Les Chiens Sauvages
BONCHOURRE. Je poste (ENFIN) la première partie de ce tree-shot sur Unknown Movies que l'on pourrait qualifier d'UA post-apocalyptique (même si c'est pas vraiment du post-apo mais bon ça y ressemble) (plus ou moins) avec, notamment, des personnages d'UM saison 1. Des personnages qui ne m'appartiennent pas, donc - de même que les chansons mentionnées tout le long de cette fic. Les deux parties suivantes sont (quasi) écrites donc elles arriveront vite, promis. La bise.
Partie 1
« Si la balle est dans ton camp, c'est que le flingue est de mon côté. »
Lorsqu'un illustre inconnu annonça sur les réseaux sociaux qu'une importante fuite de gaz venait de se produire à l'usine chimique, tout le monde l'avait cru.
Plus exactement, la nouvelle se propagea avec un effet boule de neige. Il avait suffi de quelques recherches sur Internet pour apprendre que ledit gaz était hautement inflammable et s'était de surcroît infiltré dans les nappes phréatiques, contaminant toute l'eau de la région – cela, on le sut lorsque des dizaines de personnes moururent en buvant l'eau du robinet.
On ne sut jamais la raison de cet accident. Toujours est-il qu'en une semaine, le pays était sans dessus-dessous. On bloqua les aéroports, les gens se ruèrent de concert dans les magasins, s'arrachant la nourriture, plusieurs grèves dégénérèrent de manière tragique. Beaucoup profitèrent de la confusion pour revendiquer leur propre cause, provoquant une panique encore plus monstre, et la peur et la colère continuèrent de se répandre comme du poison. Certains affolés commencèrent à préparer leurs affaires pour partir en catastrophe, bientôt imités par d'autres, par un de ces inexplicables mouvements de foule déchaînée. On parla, dans un élan d'égocentrisme général, de fin du monde.
Victor, quand à lui, ne bougea pas d'un pouce.
Lorsque le branle-bas fut sonné, il ne fit rien, si ce n'est s'enfermer à double-tour chez lui. Il avait assez de nourriture et de boisson pour tenir le temps qu'il faudrait. Il resta enfermé huit jours, ses vivres s'amenuisant, et attendit que l'agitation retombe. Il n'avait pas de famille, ni d'amis à rejoindre nulle part, habitué de la solitude. Cette fuite de gaz avait même l'obligeance de lui donner l'occasion de poursuivre sa vie dans l'oubli, parmi tant d'autres, sans faire de vagues, et cette idée lui plaisait. De manière plus pragmatique, il était conscient de ne pas pouvoir mettre le pied dans la moindre gare sans être attrapé par les forces de l'ordre. Là où il s'était autrefois tant débattu, cet appartement où il avait tant hurlé, tant torturé, cet endroit-là n'était désormais plus que souvenirs. Plus de colère – juste une paisible résignation. Du moins, c'est ce dont il réussit à se convaincre.
Le neuvième jour, armé d'un vieux paquet de gâteaux rassis dans un vieux sac et de son flingue, il sortit se ravitailler. Et ce qu'il vit le terrifia.
Certes, il s'attendait à voir les rues désertes – du moins il pensait s'y attendre. Mais le silence qui régnait dans son quartier, les voitures abandonnées et les affaires piétinées remua quelque chose à l'intérieur de lui. Il était seul depuis longtemps ; cependant il s'était habitué à la foule impersonnelle dans laquelle il savait si aisément se glisser. La conscience froide et brute de sa nouvelle vie s'abattit sur son crâne avec une bonne semaine de retard.
A sa gauche, il distingua une petite silhouette humaine assise contre une porte, recroquevillée sur elle-même, vers laquelle il se précipita sans réfléchir.
« Hé, petit ? Ça va pas ? »
Il poussa l'enfant un peu rudement, qui roula à ses pieds. Il avait bu de l'eau du robinet et ne s'était pas relevé. Victor bondit sur ses pieds et se mit en marche, le plus loin possible.
Victor marcha plusieurs jours, quittant la ville morte et son odeur âcre de maladie. Il grignotait les gâteaux rassis durant ses (courtes) pauses, buvait à petites gorgées la bouteille d'eau qu'il avait récupéré sur un corps à jamais immobile, luttant contre sa soif et sa fatigue. Par chance (mais pouvait-on parler de chance ?) il était habitué à marcher, parfois dans des conditions bien pires. Sa vie était une fuite perpétuelle, après tout.
Cependant, dès les premiers kilomètres, il avait pu constater une présence inhabituelle : celle de chiens désormais en liberté. Échappés des fourrières ou abandonnés par leurs maîtres, ils erraient le long des routes, affamés et misérables. Le premier jour, deux d'entre eux l'avaient poursuivi, et il avait réussi à fuir par miracle. Il ignorait quel danger, de la faim, de la soif ou des chiens, lui serait fatal.
Au bout de quatre jours donc, il atteignit l'orée d'une forêt, ou ce qu'il en restait. L'eau était polluée, bouleversant la Nature comme jamais ; les feuilles tombaient de manière inhabituelle et l'herbe jaunissait, se clairsemant au milieu de la roche, dans une sorte de décor à la fois désertique et brut. Le cadre parfait pour tourner un film, songea Victor en progressant au milieu des arbres épuisés, fidèle à sa vocation quoiqu'il arrive.
Un craquement à quelques mètres attira son attention. Il s'enfonça un peu plus à travers les arbres, et se retrouva face à une jeune fille accroupie dans l'herbe.
« Bonjour, tu– Hé ! »
Une lame de couteau-suisse près de son visage le fit reculer. La fille qui le tenait avait bondi à une vitesse stupéfiante, le prenant par surprise. Elle n'était pas bien costaud, ni même très grande, et la peur se lisait dans ses yeux. Mais il préférait être prudent, on ne savait jamais avec ces trucs-là.
« M'approche pas ! Lança-t-elle en agitant son petit couteau, persuadée d'être effrayante.
- C'est bon, on se calme. J'ai pas l'intention de t'attaquer.
- Comment veux-tu que je le sache ? »
Déjà, le ton semblait moins agressif – facile à désarmer, donc. Victor la détailla plus attentivement : c'était une adolescente exténuée au visage sans fard, et aux cheveux roux réunis en queue de cheval. Elle portait une casquette noire NCIS, des vêtements souples et des chaussures de marche. Des petites plaies parsemaient sa peau et l'un de ses genoux était ensanglanté, traces de plusieurs jours passés livrée à elle-même dans la nature.
« Pourquoi tu es encore là ? Tout le monde s'est enfui depuis bien longtemps.
- Je fais de la randonnée le week-end. Ça faisait trois jours que je marchais. Trois jours, putain. Déconnectée du monde, pas de réseau, rien. Et quand je suis rentrée, il n'y avait personne... »
Un sanglot agita faiblement sa poitrine.
« Mais chiale pas. Balbutia le tueur, en songeant que tout compte fait, il préférait le couteau.
- Je chiale pas, fut la réponse, féroce. Enlève ta veste.
- ...Sérieusement ?
- Enlève-là. Vide tes poches. »
Perplexe, il finit par s'exécuter, et posa à ses pieds son briquet, un paquet de cigarettes encore intact, et son téléphone. Il retira sa veste ocre et la jeta au sol avec le reste, prenant grand soin de ne pas toucher à son arme, dissimulée au creux de ses reins grâce à la ceinture de son pantalon. Là, et seulement là, elle rangea la lame de son canif, déjà plus rassurée.
« C'est quoi ton nom ?
- ...Léonie. Et toi ?
- Vi...Vigo. »
Il la regarda droit dans les yeux, nullement troublé par son mensonge. Elle hocha la tête sans poser de questions.
« Tu faisais quoi ? Reprit-il. »
Il faillit ajouter avant. Ne le fit pas.
« Licence d'anthropologie. Répondit la rouquine en retirant sa casquette.
- De quoi ?
- Anthropologie.
- A tes souhaits. »
Il se détourna d'elle comme si elle n'existait plus, et s'empara de son sac avant qu'elle ait pu faire un geste, vidant son contenu sans ménagement. De l'eau, des barres de céréales, trois pommes, une caméra portative, miraculeusement intacts. Ses yeux ternes s'allumèrent devant ce Graal.
« Hé, mais ça va pas ?! Protesta-t-elle en s'avançant pour récupérer son bien. Tu- »
Elle se figea face au canon pointé sur elle, et leva instinctivement les mains en l'air.
« C'est bien, tu piges vite. Dit-il d'un ton monocorde. Donc maintenant, c'est simple : acceptes de partager avec moi et je reste sage. Oppose-toi à moi et tu meurs.
- Va te faire foutre ! Cracha-t-elle, les paumes toujours tournées vers le ciel.
- Hé, du calme. Il n'y a personne d'autre que nous à des kilomètres dans ce désert, mais on peut tout de même rester civilisés. »
Sur cette phrase lourde de sens, il baissa son arme, but une gorgée d'eau, unique, précieuse, et lui tendit la bouteille sans résistance. Elle le fusilla du regard sans oser la prendre.
« C'est bon, je ne vais rien te faire. S'impatienta-t-il. Tant que tu ne touches pas à mon arme et que tu partages gentiment. Ça me semble honnête, de s'entraider. »
Méfiante mais assoiffée, elle prit la bouteille et but à son tour, et ce simple geste résonna comme un accord. Il sourit ; elle était un peu trop naïve, mais c'était toujours une alliée avec des vivres – et du cran. Ça promettait d'être drôle.
« Et toi ? Demanda-t-elle.
- Quoi, moi ?
- Tu faisais quoi ?
- ...Du cinéma. Bon, allez, la randonneuse. On va marcher jusqu'à la prochaine ville. »
La jeune fille hocha la tête sans poser d'autres questions, revissant sa casquette sur son crâne et tapotant son short (qui avait dû être blanc un jour) pour en retirer la terre. Puis ils se mirent lentement en route.
« Tu n'es pas civilisé, dit-elle au bout de quelques minutes. Tu a juste peur de rester tout seul.
- Tais-toi et marche. »
« On traque quoi exactement ? Lança Léonie d'un ton qu'elle voulait sarcastique.
- A ton avis ? »
Ils progressaient à la recherche de nourriture dans un village désert, dont les rues étaient jonchées d'affaires abandonnées, jugées superflues à la dernière minute. La main de l'adolescente glissa pensivement le long d'un guidon de vélo, faisant tinter la sonnette. Dring.
« Dis, commença-t-elle, tu...
- Mais ferme-là ! S'emporta Vigo à mi-voix. Tu veux que les chiens rappliquent ? »
Elle se renfrogna. Pour qui se prenait-il ?
Cela faisait trois jours qu'ils marchaient ensemble, parlant peu, songeant beaucoup, chacun focalisé sur ses propres pensées sans doute. Lorsqu'elle trébuchait de fatigue, il la relevait, quand il n'en pouvait plus de soif, elle le faisait boire. C'était amplement suffisant, bien qu'elle en sache peu sur lui. Ils s'accrochaient, seulement.
« On n'en a pas croisé un seul depuis un bail, se rebiffa-t-elle, vexée par son ton cassant.
- C'est pas une raison. Magne-toi.
- Merci, mais t'as pas besoin de me donner des ordres. Je suis grande.
- Laisse-moi deviner : t'étais appréciée au lycée, non ? »
Fulminante, elle accéléra sensiblement le pas, jusqu'à ce que son acolyte se précipite vers une épicerie abandonnée, oubliant toute prudence.
« Là ! S'écria-t-il, survolté.
- Attention ! »
Un cri bestial jaillit de l'obscurité de la boutique, précédent un énorme chien, le ventre flasque et les côtes saillantes sous sa peau. L'animal bondit hors du magasin en aboyant furieusement, prêt à se jeter sur Vigo. Léonie ne put retenir un cri, couvert par le bruit d'une détonation claquant dans l'air. Le dogue tomba à terre, mort.
« Bon réflexe, dit-elle, sonnée. »
Il raffermit sa prise sur son revolver.
« Merci. »
A peine remis de leurs émotions, d'autres aboiements se firent entendre dans le village, comme une réponse. Les deux acolytes s'entre-regardèrent, et la rouquine aurait juré voir son compagnon de survie pâlir à ces cris.
« T'as intérêt à savoir courir. Lança Léonie en réajustant les bretelles de son sac à dos.
- Toi-même. »
Ils tournèrent la tête de part et d'autre pour chercher à savoir d'où venaient les aboiements, les nerfs tendus jusqu'à la corde, jusqu'à ce qu'un éclair beige jaillise à quelques mètres d'eux de derrière un mur.
« Fonce ! »
Ils détalèrent dans une fuite désespérée, évitant les objets abandonnés gisant ça et là. Léonie sentait les aboiements se rapprocher, la puanteur des animaux malades et affamés devenir plus forte, et ses jambes faiblir un peu plus à chaque pas. En un éclair, elle eut le temps de remarquer à quel point Vigo était agile et rapide malgré son souffle court, avant de reprendre la lutte pour sa propre survie.
Brusquement, elle sentit qu'on la saisissait par le bras et la tirait rudement en arrière. Elle poussa un hurlement de terreur, mais une main sale se plaqua sur sa bouche.
« Par là ! Lança une voix. »
Vigo fit volte-face à ce cri et se précipita dans sa direction. Les mains qui s'étaient emparées de Léonie la poussèrent à l'intérieur d'une des maisons abandonnées, le long d'un corridor obscur, avant de la relâcher. A l'abri. Ils s'écroulèrent sur le sol de concert en poussant un râle d'épuisement, peinant à retrouver leur souffle et les jambes tremblantes.
Quelques minutes s'écroulèrent avant que Léonie ne relève la tête pour voir qui les avait sauvés. C'était une jeune fille, à peine plus âgée qu'elle peut-être. Son visage ne semblait exprimer aucune émotion particulière.
« Merci. »
L'inconnue hocha la tête en guise de réponse.
« Je m'appelle Léonie, reprit la jeune fille d'une voix sourde et le souffle court. »
Elle laissa planer un silence, attendant que la nouvelle venue se présente à son tour.
« No, lâcha finalement cette dernière.
- Non ? Répéta Léonie sans comprendre.
- No, comme Nolwenn. C'est comme ça que j'm'appelle. »
A l'image de son prénom, elle mâchait certains mots de ses courtes phrases, comme si parler lui était un luxe, ou physiquement douloureux. Ses longs cheveux blonds, emmêlés et gris de poussière, lui tombaient jusqu'au milieu du dos et encadraient son visage couvert de plaies et aux traits fins, presque enfantins. Léonie se sentit frappée par le contraste entre son apparence et son attitude fermée, méfiante.
« Comment es-tu arrivée ici ?
- On s'en fout, fut la réponse.
- Charmant. Grogna la rouquine, agacée. »
Inconscient (ou insensible) à son trouble, Vigo serra la main de No en se présentant, comme Léonie avait serré la sienne un peu plus tôt. La nouvelle venue hésita une fraction de seconde avant de lui rendre une esquisse de sourire.
« J'allais repartir, dit-elle. L'endroit n'est pas sûr à cause des chiens. Mais il y a encore de l'eau courante, donc si vous voulez prendre une douche, c'est votre moment. Tant que vous ne buvez pas au robinet.
- Mais l'eau est souillée, contra Léonie.
- Oh, excuse-moi, Lady Diana, du caviar sur votre brioche ? Répliqua No, soudain cassante. »
Léonie étouffa un grognement – encore. Son exaspération augmenta d'un cran lorsque Vigo singea ladite Diana avec un mouvement du poignet ridicule, arrachant une lueur de joie dans le regard de No, dans un geste de moquerie et d'exclusion qui parut d'une violence inouïe à Léonie. Même ici, au milieu de nulle part, en pleine fin du monde, les gens trouvaient un moyen de l'enfoncer un peu plus, de critiquer sa manière de parler et d'agir, de la critiquer. A ce stade, elle en aurait pleuré de rage si sa fierté ne l'avait pas emporté. Y avait-il un seul endroit sur Terre où elle avait sa place ?
« Preum's pour la douche, glissa Vigo avant de s'enfermer dans la salle d'eau. »
« Alors, tu n'es pas partie avec les autres, dit la jeune fille rousse – Léonie. »
No la regarda attentivement. La nouvelle venue semblait mal à l'aise, luttant contre son épuisement qui était pourtant visible. Elle parlait et articulait bien, les traits enfantins, le vernis bleu écaillé. Elle avait ce geste un peu chic de ramener ses mèches de cheveux derrière son oreille. Gosse de riches, calcula No. Elle en eut un soupir de pitié.
« Comme tu le vois, répliqua-t-elle, sarcastique.
- Tu es toute seule ?
- Non. Y a Ulysse.
- Qui ça ? »
No retint un grognement en songeant que cette fille parlait déjà beaucoup trop.
« Il doit être dans la chambre. »
Elle fit un vague geste du bras vers ladite chambre, dans l'espoir que Léonie capte le message et quitte la pièce. Elle avait des choses à faire avant de partir, et sa présence la gênait plus qu'autre chose. Par chance, l'autre semblait futée. Elle longea le mur du couloir et se dirigea vers la chambre. Au moment où elle allait pousser la porte, elle s'ouvrit. C'était Ulysse qui avait entendu de nouvelles personnes arriver.
« T'es qui ? Demanda-t-il.
- Je m'appelle Léonie. Et toi, tu es Ulysse ?
- Voui.
- Où sont tes parents ? »
Ulysse baissa la tête à ces mots, et ses yeux se remplirent de larmes.
« Maman, couina-t-il.
- Maman, tu as perdu ta maman ? Répéta Léonie, le faisant redoubler de pleurs. »
No eut envie de la gifler. Elle était là depuis un quart d'heure et avait déjà réussi à ruiner ses efforts pour aider le môme. Ultime erreur. Elle se mit à la détester.
A ce moment-là, Vigo (ils avaient tous des prénoms impossibles, bon sang) sortit de la douche avec de nouveaux vêtements, en meilleur état que les précédents. En voyant Ulysse, une lueur de panique se refléta dans ses yeux.
« T'as un gamin ?
- J'en ai l'air ? Riposta No.
- ...C'est ton frère ?
- Non. Il n'est pas de ma famille.
- Il sort d'où, alors ?!
- J'en sais rien, moi. Il était tout seul, alors voilà.
- Voilà, répéta Vigo en écho, acide. »
Nolwenn eut un vague geste d'agacement. Elle se refusait de parler devant le gamin. C'était trop tôt, encore, et Ulysse ne lui avait pas raconté grand-chose – hormis le fait que ses parents avaient voulu fuir le pays en voiture. De son côté, elle l'avait trouvé alors qu'elle même errait, à pied. Il était blessé, s'extirpant à grand-peine d'une voiture cabossée et fumante. Faire le lien n'avait pas été difficile. Elle l'avait alors littéralement emporté très loin, alors que les derniers gravats dévalaient la montagne. Depuis, Ulysse avait trouvé en No une grande sœur de substitution et ne la lâchait plus.
« L'a pas de famille, dit-elle simplement, à voix basse. »
Ulysse fit mine de ne rien entendre. Le visage baigné de larmes et aussi famélique que celui de No, il faisait peine à voir. Léonie détourna le regard.
« Je vais prendre une douche, moi aussi.
- Il y a des fringues dans la pièce d'à côté, l'informa Vigo en réajustant sa nouvelle chemise.
- Et ensuite ? »
Il y eut une brève seconde de vide, ce vide dangereux qui engloutit tout, où chacun retint son souffle sans oser répondre. Toute la question était là : et ensuite, et plus tard, où allons-nous ? Pour faire quoi ?
« On continue. Répondit Vigo avec une ferveur insoupçonnée. Tous les quatre. »
No eut un reniflement méprisant. Ça voulait dire oui.
Chansons mentionnée : La Tempête (Bigflo et Oli)
