Note : Yep, je sais ce que vous pensez : "encore une nouvelle fic ?!". Alors, celle-ci est un peu spéciale, car il s'agit en fait d'une série de prompts pour le Jounuary 2019. Qu'est-ce que le Jounuary ? D'abord un jeu de mot entre January et Jônouchi (dont l'anniversaire est en janvier). Ensuite un mois complet de prompts créé par Denkis et dédiés à notre duelliste préféré. Pour en savoir plus, passez sur le Discord du Club de l'écrivain duelliste ou sur le Tumblr (voir mon profil).

Les fics ou dessins produits avec les prompts n'ont pas besoin de mettre en scène un ship, mais je suis en manque de puppy/violetshipping et de drama, et je voulais écrire un Kaiba différent. Vous avez même failli avoir un "Kaiba, Jou et Yugi sont dans un lit", mais Inukisama a imposé son véto (*chuchote* je le ferai un jour).

C'est donc une fic Kaijou ou Joukai ou Puppy ou Violet ou "YGO est un manga pour ados avec des mecs qui passent des pages à parler de leur passion de faire un duel avec un autre mec et de l'excitation qui fait battre leur coeur, quoi de plus normal que d'en faire quelque chose de totalement gayTM, et, vous inquiétez pas, j'ai assez d'idées pour aussi écrire 150 fics Mai x Isis parce que je peux (mais pas dans cette fic)". Fuyez tant que vous le pouvez, pauvres fous !

TW: consommation excessive d'alcool et d'autres subtances causée par un comportement auto-destructeur.

PS : merci Ayaneiro de m'avoir aidée à trouver le nom du champion du monde de Magic & Wizard.

PSbis : anime ? Quel anime ?


This night is heating up

Raise hell and turn it up

Saying "If you go out you might pass out in a drain pipe"

Oh yeah, don't threaten me with a good time

Don't Threaten Me With A Good Time - Panic! At the Disco

1 - Celebration

— Félicitations, Jônouchi-kun ! Je suis tellement fier de toi !

Les yeux de Yûgi brillaient comme deux améthystes dans la vitrine d'un bijoutier. Katsuya ne pouvait dire si c'était à cause des lustres en cristal de la salle de réception ou de la coupe de champagne à moitié vide qu'il tenait à la main. Peut-être les deux. Il se sentait lui-même léger et aérien, presque étourdi, sans pour autant que cela atténue sa nervosité. Il n'avait pas arrêté de boire depuis son arrivée.

— C'était juste un duel, fit-il tout en se grattant l'arrière de la nuque.

Il scanna la foule du regard, une boule dans la gorge.

Juste un duel ?! s'exclama Yûgi en arrondissant les yeux avec stupeur. Tu viens de remporter la coupe du monde de Magic & Wizard ! Si le titre de roi des jeux avait été misé à nouveau…

— Il aurait fallu que Kaiba daigne jouer, nota Honda d'un ton cassant.

— Mais tu sais bien que les duels ne l'intéressent plus.

Katsuya écouta un bref moment ses deux amis se chamailler sur si oui ou non Kaiba méritait toujours le titre qu'il avait réussi à dérober à Yûgi quelques années plus tôt, au cours d'un duel aussi long qu'épique. Lorsqu'il fut certain qu'ils l'avaient tous deux oublié, il s'éloigna. Il avait besoin de prendre l'air ou, à défaut, de s'isoler. Aussi vaste soit la salle, il se sentait claustrophobe et pas du tout dans son élément. Le costume que Mai l'avait forcé à acheter - juste au cas où il gagnerait, avait-elle dit en lui choisissant une cravate - lui semblait à la fois trop étroit et pas assez fastueux pour les locaux de KaibaCorp. La plupart des autres duellistes semblaient mieux habillé que lui, sans doute grâce à l'argent reçu de leurs sponsors. Katsuya n'avait pas de sponsor. Non pas qu'il n'ait jamais reçu de propositions, mais il tenait trop à sa liberté pour signer avec qui que ce soit. Surtout, il n'avait pas envie de signer avec n'importe qui. Le sponsoring ressemblait trop à un pacte avec le Diable.

Katsuya navigua parmi les convives. Il se força à échanger quelques politesses, sans plus, quand certains le félicitèrent. Il ne croyait pas en leur sincérité. Le succès du jeu avait entraîné l'arrivée de joueurs qui auraient fait passer Bandit Keith pour un modèle de droiture s'étant un peu égaré en chemin.

Un éclat de rire attira son attention. Otogi avait réussi à charmer un groupe de jeunes femmes qui s'étaient agglutinées autour de lui alors qu'il n'avait pas joué le moindre duel. Katsuya se demanda combien il en baiserait d'ici la fin de la semaine et, surtout, combien de temps il lui faudrait pour s'en vanter. Plus loin, Ryô semblait au moins aussi peu à son aise que Katsuya. Toute son envie de mettre les voiles au plus vite se lisait sur son visage. Dire qu'il tenait bon en croyant sans doute lui faire plaisir.

Katsuya s'apprêta à rejoindre Ryô pour lui proposer de s'éclipser ensemble quand il se sentit tout à coup attrapé par le bras. Il pivota bien malgré lui pour se retrouver face à face avec un Mokuba surexcité et son téléphone portable dernier cri.

Comme il regrettait l'époque où le plus jeune des Kaiba dépassait à peine Yûgi. À présent, il était presque aussi grand que son aîné et tout aussi irritant même si dans un autre genre. Kaiba se faisait de plus en plus discret. Il ne s'était même pas montré pour remettre la coupe au gagnant - sans doute, songea amèrement Katsuya, parce qu'il était le gagnant. Mokuba, à l'inverse, avait un trop plein d'énergie à dépenser. Il avait organisé le tournoi d'une main de maître.

Katsuya se plia de mauvaise grâce à une séance de selfies - apparemment, ça serait bon pour son image. Mokuba embraya ensuite sur une histoire de campagne de promotion, de produits dérivés et de contrat, mais Katsuya décrocha rapidement. Trop de mots. Trop de chiffres. L'enthousiasme de Mokuba l'épuisait et ne faisait que renforcer sa propre mélancolie.

— Plus tard, marmonna-t-il tout en se frottant les tempes.

— Je t'enverrai un mail.

Katsuya acquiesça tout en se libérant du bras de Mokuba. Il jouait à Magic & Wizard pour devenir le meilleur, pas pour servir d'homme sandwich pour une quelconque marque. Même pas pour KaibaCorp. Surtout pas pour KaibaCorp. Peu lui importait que Yûgi et Kaiba soient en bons termes et collaborent régulièrement. Il ne l'était pas, lui. Il ne le serait jamais. Cette soirée le lui prouvait encore.

Ryô avait disparu. Peut-être avait-il pris la fuite seul, et tant pis pour l'amitié. Katsuya ne lui en voulut pas.

Il attrapa une coupe de champagne sur le plateau d'un serveur et la vida d'un trait. Puis il repéra enfin une porte par laquelle s'échapper.

Le brouhaha de la salle de réception s'atténua jusqu'à ne plus être qu'un vague murmure. Katsuya erra dans les couloirs pendant de longues minutes. Il lui fallut encore d'autres longues minutes avant d'admettre qu'il s'était perdu.

Un courant d'air frais le poussa à prendre sur sa droite à un embranchement. Il déboucha bien vite dans une sorte de hall d'attente laissé ouvert et éclairé. La pièce donnait sur une terrasse surplombant Domino.

Les deux mains appuyées sur la balustrade et le vent puissant jouant dans ses cheveux, Katsuya songea qu'il comprenait que certains puissent se sentir maître du monde face à une pareille vue.

Le vent charia soudainement l'odeur d'une cigarette, et Katsuya fit volte-face, aussitôt sur ses gardes - bien que l'époque où il n'était qu'un yankee soit révolue depuis longtemps, il n'en avait pas moins conservé ses réflexes. Il serra et desserra les poings avec nervosité. Même à contre-jour, il reconnaissait cette silhouette. Il ignorait, par contre, que Kaiba fumait. Mais ce n'était pas comme si le milliardaire se détendait les rares fois où il acceptait les invitations de Yûgi ou se laissait entraîner par Mokuba à les accepter. Ce n'était pas comme si Katsuya aimait s'attarder non plus en sa présence.

— Alors, c'est là où tu te caches pendant que tes invités te cherchent ?

Katsuya préférait attaquer plutôt que de rester silencieux et sur la défensive. Rester silencieux n'empêcherait pas Kaiba de lui servir son mépris habituel.

— Je pourrais te retourner la remarque, rétorqua Kaiba avec un geste de la main. Mokuba vient de me dire que des journalistes aimeraient t'interviewer.

Katsuya grimaça. Encore une autre raison de regretter sa participation à ce tournoi.

— Des journalistes ? C'était juste un duel.

La pointe de la cigarette brilla plus fort quand Kaiba tira dessus, et un nuage de fumée encercla Katsuya.

— Tu as gagné contre l'actuel champion du monde. Kyle Ramirez ne va sûrement pas l'oublier de si tôt…

Les mots de Kaiba ressemblaient à ceux de Yûgi, mais le ton était sec, chargé de mépris, typiquement Kaiba.

Ancien champion du monde. Et Kyle est un crétin.

Katsuya fit face à la ville illuminée. La seule vue de Kaiba lui donnait envie de jouer du poing, sauf qu'il n'avait pas les moyens d'un procès.

— À quoi ça sert d'avoir le deck le plus cher au monde si c'est pour s'en servir aussi mal ?

— Il a battu beaucoup d'autres champions avant toi. Ses résultats sont réguliers et prouvent qu'il a l'étoffe d'un grand duelliste.

— Il a battu d'autres crétins qui utilisent des decks génériques spécialement conçus pour contrer d'autres decks génériques. Ils ne savent pas comment réagir à l'imprévu.

— Par imprévu, tu veux parler du hasard ? Il y a une raison si personne n'a de decks comme le tien. Ils sont mauvais statistiquement parlant, et seul un amateur qui ne joue à Magic & Wizard qu'en dillettante aurait l'idée d'en utiliser un. Kyle souhaite déjà une revanche. Célèbre ton succès tant que tu le peux, car je doute que tu conserves ton titre bien longtemps en t'en remettant à la chance.

Katsuya se mordit la langue pour ne pas répliquer. Il n'avait rien d'intelligent à dire. Juste des insultes. Les hurler l'aurait sans aucun doute soulagé, mais il savait que Kaiba ne serait pas atteint et qu'il le détruirait ensuite.

Quand Kaiba s'accouda à côté de lui à la balustrade, Katsuya le surveilla du coin de l'oeil. Le jeune milliardaire ne portait pas de costume, ni même son iconique manteau blanc, juste un pull noir à col roulé, sur lequel reposait son médaillon en forme de carte, et un pantalon en cuir trop serré pour être décent. À vingt cinq ans passé, les goûts vestimentaires de Kaiba n'avaient pas évolué.

Le célibataire le plus en vue de l'année. C'était ce qu'avaient titré certains journaux people d'après Anzu. L'homme le plus sexy au monde aussi. Sexy, et de plus en plus insaisissable, comme si Kaiba souhaitait avoir le moins de contact possible avec le restant de la race humaine.

— Tu peux dire tout ce que tu veux sur mon deck, finit par dire Katsuya, en attendant t'as pas participé. T'es même pas venu à la cérémonie d'ouverture ou pour remettre le trophée au gagnant. C'est quoi ton problème, Kaiba. T'es effrayé de perdre ton titre ?

Katsuya écarquilla les yeux quand Kaiba lui tendit une cigarette. Ce n'était pas la réaction à laquelle il s'attendait et il hésita à la prendre, se demandant si elle contenait de la cyanure ou un quelconque poison mortel dont il ignorait le nom. Il la plaça finalement entre ses lèvres et ne put s'empêcher de laisser échapper un ricanement nasal quand Kaiba l'alluma avec un briquet en argent gravé de dragons. Typique.

Puis Kaiba se recula d'un pas, le briquet rempoché, sa propre cigarette entre ses longs doigts.

— Tu as raison sur deux points, Jônouchi, fit-il dans un murmure. Tous ces duellistes sont des crétins qui ne savent pas réagir à l'imprévu. Je ne joue plus parce qu'il n'y a ni surprise ni enjeu, absolument rien à conquérir. Pourquoi je m'investirais dans quelque chose d'ennuyeux ? Mokuba, à l'inverse, aime s'occuper des tournois.

Kaiba s'appuya sur la balustrade et baissa la tête vers la rue, mains jointes, la cigarette toujours entre ses doigts. Katsuya tira une taffe, surpris de ne pas sentir la fumée lui brûler les poumons et la gorge - ce que fumait Kaiba n'avait rien à voir avec les marques bon marchés des combini, même si cela ne l'empêcherait pas de mourir d'un cancer du poumon. Pourquoi quelqu'un d'aussi obsédé par son apparence physique que Kaiba s'empoisonnait-il ? Katsuya l'aurait plutôt imaginé obsédé par tout ce qui était "sain". Le sport. Les produits bio. Tous ces régimes et soins chelous et novateurs que les riches s'infligeaient.

— C'est quoi le second point ?

Kaiba ne le gratifia même pas d'un regard.

— T'as dit que j'avais raison sur deux points. C'est quoi le second point ?

Kaiba tourna la tête vers lui, ses yeux bleus partiellement obscurcis par ses cheveux en bataille. Katsuya retint son souffle en voyant un soupçon de sourire flotter sur ses lèvres. En général, cela n'annonçait rien de bon, et il se prépara au pire, le corps tendu.

— Je détesterais perdre mon titre, encore plus face à un crétin sans imagination. Ce ne serait pas faire honneur à Atem ou à Yûgi.

Le sourire de Kaiba s'accentua, révélant ses dents blanches. Katsuya laissa la cigarette tomber du haut de la balustrade et serra à nouveau les poings jusqu'à ce qu'il les sente trembler. Il n'avait plus ressenti une telle rage depuis…

— Va te faire foutre !

Il tenta de fracasser le nez de Kaiba, mais celui-ci s'écarta avant d'être touché. Emporté par son élan, Katsuya trébucha et manqua de s'étaler au sol, ne se rattrapant que de justesse à la rambarde.

Sous le poids de l'humiliation, son visage lui brûla. Puis il sentit des larmes mêlant colère et amertume lui monter aux yeux. Il n'aurait jamais l'occasion de prouver quoi que ce soit à Kaiba, encore moins de le combattre dans un duel puisque celui-ci ne souhaitait plus s'investir dans un jeu dominé par des "crétins". C'était comme si ces dernières années passées à s'entraîner et à gravir les échelons sans l'aide de personne, si ce n'était celle de Yûgi, n'avaient été qu'une perte de temps et d'argent.

— Jônouchi…

Katsuya essaya d'ignorer l'appel, essaya de ne pas relever la tête, mais il ne put résister à la tentation de regarder vers celui qui refusait de le reconnaître comme un rival digne de ce nom. Kaiba le toisait depuis l'entrée de la terrasse, une partie de son visage éclairée par la lumière du hall, l'autre engloutie par l'obscurité.

— J'espère que tu auras d'autres victoires à célébrer prochainement. Ne me déçois pas.

Katsuya se figea, médusé. Quand il parvint enfin à retrouver ses esprits, Kaiba avait disparu depuis longtemps. Seul le mégot d'une cigarette écrasé sur le dallage lui prouva qu'il n'avait pas rêvé.