Auteur: Kuro-Hagi – 04/07/2018

Genre: Drama – Hurt/Comfort - Yaoi

Disclaimer: Tout ce monde et ces personnages appartiennent à Tadatoshi Fujimaki.

Note: Me revoilà avec Kagami et Aomine auxquels j'ai osé faire des infidélités en juin pour Kise. Oh my god… Plaignez vous auprès de Peri c'est de sa faute tout ça !

Bref, j'en reviens enfin à mes chouchous ! Ce n'est pas un OS… Il y aura 3 ou 4 chapitres je pense. Je m'excuse d'avance pour celles qui attendaient 'Road Trip' promis je n'oublie pas ce projet… Mais celui-ci était plus avancé !

Ce n'est pas très original pour une fois comme 'style'. Pour l'instant, il n'y a même pas de lemon (je vous vois dans le fond les déçu(e)s XD bande de pervers(es)). C'est un peu triste, un peu joyeux… J'avais envie de parler de la construction de la relation entre Kagami et Aomine d'une manière différente.

J'espère que vous apprécierez !

Bonne lecture

Remerciements : Merci à PerigrinTouque pour sa relecture, ses conseils avisés, ses encouragements (surtout les encouragements) ! Et Merci pour l'illustration !


- Memories -

Taiga attendait. Il ne savait plus depuis combien de temps, mais il attendait. Les médecins avaient promis qu'il se réveillerait. Alors, il avait en quelque sorte mis sa vie en pause. Il avait posé des congés. Ce n'était pas dans ses habitudes d'abandonner son équipe comme ça. Il était toujours le premier volontaire pour faire des heures supplémentaires, remplacer des collègues absents. Il avait un sens du devoir et un professionnalisme exemplaire. Mais cette fois il avait déserté. Il n'avait aucun remords. Ils viendraient sûrement plus tard, quand il sera réveillé. Mais pour l'instant, il ne pouvait pas quitter son chevet. Il attendait. Il avait refusé de quitter l'hôpital. Il devait rester près de lui. Tout juste il avait accepté de le laisser quelques minutes avec l'un de leurs amis communs le temps de se laver rapidement. Il n'avait pratiquement rien mangé non plus. Il attendait qu'il se réveille, tenant sa main. Il avait besoin d'être près de lui. Parfois, il osait caresser son visage où les ecchymoses commençaient à s'estomper. Il lui arrivait de poser délicatement ses lèvres sur les siennes en versant quelques larmes et plus récemment il appuyait sa tête sur le ventre Daiki, glissait une main sous le drap et sous la chemise d'hôpital pour caresser son ventre. Il avait tellement envie de le toucher. Son corps, la douceur de sa peau et son odeur lui manquaient. Il avait besoin de le toucher pour se rassurer de la réalité de son existence. Il voulait entendre sa voix, son rire. Il voulait sentir son souffle sur sa nuque. Il voulait sentir sa poitrine se réchauffer par les émotions, que la voix chaude de Daiki murmurant au creux de son oreille, réveillaient.

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"Tadaima.

- Okaeri."

Taiga fit glisser les oignons fraîchement coupés dans la poêle bien chaude. Les petits morceaux de légumes se mirent aussitôt à frétiller. Il les remua légèrement les laissant dorer doucement. Le corps chaud de son petit ami se colla au sien dans son dos, deux bras enlacèrent sa taille et des lèvres se posèrent dans son cou.

"Hm… J't'ai déjà dit de pas cuisiner dans cette tenue…"

La voix chaude et douce était agréable à son oreille.

"Désolé. Mais j'ai super chaud. Il est vraiment tant qu'ils réparent cette clim.

- Je sais, je sais…"

Les lèvres descendirent sur sa nuque, puis sur le haut de son dos.

"J'me demande pourquoi tu gardes le caleçon.

- J'vais pas cuisiner nu non plus.

- Ben tu as toujours le tablier."

Taiga rit. Les mains baladeuses caressaient son ventre sous le tablier. Les oignons bien dorés, il versa le reste des légumes dans la poêle.

"Si tu es patient quand j'ai fini… j'enlève le caleçon.

- Vraiment ?!

- Ouais… Vraiment."

Il tourna la tête légèrement pour embrasser les lèvres de son homme.

"Moi aussi j'ai envie de toi… On s'est pas beaucoup vu cette semaine."

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Il se redressa quand on frappa à la porte.

"Bonjour Kagami-kun.

- Bonjour Kuroko.

- Ça fait quatre jours maintenant que tu n'es pas sorti… Tu devrais prendre un peu l'air.

- Il va se réveiller bientôt. Je reste encore un peu."

Daiki était dans le coma depuis sept jours. Taiga était en service à la caserne quand il avait été informé de l'accident de son petit ami.

Le jeune pompier et son collègue vérifiaient le matériel en plaisantant quand leur chef de section les interrompit l'air grave. A l'instant où les yeux de Taiga croisèrent ceux désolés de son supérieur, son estomac se noua. Les scenarios les plus terribles traversèrent son esprit en un éclair. La mâchoire et les poings crispés, il l'entendit en un écho lointain dans son cerveau parasité par des images atroces lui demander de le suivre. Avançant tel un automate, sans un regard sur son collègue, il lui emboîta le pas. La peur au ventre, il entra dans le bureau de son supérieur. La porte tout juste refermée, le gradé demanda.

"Aomine Daiki. C'est lui ton petit ami n'est-ce pas ?"

Taiga blêmit. Les pires scenarios avaient tous pour principal protagoniste Daiki. Ses soupçons se confirmaient. Il était arrivé quelque chose à son homme. Taiga ne répondit pas à la question et son supérieur n'insista pas. Taiga n'avait jamais nié qu'il était gay et il avait confirmé qu'il était en couple, cependant il avait toujours refusé de nommer celui qui partageait sa vie. En entendant ce nom le chef avait compris pourquoi Taiga l'avait gardé sous silence. L'inspecteur Aomine était connu de ses équipes. Alors il respectait la volonté de son soldat de rester discret sur sa vie privée.

"Tu es la personne à contacter en cas de problème. Je n'ai pas beaucoup d'informations, sinon que son état est préoccupant mais pas sans espoir. Il a été admis à l'hôpital central."

Taiga avait hoché doucement la tête pour signifier qu'il avait compris le message, n'attendant qu'un mot de plus de son chef pour quitter la caserne sur le champ.

"Vas-y. Tiens-moi au courant si je dois te mettre en congés pour les prochains jours.

- Merci Kozaki-san."

Il salua poliment son chef et partit. Il ne prit pas la peine de se changer et se rendit dans sa tenue de pompier sur le lieu indiqué par son supérieur. Ne voulant pas se retrouver là-bas à angoisser seul, il ne perdit pas de temps et sur le chemin, envoya trois messages identiques. Il se sentait incapable de téléphoner, il n'était même pas sûr d'être capable de parler tant sa gorge était nouée.

Le message envoyé était simple : 'Daiki. Hôpital central.'

Taiga n'ouvrit finalement la bouche que pour prononcer d'une voix cassée le nom de son amant à l'accueil de l'hôpital. On lui indiqua une salle d'attente en chirurgie. Daiki était en salle d'opération et l'hôtesse d'accueil n'en savait pas plus. Le pompier rejoignit l'espace indiqué, il connaissait cet hôpital par cœur, étant souvent amené à conduire des patients ici. Malgré la chaleur étouffante du lieu, il se mit à trembler. Il avait peur. Peur comme jamais il n'avait eu peur. Il remonta un genou sur son fauteuil et serra sa jambe de ses bras comme pour chercher du réconfort. Il avait la nausée. Il avait froid. Il avait perdu la notion du temps. Il n'avait aucune information sinon que Daiki avait été admis au bloc opératoire en urgence. Il n'entendit pas Tetsuya arriver. Il ne réalisa sa présence que lorsque son ami posa une veste sur ses épaules. Parti de la caserne avec le strict minimum, il ne portait qu'un t-shirt. Il ne faisait pas froid, pourtant il était frigorifié. Il était tellement amorphe et perdu, déconnecté de la réalité et du temps qui passait, que même si son ami n'avait pas été d'une discrétion surnaturelle il ne l'aurait pas entendu le rejoindre.

"Kagami-kun ?"

L'interpelé releva la tête pour regarder son ami. Il se contenta d'un hochement de tête négatif pour signifier qu'il ne savait rien. Tetsuya s'assit à côté de lui et ne prononça pas un mot de plus. Peu de temps après l'une des deux autres personnes qu'il avait prévenu les rejoignit. Satsuki posa une main douce sur l'épaule du garçon aux cheveux rouges qui regardait fixement le sol devant lui. Ils n'étaient pas des amis très proches comme des confidents, mais ils s'étaient beaucoup rapprochés grâce à Daiki et s'appréciaient mutuellement.

Taiga entendit ses amis échanger quelques paroles, mais ne chercha pas à en comprendre le sens. Son cerveau était vide, son esprit déconnecté. Son cœur battait douloureusement dans sa poitrine. Il se rappelait une autre attente dans une salle identique, un autre accident dont l'issue fût fatale. Daiki savait, il était le seul à savoir d'ailleurs.

Durant cette longue attente, Satsuki leur proposa de manger. Taiga refusa, il avait toujours la nausée, la gorge trop serrée. Elle se leva néanmoins pour prendre quelque chose pour elle, qu'elle ne mangera pas, et pour Tetsuya. Elle avait besoin de bouger, de faire quelque chose pour calmer son angoisse. Elle ne pouvait pas rester comme le pompier, figé comme une statue à attendre. Au bout de plusieurs heures d'attente, la jeune femme avait eu le temps d'aller cinq fois aux toilettes, de boire au moins trois cafés et faire une collection de boissons fraîches prises au distributeur que personne n'avait bu. Même le passeur n'avait pas eu le courage de faire preuve de politesse, il le cachait mieux que ses amis mais lui aussi angoissait. Enfin, un médecin vint les voir. Ils se levèrent tous les trois d'un seul mouvement.

"Kagami-san ?"

Le jeune pompier s'avança et répondit d'une voix brisée.

"C'est moi.

- Un cousin, un frère ? tenta le médecin.

- Un conjoint." répondit le pompier sans se démonter.

Mais le médecin ne fut pas vraiment surpris, la question était rhétorique. Il se montrait juste prudent, il ne voulait pas risquer de se tromper et d'insulter l'homme face à lui. Il avait remarqué sa tenue. Le jeune homme lui était familier, ils s'étaient croisés plusieurs fois dans les couloirs de cet hôpital. Il se souvenait qu'il avait été surpris lors de leur première rencontre, du calme et de l'autorité dont faisait preuve le pompier malgré son jeune âge. A chaque fois qu'il accompagnait un patient avec ses collègues, il prenait la direction des opérations. Il était précis, efficace et rapide. Et ses coéquipiers souvent plus âgés ne remettaient jamais en cause son leadership et au contraire semblait s'en remettre à lui volontiers. Il lui adressa un sourire compatissant, quelque part ils étaient un peu collègues. Il était soulagé de ne pas avoir à lui annoncer le plus dramatique des scenarios. Il n'était pas venu annoncer de très bonnes nouvelles, mais enfin il y'avait de l'espoir.

"Votre ami a été gravement blessé. Il a été amené par vos collègues à quinze heures cet après-midi suite à un accident de la circulation. Il a une commotion cérébrale importante, une jambe cassée, de multiples contusions et des dégâts internes importants. Il a de la chance d'être encore en vie. Nous avons pu le stabiliser… Mais pour l'instant il n'est pas tiré d'affaire.

- On peut le voir ?

- Bientôt. On le ramène dans sa chambre d'ici deux heures. Une infirmière va venir vous voir pour vous y conduire. Il vous faudra remplir quelques papiers et on vous remettra ses affaires."

Taiga hocha la tête et regarda le médecin s'éloigner sans bouger. 'Pas tiré d'affaire', combien de temps devrait-il patienter pour être sûr qu'il allait bien ? Il serra les poings, sa mâchoire se crispa douloureusement. Il ne réussit pas à les retenir plus longtemps, son regard fixé au sol s'embua et les larmes vinrent s'écraser sur le carrelage blanc avec un léger bruit mat.

Satsuki craqua à son tour en voyant ce grand gars, ce géant, habituellement si souriant pleurer. Taiga ne pleurait pas. Même lors du décès d'un de leurs amis, alors même qu'il avait été celui qui l'avait tiré trop tard des flammes qui dévoraient sa maison, elle ne l'avait pas vu verser une larme.

En réalité, il était arrivé que Taiga pleure, certes rarement. Il avait pleuré cet ami perdu tragiquement, il avait même longtemps fait des cauchemars de ne pas avoir pu le sauver, d'avoir vu son corps abîmé par les flammes et son visage défiguré, méconnaissable. Il avait évacué aussi parfois par des larmes lorsque ses interventions étaient difficiles, qu'il avait enchaîné trop d'heures et que la fatigue commençait à peser, alors une petite contrariété pouvait le faire éclater. Le plus souvent c'était par des colères où Daiki s'en prenait plein la tête d'avoir encore laissé ses chaussures traînées, de ne pas avoir étendu le linge "pour une fois qu'il lui demandait quelque chose" ou d'avoir oublié de payer la dernière facture d'électricité, évidemment le policier ne se laissait pas faire, même si la plupart du temps les reproches étaient mérités, Taiga n'était pas parfait non plus et Daiki savait lui rappeler. Les premières colères du pompier avaient beaucoup surpris le policier, l'amenant à préférer quitter leur domicile et venir squatter quelques jours chez sa meilleure amie en attendant que la tempête se calme.

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"Dai-chan ?!

- Salut. Euh… J'peux dormir là ce soir ?"

Interloquée, Satsuki resta muette quelques secondes, avant de s'effacer pour laisser son ami entrer. Il était évident qu'il avait dû se passer quelque chose avec Kagami pour que son ami vienne se réfugier chez elle aussi tard. Elle prépara du thé silencieusement et porta les tasses dans le salon. Elle était sur le point de se coucher quand son ami avait sonné, mais elle ne pourrait plus dormir à présent sans avoir avant tiré les choses au clair avec Daiki. Et puis, il avait visiblement besoin de parler.

"Il s'est passé quoi avec Kagamin ?

- On s'est engueulé.

- Ça arrive à tous les couples… A quel…

- Pas à nous.

- Quoi ?!

- Pas à nous. Nous on s'engueule jamais."

Satsuki allait rétorquer que c'était ridicule, qu'ils étaient tout le temps en train de se chicaner. Mais elle s'interrompit et regarda son ami silencieusement réalisant qu'il n'avait effectivement jamais parlé de disputes avec Taiga auparavant. Et à bien y réfléchir, plus Taiga et Daiki s'étaient rapprochés et moins ils se disputaient. Jusqu'à ce dénouement où ils devinrent devenus amants.

"Il s'est passé quoi ?

- Je sais pas vraiment… Il est rentré du taf… Et avant même de me dire 'bonsoir' de m'embrasser comme chaque soir… Il m'a crié dessus parce que mes chaussures n'étaient pas rangées, parce que je ne m'étais pas occupé de la machine à laver, parce que… Il m'a enchaîné…, Daiki avait soupiré, J'sais que je suis pas parfait tu vois… Mais j'essaie de faire beaucoup d'effort. Et lui…"

Daiki se grattait la nuque, signe qu'il était nerveux. Satsuki se rapprocha de lui et passa son bras autour de ses épaules.

"Et lui ?

- Il le sait… Et il m'en veut jamais d'être bordélique. Ouais il me rappelle que je pourrai ranger. Mais il se met pas en colère.

- Qu'est ce que tu lui as dit ?

- Je lui ai rappelé que c'était toujours moi qui m'occupait de l'administratif…

- Tu fais ça toi ?

- Hm… Tai a horreur du téléphone… Je prends même ses rendez-vous médicaux et chez le coiffeur pour lui. Mais j'men fous ! Ça me dérange pas… J'fais plus souvent les courses que lui. Je croyais qu'on avait une sorte d'arrangement…

- Il y'a sûrement une bonne explication…

- Ouais. Il en a marre de moi.

- Dis pas de conneries Kagamin t'aime. Aucun doute là-dessus."

La jeune femme soupira. Elle connaissait son ami, ses angoisses et sa médiocre confiance en lui. Malgré les apparences, qui laissaient entrevoir un garçon imbu de lui-même et sûr de lui, Daiki avait constamment besoin d'être rassuré sur l'amour qu'on lui portait. Ils discutèrent un long moment. Enfin le garçon surtout parla, tandis que Satsuki l'écoutait attentivement, heureuse qu'il se dévoile à lui et qu'il lui partage un peu sa relation avec le pompier. Mais il était déjà tard, ils déplièrent le futon d'invité à côté de celui de la jeune femme et se couchèrent. Aomine se retourna dans ses draps. Il n'avait plus l'habitude de dormir dans un lit traditionnel aussi étroit et fin. Clairement, avec son géant de petit ami, ils s'en étaient achetés un king size et très confortable et puis… Il ne pouvait s'empêcher de penser à lui. Qu'est-ce qu'il faisait ? Où était-il ? Est-ce qu'il allait bien ? Il s'inquiétait pour lui, comme toujours. Il ne pouvait pas s'empêcher de se préoccuper de Taiga. Depuis, très longtemps… Depuis la première fois où il l'avait battu sur un terrain de basket. Il l'avait assidument suivi pendant le championnat, il lui avait prêté ses baskets… Au début beaucoup dans l'ombre puis de plus en plus ouvertement à mesure que leur relation évoluait. Et puis, ce soir une autre question le taraudait. Qu'est ce qui s'était passé ? Où est-ce qu'il avait merdé ? Qu'il n'ait été que le souffre-douleur, l'exutoire de toutes ses angoisses accumulées des derniers jours ne l'effleuraient pas. Il se pensait seul et unique responsable de la colère du pompier.

"Mai-chan…

- Dai-chan ? Tu dors pas ?

- Désolé… J'arrive pas à dormir…

- Pourquoi tu parles de Mai-chan ?

- Ce soir… J'ai oublié de ranger le magazine avant que Taiga rentre."

Momoi se redressa d'un coup dans le lit en allumant la lumière les éblouissant tous les deux.

"Tu as ENCORE ce genre de magazine ? Et tu t'en sers ?

- NON ! J'en n'ai plus besoin pour me branler mais… Mai-chan est magnifique. J'aime la regarder…

- Kagamin est au courant ?!

- Ouais. Il dit rien tant que je sors pas mes magazines devant lui."

La jeune femme soupira et lui jeta un coussin au visage.

"CRETIN ! T'as déjà de la chance qu'il tolère !

- Quoi ?! Mais c'est pas la première fois ! D'habitude il fait un peu la gueule… Mais il s'énerve pas comme ça.

- Pfff… Kagamin est vraiment trop bon avec toi."

La jeune femme éteignit la lumière et se remit sous sa couverture en lui tournant le dos et pestant. Ce que son meilleur ami pouvait être crétin des fois.

"Je fais rien de mal ! Je me contente de regarder ! J'ai même plus envie de me branler la nouille en la matant. C'est juste pour la beauté plastique.

- IDIOT ! Imagine-toi Kagamin mater d'autres mecs ! T'en penserais quoi ?"

Un silence éloquent répondit à la question de la jeune femme.

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La pression dans son métier était forte. Pourtant Taiga tenait bon, mais oui parfois, il devait lâcher la pression. Daiki était le seul devant lequel il se montrait faible. Laissant éclater des colères venues de nulle part souvent que policier avait mis du temps à comprendre. Et quelques fois il avait pleuré dans ses bras réconfortants. Son petit ami ne le jugeait pas. Il ne lui suggérait pas d'arrêter son métier qu'il aimait tant malgré la difficulté. Il le soutenait, l'encourageait, lui répétant qu'il serait toujours là pour l'aider à gérer ça, qu'il était le meilleur dans son métier et ne devait pas abandonner.

Mais Satsuki, elle, ne l'avait jamais vu pleurer. Et l'ancien As de Touou ne lui avait jamais parlé des larmes du tigre. Pour tout dire, Daiki se montrait très discret sur sa relation avec Taiga. Il ne se cachait pas, mais au contraire de toutes ses précédentes conquêtes dont il détaillait la relation à la jeune femme dans les moindres petites choses inavouables, il se montrait plus pudique concernant celle-ci. Il répondait généralement à ses questions sans se faire prier, mais elle sentait qu'il voulait garder ça pour lui jalousement comme si ne pas s'en vanter lui assurerait la solidité de sa relation. Elle le savait heureux et c'était bien tout ce qui comptait. Il lui parlait bien-sûr quand c'était important. Comme pour cette première Saint Valentin où Daiki -qu'elle constata à son plus grand étonnement « romantique » - ne savait pas quoi organiser pour faire plaisir à son petit ami. Elle avait écouté ses questions, ses dilemmes. Et elle avait encore une fois été surprise par son meilleur ami. Il faisait preuve de beaucoup d'égards envers le pompier, bien plus qu'envers toutes ses précédentes conquêtes dont il se souvenait à peine du prénom. Là où il semblait indifférent et ennuyé avec ses ex-petites amies, il se montrait attentif, prévenant et minutieux avec Taiga. Il connaissait ses goûts, ses préférences, ses petits plaisirs. Quelque part, Satsuki en avait été soulagée. Elle appréciait l'ancien As de Seirin et avait eu peur que Daiki ne se lance dans cette relation que par curiosité. Mais non, le policier semblait vraiment sincère. Et c'était sûrement pour cette raison qu'il gardait les détails de leur relation pour lui, comme de précieux trésors, ne lui dévoilant quelques infos qu'au compte-goutte quand il avait vraiment besoin de ses conseils. La jeune femme s'en contentait très bien. Et même si elle avait été décontenancée d'apprendre que son meilleur ami se tournait vers un homme, elle en avait profité aussi.

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"Pourquoi Kagamin ? Je veux dire… Il ressemble pas du tout à une fille. A la limite, Tetsu-kun ou Ki-chan… Mais Kagamin… Tu fais difficilement plus viril comme mec."

Daiki rit. Gêné, il se passa une main sur la nuque avant de s'allonger sur le lit, un bras en travers des yeux.

"J'en sais rien. Ça se calcule pas ce genre de truc."

Il resta silencieux, elle patienta sachant qu'il cherchait à répondre sincèrement à sa question.

"Taiga est une belle personne. La meilleure que j'ai rencontrée. J'suis… heureux quand je suis avec lui."

Satsuki laissa échapper un petit rire moqueur mais tendre.

"Ahhh ! Arrête de te moquer sinon je réponds plus à tes questions !"

Elle se calma.

"Je peux te poser une autre question Dai-chan ?"

Daiki toujours allongé sur le lit, les bras croisés sous sa tête, rouvrit les yeux.

"Ouais ?

- Vous l'avez fait ?"

Il rigola.

"Je croyais que tu n'aimais pas que je te parle de mes exploits sexuels ?

- Dai-chan !

- Ok. Ok."

Le garçon répondit à la question facilement d'une voix qui laissait entendre que c'était évident.

"Ouais."

Satsuki s'était levée pour venir s'asseoir en tailleur dans le lit à côté de son meilleur ami.

"Jusqu'au bout ? Avec pénétration ?"

Le jeune étudiant avait souri.

"Oui. La totale. Comme dans tes mangas yaoi…

- Et euh…"

Elle avait rougi. Elle avait réfléchi souvent à la question et elle ne voyait ni l'un, ni l'autre comme un dominé. Par ailleurs, elle savait pour en avoir parlé avec le tigre qu'il était seme. Mais sa curiosité de fans de Yaoi en était forcément attisée.

"... Tu… es dessus ou dessous ?"

Daiki éclata encore une fois d'un rire amusé de la gêne de son amie. Il s'attendait à la question depuis que la jeune femme avait commencé à rougir.

"Les deux… Mais je préfère être dessous.

- Comment vous avez fait ? Je veux dire… La première fois qu'il t'a…"

Mis sa bite dans le cul ? Daiki se retint d'énoncer sa pensée entière à voix haute.

"Qu'il me la mise ?

- Euh… Oui… Comment vous avez décidé que c'était le bon moment ?"

Il regarda sa meilleure amie et haussa les épaules.

"Je sais pas. On en avait envie. C'était comme… Une évidence ? C'était mon corps qui réclamait…

- Et t'avais pas peur d'avoir mal ?

- Si. Surtout que Taiga est sacrément bien équipé. Mais je savais qu'il ferait tout pour que ce soit le moins douloureux possible et qu'il arrêterait si vraiment je le sentais plus. J'ai eu mal. Mais ça a été tellement bon que j'en ai redemandé et j'en redemande encore.

- Merci. Je voulais pas en savoir autant.

- Satsu… C'est quoi le problème ?"

Satsuki regardait devant elle.

"Finalement, c'est bien que tu sois gay… Je peux parler de truc… Je pensais pas que tu pourrais me comprendre.

- Dis-moi.

- Takano veut qu'on… Enfin… Qu'on couche ensemble tu vois.

- Tu n'as pas déjà couché avec lui ?"

Elle secoua la tête négativement et Daiki fut pris d'un doute.

"Tu es… vierge ?"

Hochement de tête positif de la belle.

"Oh… OK. Ben si tu en as pas envie rien ne t'y oblige. Vous êtes allés jusqu'où ?

- Je le laisse me toucher les seins… Mais… Dès qu'il veut aller en bas… Ça me dégoûte."

Daiki regarda sa meilleure amie avec suspicion.

"T'es pas amoureuse de Takano ?

- Non…

- Tu as envie de le toucher toi ?

- Non…

- Largue-le. Tu ne veux pas perdre ta virginité avec un mec que tu aimes pas et qui t'attire pas."

Elle resta silencieuse.

"C'est qui ?

- Qui quoi ?

- Le mec dont tu es amoureuse. Je le connais ?

- Oui.

- Basketteur ?

- Oui. Un ancien de Seirin.

- Je sais que tu as jamais été vraiment amoureuse de Tetsu… Me dis pas que c'est Taiga !"

La jeune femme étouffa son rire dans son oreille qu'elle serrait contre elle depuis le début de la conversation.

"Tu verrais ta tête ! T'es livide ! Mais non ! Je te laisse ! Quoique… Il est mignon… Gentil… Il a plein de qualités j'aurai pu peut-être tombée amoureuse de lui. Mais non.

- Alors qui?

- Kiyoshi.

- Kiyoshi ?"

Daiki réfléchit essayant de penser à leur senpai. Il sourit.

"T'as raison. Il est mignon. Gentil. Il a plein de qualités. Il est bon basketteur… Il est honnête et intègre… Un peu le même genre de mec que Taiga.

- Ouais. Et il a une fiancée.

- S'il est pas amoureux… Ça s'arrange.

- Ouais… Enfin je me vois pas lui poser la question comme ça…"

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Satsuki se fendit d'une plainte déchirante. Les larmes de Taiga lui étreignaient le cœur rendant les choses tellement plus réelles. Daiki, son meilleur ami, dont elle s'était rapprochée encore plus si c'était possible depuis qu'il vivait une véritable histoire d'amour, se trouvait effectivement entre la vie et la mort. Il avait tellement changé, tellement mûri. La volonté de rendre heureux Taiga, de lui faire plaisir, l'avait transformé. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il puisse être quelqu'un d'aussi attentionné.

Tetsuya restait calme et impassible aux yeux des inconnus. Mais si Satsuki et Taiga avaient été en état, ils l'auraient vu lui aussi vaciller légèrement. Il se reprit. Il ne pouvait pas craquer, pas encore. Il devait soutenir ses deux amis.

"Kagami-kun, viens t'asseoir."

Taiga se laissa faire comme une poupée de chiffon, il se retrouva assis sur une chaise. Il n'émettait aucun son mais ses larmes ne semblaient pas vouloir s'arrêter de couler. Satsuki se leva pour le prendre dans ses bras. Tetsuya la remercia d'un regard et partit chercher des boissons.

Au bout d'un long moment le pompier cessa de pleurer, la tête posée dans le cou de la jeune femme. Il sentait la main petite et délicate de Satsuki caresser doucement ses cheveux. La sensation était bien différente de la grande main de Daiki effectuant ce même geste avec la même douceur. Combien de fois s'était-il réfugié dans ses bras, à se laisser bercer par une main glissant tendrement dans sa tignasse rouge ?

L'infirmière vint chercher le pompier. Il la suivit, ainsi que ses deux amis, jusqu'à un comptoir et remplit les documents demandés. En d'autres circonstances, il se serait réjoui de connaître toutes ces informations sur son petit ami. Chacune d'elles était une preuve de ce qu'ils étaient l'un pour l'autre, amants et amoureux. Chaque petit détail, chaque jour, prouvant leur relation le confortait : l'appartement dans lequel ils avaient emménagé ensemble depuis peu, ou bien leurs brosses à dents côte à côte dans la salle de bain. Le post-it sur le frigo où Daiki quémandait ses teriyakis burgers pour le soir agrémenté d'un petit cœur comme conclusion ; la machine à laver qu'ils avaient achetée ensemble fatigués du lavomatique, ou encore les t-shirts que Daiki lui empruntait constamment. Le policier était un romantique, aimant le dîner aux chandelles, offrant des chocolats à la Saint-Valentin ou l'invitant dans un somptueux restaurant pour son anniversaire. Le pompier lui c'était ces petites choses du quotidien qu'il trouvait vraiment romantiques et lui réchauffaient le cœur. Mais remplir cette fiche de renseignement aujourd'hui n'était pas du tout plaisant. Non, c'était même douloureux. Il se sentait lourd. Un goût amer envahissait sa bouche. Sa main tremblait légèrement. Il reposa le crayon doucement et repoussa la fiche vers l'infirmière. Le regard rivé sur le papier encore posé devant lui, n'osant pas croiser celui de la jeune femme qu'il connaissait pour avoir eu fréquemment à échanger avec elle lors de ses interventions, il demanda.

"J'aimerai voir la fiche de transmission remplie par les pompiers."

Elle hésita, l'ayant reconnu elle aussi.

"Je… Je ne suis pas autorisée. Kagami-san vous le savez.

- S'il vous plaît."

Elle soupira, hésita quelques secondes mais finit par ouvrir un dossier et lui fournir le document demandé. Taiga le parcourut rapidement. Pour un néophyte, ce qui était écrit n'avait aucun sens, mais pour lui qui remplissait ces fiches quotidiennement, elles révélaient de nombreuses informations. Le véhicule dans lequel son petit ami se trouvait avait frappé de plein fouet la voiture d'un suspect qu'il pourchassait. Il avait été extrait au bout d'une heure de son véhicule, inconscient, une profonde plaie à la tête, une jambe fracturée. Il avait perdu énormément de sang et fait un arrêt cardiaque dans l'ambulance. Le collègue de Daiki qui conduisait était mort au moment de la désincarcération. Alors si Daiki avait été au volant du véhicule ? Livide, Taiga frissonna et rendit la fiche à l'infirmière.

"Merci."

Elle hocha la tête rapidement et rangea le dossier du policier puis elle tendit un sac en papier à Taiga.

"Ses affaires. Je vous emmène à sa chambre. La fin des visites est à vingt heures. Vous ne pourrez pas rester longtemps."

Les trois jeunes gens suivirent la jeune femme dans les couloirs. Tetsuya regardait son ami avec inquiétude. Il ne lui avait pas demandé ce qu'il avait lu, mais à voir sa tête plus pâle encore que lorsqu'il était arrivé ce n'était pas réjouissant. Une fois dans la chambre, Taiga se laissa tomber sur une chaise et garda le silence tête baissée et regard rivé au sol. Tetsuya et Satsuki ne tentèrent pas de discuter avec lui. Ils attendaient patiemment eux aussi. La jeune femme avait prévenu leurs autres amis de l'accident dont avait été victime Daiki. Satsuki essuyait régulièrement les larmes qui ne cessaient de vouloir couler sur ses joues et répondait aux quelques messages qu'elle recevait, dont celui de Tatsuya que Taiga avait prévenu mais qu'il n'arrivait pas à joindre. Le pompier ne se souciait pas de son téléphone qui vibrait dans sa poche.

Daiki inconscient fut ramené dans la chambre. Ils ne savaient pas vraiment à quoi ils s'étaient attendus, sûrement pas à ça en tout cas. Daiki était intubé, son visage tuméfié et un bandage enserrait sa tête. Il avait une jambe plâtrée. Le haut de son corps était découvert, des ecchymoses le parsemaient et des électrodes mesuraient ses constantes. Une aiguille dont le tuyau filait jusqu'à une poche contenant un liquide transparent était plantée dans son bras. Taiga s'était levé à l'instant où la porte s'ouvrit. Tetsuya et Satsuki l'imitèrent en voyant le brancard dans lequel leur ami gisait.

Ils attendirent que les infirmiers installent le blessé sur son lit, qu'ils mettent les moniteurs en place puis le recouvre. Sans un mot les deux hommes sortirent de la pièce. Satsuki éclata en sanglots silencieux cachant son visage dans ses mains. Tetsuya resta impassible et observait avec vigilance Taiga. Le basketteur aux cheveux rouges restait figé, regardant le corps meurtri de son petit aim face à lui. Des images du passé défilaient dans sa tête se superposant à la vision qui s'offrait à lui. Il revoyait Daiki sur le terrain de basket, son regard de défi et son sourire victorieux. Ce sourire qui avait définitivement fait chavirer son cœur. Daiki endormi dans le canapé du salon, au visage si serein, si paisible. Daiki riant aux éclats. Daiki lui souriant avec amour. Daiki le détaillant avec avidité. Daiki… Des larmes glissèrent sur ses joues de nouveau. Il ne pouvait pas le perdre. Il ne pouvait pas. Sa vie était pleine de lui. Il rayonnait tellement. Il voulait revoir son sourire, entendre sa voix, sentir ses mains sur lui, son corps contre le sien. Il voulait s'enivrer de son odeur, pleurer sur son épaule attentive et rire avec lui. Tetsuya posa une main légère sur le bras de Taiga.

"Kagami-kun."

Il sortit de sa léthargie laissant ses sanglots se faire plus bruyants, il s'avança une main tentant de retenir ses larmes et l'autre cherchant timidement celle du blessé. Il s'agenouilla à côté du lit, à hauteur de cette main, seul endroit qu'il osait toucher, tellement toute l'entièreté du corps du policier semblait n'être qu'une plaie immense. Il serra la main dans la sienne et posa l'autre sur l'avant-bras en faisant attention à la perfusion. Il embrassa la main dans la sienne avant de poser son front contre elle. Une plainte s'échappa d'entre ses lèvres.

"Dai…"

Tetsuya retint Satsuki avant qu'elle ne s'effondre, le cri déchirant de Taiga lui était insupportable. Il fallut de longues minutes pour que les deux se calment. Le silence envahit alors la pièce. Un silence bruyant en vérité, le bip régulier du moniteur et le murmure du respirateur étaient assourdissants. On frappa à la porte. Le médecin entra. Taiga se redressa mais ne lâcha pas le policier. Il leur fit le bilan post-opératoire. L'hémorragie avait été stoppée, le médecin indiqua à travers la couverture où ils avaient dû opérer. Il les rassura quant à la cicatrice sur son abdomen qui resterait discrète. Taiga pensa amèrement que celle-ci était le dernier de ses soucis. Il voulait savoir quand il se réveillerait.

"Nous constatons un traumatisme crânien heureusement léger… Mais il est dans le coma. Nous sommes dans l'incapacité actuellement d'évaluer les séquelles de ce traumatisme, même si nous pouvons supposer qu'ils seront mineurs. Son état physique est stabilisé. Nous ignorons cependant quand… ni si, il va se réveiller."

Le médecin regarda sa montre.

"Je vous laisse encore une heure. Ensuite vous devrez partir.

- Non."

Taiga leva un regard déterminé sur le médecin.

"Je reste. Jusqu'à ce qu'il se réveille."

Le médecin allait protester mais Taiga ajouta d'une voix suppliante.

"S'il vous plaît.

- D'accord. Je préciserai aux équipes que vous êtes de la famille proche. Je ne peux malheureusement pas leur dire que vous êtes son conjoint… Ce statut n'étant pas reconnu officiellement entre deux hommes.

- Dites ce que vous voulez. Je m'en fous. Je veux juste rester."

Le médecin hocha la tête.

"Très bien."

Il regarda Satsuki et Tetsuya.

"Une heure."

Tetsuya répondit.

"Oui. Merci beaucoup Docteur."

Le médecin prit congé. Taiga s'était légèrement détendu, à défaut de voir son amant se réveiller, il pourrait rester auprès de lui en attendant qu'il veuille bien sortir de son coma. Satsuki contourna le lit de Daiki pour se retrouver en face du pompier. Elle posa une main hésitante sur celle du jeune policier, puis elle la prit doucement dans la sienne. Elle murmura faiblement, chuchotant comme si elle avait peur de le réveiller.

"Salut Dai-chan. C'est moi Satsu."

La voix de la jeune femme se brisa, elle dut s'interrompre un long moment avant de pouvoir reprendre.

"Tu… Tu as eu un grave accident… Tu es à l'hôpital. Tu es sorti d'affaire… Maintenant, il faut juste que tu te réveilles."

Elle s'interrompit de nouveau, se forçant à respirer calmement avant d'achever.

"Tetsu-kun et Kagamin sont là aussi… C'est important que tu te réveilles… vite. Ok … ? S'il te plaît..."

Sa voix se brisa sur son dernier mot et elle ne retint pas de nouveaux sanglots. Tetsuya posa une main légère sur l'épaule du pompier.

"Tu devrais lui parler aussi…"

Taiga ne répondit pas. Il n'était pas très à l'aise avec ça. Et s'il devait parler à son homme, il le ferait lorsqu'il serait seul avec lui. Le reste de l'heure se passa dans un silence lourd dans lequel résonnaient les bruits des machines et des sanglots étouffés. Une infirmière frappa. Elle déposa une couverture dans le fauteuil disposé là et se tourna vers les deux garçons.

"Les visites sont terminées. Seule Kagami Taiga peut rester."

Elle acheva sa phrase en se tournant vers la seule jeune femme présente.

"Je vous ai apporté une couverture pour la nuit."

Taiga lança d'une voix cassante. Son nom n'était pas inconnu dans l'hôpital, mais visiblement elle ignorait qui il était.

"Je suis Kagami Taiga. Merci."

La jeune femme s'excusa et quitta la chambre en rappelant que les visites étaient terminées. Satsuki rit.

"Te fâche pas ! Elle pouvait pas savoir !

- Rien à foutre !

- Oui oui on sait. Dai-chan est chasse gardée. T'inquiète pas Kagamin on te le laisse cet ours mal léché."

L'erreur de l'infirmière avait redonné le sourire à la jeune femme aux cheveux roses qui se pencha sur le policier affectueusement. Elle souffla sur son front pour soulever une mèche qui commençait à coller son front moite.

"Tetsu-kun et moi devons te laisser Dai-chan. Mais Kagamin reste pour veiller sur toi. On revient te voir demain. Essaie de te réveiller d'ici là. Repose-toi bien."

Tetsuya se tourna vers le pompier.

"Je passe chez toi demain pour te ramener d'autres vêtements et de quoi te laver.

- Merci Tetsuya.

- Veux-tu que je te ramène quelque chose à manger avant de partir ?

- Non merci. Je n'ai pas faim.

- Au revoir Kagami-kun."

Le petit passeur s'approcha du lit de son ami et posa une main légère sur son bras.

"Au revoir Aomine-kun. A demain."

Taiga serra la main de Daiki quand la porte se referma sur ses deux amis. Il frémit à présent seul avec son homme inconscient. Il devrait essayer de lui parler. Mais il n'était pas comme Satsuki, ça ne lui venait pas naturellement. Parler dans cette chambre glauque lui faisait peur. Pourtant il avait envie de lui dire qu'il l'aimait et qu'il devait se battre, qu'il n'avait pas le droit de l'abandonner. Intérieurement, son estomac noué, il le suppliait de tenir sa promesse, de vivre avec lui pour les six décennies à venir. Sa gorge se noua à ce souvenir. Son corps se mit à trembler, secoué de nouveaux sanglots. Les larmes dévalèrent ses joues, sans soulager ni sa peur, ni sa peine.

.

La voix de Daiki brisa le silence.

"Tai ?"

Il était étendu par terre, allongé sur le côté, se servant de la cuisse de Taiga pour reposer sa tête, le visage contre son ventre et une main remontant sous son t-shirt dans son dos. Daiki était un vrai chat. Dès que le futur pompier s'installait quelque part, il avait ce besoin de venir se coller à lui. Son petit ami ne s'en plaignait pas. Il aimait ce côté quémandeur d'attention et de tendresse de la panthère. Sa main se perdait distraitement dans ses cheveux, grattant doucement le cuir chevelu, redescendant pour masser la nuque avant de remonter en caressant sa douce chevelure. Ces gestes aussi Daiki les appréciaient. Il n'était pas loin de ronronner comme un chat. Souvent il s'endormait comme ça. Taiga étudiait, des documents étalés sur la table basse. Il répondit distraitement, concentré sur ses cours.

"Hm ?

- Je veux vivre avec toi pour les soixante prochaines années."

Taiga se figea, analysant les mots de son petit ami. C'était une sacrée projection dans le futur et en même temps… Il baissa la tête pour le regarder. Daiki tourna la sienne vers lui se demandant pourquoi la main qui le cajolait s'était arrêtée, enfin il se doutait bien un peu quand même de la raison. Il plongea son regard sérieux dans celui du tigre.

"Alors ?

- Alors quoi ?

- T'es d'accord ?

- Tu m'as pas posé de question."

Daiki sourit, sans bouger de sa place il reformula.

"Kagami Taiga veux-tu vivre avec moi pour les soixante prochaines années ?

- Pourquoi soixante ? Y'a une date de péremption ?"

Le garçon aux cheveux bleus rit de ce rire que son petit ami aimait tant. La main glissa de nouveau dans ses cheveux.

"Parce qu'on aura quatre-vingt-trois ans. Et qu'à cet âge-là… Je sais pas si je serais encore capable de te satisfaire… Alors… je te t'autoriserai à aller te trouver un petit jeune de vingt ans."

Taiga leva les yeux au ciel mais répondit au rire de son ami.

"T'es con.

- Alors ?

- Hm… Même à quatre-vingt-trois ans j'aurai pas envie de te laisser partir…

- Hm… et bien on re-signera un avenant au contrat de quelques années.

- T'es vraiment un idiot.

- Alors ?

- Bien-sûr que je veux vivre avec toi jusqu'à être un vieux croulant."

Un sourire radieux illumina le visage de Daiki. Il se leva, sortit deux bouteilles de bière du frigo qu'il servit dans les deux chopes 'empruntées' dans un bar de Los Angeles en guise de souvenir, le fameux jour où le jeune policier s'était déclaré. Ces deux verres ils ne les sortaient que pour fêter les petites et grandes occasions entre eux. Daiki les planquait au fond du placard le plus haut de la cuisine, pour que personne ne puisse tomber dessus par inadvertance. Il avait eu l'idée de les cacher dans ses poches en quittant le bar. Il avait été pris d'une soudaine impulsion de vouloir garder un souvenir de ce lieu qui avait abrité l'un des plus importants moments de sa vie et dont il ne franchirait probablement pas de sitôt les portes. Ce petit larcin fut la première démonstration de romantisme que la panthère offrit à Taiga. C'était un romantisme bien à lui, qui lui ressemblait bien. Il attachait beaucoup d'importance à des petits détails de leur relation. Comme celui-là. Si ce bar avait été à Tokyo, il aurait probablement voulu y célébrer les évènements importants de leurs vies, leurs anniversaires… Ou juste y aller par nostalgie, comme fréquemment il allait sur ce terrain de streetbasket où ils s'étaient affrontés de nombreuses fois au lycée, mais qui était pourtant bien loin du nouvel appartement de Taiga. A défaut donc de pouvoir aller dans ce bar aussi souvent qu'il l'aurait souhaité, il avait décidé d'emporter un petit 'bout' de ce lieu avec lui.

Il revint s'asseoir à côté du jeune homme aux cheveux carmin. Il lui tendit un verre et leva le sien devant lui.

"A nos soixante prochaines années."

Il se pencha pour poser un rapide baiser sur ses lèvres et ils burent une gorgée de bière.

"Bon… maintenant faut qu'on se trouve un appartement à nous où ton père puisse pas débarquer quand il veut.

- C'était ça la finalité ?!"

.

Il resta un long moment silencieux, peinant à retenir ses tremblements et ses larmes. Chaque souvenir provoquant un afflux de nouveaux sanglots. Il finit par laisser sa voix exprimer sa peine à son tour, murmurant surtout pour lui-même pas vraiment sûr que son amant entende quoique ce soit.

"M'abandonne pas Dai… Tu as promis… Tu as promis de vivre soixante ans avec moi…"