Relecture Brynamon.

J'ai eu enfin le courage de me lancer dans l'écriture d'une suite de Blanche-neige et le Chasseur grâce aux encouragements de ma moitié qui en avait marre de me voir toujours agacée par la fin du film. J'aime tellement ce film, j'avais peur de ne pas savoir recréer son ambiance si particulière. C'est peut-être le cas mais au moins j'aurai essayé et je n'aurai pas de regret.

Je ne suis pas en capacité de faire une fic, donc je tente un OS en cinq parties (déjà écrites) ou disons alors que c'est une mini-fic.

Bien sûr les persos et l'histoire originale ne sont pas ma propriété.

Pour mes lecteurs habituels, merci de me suivre.

Pour les nouveaux, bienvenue.

Bonne lecture.


PARTIE 1


Deux semaines après la victoire.

Il était là face à moi, devant le Saint-homme qui nous unissait dans les liens sacrés du mariage. J'étais face à William qui me contemplait, serein. Cela me conforta dans mon bien-être. Je m'unissais à mon ami dans la suite logique des choses, supportant mon destin avec sagesse, sans crainte. Les paroles du Saint-homme me parvenaient dans un brouillard, je n'y accordais pas tellement d'importance alors que j'aurais dû. Je sus qu'il était temps de concrétiser notre union quand mes sujets suspendirent leur souffle, nous nous embrassâmes sous leurs acclamations enjouées. Un baiser chaste et au goût étrange.

Nous étions unis par Dieu.

Le poids de mon alliance me surprit. Elle reflétait le poids subit sur mes épaules. Un poids qui venait de s'alourdir alors que cela aurait dû être l'inverse. Mais pourquoi étais-je soudainement anxieuse ? Nous fîmes face à la cour, qui nous bénissait à leur tour nous souhaitant bonheur et enfants.

Des enfants…

Je déglutis, parcourant la salle à la recherche de celui qui pourrait relativiser tout cela. Greta me fit signe, Muir, toujours serein, semblait moins enthousiaste ce qui n'était pas le cas de mes autres amis qui jubilaient, mais le Chasseur, lui, n'était pas là. Mon bonheur s'en trouva terni. Pourquoi n'était-il pas là en ce jour si spécial ?

Nous ne nous étions pas vus beaucoup depuis ces deux dernières semaines. J'étais très occupée dans mes nouvelles fonctions de Reine. Je l'apercevais par à-coup comme une ombre rassurante et protectrice mais jamais il ne m'avait adressé la parole même après mon couronnement. Il se sentait mis à l'écart, je l'avais bien compris et je m'en voulus de ne pas avoir remédié à ce sentiment infondé. Mais il y avait eu tant de choses à faire et à préparer…

Le couronnement de William se fit dans la continuité du mariage. Cela fut bref, à sa demande. Mais la foule l'acclama néanmoins avec ferveur, me confortant dans mon choix. Il chercha dans mes yeux mon approbation, s'embellit de fierté et d'un bonheur sincère en caressant ce symbole royal qui avait été confectionné au moment même où nous avions annoncé nos brèves fiançailles. Il me tira ensuite par la main, je suivis mon époux, élégant, divinement royal. Il allait désormais régner à mes côtés. Je lui faisais confiance pour aller dans le sens que je souhaitais car nous étions similaires dans certaines de nos convictions. Et nos valeurs étaient les mêmes.

Nous pénétrâmes dans la salle de réception, il nous dirigea vers le centre, et nous attendîmes. La musique s'éleva brusquement, lente et sinueuse. Il fit le premier pas, me guidant dans notre première danse, je le laissai me diriger, l'esprit tourné ailleurs. Je ne comprenais pas pourquoi son absence me faisant tant de peine car après tout ce que nous avions traversé, je pensais…en fait oui, qu'est-ce que je pensais réellement ?

Cependant, je ne voulais pas entrer dans des introspections inappropriées. Je désirais profiter de ces instants uniques qui annonçaient une nouvelle vie. William m'appela doucement. Il cherchait mon attention. Je lui offris mon plus beau sourire auquel il répondit de la même manière. Il n'avait pas changé, il représentait la pureté de ce monde. Il était impossible de ne pas l'aimer.

La journée se déroula sans autre anicroche. J'étais de nouveau entourée de bien-être. Confiante en notre vie future. La noirceur de ma vie était loin, je tendais vers une lumière bienfaitrice qui me montrerait le chemin pour restaurer mon royaume. Et à deux tout serait plus facile.

Le Duc Hammond nous fit part de son immense bonheur et de tous ses vœux. Il étreignit son fils sans se soucier de ce qui l'entourait. Il paraissait soulagé d'un fardeau. Il se pencha vers moi dans une révérence trop marquée. Je m'autorisai à lui donner une légère accolade. Il en fut surpris mais se reprit aussi tôt. Il demanda à son fils la permission de me faire danser. Ce qu'il lui accorda.

Dans les bras du Duc, je perdis confiance. Je cherchai William des yeux, il discutait avec l'un de ses amis qui le félicitait.

-Majesté, vous êtes resplendissante.

J'ignorai ses flatteries, aussi sincères soient-elles. Je n'étais pas à l'aise avec lui. Il représentait l'abandon et l'éloignement. Il représentait la peur et le découragement. Il représentait la faiblesse et l'insécurité. Je me sentis mal.

-Savez-vous où est Eric ?

-Qui donc, Majesté ?

Je soupirai intérieurement, nullement surprise par le fait qu'il ne connaisse pas son prénom. Je l'avais moi-même découvert par hasard en surprenant une conversation graveleuse des servantes à son sujet.

-Le Chasseur.

-Oh, et bien…

Je n'aimais pas le ton, ni ses sourcils en circonflexes.

-Je ne sais pas non. Mais je peux me renseigner.

Une aura fit porter mon regard vers le fond de la salle, il était là sous la voûte…

-Pardonnez-moi, dis-je au Duc en le lâchant sans cérémonie.

Je voulais m'approcher de cette aura attractive mais William me barra la route, heureux de me retrouver.

-C'était long sans toi. Heureusement que c'est mon père sinon je l'aurais provoqué en duel pour m'avoir privé de ta présence si longuement.

Je tentai un écart mais il n'était déjà plus là.

-Blanche ?

-Oui ?

-Quelque chose ne va pas ?

-Non. Tout va bien, puisque tu es là.

C'était vrai (en partie, me murmura ma conscience). Il en fut satisfait et me ramena au centre de la salle.

Je commençai à avoir chaud dans cette robe lourde. Une robe blanche, au décolleté carré et sobre, aux manches longues et étroites, atrocement serrée à la taille. Mais l'heure n'était pas à la complainte.

Plus le soir arrivait, plus mon appréhension grandissait. J'allais me retrouver seule avec William entre les draps neufs de notre lit royal confectionné par le meilleur charpentier du royaume en un temps imbattable. William avait fait toutes ces démarches, il voulait que tout soit parfait, il voulait mon bonheur, et se hâtait de me le démontrer chaque jour.

Alors que chacun se restaurait et buvait sans compter, je fus entrainée loin d'eux par mon époux qui exigea que les festivités continuent.

-Où allons-nous William ?

-Nous rejoignons nos appartements.

Mon cœur bondit, s'emballa puis se rétracta. La sensation fut douloureuse. Dans l'escalier menant aux étages royaux, il fixait les marches, je le connaissais suffisamment pour comprendre qu'il était aussi anxieux que moi. Les gardes en arrière se faisaient discrets mais nous incommodaient réellement. Devant la porte, il hésita, me jeta un coup d'œil mais je fus trop lâche pour l'intercepter. Il poussa alors la lourde porte ouvragée. Je découvris pour la première fois notre sanctuaire. Une pièce orangée, aux rideaux fluides d'un brun doux et aux sols dans le même ton. Les meubles étaient blancs, un blanc étrange mais agréable. Je fis le tour, laissant glisser mes doigts sur le travail parfait réalisé par le charpentier et ses œuvriers.

-Qui a décidé de ces couleurs ?

-Moi. Tu n'aimes pas ?

-C'est parfait, affirmai-je en me tournant vers lui, moins tendue.

Il se détendit aussi.

-Par contre c'est Greta qui a orné la pièce.

J'appréciai sa franchise, me délecta du bon goût de mon amie car Greta était devenue mon amie la plus proche. Hormis le Chasseur. Je fis un geste pour l'effacer de ma tête. Je ne voulais pas être triste de nouveau. Je remarquai le miroir en pied, devant, je me trouvai inhabituelle ou plutôt je ne me retrouvai pas. J'avais été privée de mon image si longtemps. William apparut dans le reflet, m'entoura de ses bras avec délicatesse. Sa joue se colla à la mienne, nous étions semblables : la peau pâle, les cheveux noirs, les yeux bleus, les lèvres rose foncée. Trop semblables ? Ce que je saisissais dans ses iris n'apparaissait pas dans les miens. J'en fus troublée. Il se troubla à son tour mais pas pour les mêmes raisons. Il recula, retira sa couronne, commença à défaire son costume. Je le regardai faire, à travers la glace, hypnotisée. Il déposait chaque habit et revenait au même endroit.

J'eus un choc en découvrant son torse imberbe, j'étais immobile, gênée en fait. Mais à quoi pensais-je donc ? Il était mon ami de toujours et maintenant tout cela devait changer et je ne le voulais pas. Il avançait vers moi pour m'aider voyant que je ne bougeais pas.

-Attends, suppliai-je.

Il eut alors un voile d'inquiétude qu'il ne camoufla pas assez vite.

-Tu ne veux pas ?

-Je suis fatiguée, bafouillai-je, et si nous nous contentions de dormir juste ce soir.

Il hésita, puis me retourna vers lui et se pressa contre moi sans insanité, m'embrassant avec plus d'intensité mais je ne répondis pas. Ce contact ne me parlait pas, ne m'émouvait pas comme je m'y attendais. Il le remarqua, soupira, et se détourna.

-Faisons comme bon te semble, comme d'habitude.

Je n'aimais pas cette pique. Il s'en rendit compte, je le savais mais il ne rajouta rien. Il y eut un vide monstrueux entre nous. Je m'envolai vers la sortie de la chambre pour appeler une des filles toujours en faction (avec les gardes) là où je me trouvais dans l'éventualité que je puisse avoir besoin d'aide.

Il y eut des murmures. Il y avait des convives qui guettaient dans l'escalier, je me crispai. En fait, chacun attendait que nous consommions notre union et voulait en être témoin. Le Duc en faisait partie. Je l'appelai sèchement, il se faufila, se hâtant et se posta devant moi, perplexe :

-Oui votre Majesté.

-J'aimerais un peu d'intimité.

-Mais, Majesté c'est la coutume.

-Pardon ?

-Nous devons être témoin de la validation de votre mariage.

Je rougis de colère, de gêne et de honte.

-Non ! Dorénavant cette tradition est abolie. Je vous somme de tous les renvoyer chez eux !

Il pâlit.

-Il y a un problème avec mon fils, Majesté ?

-Non, entendis-je William derrière moi.

Il avait revêtu un peignoir en soie.

-Nous voulons faire ce que nous avons à faire tout seul sans témoin, abonda-t-il dans mon sens.

Je le remerciai mentalement de cette intervention implacable qui ne laissait rien à redire.

-Maintenant laissez-nous !

Il me tira en arrière et referma la porte.

-Je vais t'aider à ôter cette satanée robe et ensuite allons dormir !

Il était en colère, je ne l'avais jamais vu ainsi :

-Pardonne-moi mon ami.

-Je suis ton époux, rectifia-t-il.

Oui c'est vrai. Je ne réalisai que maintenant ce que cela voulait dire. Et je me sentis très lourde et la robe n'y était pour rien.

A mesure qu'il me découvrait, je me raidissais. Il me laissa procéder au reste de mon déshabillage et me montra la robe de nuit satinée posée sur le lit, dans les tons bleutés rappelant ses yeux. Des yeux tristes et désappointés. Il défit son peignoir, ôta son pantalon et se glissa entre les draps. Allait-il dormir à moitié nu ?

Une vingtaine de minutes plus tard, je pris place à ses cotés, raide comme un piquet et plongée dans la confusion. Je cherchai sa main comme à mon habitude, il m'accorda ce contact mais resta dos à moi. Il s'endormit ainsi. Je refoulai toutes mes angoisses, il serait assez tôt demain pour y faire face. Je l'écoutai respirer et m'endormis à mon tour en espérant trouver une solution à mon état d'angoisse.

Je rêvai d'une pièce, d'une voix, une voix familière et douloureusement triste. Cette voix m'enveloppait, m'appelait, me reprochait de ne pas être là. Pourquoi je ne pouvais être là ? Je voulais être là pour cette voix, la voix d'un homme irrémédiablement épris. Pourquoi ne pouvais-je voir son visage ? Se cachait-il ? Il avait besoin de moi et moi de lui. Nous étions destinés. Je le sus dès qu'il m'embrassa.

Je rouvris les yeux, il faisait clair dans la chambre, grâce à la lune. Je pris le temps d'observer le visage de William maintenant tourné vers moi. Son bras sur moi. Mais il ne se passa rien. Qu'est-ce que je cherchais ? Je me redressai sans me poser de question, me libérant de son étreinte et sortis de ma chambre, les gardes dormaient. Tant mieux…

Ou tant pis ?

Je courus, pieds-nus le long des dédales de couloirs glacés et descendis de deux étages par l'escalier secondaire utilisé par le personnel. Je me faufilai parmi les autres couloirs et trouvai la pièce que je cherchai : elle était la plus reculée, la plus petite et la plus sombre. C'était la chambre du Chasseur. Je toquai doucement, réprimant mes craintes. Il ouvrit presque aussi sec, habillé et muni de sa hache. Son regard vert bouteille franc et direct me remua violemment. Tout mon être bouillonna, voulant tendre vers lui. La stupeur s'étala sur ses traits et sûrement sur les miens.

-Blanche-Neige ?

Jamais il ne m'avait appelé autrement.

-Où vas-tu ? Articulai-je.

-Je venais prendre ma garde auprès de vos appartements comme tous les soirs.

-En pleine nuit ?

-D'habitude, j'arrive plus tôt mais…

Il évita mon regard. Je devinai très bien ce qui l'avait retardé. Et je vis beaucoup de chagrin en lui. En étais-je à l'origine ? Ou étais-je trop présomptueuse ?

Difficile à dire. Cela m'aida dans ma quête.

-J'ai besoin de savoir une chose Eric.

Il tressaillit, exprima mille émotions puis se renferma. Je m'enlisais à mesure que je prenais conscience de certaines choses. Il attendit, me laissant me débattre dans ma tentative de trouver les mots justes.

-Es-tu à l'origine de mon réveil ?

Il se décomposa, franchit le seuil de sa chambre et ferma la porte d'un coup sec qui résonna dans le couloir.

-Quelle importance ? Murmura-t-il, affreusement meurtri.

Il fixa mon alliance avec écœurement. Cette sonorité douloureuse correspondait aux réminiscences de mon rêve. Ma bouche se dessécha, je restai muette, le contemplant d'un œil neuf et effarée. Je connaissais pourtant chaque détail de son visage marqué par la vie, marqué par l'alcool et la douleur mais il m'apparut différemment. Et cela me fit peur.

-C'est important pour moi, je dois savoir.

Il me sonda avec la rudesse qui le caractérisait. Il élimina toute chaleur, toute douceur dans sa voix, supprimant l'affection fraternelle qu'il m'avait montrée jadis.

-Je ne suis en rien lié à votre réveil.


La suite dans une semaine.