Chapitre 121 : The real story - partie 3
Cérémonie de remise des clés de la ville aux successeurs de la famille royale. Cérémonie en grande pompe pour oublier la condition de l'humanité : des proies faciles, livrées en pâture aux mâchoires de prédateurs géants.
Si Livaï avait pu différer ce genre de manifestation, prétextant une bonne grippe ou une blessure qui le tenait au lit, il l'aurait fait sans hésiter mais les microbes et les titans semblaient en avoir décidé autrement. Il se tenait là, en tenue d'apparat, jurant dans les rangs, tout en s'avançant au pas cadencé, s'arrêtant dans un quadrille parfait, effectuant le salut devant les membres de la noblesse, affichant ce profil impénétrable et fier.
Je profite d'une manœuvre pour me glisser dans les rangs - en bonne retardataire que je suis !...
"Fais chier, merde !..." peste toujours le Caporal chef, en changeant de pas.
"Eh bien, eh bien... t'as l'air sur les nerfs aujourd'hui."
Ma voix le fait presque sourire. "Et toi, t'es à la bourre, comme d'hab."
"Loki !..." se jetant dans les bras du dieu de la Malice.
"Ma précieuse Lune..."
Lune sait, Lune a appris à connaître Loki ; qu'il est le fils illégitime de la famille royale asgardienne, qu'il est le fils des amours interdits de Laufey.
"Un jour, je te serrerai si fort que tous les morceaux brisés en toi se recolleront d'eux-mêmes."
"Lune..." souriant, embrassant le haut de sa tête.
Lune sait que Loki n'est pas foncièrement mauvais, simplement mal dans sa peau, rejeté.
Ces failles, dans l'armure de l'Asgardien d'adoption, touchent énormément Lune. Elle le comprend, elle l'aime. D'un amour différent de celui qu'elle éprouve pour Alone.
Lune n'a jamais fait aucun cas de la véritable nature de Loki. Elle a toujours trouvé le magicien plus intéressant que la brute qui lui sert de frère !...
Livaï pose négligemment sa veste aux couleurs du bataillon sur le dossier de la chaise et s'y affale, une jambe ramenée sur l'autre, attrapant une bouteille dont il s'abreuve directement au goulot. Il s'agit d'une bière extrêmement maltée. Il s'essuie d'un revers de main.
"Je déteste ce genre de cérémonie débile !..."
Je pouffe devant son irrévérence. "J'ai pu le noter."
"C'est complètement débile de jouer aux beaux petits soldats alors que dehors on se fait bouffer, merde !" prenant une nouvelle gorgée.
"Parlant de ça, nous pourrions nous éclipser avant le début du gueuleton..." regard appuyé.
"Hmm, qu'est-ce que tu proposes, mon adorable cousine ?"
"De nous tirer et d'aller zoner du côté de la ville. Voire même tenter une sortie à l'extérieur."
"Tu me courtises ouvertement, là."
Les doigts de Loki et de Lune se croisent. Elle est allongée sur le banc d'un parc, tête reposant sur les cuisses du dieu de la Malice tandis qu'il caresse ses cheveux châtain de sa main libre.
"Sif est toujours aussi éplorée ?"
"Bien sûr. Et elle demeure convaincue que je suis responsable de la situation endurée par mon frère."
"Pfff."
Loki sourit.
"J'espère que le séjour forcé de Thor sur Terre lui enseignera quelques leçons de vie. Mais je n'y mettrai pas ma main au feu pour autant."
"En effet. Chassez le naturel, comme le disent les midgardiens..."
"Hors de question de vous laisser passer sans autorisation." affirme l'un des soldats stationnés à la porte.
Livaï inspire et saisit, depuis sa position assise en selle, le col de l'homme. "Je suis ton supérieur direct, pauvre crétin ! Alors tu m'ouvres cette porte illico."
"Il nous faut... une autorisation expresse... du Major Smith..." bredouille l'homme, pris de frayeur devant le terrible mètre 60 à la mâchoire crispée et aux yeux rétrécis de rage.
"Tu tiens pas à la vie ou quoi ?!" lui hurle Livaï.
Le spectacle est de toute beauté et dope mon envie de lui.
Il fait décrire des cercles à son cheval, nerveux, tandis qu'il tient littéralement l'homme d'un bras, semelles de ce dernier décollées du sol pavé.
"OUVRE MOI CETTE PORTE !" le lâchant brusquement, avec une telle force qu'il en percute durement le mur de moellons. "VOUS AUTRES, NE RESTEZ PAS LA COMME DES ABRUTIS !"
Deux soldats se précipitent sur la manivelle d'ouverture de la porte et l'actionnent dans une cadence soutenue.
Livaï fait piaffer son cheval. "MAGNEZ-VOUS !"
J'observe le manège, coude appuyé sur le pommeau de la selle, main soutenant le menton, bride tenue dans l'autre.
En passant au galop, il bouscule d'un coup de semelle, étrier déchaussé, le soldat encore à la manœuvre.
Je le suis. "Toujours aussi aimable, Caporal-chef Ackermann !..." rieuse.
"Je dois rentrer, Loki..."
"Le soleil se couche à peine."
Le visage de Loki se crispe tout à coup et pour cause, c'est le poing d'Alone en personne qui vient de lui saisir les cheveux à pleine poignée.
"Elle est attendue."
"Alone !..." se redressant vivement.
Loki fait signe à Lune de se tenir tranquille et, en l'espace d'un instant, il se change en serpent menaçant qui vient s'enrouler autour du bras d'Alone et finit par le mordre au sang.
Alone esquisse un sourire, finissant par se débarrasser de Loki, le jetant au loin.
Le dieu de la Malice reprend sa forme initiale.
"Je dois avouer que tu as toujours été très fort pour les traîtrises de toute sorte, Loki."
"Ce compliment me va droit au cœur." faisant une petite courbette ironique.
"Alone, Loki !... Par pitié, ne vous battez pas !..." affolée.
"Nous battre ? C'est une plaisanterie, ma chère Lune ? Il n'y a pas matière." assène Alone. "Qu'on m'amène le brave Thor et nous pourrons l'évoquer."
Loki bisque à la remarque volontairement choisie. "Je ne suis plus le dieu que tu as connu jadis, Hadès."
"En effet. On dirait bien que ton niveau a encore baissé." impitoyable.
"ASSEZ !" s'énerve Lune. "Puisque c'est ainsi, je ne vais pas demeurer là à vous regarder vous affronter sans réagir !..." disparaissant soudain.
Nous venons de choisir un grand chêne isolé, au sommet d'une colline qui permet une excellente vue d'ensemble des environs.
"T'es quand même rudement gonflé d'être sorti avec ton uniforme d'apparat, Ackermann !..." assise dans l'herbe amusée.
"J'attends la première flaque de boue pour m'y rouler." scrutant les environs avant de s'installer à mes côtés, posant l'arrière de sa tête contre le tronc, paupières closes, laissant le vent balayer sa chevelure sombre. "On respire vachement mieux ici que dans la cité." arrachant des brin d'herbe pour les rouler dans sa paume, observant les effets et l'odeur qui s'en dégage.
"A ton avis, pourquoi on n'arrête pas de se sauter dessus ?"
Il réfléchit un instant à la question.
"Oh, parce que nous sommes en voie d'extinction, vraisemblablement. A dire vrai, je m'en fiche totalement. Je sais juste que... ouais, c'est avec toi que je veux être." cherchant ma main pour s'en saisir presque avec délicatesse.
Nous regardons défiler les nuages.
"Celui-ci a la forme d'un os." dis-je, pointant le nuage du doigt.
Livaï vient poser sa tête en travers de mes cuisses. Je dessine du bout des doigts les principaux traits de son visage torturé qui, maintenant, respire la sérénité. Puis mes doigts se perdent dans les mèches sombres.
"Tu te rappelles la pâté que tu m'as mise lors de notre premier duel ?"
"Ouais. J'avoue que ça a été le panard. Surtout lorsque je me suis penché sur toi. Là, j'ai compris ma douleur."
"Oh, ce n'est pas si douloureux que ça, non ?"
"Parle pour toi !... J'en crève." froncé de colère.
Je glisse mes doigts entre les siens. "Nous avons toujours été proches, Livaï. Gamins déjà, on se fightait sans arrêt. Nous étions toujours fourrés ensemble. On se battait avec des bâtons, tu te rappelles ?"
"Tu traînais pas mal avec notre cousin Bernard. J'ai jamais compris quel attrait tu lui trouvais."
"C'est un bagarreur aussi."
"Tss." avec un mépris jaloux.
"Mais j'avoue qu'au rayon des têtes de bourriques, tu caracoles en tête de liste !..." me penchant pour venir poser mes lèvres sur les siennes. "T'es même ma tête de mule préférée."
Sa main libre vient glisser dans ma nuque, visant à appuyer le baiser. "Mieux."
L'instant d'après, nous nous dévorons à pleines bouches, fous l'un de l'autre, envoyant valdinguer les convenances par le truchement d'un seul et même baiser.
Nos doigts se tendent et se détendent, dans un rythme doux, allant de paire avec les sensations qui montent.
Sa façon d'embrasser... me rend dingue !... Cette manière de me savourer en penchant la tête d'un côté puis de l'autre...
Je m'en sépare, papillons dans le ventre autant que sur les lèvres. "Vache... où est-ce que t'as appris à être si bon ?..."
Il sourit, flatté. "C'est de famille, je crois, non ?" m'invitant à poursuivre.
Je sens le baiser faiblir. Livaï a les sens ailleurs.
Je me concentre pour détecter ce qui passe dans l'air. Mon ouïe capte de l'agitation.
Livaï me repousse lentement pour se lever, fixant son matériel aux attaches de son pantalon clair, vérifiant ses lames à l'œil.
"Il s'agit d'une meute entière."
"Houmpf ! L'occasion rêvée de souiller ton uniforme d'apparat." lui donnant un léger coup de coude.
"J'aurai préféré m'y employer en me roulant dans l'herbe avec toi. Les dégâts auraient été moindres."
"Qu'est-ce que t'en sais ?" l'attirant par le devant de sa cape pour l'embrasser à pleine bouche.
Sitôt relâché, il poursuit ses vérifications minutieuses, plaçant les lames dans les fourreaux en fonction de leur état.
"Ils approchent."
"Je les entends, oui."
"Je me charge du second. Le premier se déplace d'ailleurs à quatre pattes."
"Hmm... oui, tu as raison." faisant de même pour mon équipement.
Les pas sont effectivement proches.
Livaï enclenche ses lames dans les poignées prévues à cet effet et s'élance, commandant l'apport en gaz propulsant au moyen des manettes attachées aux manches.
Livaï bondit, virevoltant devant le premier titan, se laissant glisser sur son dos courbé pour sauter jusqu'au visage du suivant, lui plantant les deux lames dans les yeux !...
Pendant que Livaï s'occupe d'un troisième titan, j'achève le premier.
Nos coups de lames sont d'une efficacité totale.
Le quatrième se fait harponner par nous deux et nous finissons sur ses épaules. Au moment où il souhaite nous happer de ses mains immenses, nous basculons, nous croisant, tailladant sa nuque de deux coups vifs.
Le cinquième est plus compliqué puisqu'il s'agit d'un déviant. Il fonce d'ailleurs droit sur nous, trébuchant bêtement sur le corps du quatrième. Nous profitons de sa chute pour l'achever.
Le sixième vient de s'arrêter.
"Dis donc, connard, j'ai une question à te poser : c'est si bon que ça, la chair humaine ?" s'avançant en ligne droite comme si c'était lui le prédateur. "Réponds, ordure !" s'élançant pour le contourner, s'accrochant dans son dos à l'aide des lames pour lui tailler la nuque.
Voici les cadavres fumants au sol. Les premiers ne sont déjà plus qu'à l'état de squelettes.
Comme prévu, les couleurs claires de l'uniforme d'apparat de Livaï sont tachées de boue.
"Regardez-moi cette œuvre !..." rieuse, dépliant la cape maculée.
"Tsss." glissant deux doigts son mon menton, tenant toujours sa lame de façon particulière, venant m'embrasser avec force. "Avoue que tu me trouves encore plus baisable, couvert de boue, adorable petite dépravée." laissant sa langue courir depuis le menton jusqu'à ma bouche.
"Lune ?... Lune, tu es là ?..."
Lune renifla. Il n'y avait décidément que Loki pour la retrouver dans cet endroit qui, jadis, a abrité leurs amours ; une petite alcôve située dans le domaine réservé aux rêves.
La première fois que Loki s'y était invité, fut sous la forme d'un étalon. Lune en avait été subjuguée !... Il s'approcha, pas après pas, venant frotter son encolure contre les flancs de Lune, glissant la tête sous le bras de la jeune femme, hennissant doucement.
Une fois accoutumée à sa présence, Loki se changea en centaure, enveloppant de ses bras la jeune femme, la pressant contre son torse nu. Au moment des faits, Loki était encore le second prince d'Asgard, soumis aux caprices de son frère et au mépris de son père, en pleine crise d'identité. Il maîtrisait déjà la magie et savait en faire un usage avantageux.
Le jeune dieu posa une main sur l'épaule frémissant de Lune. "Lune, je suis désolé. Je tiens tellement à toi..."
Lune posa sa main sur celle de Loki, caressante.
"Tu es la seule qui m'ait jamais compris à l'époque... la seule qui m'ait donné foi, qui m'ait offert la force d'accepter mon destin, qui m'ait aidé à y voir plus clair."
"Loki..." touchée.
"Livaï, j'ai envie d'emmerder le fils Jäger." sur le chemin du retour.
Livaï éclate de rire. "Je lui ai déjà arraché une dent et l'ai roué de coups mais... si tu veux remettre ça, je vais chercher la meilleure occasion pour nous déchaîner contre lui." avec un clin d'œil.
"Oh, moi je pensais simplement lui mettre la main aux fesses !..."
Livaï pouffe. "Va falloir que je le pourrisse définitivement !..."
"Jäger."
"Aye, Caporal Chef !..." effectuant le salut de rigueur.
"Montre à cet imbécile de Günther comment on procède." se plaçant à côté d'Eren, main échouant sur la fesse gauche.
Je me positionne du côté droit, main échouant, en douce, sur l'autre fesse. "En piste, Eren !..."
Eren ne sait plus où se mettre, rosissant des joues, regardant la pointe de ses bottes.
Basculant la tête en avant, Livaï et moi nous nous sourions, fiers de notre délit incognito.
"Et si tu échoues, Jäger, je me chargerai moi-même de te botter le cul."
Eren déglutit. Il est très amusant de voir l'hôte du terrible Titan Assaillant suer de peur face à deux "moustiques" !...
"Tu veux un scoop, Eren ?..." demandais-je à Eren.
Eren bascule son regard émeraude sur moi.
"Tu sais pourquoi notre cité est ceinturée par cette série de trois murs ?..."
"Pour... nous préserver des... titans ?..."
"Nope. Pour protéger les titans de la fureur du Caporal-chef."
"Tss ! N'importe quoi !..." ricane Livaï, sans me regarder.
Lune pousse, à contrecœur, la porte de la boutique funéraire, faisant tinter le carillon électronique. Elle fait la moue devant l'odeur de lilas artificiel qui lui prend la gorge.
Crevan arrive, mains sur le devant. "Bonjour, que pui... oh."
"Oui 'oh'. Où est Lévichoute ?" (*)
"Je ne connais personne qui répond à ce nom."
"Me prends pas pour une quiche, Crevan."
"Elle est retournée auprès de ce soldat, il me semble, vous savez, celui qui..."
"Ça ira, merci." le coupe Lune.
"Oh, elle semble beaucoup y tenir !..."
"Ta gueule !" ressortant de la boutique. "M'énerve, celui-là !"
"Pouvons-nous parler, Alone ?"
"Bien sûr, ma chère Lune."
Lune s'installe sur le canapé.
"Six mois lui, six mois toi ?"
"Par... don ?..." manquant de lâcher son pinceau.
"Six mois lui, six mois toi ?..." d'une voix plus basse.
Alone recule d'un pas, ébahi. "Lune ?..."
"Temporairement... enfin, je n'en sais rien !... Et Lévichoute qui n'est pas là pour me conseiller..."
"Léviathan n'est pas une référence en matière de fidélité." sec.
"Je ne vois pas d'autres solutions amiables..."
"Eh bien je lui ferai la guerre." buté.
Il rit... après l'amour. Il rit de bonheur, shooté aux endorphines.
Je me hisse sur son torse pour profiter de ses traits détendus.
J'aime le fait que son passé trouble n'ait en rien entamé son énergie sexuelle.
Je profite des dernières vagues qui agitent son torse, l'embrassant par touches légères ou appuyées.
Il en sourit, main venant caresser ce qu'il faut de moi.
"Wow... mais wow quoi !..."
"Tu me flattes." dis-je, entre deux baisers.
Il remonte les mains, prenant mes épaules par l'arrière.
"Tu pourrais te taper n'importe quelle fille ici..."
"Peuh. T'es bête." fermant ma bouche par un baiser chaud.
"Je suis heureuse que la guerre ne t'ait pas trop amoché de ce côté-ci."
"En fait, la guerre m'a rétabli. C'est plutôt mon oncle qui..."
Les mots restent étranglés dans sa gorge.
"T'es prête ?..."
"Tu demandes ?" avec un petit sourire en coin, ajustant sa lame, la tenant à sa manière.
Nous nous élançons, efficaces sur tout le parcours.
"Quelle équipe hors du commun..." constate Erwin en nous observant durant l'exercice.
"La fine fleur, en effet." concède un autre soldat.
"Ils n'ont pas besoin de se parler pour se comprendre ; un simple regard suffit."
Nous terminons l'exercice pour nous poser devant Erwin.
"Les Titans n'ont qu'à bien se tenir !..." annonce-t-il, impressionné par notre synergie.
(*) "Dans ton *biiiiiiiiiiiiip !*" XD
