Prière à Harry Potter
-Dieu, tu n'as jamais dit un mot.
Ca faisait longtemps maintenant qu'Hermione avait arrêtée d'espérer.
Harry s'était enfermé dans son mutisme et n'en était pas ressorti depuis la mort de Ron.
Et il ne faisait plus rien, plus rien du tout.
Dehors les gens continuaient de souffrir, continuaient de mourir. Et eux ils étaient là, au square Grimmaud, bien au chaud, bien au sec. Et on avait l'impression que le Survivant attendait que tout ça, tout ces massacres, toute cette guerre, se termine.
Mais la Gryffondor ne pouvait accepter cela, alors elle lui parlait, chaque jours. Elle lui contait leurs aventures et leurs souvenirs les plus heureux. Elle parlait de ses joies, de ses peines. Et jamais il n'y avait eu la moindre réaction dans ses yeux verts. Alors elle lui parla de la guerre, de l'horreur, des cris, du sang et de l'odeur de pourriture qui les entourait à chaque instant. Mais il n'avait pas plus réagi.
Jusqu'à aujourd'hui.
Alors qu'il regardait fixement le mur de sa chambre ses prunelles s'étaient braquées sur elle d'un mouvement vif et brusque, comme celui d'un serpent (et l'unique fille du Trio d'Or était bien placée pour le savoir).
Parce qu'elle l'avait appelée Dieu.
Et Dieu, c'était ce qu'il était, il fallait bien qu'il s'en rende compte un jour !
Tous ces gens qui étaient dehors, tous ces gens qui mourraient croyaient en Harry Potter plus qu'en Merlin lui-même. Ils voyaient dans le garçon à la cicatrice un Dieu qui les sauverait tous.
-Tu ne m'as envoyé aucune lettre. Pourtant Dieu, je t'avais dis que tu le pouvais si t'avais vraiment pas envie de prendre la parole.
Sa voix restait froide figée et lointaine. Sauf qu'à l'intérieur d'elle-même, elle jubilait. Harry était là, Harry refaisait surface pour la première depuis des mois Harry la regardait.
-Tu vois Dieu, tu me regardes. Ca fait longtemps que j'espérais cette réaction de ta part. Et je suis heureuse de te voir refaire surface. Mais surtout Dieu, ne pense pas que je pourrais te pardonner.
Un éclair de douleur et d'incompréhension brilla dans ses yeux. Puis, de nouveau, il se remit à fixer le vide. A croire que c'était comme ça qu'il résistait aux chocs, en s'emmurant dans un silence qui le sauverait de tous ses problèmes.
-Harry, tenta Hermione d'une voix qui la surprit elle-même tant elle était devenue suppliante, vois notre monde qui meurt doucement, il faut que tu reviennes, ils ont tous besoins de toi. Harry !
Sauf que c'était trop tard. Harry après une brève apparition était repartit dans son monde imaginaire. Il les avait abandonnés de nouveau. La jeune fille soupira et se leva du fauteuil inconfortable sur lequel elle était assise.
-Tu sais quoi ? Je ne gaspillerai pas plus de temps avec toi. Je vais partir essayer de sauver des vies pendant que toi tu vas rester là à te cacher de Tu-sais-qui !
Il ne réagit même pas au nom de son ennemi.
Peut-être ne l'écoutait-il même pas.
Et bien qu'il reste ici ! Elle, elle avait autre chose à faire. Jamais Hermione n'aurait pensée qu'un jour elle puisse ressentir autant de colère envers Harry, son Harry.
Alors qu'elle allait quittée la pièce, elle s'arrêta sous le chambranle de la porte et se retourna, folle de rage, vers celui qu'elle continuait à appeler son meilleur ami et qui n'avait toujours pas bougé.
-Tu sais Harry, ne pense pas que je pourrais te croire le jour où tu me diras que tout ça ce n'était pas ta faute, que c'était trop lourd à porter ou que tu n'avais rien demandé. Oui tu n'as rien demandé sauf que oui tu as été choisi et oui tu es le Survivant. Oui tu as le rôle le plus horrible et le plus compliqué de l'Histoire. Mais réfléchi un peu Dieu, si c'est tombé sur toi, il y a peut-être une raison. Peut-être que c'est parce que tu as les épaules pour supporter tout ça !
-Hermione, un Gryffondor aurait le courage de faire ça. Ron aurait pu, tu aurais pu. Mais moi je suis plus Serpentard que Gryffondor, je suis lâche.
La jeune fille était tellement en colère quelle ne réagit même pas au fait que c'était la première fois qu'il parlait à quelqu'un depuis des mois. Sa voix était pourtant rauque, si rauque et pleine de douleur, aussi.
-Oh ? Un Serpentard n'aurait pas pu ? Eh bien tu veux savoir quelque chose Dieu ? Des Serpentards se battent dans nos rangs. Et tu veux savoir quelque chose d'autre ? Draco nous as rejoint. Depuis un certain temps maintenant. Il n'a pas changé, il n'est toujours pas courageux. Sauf qu'il est là et qu'il se bat tout simplement parce que c'est la dernière chose qu'on peut encore faire sur cette terre ! Tu l'aurais su, ça, si t'était resté.
Elle se tut, s'attendant à le voir réagir, se lever, hurler, mais il se contentait de la regarder.
Si précédemment elle était en colère, elle venait maintenant de rentrer dans une rage folle.
-Tu sais ce que tu aurais su aussi ? Tu aurais su que je suis avec lui.
Cette fois, il réagit, il s'apprêtait même à parler. Sauf qu'Hermione le connaissait trop bien, elle savait déjà ce qu'il allait dire.
Il allait lui reprocher d'oublier Ron, d'oublier leur amour et de pactiser avec l'ennemi.
Elle le savait, ça se voyait dans ses yeux.
Alors elle se justifia avant qu'il ait clairement le temps d'exprimer ses pensées.
-Parce qu'un jour je lui ai demandé qui il aurait aimait être s'il n'avait pas été le Mangemort-qui-a-changé-de-camp et tu sais ce qu'il m'a répondu ? Il m' répondu qu'il aurait aimait être toi pour aller voir Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom et que tout ce gâchis finisse. Si tu veux savoir autre chose Dieu, nos mains deviendront plus ridées, et nos cheveux deviendront gris et ne pense pas que je pourrais te pardonner pour tout ce que tu n'as pas fait.
-Mais qu'est-ce que je pourrais faire ? Que veux tu que je fasse ?
La colère ne faisait que rentrer en elle, encore et encore. Elle aurait pensée qu'elle ressentirait beaucoup de joie à voir Harry interagir avec le reste du monde, mais la rage dominait. Comment son meilleur ami avait-il pu tomber aussi bas ?
-Tu pourrais te battre. Tu pourrais prendre conscience de ce qui se passe autour de toi. Et vois, les enfants meurent de faim, et les maisons ont été détruites. Et le monde entier a attendu que tu réagisses. Que tu prouves que tout n'était pas fini. Mais tu t'es enfermé ici et tu t'es désintéressé des morts autour de toi. Ne pense pas qu'ils pourront te pardonner, tous ces gens qui sont morts pour toi. Mais ceux qui sont encore en vie, tu peux encore les sauver, tu peux encore nous sauver ! On ne te demande même plus de battre Tu-sais-qui, on te demande de nous montrer que tu y crois toujours.
Hermione était très fière de son discours. Peut-être que, en lui redonnant espoir, elle retrouverait le Harry d'avant. Celui-qui-a-survécu. Ou encore mieux. Le Harry du Trio d'Or. Celui qui riait tout le temps et qui était prêt à tout pour ses amis. Prêt à tout pour elle, prêt à tout pour Ron.
-Je ne peux plus me battre. J'en suis incapable. Je ne peux même plus protéger ceux que j'aime. Je n'ai pas pu protéger Ron. Je ne peux pas te protéger toi. Encore moins le reste du monde. Et si la fouine a envie de tous vous sauver, qu'elle le fasse. Quoi qu'il arrive, ce sera toujours mieux que moi.
-Mais qu'est-ce que tu racontes ?! Se mit-elle à crier. Toi ? Incapable de nous protéger ? Tu es un des sorciers les plus doués de ta génération. Ni Malfoy, ni moi ni personne d'autre ne pourra changer le fait que c'est seulement toi qui est à même de faire bouger les choses. Ron l'avait compris lui aussi, il connaissait les risques. Tu ne peux pas tous nous sauver Harry. Mais tu peux tout de même sauver une bonne partie de ce monde, ou celui-ci va partir en fumée.
-Non Hermione, que je revienne ou pas, c'est la fin de cette terre. Il faut l'accepter. Je ne sais pas ce qui se passe dehors, tu as raison. Mais je sais que, quoi que j'y fasse, ça n'y changera pas grand-chose. C'est la fin, et il faut l'accepter.
-Mais oui Dieu, c'est la fin du monde, fit-elle sarcastique. Hé, lorsque les mers recouvriront les terres, tu m'appelleras hein ? Quand ce sera le Déluge et que Tu-sais-qui dansera comme un fou aux côtés de son serpent et de ses Mangemorts, on hurlera tous en se lamentant et en se demandant pourquoi on a pas fait comme celui qu'on considérait comme notre Dieu, pourquoi on est pas resté caché dans un coin en attendant que ça arrive. Mais tu sais quoi ? Nous, on arrêtera jamais. On se battra jusqu'au bout. Et quand il n'y aura plus d'hommes sur terre, que tu seras le dernier, ne pense pas que tu pourras te pardonner.
-Je ne rigole pas. Et arrête de m'appeler Dieu. Je n'ai pas décidé de tous ça. Je n'ai pas voulu que vous mourriez tous.
-Oh que si tu as décidé de tous ça ! Il suffit seulement que tu sortes de cette pièce et rien de tout ce que tu as prédis n'arrivera. Quoi que tu décides, tu resteras notre Dieu, c'est toi qui a indirectement pouvoir de vie et de mort sur nous. Mais si tu restes assis sur ce fauteuil. Si tu reste assis et que tu attends. Eh bien un jour tu te lèveras et il y aura les gravats du monde sous tes pieds. Oh quand il n'y aura plus que le silence, et que la vie sera finie, ne pense pas que tu pourras te pardonner. Moi, à ta place, je ne le pourrais pas.
Des pas se firent entendre et, bientôt, Harry vit Draco Malfoy, sa Némésis des premiers jours apparaitre. Le deuxième être humain qu'il voyait depuis un temps indéterminé. Le blond ne le regarda même pas, les yeux fixés sur Hermione.
-McGonagall veut nous parler.
La brune jeta un coup d'œil dans la direction du jeune homme dans le fauteuil.
Le blond suivi son regard et atterrit directement dans les yeux verts du Survivant.
Celui-ci le fixait comme s'il n'était pas vraiment là. A cet instant, le Serpentard comprit qu'ils étaient foutus. Il aurait préféré que le Balafré lui foute une baffe dans la gueule ou quelque chose dans le genre.
Quelque chose qui montre qu'Harry Potter, Celui qui a Survécu, n'avait pas abandonné.
-Presse-toi. Demanda-t-il à Hermione, et il partit.
Cette discussion n'était pas la sienne. Il n'avait rien à faire dans cette pièce de malheur.
La brune s'adressa une dernière fois au brun.
-Je parle à Harry Potter. Pas celui que tout le monde connait non, je parle à mon meilleur ami. À l'Harry Potter du Trio d'Or. Parce que lui est incapable d'abandonner. Peut-être est-il mort. Alors je parle à son fantôme. Mon ami, c'est la dernière fois que je viens ici. Et je t'aime Harry Potter, je t'aime comme mon frère, je t'aime comme j'aimais Ron, je t'aime au dessus des mots, au dessus de tout. Je t'en prie, réagis. Sinon, adieu, Harry Potter. Je ne peux pas tomber avec toi, il faut que des gens continuent à se battre. Mais je t'aime, Harry, et je me souviendrais toujours de toi. A jamais.
Il n'eut absolument aucune réaction.
Aucune.
Alors Hermione referma la porte derrière les yeux verts qui la fixaient avec le plus de douceur possible.
Puis son cœur s'effondra. Leur trio était mort. Il ne restait plus qu'elle. Elle était seule. Peu importe Draco, ce n'était pas la même chose. Elle l'aimait comme elle ne pouvait le décrire. Mais ce qui s'était passé avec Harry et Ron était au-delà de l'entendement. Comme si, à trois, ils étaient une seule et même partie d'un même corps. Et c'était fini.
Fini.
Les rires étaient bien loin derrières maintenant. Ils étaient restés dans le Poudlard de leur enfance et n'en sortiraient jamais. Prisonniers. Et elle était prisonnière du présent et du futur.
Elle sentit les larmes tomber sur sa joue. Puis les sanglots. Puis les gémissements. Elle devait être ridicule. Et McGonagall était en train de l'attendre.
Une main se posa sur sa joue, elle n'avait pas besoin d'ouvrir les yeux pour savoir que c'était Draco. Doucement il la releva, elle ne s'était même pas rendue compte qu'elle était par terre.
-C'est fini Granger. Maintenant, tout ça, c'est fini.
Il n'avait pas dû s'en rendre compte, mais ses mots résonnaient aussi cruellement qu'un akada kedavra aux oreilles de la brune.
Ses sanglots redoublèrent.
Elle entendit le blond soupirer.
Ils savaient tous deux qu'il ne savait pas consoler les gens. Il attendit donc que sa crise de larme finisse. Une fois que ces sanglots s'arrêtèrent, sans un mot il sortit un mouchoir de sa veste et essuya ses joues trempées.
-Viens Granger, McGonagall nous attend.
S'accrochant à lui comme si sa vie en dépendait, elle l'entendit soupirer une nouvelle fois, mais il ne se dégagea pas.
Au fond, elle savait que même si il disait détester les contacts, c'était tout le contraire. Il était aussi perdu qu'elle et avait besoin d'attention.
Et elle aimait ça. Parce que dans trois minutes ils allaient commencer à se chamailler tout en créant un nouveau plan d'attaque pour battre Voldemort. Parce que Draco était l'avenir et Harry le passé. Son meilleur ami resterait à ressasser ses souvenirs dans cette pièce sombre. Et Draco pensait au futur. Et elle s'y accrochait avec tous l'espoir qu'il lui restait.
Ils survivraient à tout ça, il le fallait. Sinon, à quoi bon ?
Il Fallait agir. Sa prière en Harry Potter prenait fin à cet instant précis.
Et elle ne l'a plus jamais revu.
Elle ne l'a plus jamais revu.
