Chapitre 1
Note de l'auteur:
Chers lecteurs,
C'est à la fois avec fierté, une anticipation certaine et un tantinet d'angoisse que je vous présente cette nouvelle fiction. Il s'agit d'une histoire complètement différente de mes autres fictions et j'espère sincèrement qu'elle vous plaira. Si dans Désillusion j'ai exploré l'adolescence et les premiers émois amoureux tandis que dans Dénonciation, je me suis plutôt attardé à l'âge adulte, ici je vous propose un entre-deux, si l'on peut dire.
Merci mille fois de donner sa chance à cette nouvelle histoire et évidemment, je répondrai à tous les lecteurs qui seront assez charmants pour me laisser un commentaire.
Merci de me suivre et de me lire,
Votre toute dévouée Harley
-Draco! cria Narcissa en franchissant d'un pas rapide l'allée de rosiers blancs. Draco! Draco Malfoy!
Soit il ne l'entendait pas, ce dont sa mère doutait fortement, soit il choisissait sciemment de ne pas se préoccuper d'elle, ce qui était davantage probablement. Quoi qu'il en soit, le jeune homme fit passer une nouvelle fois sa monture par-dessus l'obstacle, faisant rire aux éclats l'enfant assis sur la selle devant lui.
-Draco, ce n'est pas raisonnable! s'exclama de nouveau sa mère en arrivant à leur hauteur, à bout de souffle. Combien de fois devais-je te le répéter? Si jamais tu l'échappes? Si jamais la jument trébuche?
Draco immobilisa le cheval d'un blanc impeccable à la hauteur de sa mère en levant les yeux au ciel, tandis que l'enfant envoyait la main à Narcissa, un sourire fendu jusqu'aux oreilles et les yeux brillants de plaisir. Elle adressa un sourire à l'enfant en retour, posant une main sur sa petite jambe, comme pour le stabiliser, même si cela était inutile puisque Draco le tenait déjà fermement contre lui de son bras gauche.
-Jamais je n'échapperai Teddy, mère, et vous savez comme moi que Blossom est la jument la plus sécuritaire de l'écurie et qu'elle a le pied sûr, sinon je ne vous la ferais pas monter pour la chasse, répondit le blond avec un sourire désinvolte.
Elle laissa échapper un soupir, sachant combien il était inutile de tenter de lui faire changer d'avis lorsqu'il avait une idée en tête.
-Tout de même… Tout ceci me semble bien risqué, se permit-elle d'ajouter à voix basse.
-Non! Daddy a raison, Blossom est gentille et je n'ai pas peur! Encore, juste une dernière fois, s'il te plaît! S'il te plaît! plaida l'enfant dont les cheveux étaient à ce moment aussi blonds que ceux de Draco. Quiconque les aurait vus en cet instant aurait juré qu'ils étaient père et fils, ce qui n'était pas réellement le cas.
-Non, je t'ai déjà dit, il y a au moins dix minutes qu'il fallait partir. Blossom est encore sellée et papa nous attends à la maison pour seize heures, nous allons diner chez madame Weasley ce soir, dit Draco d'une voix qui se voulait autoritaire, mais dont la sévérité était démentie par le sourire de fierté qui éclairait son visage.
-Juste une dernière fois! insista l'enfant en fronçant les sourcils.
Draco faillit succomber, puis son regard croisa celui de sa mère. Nul besoin de parler pour qu'elle soit en mesure de lui signifier combien elle jugeait son manque d'autorité et combien, à sa place, elle ferait mieux. Il se retint de lever les yeux au ciel et l'ignora tout bonnement. Ce n'était pas la première ni la dernière fois que sa mère désapprouvait la manière dont il élevait Teddy. Il ne pouvait compter toutes les fois où elle lui avait dit qu'il deviendrait certainement un délinquant s'il ne lui inculquait pas un peu plus de discipline. Narcissa Malfoy avait un goût certain pour le drame et l'exagération.
-Va plutôt rejoindre ta grand-mère et lui dire au revoir comme il se doit pendant que je m'occupe de Blossom, l'encouragea Draco en mettant pied à terre, tendant les bras vers lui pour l'aider à descendre à son tour. Je n'en ai pas pour longtemps, mère, je viendrai vous rejoindre au manoir dans un moment, dit-il en se tournant vers elle.
Teddy poussa une sorte de petit soupir, mais se laissa néanmoins glisser dans les bras de Draco avant de se diriger vers Narcissa qui l'accueillit avec un mince sourire en lui prenant la main. Draco les regarda partir en direction du manoir dont les immenses fenêtres reflétaient la lumière descendante du soleil à cette heure-ci, si bien qu'on eut dit qu'il s'agissait plutôt de miroirs.
Draco tapota distraitement l'encolure de l'immense jument grise en l'entraînant vers l'écurie située juste un peu plus bas, à la lisière du bois. Tâchant de se dépêcher puisqu'il avait dit à Harry qu'il serait de retour vers seize heures.
-Avez-vous besoin d'aide, monsieur Malfoy? demanda William, le palefrenier, en sortant d'une stalle alors que le maître des lieux pénétrait dans l'écurie. Le bruit des fers se répercutait sèchement sur les dalles de pierre fraîchement balayées. Voulez-vous que je m'occupe de Blossom pour vous?
-Merci, William, mais vous savez que je me suis toujours occupé moi-même de mes chevaux, répondit-il avec l'ébauche d'un sourire, attachant la jument dans l'allée. Dites-moi plutôt comment se porte Orphée?
-Son antérieur droit est toujours enflé, je lui ai fait un cataplasme avec une potion de mon cru et je vais lui laisser ses bandages de repos pour la nuit en espérant que ça se tasse, sinon je crains bien que l'on doive appeler le vétérinaire.
Draco acquiesça lentement. Il avait confiance dans le jugement de son employé qui connaissait ses chevaux par cœur.
Avant la guerre, il y avait toujours eu des chevaux au manoir Malfoy et Draco avait appris à monter à cheval dès son plus jeune âge. Il n'aurait cependant jamais pensé qu'un jour, il reverrait des chevaux au manoir. Tout cela avait commencé peu à peu, après que son père eut été emprisonné, sa mère était seule au manoir et comme elle avait toujours aimé les chevaux, il en avait acheté deux, dans l'espoir que cela lui remonte le moral ou du moins, que ça l'occupe. Bien vite, cependant, il s'était aperçu que cela ne faisait pas seulement du bien à sa mère, mais à lui aussi. Il s'était surpris à venir de plus en plus souvent, puis il en avait acheté un troisième et un quatrième. Une chose en amenant une autre, l'écurie comptait désormais pas moins d'une vingtaine de chevaux qu'il entraînait et avec lesquels il prenait part à des concours de plus en plus sérieux.
Et il n'était pas le seul dans la famille qui avait une passion pour les chevaux. Depuis qu'il était tout jeune, Teddy exigeait de l'accompagner à l'écurie et pouvait passer des journées entières avec lui sans jamais se plaindre. Au grand dam de Harry qui semblait imperméable à la beauté de ce sport et qui, à dire vrai, même s'il ne l'avait jamais admis, craignait de monter ces animaux qu'il qualifiait d'imprévisibles. Il y avait quelques semaines, Draco avait même fait l'acquisition d'un poney pour celui qu'il considérait comme son propre fils, dans le but qu'il puisse l'accompagner à la chasse dès l'automne prochain.
Il finissait de panser la jument lorsqu'il vit sa mère pénétrer dans l'écurie, seule. Il leva la tête vers elle en fronçant les sourcils.
-Où est Teddy? demanda-t-il aussitôt.
-Pas besoin de me jeter un tel regard, Draco, je ne l'ai pas laissé seul si c'est ce qui t'inquiète, je sais encore m'occuper d'un enfant. À ce que je sache, tu es ici devant moi pour en témoigner. Edward est en sécurité au manoir avec Mimi.
Il déposa la brosse dans la boîte prévue à cet effet en regardant sa mère approcher lentement de la jument, caressant doucement son front tandis que Blossom fermait les yeux de plaisir et poussait sa tête contre sa main.
-Elle vous apprécie, vous devriez la monter plus souvent, vous savez que j'ai acheté cette jument pour vous.
-Oui, je sais. Je viens parfois la brosser, le soir, quand tu n'es pas là et je lui apporte du sucre. Ça ne la dérange pas, elle, que je ne la monte pas.
Il lui jeta un regard entendu, mais s'abstint de tout commentaire, il savait trop bien qu'il ne lui ferait pas changer d'avis.
-Mais, ce n'est pas pour me parler de Blossom, j'imagine que vous êtes venue me trouver ici, sans Teddy, dit Draco en détachant la jument et en allant la reconduire dans sa stalle.
-Non, tu as raison, comme toujours.
-J'aurais dû vous enregistrer prononcer cette phrase… Vous savez que je suis pressé, mère. Harry m'attend, répondit-il, espérant échapper à la pénible conversation qui semblait vouloir se dessiner.
Elle ne répondit rien.
-Donc? De quoi est-il si important que vous me parliez et qui ne peut visiblement pas attendre à demain?
Il la connaissait trop bien pour penser qu'elle avait quelque chose d'agréable à lui dire et il ne pouvait s'empêcher d'adopter un ton cassant avec elle. Il devinait déjà de quoi il serait question, probablement, et n'avait aucune envie d'entendre ses critiques concernant sa manière d'agir avec Teddy en cet instant, ni jamais, d'ailleurs.
-Je me demandais seulement si c'était bien… approprié… certaines choses que tu dis à cet enfant.
Draco se tendit et ne put retenir un soupir agacé. Et voilà, c'est reparti, ne put-il s'empêcher de penser.
-Mère, je… commença-t-il en retenant la réplique cinglante qui mourrait d'envie de franchir ses lèvres.
-Je voulais te parler d'Edward.
Évidemment, pensa Draco en sentant son agacement grandir.
-Je ne vois pas le bienfait, ni pour toi ni pour cet enfant d'inventer des titres qui ne représentent en aucun cas la réalité. Cela ne peut que le troubler… davantage, continua Narcissa sans le regarder.
Les mots de sa mère le brûlèrent comme un jet d'acide.
-Davantage? répéta Draco, son impatience se muant en colère alors qu'il refermait un peu trop brusquement la porte de la stalle, faisant sursauter Blossom. Vous trouvez que Teddy est un enfant troublé? Est-ce bien ce que vous essayez de me dire, mère? Et cette manière de le désigner «cet enfant», y a-t-il une raison particulière, soudain, pour que vous en parliez avec autant de distance?
Il n'avait ni l'envie ni la patience de l'écouter lui débiter de telles âneries. Il inspira pour tenter de se calmer, mais sa mère avait un don naturel pour le mettre hors de lui en quelques mots à peine. Il aurait cru qu'un jour elle finirait par accepter ses choix, sa vie, mais à chaque fois qu'il avait l'impression qu'enfin c'était bon, elle lui ramenait une chose du genre à la figure. Il en avait plus qu'assez.
-Tu sais que j'aime Edward, Draco, répondit-elle de ce ton dépourvu d'émotion avec lequel elle se drapait juste avant de laisser échapper les pires horreurs.
-Mais vous ne croyez pas que deux hommes devraient élever un enfant. Je connais vos positions sur le sujet, mère et je crois bien vous avoir dit, à plusieurs reprises, que je ne voulais plus les entendre! répliqua-t-il avec colère.
-Ce n'est pas ça. Je pense simplement qu'il doit comprendre qui il est plutôt que de s'imaginer des… faussetés…
-Quelles faussetés? la coupa-t-il, acéré.
-Tu n'es pas son père, Draco et tu ne le seras jamais, ni toi ni ton… amant.
-Mon amant? Vous entendez-vous parler? Comme si vous ne connaissiez pas son nom! Je suis avec Harry depuis bientôt quatre ans, il serait plus que temps que vous vous y fassiez! Et, vous savez bien qu'Harry est le parrain légitime de Teddy, puisque les titres semblent avoir autant d'importance pour vous, vous feriez bien de vous en rappeler! Quant à ses parents, ils sont morts alors qu'il avait moins d'un an, tués lors de la Bataille de Poudlard par des mangemorts, comme vous n'êtes pas non plus sans le savoir. Harry et moi l'élevons du mieux que nous le pouvons, et ce, depuis deux ans. Jamais nous ne lui avons caché la vérité sur qui il était ni sur ses parents, bien au contraire! Je ne sais pas ce que vous attendez de plus de notre part! s'emporta Draco en haussant le ton. J'en ai assez de votre intolérance, mère. Assez de vous entendre juger ma famille et tenter de la diminuer. Et surtout, j'en ai assez de cette conversation, je vais partir retrouver ma famille «troublée» plutôt que de dire des paroles que je pourrais regretter!
Il entendit sa mère tenter de le retenir, mais il ne l'écouta pas, marchant d'un pas vif jusqu'au manoir, il vit que Teddy l'attendait sur la terrasse avec Mimi, l'elfe de maison, un biscuit à moitié entamé à la main.
-Viens Teddy, trancha Draco d'une voix blanche, ne parvenant pas à calmer sa rage.
-Pourquoi t'es fâché, daddy? demanda l'enfant avec inquiétude peu habitué à voir celui qu'il considérait comme l'un de ses pères dans un tel état.
-Ce n'est rien, allez, on y va, dit-il en lui prenant la main un peu brusquement avant de transplaner sans demander son reste.
Bien entendu, Harry les attendait de pied ferme, un air agacé sur le visage. Le blond jeta un œil à l'horloge du salon. Il était seize heures quarante. Merde.
-On avait dit seize heures Draco! se plaint Harry en poussant un soupir.
-Oui, je sais! répondit le blond avec impatience, se retenant de déverser sa colère sur lui.
-Nous allons être en retard, encore! C'est toujours la même histoire avec toi!
-Malheureusement, Harry, le ministère a détruit tous les retourneurs de temps après la Guerre, donc vois-tu, il n'y a rien que je puisse faire par rapport à cela! rétorqua le blond sèchement avant de monter l'escalier et de s'enfermer dans la salle de bain.
Lorsqu'il redescendit, Teddy avait lui aussi pris sa douche et il portait des vêtements propres. Les deux hommes de sa vie l'attendaient assis sur le canapé du salon et il ne put s'empêcher de les trouver beaux et parfaits. Harry lui jeta un regard qui en disait long et une pointe de culpabilité s'enfonça dans sa poitrine. Mais il l'ignora, se contentant de se saisir de la boîte où ils rangeaient la poudre de cheminette avant d'en jeter une poignée dans l'âtre qui prit aussitôt une teinte émeraude.
-Grand-maman! s'exclama Teddy en se ruant dans les bras d'Andromeda Tonks qui le serra avec force entre ses bras.
Teddy avait vécu avec elle pendant un peu plus d'un an suivant la guerre et ils étaient très proches. Puis, Harry avait terminé sa scolarité à Poudlard et s'était installé avec Draco au Square Grimmaurd. Le couple avait passé l'été à rénover la demeure qui en avait bien besoin et à la décorer au goût du jour. Si bien que tous ceux qui avaient vu la maison dans son état antérieur peinaient à reconnaître les lieux. Draco se targuait d'avoir tout choisi, mais en vérité, ils y avaient mis chacun du leur pour faire de leur demeure un endroit réellement à leur image.
Peu de temps après, Harry avait décidé de prendre ses responsabilités de parrain envers Teddy, soutenu et aidé par Draco. Andromeda se faisait vieille pour élever un enfant aussi jeune et quoiqu'elle en dise, sa santé était plus fragile qu'elle ne l'était autrefois. Le poids des années ayant pesé plus durement sur ses épaules vus les épreuves et les deuils qu'elle avait dû affronter. Elle était néanmoins demeurée très présente dans la vie de l'enfant.
Teddy prit place sur les genoux de sa grand-mère et se mit à débiter à voix haute tout ce qu'il avait fait avec Draco dans sa journée et lorsqu'il mentionna sa grand-mère Narcissa, Andromeda se contenta de sourire d'un air intéressé. Malgré la fin de la guerre, Andromeda et Narcissa ne s'étaient jamais reparlé. Certaines blessures sont parfois trop profondes pour être guéries.
Draco le regardait faire, l'ombre sourire aux lèvres alors que Teddy racontait comment il avait sauté des obstacles avec Blossom d'une voix animée à sa grand-mère et à George Weasley. Ce dernier jetait des œillades amusées à son épouse, Angelina, dont la main était posée sur son ventre rebondi. Il était prévu qu'elle accouche dans moins de deux semaines.
De l'autre côté de la pièce, près de la bibliothèque qui prenait presque le mur en entier et dont les volumes étaient sens dessus dessous, Ron discutait avec son père et le nouvel amoureux de sa sœur, Marcus, et d'après l'animation de la conversation, Draco savait qu'ils discutaient de la prochaine Coupe du monde de Quidditch. Elle se déroulerait l'été prochain en Suède. Lui-même comptait bien y assister avec Harry et Teddy et puisque les billets seraient mis en vente très prochainement, il les leurs offrirait pour Noël.
Il entendait également très clairement les voix animées d'Hermione, Ginny et madame Weasley provenant de la cuisine et se demanda où était Harry.
Ils ne s'étaient pas reparlé depuis l'échange désagréable qu'ils avaient eu un peu plus tôt et Draco regrettait d'avoir été aussi impatient avec lui. Il avait rejeté sur son amoureux toute la colère qu'avait suscitée sa mère chez lui et il ne méritait clairement pas un tel traitement. Il se souvenait d'avoir vu Harry un peu plus tôt avec Ginny et se demanda s'il était encore avec elle dans la cuisine.
Il prit une gorgée du vin que lui avait servi madame Weasley à son arrivée, essayant de se détendre, chose qui était toujours un peu difficile dans ce genre de soirée. Malgré toutes ces années passées ensemble, Draco ne s'était jamais senti tout à fait à l'aise au sein des amis et de la famille adoptive de son petit ami et, même s'ils faisaient un effort évident pour l'inclure, il savait qu'il ne serait jamais tout à fait des leurs.
-Ça va? murmura une voix près de son oreille alors qu'il sentait un bras entourer tendrement sa taille. On n'a pas vraiment eu le temps de se parler avant de partir, mais je te sens tendu. Les chevaux vont bien?
-Oui, les chevaux vont bien… enfin… Orphée a encore une patte enflée, mais ce n'est rien de grave, je crois. Non, c'est juste ma mère qui fait encore des siennes, mais je n'ai pas envie d'en parler, pas tout de suite, pas ce soir, répondit Draco en profitant du contact entre eux, aussi fugace soit-il. Pardonne-moi pour tout à l'heure.
-C'est déjà oublié.
Draco prit une autre gorgée de vin, hésita un instant avant de prononcer les paroles qui lui brûlaient les lèvres depuis qu'il était revenu du manoir.
-Tu m'as manqué.
Il ne pouvait voir le visage de son amoureux puisqu'il était derrière lui, mais il devina son sourire. Draco ne disait presque jamais des choses de ce genre, qualifiant ce genre de propos de «mielleuses niaiseries» et autres «stupidités romantiques». Néanmoins, cela faisait deux semaines qu'ils ne s'étaient pas vus puisqu'Harry était parti dans un camp d'entraînement en Écosse dans le cadre de sa formation d'Auror.
-Toi aussi et… si nous ne quittons pas ce diner trop tard, il y a plusieurs façons dont j'aimerais te le montrer, susurra Harry et Draco sentit son souffle s'accélérer légèrement alors que la main sur sa taille appuyait un peu plus fort contre lui, faisant soudain monter la température de la pièce de quelques degrés.
-Plusieurs? Es-tu certain de pouvoir honorer cette promesse, Potter? le provoqua-t-il.
-Harry! Viens par ici plutôt que de dire des obscénités à ton petit ami et dis-nous qui, selon toi, va remporter le prochain match de la ligue? intervint Ron d'une voix forte, de l'autre côté de la pièce. Cet idiot pense que les Canons seront battus!
-Ronald, il y a un enfant ici! claqua la voix réprobatrice de madame Weasley qui venait leur indiquer de prendre place à table puisque le repas était prêt.
-Teddy est assez brillant pour savoir que les Canons de Chudley sont la meilleure équipe de la ligue, maman, ne t'en fait pas, sourit Ron en direction de l'enfant qui s'était tourné vers lui en entendant son nom. Pas vrai Teddy?
Il regarda Ron droit dans les yeux en fronçant légèrement les sourcils, comme s'il analysait en profondeur la question, pesant le pour et le contre. Un sourire amusé étira les lèvres de Georges. Puis soudain, un éclair de certitude passa dans les yeux de l'enfant, comme si la réponse venait alors de lui être révélée.
-Moi, oncle Ron, je préfère les Harpies, dit-il alors que Ginny passait près de lui.
La sorcière s'arrêta et lui ébouriffa les cheveux qui étaient désormais vert pomme. Teddy avait hérité des dons de métamorphomage de sa mère et cela s'était révélé alors qu'il n'était encore qu'un nourrisson.
-Charmeur, murmura-t-elle en lui embrassant la joue au passage. Il a définitivement bon goût, j'adore la manière dont tu l'élèves, Harry, rigola la rouquine, plus fort.
Ginny jouait dans l'équipe des Harpies de Holyhead comme poursuiveur depuis l'an dernier. Ça n'avait pas été une surprise, déjà à Poudlard, elle était l'une ou sinon la meilleure joueuse de Quidditch, toutes maisons confondues. Molly Weasley avait réagi en poussant une sorte de soupir résigné, elle ne pouvait s'empêcher de penser que c'était un métier bien dangereux.
-Le côté lèche-bottes ça vient plutôt de Draco, blagua Harry.
-Pardon? s'offusqua le blond en haussant les sourcils. Je dirais plutôt charmant et séducteur.
-Deux mots Malfoy : brigade inquisitoriale, répondit Ron.
-Vous ne laisserez jamais tomber cette histoire, n'est-ce pas? demanda le blond en les fusillant du regard alors qu'Harry dissimulait son sourire derrière sa main.
-Tu peux toujours rêver! se moqua Ron et Draco prit un air faussement outragé.
-Je pensais que tu avais dit que tu voulais qu'on le fasse graver sur ton épitaphe : Draco Malfoy, membre de la brigade inquisitoriale et, subséquemment, père et époux adoré.
Il leva les yeux au ciel et posa ses mains sur les oreilles de Teddy avant de répliquer.
-Allez vous faire foutre, tous les deux!
-Oh, mais j'y compte bien, mon amour, répliqua Harry avec une lueur prédatrice dans le regard.
Si Draco avait été en train de boire à cet instant, il se serait certainement étouffé. Harry venait-il vraiment de dire une telle chose devant tous ces gens? Une bouffée de chaleur lui monta soudain au visage.
-TROP D'INFORMATIONS! intervint Ron en secouant la tête.
Hermione et Ginny pouffèrent de rire.
Teddy enleva les mains de Draco de sur ses oreilles et lui jeta un regard courroucé, il détestait quand on lui faisait ça, comprenant très bien que cela signifiait qu'on ne voulait pas qu'il entende une partie de la conversation.
-J'ai entendu dire que tu partais pour la France jeudi, Draco, dit Molly, changeant de sujet, en lui servant une assiette contenant une telle quantité de nourriture qu'il aurait pu en faire facilement trois repas.
-Oui, je dois rencontrer des investisseurs à Paris, répondit-il poliment, doutant que cela l'intéressât réellement. Puis, il est prévu qu'Harry vienne me rejoindre pour passer le weekend.
-Si mon supérieur me laisse partir, intervint Harry.
-Si son supérieur le laisse partir, corrigea Draco en pinçant les lèvres, lui jetant un regard en biais.
Il lui avait promis qu'il se libérerait pour la fin de semaine il y avait déjà de cela trois semaines, leur appartement particulier à Paris avait été préparé à cet effet par les elfes de maison et Draco avait tout planifié. Il ne pouvait croire que son amoureux allait encore annuler l'une de leurs sorties à cause du travail. Il avait parfois l'impression que le brun faisait passer son travail avant lui ou plutôt avant eux, puisque Teddy aussi se plaignait de ne jamais le voir.
En fait, il ne pouvait dire qu'ils ne se voyaient jamais, ç'aurait été faux. Harry revenait tous les soirs dormir au Square Grimmaurd, sauf lorsqu'il était en entraînement ou en mission à l'extérieur ce qui était, tout compte fait, assez peu fréquent. Néanmoins, il arrivait souvent très tard et Draco avait à peine le temps de passer quelques instants avec lui qu'il était déjà l'heure de se mettre au lit et ils n'avaient eu aucun temps de qualité ensemble. Quant à Teddy, il était la plupart du temps déjà couché et ne voyait celui qu'il considérait comme son père que le lendemain matin.
Une part de Draco comprenait qu'Harry n'avait pas le choix, que c'était son travail d'Auror ou plutôt d'Auror en formation qui était ainsi, que c'était de même pour tous les autres aussi, mais il ne pouvait s'empêcher de trouver cela difficile, parfois. D'autant plus que c'était lui qui devait s'occuper de Teddy au quotidien, en plus des tâches liées à l'administration des biens de sa famille, car, depuis que son père était en prison, c'était lui qui avait dû reprendre les rênes des affaires de la famille.
Les Malfoy possédaient l'une des plus importantes fortunes d'Angleterre sorcière et moldue confondue et bien entendu, cet argent ne reposait pas simplement à la banque, mais tirait sa source d'une multitude d'investissements dans certaines des plus grandes entreprises au monde. Sans compter les nombreuses propriétés dont il devait assurer l'entretien et les divers conseils d'administration auxquels il siégeait. Par ailleurs, Draco devait aussi veiller au bon fonctionnement de l'écurie et à l'entraînement de ses chevaux. Mais Harry semblait oublier que cela aussi représentait un travail à temps plein.
Il fut sorti de ses mornes pensées par Hermione qui était assise à sa droite et qui posa une main sur son avant-bras avec un air de connivences. Au fil des ans, ils étaient devenus de véritables amis.
-Ce n'est pas Ron qui ferait ça, planifier un weekend romantique à Paris, dit Hermione à voix basse en jetant un regard désabusé vers le susnommé qui avait la bouche pleine et qui était, malgré tout, en grande conversation avec Harry. Parfois, je dois te dire, je regrette que tu sois complètement gay, Draco.
-Je t'assure que tout cela a l'air beaucoup plus beau qu'il n'y paraît.
Elle fronça légèrement les sourcils.
-Est-ce que par «cela» tu serais en train de parler de ta personne? dit-elle en haussant un sourcil moqueur.
-Jamais. Je sais bien que je suis divinement beau, rétorqua-t-il avec un sourire suffisant et elle le regarda avec effarement avant d'éclater de rires.
-Harry, je te le laisse tout compte fait, ton petit ami est l'être le plus vaniteux que je connaisse! s'exclama Hermione en direction de son meilleur ami qui n'avait pas suivi leur conversation et qui se tourna vers eux, un air légèrement interrogatif sur le visage et un sourire aux lèvres.
-C'est toujours comme ça que ça se termine, Mione, et c'est pourquoi, à chaque fois, je finis par le ramener à la maison avec moi! se moqua Harry.
-Et moi qui croyais que c'était l'inverse, répliqua Draco.
Ils éclatèrent de rire et Draco se dit que finalement, cette soirée n'était pas si terrible et qu'elle avait au moins le mérite d'avoir réussi à lui changer les idées, c'était déjà ça.
Alors que Draco prenait une dernière tasse de thé dans la cuisine avec Hermione, Ginny et madame Weasley, Georges et Angelina vinrent leur dire au revoir. Il jeta un œil vers l'horloge magique accrochée dans la cuisine, celle-là même qui indiquait l'emplacement de tous les membres de la famille Weasley et vit qu'il était très tard. Ils avaient couché Teddy dans l'ancienne chambre de Ron depuis un bon moment déjà.
-Je crois que nous allons y aller nous aussi, il se fait tard, merci, madame Weasley, pour cette invitation, le repas était exquis, dit Draco en se levant, faisant léviter sa tasse jusque dans l'évier.
-C'est toujours un plaisir de vous recevoir, répondit-elle en l'embrassant.
Il se dirigea ensuite vers le salon, mais il découvrit avec étonnement qu'il était vide. Il entendit ensuite des voix provenant de l'extérieur. Harry devait être sur le patio avec Ron et monsieur Weasley. Draco fit un pas vers la porte, mais s'interrompit en entendant la teneur de la conversation des trois hommes.
-Selon l'information que j'ai, l'audition de Lucius devrait avoir lieu la semaine prochaine, murmura la voix de Ron.
-Je ne peux pas croire que ce salop va sortir d'Azkaban, répondit Harry tout aussi bas et la colère était bien perceptible dans sa voix.
-Malfoy a beau faire toutes les demandes qu'il désire, cela ne veut pas dire qu'il obtiendra de faire commuer sa peine! trancha Arthur, sûr de lui. Les membres de la Commission ne sont pas aveugles, ils sauront qui ils ont sous les yeux.
-Tout de même, j'ai entendu qu'il avait un comportement exemplaire en détention et la prison déborde, tout ceci est possible, répliqua Ron.
-Draco ne doit rien savoir pour l'instant, ne lui dites rien, je… commença Harry, mais il se figea soudain en voyant que Draco avait passé la porte et se trouvait face à eux.
-C'est un peu tard pour ça, dit le blond d'une voix acérée.
-Je n'arrive pas à croire que tu ne m'en as pas parlé! répéta pour au moins la centième fois Draco alors qu'Harry, qui venait tout juste d'aller coucher Teddy pénétrait dans leur chambre.
Le brun lança un sort de silence. Draco n'était pas du genre à moduler le son de sa voix lorsqu'il était en colère.
-Je ne voulais pas t'inquiéter avec cela alors que c'était si incertain, répondit Harry d'une voix posée, tentant de calmer son petit-ami qui le fusilla du regard.
-Quand me l'aurais-tu dit, alors? Quand je l'aurais croisé par hasard en allant au Manoir? Et pourquoi tes amis sont-ils au courant, eux? répliqua-t-il en déboutonnant furieusement sa chemise.
-Seuls Ron et Arthur sont au courant, je te l'ai déjà dit et ils l'ont su d'un ami travaillant dans le département de justice magique qui leur a fait promettre de ne rien dire.
-Ils te l'ont bien dit à toi!
-Draco…
-Non. C'est assez, je n'ai plus envie d'avoir cette conversation. Je suis fatigué et j'en ai marre, trancha-t-il en se glissant entre les draps.
Harry resta debout, hésitant entre quitter leur chambre, le forcer à continuer cette conversation qui pour lui, n'était pas terminée ou se glisser avec lui sous les draps. Il n'eut pas le temps de tergiverser plus longtemps que le blond trancha pour lui.
-Ne reste pas planté là, viens te coucher.
Il ne se le refit pas dire deux fois et se coucha auprès de Draco, inconfortablement conscient de la présence de son petit ami à ses côtés si près et si loin tout à la fois. Il n'avait qu'une envie, c'était de fondre son corps contre le sien, de l'enlacer, de l'embrasser, de se faire pardonner, lui qui lui avait tellement manqué pendant ces deux semaines. Deux semaines sans le tenir dans ses bras, sans voir son regard gris se poser sur lui, sans l'entendre se plaindre à propos de tout et de rien, sans s'endormir et s'éveiller à ses côtés, sans goûter ses lèvres, sans lui faire l'amour, c'était beaucoup trop long.
Il se maudit de ne pas lui avoir dit, pour son père, mais il avait dit vrai, il ne souhaitait pas l'inquiéter, surtout pas alors qu'il le sentait déjà sur les nerfs. Mais Draco n'avait pas tort, il aurait dû le lui dire, ça le concernait directement après tout. Lentement, il glissa une main vers son amoureux et la posa encore plus lentement sur son bras.
Le blond soupira et lui tourna le dos. Ça avait au moins le mérite d'être clair.
