun. »
Les paroles centrées appartiennent respectivement à Saez et Christophe Miossec.
Je tiens aussi à préciser que les récit en italique à la première personne ne viennent pas de la même personne à la fin et au début du chapitre, mais bien de deux personnages différents !
A suivre ( si et seulement si vous le désirez ! )
