Prologue

Le jeune Turk baissa les yeux sur le petit être allongé dans son berceau. Celui-ci lui rendit son regard et tendit ses bras en ouvrant et fermant ses poings comme une invitation lancée à l'homme se tenant au-dessus de lui. Etonné et peu sûr de lui en ce qui concernait les bébés, Vincent pris délicatement l'enfant entre ses mains. La lumière artificielle du laboratoire se reflétait dans les cheveux argentés du bébé et ses yeux à la lueur surnaturelle semblaient si innocents. Le jeune homme esquissa un sourire en se disant que l'enfant serait certainement aussi beau que sa mère quand il grandirait. Sourire qui disparut de son visage aussi vite qu'il était venue, à la seule pensée de la mère du bébé.

« Tu aurais bien aimé voir ta maman, pas vrai? Je suis certain que tu l'aurais aimé autant que moi, si ce n'est plus. »

L'enfant babilla en entendant les paroles de Vincent, puis bâilla, ses paupières tombant lourdement. L'homme le déposa de ce fait dans son berceau et le regarda s'endormir paisiblement, n'ayant aucunement conscience des tragédies qui l'entouraient.

« Courage Sephiroth, le chemin de la vie est loin d'être tranquille, il sera semé d'embûches mais ne doute jamais de toi et de ce que tu es : l'enfant de la plus belle femme qu'il m'ait été donné de rencontrer, l'enfant de Lucrécia. »


Nibelheim – Manoir Shinra

Il ouvrit ses paupières dans un sursaut. Il ne découvrit que ténèbres. Sa respiration était haletante. Il tenta de reprendre son calme afin d'économiser son oxygène; en effet, l'air était une denrée rare dans ce cercueil.

Il soupira. Encore un souvenir qui remontait à la surface. Néanmoins, lui qui était poursuivi par ses cauchemars jour et nuit, il venait de se réveiller pour la première fois sur une note plus joyeuse. Une lumière dans le voile sombre et épais qui l'entourait.

Il aurait dû stopper tout cela.

Son devoir était de veiller au bon fonctionnement des recherches.

Et tout avait déraillé.

Parce qu'il n'avait pas eu le courage de s'opposer à un petit scientifique.

Et tous avaient subi les conséquences de ses actes.

Il était responsable de la mort de Lucrécia. Dire qu'elle n'a jamais eu l'occasion de rencontrer son propre fils. Et Sephiroth ? Pauvre enfant. Que devenait-il entre les mains de la Shinra ? Entre les mains de Hojo ? Son père… Il ne le considérerait certainement jamais comme son fils. Pour lui ce ne serait qu'un sujet de recherche de plus. De toute manière, Vincent ne pensait pas que le scientifique soit capable de sentiments.

« Oh Lucrécia, pardonne-moi ! pensa douloureusement Vincent. Je n'ai même pas su protéger ton fils ! »

Mais qu'avait-il fait en fin de compte pour aider le petit Sephiroth ? Rien, à part s'enfermer dans un cercueil, afin « d'expier » ses péchés durant l'éternité qui s'offrait à lui. Était-ce une vie ? Se couper ainsi du monde était-ce réellement la meilleure manière d'expier se fautes ? Après tout, n'était-ce pas justement parce qu'il n'avait rien fait que tout s'était envenimer ?

Combien de temps avait passé depuis ces événements ? Deux ans, six, dix ? Dehors, l'enfant de Lucrécia grandissait sans la présence de sa mère, mais sous le joug d'un père inatteignable, n'ayant que de la curiosité malsaine à lui offrir.

Une bouffée de tristesse envahie Vincent en songeant à ce que Hojo pouvait bien faire subir comme ignominies à son fils.

Il ne pouvait pas rester là à se morfondre ! Il en avait assez de n'être que le spectateur des horreurs qui se produisaient autour de lui. Il se devait d'intervenir au moins une fois dans sa vie, de changer le cours de cette histoire macabre. C'était son devoir de protéger Sephiroth, en mémoire de Lucrécia. Ce serait sa dernière croisade, celle qui lui permettrait peut-être enfin de se pardonner.

Quant à Hojo, s'il se dresse sur son chemin, il n'hésiterait pas cette fois.

Hojo…

Une colère sourde l'envahit et enfla jusqu'à le faire enrager. Son corps réagit et l'homme laissa place à la bête.

Le bois du cercueil éclata. La bête s'ébroua, rejetant les échardes qui s'étaient enfoncées sous sa peau, et poussa un hurlement si profond et guttural que le manoir vibra de toute part. Il prit position sur se puissantes pattes arrières et s'élança contre la porte le retenant prisonnier dans ce caveau lugubre. Celle-ci s'ébranla et se déforma sous le choc, mais ne céda pas. Seulement, la bête ne pouvait contenir plus longtemps sa haine et rassemblant ses forces, elle tenta à nouveau de faire céder la porte. Cette dernière fut arrachée de ses gonds avec une telle force qu'une partie du mur la retenant tomba avec elle. Il traversa le couloir creusé à même la roche et grimpa les escaliers avant de déboucher sur une chambre. Il descendit les escaliers jusqu'au hall et sortit enfin du manoir.

Il faisait nuit les étoiles brillaient intensément et la lune était pleine. La bête leva son museau vers le ciel. Quel spectacle magnifique ! Subjugué par la beauté des joyaux de l'espace, la bête s'attendrit et la colère qui l'animait disparu. Alors l'homme reprit le contrôle et il admira la scène. Il lui semblait qu'il était resté cent ans dans ce cercueil voir enfin autre chose que la noirceur de son âme le ravissait. Une petite brise se leva il respira à pleins poumons l'air frais, ce qu'il n'avait pas pu faire depuis un bon bout de temps. Etrangement, il se sentait bien.

Devant lui s'étendait la ville de Nibelheim, encore illuminée par les quelques lampadaires extérieurs, mais toutes les maisons semblaient endormies… comme s'il ne s'était jamais rien passé. Rien ne venait troubler le calme de cette nuit étoilée.

Ne souhaitant pas faire parler de lui, Vincent se glissa parmi les ombres et traversa la ville dans le plus grand silence, pour rejoindre les plaines s'étendant au sud de Nibelheim.

Il ne se retourna pas, cherchant à mettre le plus vite possible, une certaine distance entre lui et cette ville qui fut le théâtre de cette tragédie.

« N'aie pas peur Sephiroth, je serai bientôt là »