« Hermione ! Ma Mione, tu m'as tellement manquée ! Si tu savais à quel point ta présence ici est indispensable ! »
Ginny Weasley, ma meilleure amie que j'ai lâchement abandonnée sur un coup de tête. Ou un coup du destin. Peu importe, j'ai fui, tout bonnement fui.
« Toi aussi. Toi aussi, tu m'as manquée Ginny. Ça fait du bien de te voir. Je suis tellement désolée »
« Entre ! J'ai pas envie de rester à la porte de mon bureau pour que tout le monde apprenne que tu es revenue »
Ginny… toujours aussi secrète. Tu aimes avoir le pouvoir n'est-ce pas ? ça n'a pas changé, le monopole de l'information est toujours dans ton camp.
Je rentrai et la porte se ferma. Sur les murs était toujours accrochées les mêmes photographies qu'il y a deux ans.
« C'est dingue comme rien n'a changé ici. », dis-je en m'installant dans le fauteuil qui faisait face à son bureau. « Tout est inerte, c'est beau ! »
« Toi, t'as changé »
« Vraiment ? »
« Je ne sais pas. Tu sembles plus… plus confiante, plus sereine. Et t'es canon ! », dit-elle avec un sourire en s'asseyant. « Tellement canon ! … Ce soir, pour le souper tu viens à la maison. A l'heure habituelle, ça te va ? »
Question piège ? C'est bête mais j'ai peur d'une question. Est-ce que je viens à l'heure habituelle ? Est-ce que je me rappelle des habitudes ? Si je dis oui, j'admets que ce passé me plaisait, mais il s'est tellement dégradé. Je regrette le temps de l'innocence et de l'inconscience. Aujourd'hui tout est si différent.
Si je dis non, je change la donne. Ça voudra dire que je tourne la page et que je renie des choses que je ne peux pas renier. C'est pourtant simple, oui ou non ?
« Hermione ? », Ginny secoua sa chevelure rousse, s'impatientant. « T'es avec moi ? »
« Euh… oui, pardon oui je suis là. Mais… euh… je ne me rappelle plus de l'heure à laquelle je venais toujours… »
Ginny me regarda bizarrement avant de baisser les yeux sur les parchemins recouvrant son plan de travail.
« 19h00. Je dirai à maman que tu viens. »
JE SUIS STUPIDE
Elle fit léviter certains parchemins jusqu'à une corbeille avant de relever le regard sur moi. Elle n'aime pas la situation et je le sais. Seulement, je ne peux rien pour elle.
« Tu… s'il te voyait », dit-elle simplement en me détaillant de la tête aux pieds.
C'est plus fort que toi, hein Ginny. Il faut toujours que tu mettes les pieds dans le plat, le doigt sur ce qui embête, consciemment. Tu cours dedans… T'as pas changé…
« Hum… »
J'ai peur. J'ai la trouille. Elle n'a pas prononcé son nom et pourtant j'ai déjà l'estomac noué et la gorge sèche. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire quand je le verrai ? J'ai beau y avoir réfléchi pendant toute la durée de mon trajet, je n'en ai pas la moindre idée.
L'empreinte qu'on laisse sur les gens ne s'efface pas avec le temps.
« Ils seront tous là ? », lui demandai-je.
« Je… euh… ouai, il seront… enfin… je pense, non pas Blaise et Pansy, ils ne peuvent pas venir. Et puis Harry… euh tu sais… oh et puis merde, j'en sais rien d'accord ? »
Qu'est-ce qui se passe ? Dis-moi, toi qui sait toujours tout sur tout, toi qui aime tout contrôler, tout savoir. T'as l'air bizarre. Tu fuies mon regard ? Il y a quelque chose qui cloche… quelque chose qui concerne Harry et toi, j'en mettrais ma main au feu ! Tu sais pas aligner six mots sans bégayer. Tu devrais savoir où il est pourtant, Harry est ton co.. Oooh c'est donc ça…
Ginny…
« Vous avez rompu, c'est ça ? »
« Oui, on a rompu ! Et tu sais, Hermione, c'est pas la seule chose que tu as manquée ici. »
Harry et Ginny plus ensembles, c'est bien la dernière chose à laquelle je m'attendais. Le petit couple parfait, si beau, si proche, si pur.
Evidemment, je suis partie pendant deux ans, je ne peux décemment pas revenir comme une fleur, comme si le monde m'avait attendue pour tourner. Ca sent la rancune, la bonne grosse rancune. Mais je le mérite, je t'ai abandonnée, Ginny, je t'ai laissée toute seule en m'enfuyant. J'ai lâchement abandonné ma meilleure amie. Et je me déteste assez pour ça, ne me tourne pas le dos !
Cette impression de toujours tout gâcher, il faudrait que ça cesse.
« Bon, c'est pas tout mais j'ai du boulot moi. Tu devrais aller voir au bureau d'Harry s'il n'y est pas. Bien sûr, on se voit ce soir, 19h00, au Terrier, pour le souper. A tout à l'heure ! »
Comme toujours, tu as le dernier mot. C'est tout toi ça. Dans ce cas, on se voit tout à l'heure. J'ai hâte de revoir ta famille, elle m'a manquée. Presqu'autant que toi…
Je n'eus même pas le temps de lui répondre qu'elle avait déjà regagné la porte, attendant que je parte. Marmonnant un faible « A tantôt », je sortis de la pièce.
Alors que je me dirigeai vers le bureau d'Harry, je fus stoppée par une main sur mon épaule.
« Alors Granger, on ne dit plus bonjour ? »
Ce fut à mon tour de me jeter au cou de mon ami. Blaise, mon vieux Blaise.
« Blaise ! »
« Eh Mione, je sais que tu es folle de mon corps, mais on est au beau milieu de l'étage des Auror… au Ministère… là où je travaille… »
Je me repris et m'écartai.
« Oh Blaise, c'est bon de te revoir. »
« Ca me fait plaisir à moi aussi, ma belle. Ça fait un bail. »
« Je sais… »
« Alors, t'es prête à revoir tout le monde ? Je pensais que tu n'arrivais que demain. »
« J'ai voulu revenir pour l'anniversaire de Ron. »
« Tu vas donc chez Molly ce soir. »
« Oui. Toi aussi ? »
« Non, j'ai des obligations avec Pansy. Mais les autres y seront. »
« Oh ,dis-je simplement. Dis à Pansy que je passerais la voir demain. J'ai tellement de choses à lui dire. »
Blaise sourit.
« Tu lui as manquée… Tu nous as tous manquée… Bon, ne va pas voir Harry, il n'est pas au bureau aujourd'hui. »
« Ginny et lui… »
« Je sais, Hermione. Je sais. »
Il m'embrassa sur la joue avant de continuer son chemin.
Désœuvrée, je rentrai chez moi. Mon chez moi qui est resté tel quel pendant mes deux ans d'absence. Mon appartement sur le Chemin de Traverse.
Rien, vraiment rien n'avait changé. Les magasins étaient toujours à leur place, les sorciers habillés de la même manière, Tom toujours au bar du Chaudron Baveur et mon immeuble se dressait toujours fièrement au même endroit.
A l'intérieur, la poussière avait recouvert les meubles et les bibelots. Mais rien n'avait bougé. Tout était pareil qu'avant, ça a un côté immortel au regard du temps qui s'est écoulé depuis la dernière fois que j'ai mis les pieds ici. Et si le temps semblait s'être arrêté, le désordre qui régnait témoignait de mon départ précipité. Des livres ouverts à même le sol, des habits reposant sur le dossier des chaises, le lit défait, la vaisselle sale devenue irrécupérable et, au vu de l'odeur, une poubelle toujours pleine et en pleine putréfaction.
Il faut croire que partir ne faisait pas partie du contrat.
Écœurant, totalement dégoûtant, repoussant, répugnant, abominable, horriblement sale, pourri… ça résumait bien l'état de l'appartement. Prenant mon courage à deux mains, j'ai nettoyé tout ça en quelques coups de baguette puis, retroussant mes manches, j'ai rangé.
Après une bonne heure, l'ensemble paraissait enfin propre et vivant. Bien sûr, mon chat n'était plus là pour égayer les alentours. Ça faisait maintenant trois ans qu'il avait rendu l'âme en recevant un sortilège perdu… à l'instar du hibou de Harry.
18h00. Une heure avant l'affrontement. Il faut que je me trouve des habits décents, un peu habillés mais pas trop classes non plus. Je voudrais être jolie. Qu'on me regarde. Qu'on me parle. Mais surtout qu'on me pardonne. Si je suis jolie, ça sera plus facile, non ?... Non !
J'ai voyagé léger. Quelques habits, aucune denrée périssable ou non périssable, quelques bouquins, une brosse à cheveux et une brosse à dent. Mes affaires de toilette. Quelques photos, rien de plus.
En fouillant dans mes affaires, vieilles et nouvelles, j'ai trouvé quelque chose à mettre. Rien d'extravagant, rien de magnifique, juste des affaires simples. Tout à fait mon style, du grand Hermione Granger !
Un jean blanc avec une blouse bleu clair. Pas de rouge, ni de vert, histoire de ne pas commencer les hostilités directement.
Je stressais tellement de tous les revoir. Ils ne me pardonneront sûrement pas, pas tous en tout cas et je ne peux pas les en blâmer.
Ah ça ma vieille ! Tu t'es barrée pendant deux ans. T'es partie sans rien leur dire… à personne, t'es partie sans te retourner, presque sans donner de nouvelles, sans aucune raison. Ou du moins tu ne leur as pas donné de raison. Tu les as juste laissés là, dans leur vie, sans toi pour les aider. T'es juste partie. T'as pris la fuite une fois de plus, et ils vont t'en vouloir… beaucoup !
Je suis au moins soulagée que Blaise et Pansy ne m'en veuillent pas plus que ça.
Bon, quand faut y aller, faut y aller… Courage ma petite Hermione, tu peux te remettre dans la peau de celle que tu étais autrefois… tu peux récupérer ta place. Tu n'as qu'à transplaner près du Terrier. Vas-y !
