C'était une chose à laquelle elle s'était habituée.
Le temps qui passe. Les heures, les mois, les ans qui défilent.
Dire qu'elle n'y pensait pas serait mentir ; dire qu'elle y pensait trop aussi. Helen Magnus était enfin satisfaite d'avoir trouvé un juste milieu, même si quelques fois, la peur et les questions revenaient la harceler.
Combien de personnes avaient-elles vu partir ? Combien de personnes étaient aujourd'hui poussière alors qu'elle-même respirait, foulait la terre, vivait depuis cent cinquante sept ans ? Le nombre était vertigineux. Combien encore, combien à venir ? Will, Henry, Ashley… ?
Il était facile de dire qu'on n'allait pas trop s'attacher aux gens, trop s'investir, trop aimer. Il y avait des moments où le grand docteur Helen Magnus se sentait épuisée, vidée de toute énergie, à force de brider ses sentiments. Toutes les personnes auxquelles elle tenait finiraient par mourir ; et la souffrance reviendrait, comme elle était toujours revenue au fil des siècles et des pertes.
Avec le temps, Helen avait appris à cesser de redouter le futur. Elle s'efforçait de vivre chaque instant pour ce qu'il était, à profiter de chaque minute écoulée. A quoi servait-il d'appréhender une chose que l'on savait inéluctable ?
