Auteur : Anya

Base : Gundam Wing

Disclaimer :L'univers de Gundam Wing ne m'appartient pas

Genre : Angst, violent, lime (yaoi)

Insomnia

Depuis quelques temps, le simple fait de te regarder me retourne les entrailles: quand je croise tes yeux froids et méprisants, quand je reconnais ce rictus qui déforme tes lèvres craquelées et desséchées, ou encore quand je remarque tes bras où les muscles saillants révèlent encore plus ta maigreur.

Aujourd'hui est un jour comme un autre: tu es toujours aussi écoeurant en revenant de mission Tes bras sont éraflés en de nombreux endroits, et tes mains sont en sang jusqu'au bout des doigts, là où tes ongles devenus noirs de saleté sont tout aussi répugnants. Tes mains semblent inhumaines, froides et grises comme celles d'un cadavre. Ton pantalon large cache l'état de tes jambes, mais tu as perdu l'une de tes chaussures, et ton pied nu, noir de terre et rouge de sang laisse deviner le massacre. Appuyé contre la porte, tu te retiens pour ne pas tomber, avec toujours cette lueur malsaine dans les yeux, cet éclat de folie qui t'empêche de t'effondrer face à moi.

Tu es la personne que je hais le plus au monde.

Tous les jours, tu me reviens dans cet état et je te soigne. Jamais tu ne me remercies. Pour toi, il n'y a là rien d'anormal: être un terroriste, c'est prendre des risques, et revenir blessé n'a rien de dramatique. C'est pour cette raison que chaque jour qui passe, tu me méprises d'avantage pour être touché par quelque chose que tu considères comme normal... Petit à petit, je perds la notion du temps à force de revivre cette même scène depuis le début de cette mission.

Je sais que tu souffres aussi, mais pas pour les même raisons. Comme nous ne savons ni partager, ni même communiquer simplement, il nous est également impossible de guérir nos plaies respectives. Pourtant, malgré tous mes échecs, je cherche encore la bonne manière d'agir avec toi. Je sais déjà que tu ne veux pas que j'interfère dans tes décisions, tu ne veux pas non plus de mon « sentimentalisme », de ma « compassion », ou même mon aide. Je pense savoir tout ce que tu détestes, alors peut-être finirais-je par trouver quelque chose que tu acceptes.

Je suis désespérément amoureux de toi, alors je me raccroche à de ridicules espoirs.

Je sais bien que es répugnant, franchement idiot, et buté. Mais je t'aime quand même, rien n'y fait. Je te trouve beau, j'aime ton côté sérieux et obstiné. Ton intelligence m'impressionne, même si elle n'est pas utilisés à de bonnes fins. Ne pas pouvoir m'empêcher d'aimer une personne comme toi me rend malheureux, parce qu'il faut être fou pour ressentir des sentiments aussi forts pour un meurtrier dans ton genre. En réalité, ce qui me blesse le plus, c'est que tu ne m'aimes pas. Je pensais qu'avec le temps, tu ne me serait plus indifférent. C'est bien ce qui est arrivé, mais alors que tu aurais pu m'accepter comme coéquipier ou ami, tu t'es mis à me détester.

Tu me hais parce que tu ne sais que détruire pour te donner l'impression de vivre, or je fais semblant de vivre pour mieux détruire. Je suis ton exact opposé, tout ce que tu ne veux pas être ou pas voir. Je te dérange. Encore plus depuis que tu a remarqué que je t'observais sans cesse, que j'avais envie de toi dès que je touchais. Pour toi, je suis un parasite.

Et pourtant… Pourtant, je m'obstine à faire comme si rien ne se passait. Comme si nous étions des étrangers, et non pas des ennemis. Mais je te dérange et je me fais encore plus mal. Par amour. Depuis, je suis aussi régulièrement pris par des accès de colère: je veux te punir, te tuer même, pour que nous disparaissions avec nos maladies, notre dégénérescence, pour que nous laissions les gens normaux reconstruire le monde. Ni toi, ni moi, ne bâtirons le futur. Nous sommes des terroristes. Rien de plus, rien de moins.

Mon véritable souhait est pourtant de pouvoir te parler d'égal à égal, de voir que ton regard a changé et que tu m'acceptes. Des fois, je rêve de pouvoir te tenir dans mes bras et te serrer contre moi... Mais les rêves les plus heureux sont aussi les plus tristes, parce qu'ils ne restent jamais plus que des rêves.

Alors laisse-moi te tuer avec moi, Heero.


Je regarde à travers la fenêtre de notre planque. Nous sommes à St Petersbourg, et nous avons quitté le climat rude de la Sibérie hier. Une nouvelle partie de la mission commence, et une nouvelle épreuve pour moi. Je n'arrive pas à dormir depuis que la planque nous oblige à partager le même lit. Depuis que je te fais l'amour juste avant de te tuer de mes propres mains dans mon sommeil.

Heero… Je suis malade.
Et toi tu aurais bien besoin d'un psy.

Alors laisse-toi faire, laisse-toi mourir…


Je n'arrive pas à dormir.

J'ai la vue trouble, la tête lourde, le cœur au bord des lèvres.
Je suis malade, mais je n'arrive pas à me résoudre à partir.
Je ne veux pas vivre comme ça.

Meurs avec moi, Heero…

_ Duo.

Ne m'appelle pas avec cette voix là. Celle qui me donne des ordres, me rabaisse et me hais.

_ Duo.

Je soupire. Je te déteste.

_ Qu'est-ce qu'il y a ?

Tu me jettes un regard désespéré.

_ D'après toi ? Ca concerne la mission.

_ …

_ Je t'ai imprimé les détails.

Tu passes à côté de moi, me tends les feuilles et repars t'enfermer dans la chambre.

Si tu savais comme je te hais…

Je ne peux pas oublier l'état dans lequel tu me revenais la semaine dernière, lorsque nous étions en pleine Sibérie. J'avais envie de vomir mes entrailles, te voir recouvert de sang de la tête aux pieds me rendait encore plus malade qu'à l'ordinaire. Tu souriais en plus, le sourire satisfait après le travail bien fait. Tu es écoeurant.

Et pourtant, j'étais incroyablement heureux. L'ambiance malsaine qui nous enveloppait à ton retour m'excitait encore plus. Non seulement parce que tu avais besoin de soins, besoin de moi, malgré tes tentatives pour m'échapper, mais parce qu'en plus tu t'endormais, même en sachant que j'étais présent. J'en venais presque à être heureux que tu aies commis un nouveau massacre.

Une faiblesse que tu détestes, et tu m'en hais encore plus.

Moi, je jubile autant que je me retiens pour ne pas être pris de vertiges. Je sais que je suis malade, je me dégoûte de penser comme ça. Mais je ne peux m'empêcher de ressentir un irrépressible bonheur. Tu te fiches de mon existence ? Eh bien je me fiche de ce que tu penses ou ressens.

Je veux juste te faire l'amour et te tuer. Rien que ça.

Oui, je suis schizophrène. Et un assassin. Un ado paumé de plus.
Oui, j'ai des pulsions. Meurtrières. Sexuelles.

Laisse-moi te faire goûter l'Enfer aussi… Puisque c'est de ta faute si j'y suis.

Mais toi, tu ne comprends pas qu'il te faut fuir. Tu ne comprends pas que tu es en danger. Tu te crois invincible. Ca tombe bien: je préfère les gens qui ont du caractère... Je t'aime d'un amour malsain, et toi tu ne t'en rends pas compte. Tu comprends juste que je suis attiré par toi. Le reste, tu t'en moques. Tu te crois à l'abri.

Alors tu sors de la chambre juste vêtu d'un caleçon et d'une chemise ouverte, comme si je n'étais pas là. Et moi je te dévore des yeux, je te bouffe déjà. Tu sais que je te regarde. Tu sais déjà que je vais me tourner vers toi avant même que tu ne sortes de la chambre. Tu le sais si bien que tu ne prends même plus la peine de lever les yeux ou me faire une remarque.

Je sais ce que tu penses. Tu penses que de toute façon, je ne suis pas assez idiot pour tenter quoi que ce soit. Et puisque notre mission a deux ne durera encore qu'une semaine tout au plus, tu te dis que ce n'est qu'une semaine à me supporter, après quoi tu éviteras de me revoir. C'est tout.

Tu es si simple à comprendre, Heero. Tu es si idiot de croire que j'en resterai là. Je suis malade, et tu ne l'as même pas remarqué. Je suis tombé amoureux de toi, mais ta haine à mon égard a entièrement pervertis ce que je ressentais. Je te hais à un point que tu ne peux même pas imaginer. Et si tu ne l'as pas remarqué, c'est que tu es déjà mort.

Parce que j'ai une longueur d'avance.

Alors quand je me lève et que je te suis dans la salle de bain, tu ne te retournes même pas. Tu me jettes un regard noir dans le miroir, c'est tout. Et moi je referme la porte en te souriant. Tu te retournes, les lèvres serrées. Tu m'ordonnes de sortir, mais je ne fais que me rapprocher de toi. Alors tu hausses le ton. Et moi le sang me monte à la tête. On va se battre, et je vais gagner, je vais avoir le dessus. Tu essaies de me frapper au visage, mais tu es celui qui est blessé, Heero. Je suis rapide et agile, tu es blessé et fatigué. Alors je te laisse t'épuiser, je pare tranquillement. Quand tu comprends que je me moque de toi, tu ouvres la porte de la salle de bain, tu me prends par le col, et tu tentes de me faire sortir. Bon. Là tu auras vraiment tenté quelque chose au moins. Mais tu as déjà perdu, Heero… Je te repousse d'un coup à l'intérieur, et tu te cognes contre la paroi de la douche. J'en profite pour fermer la porte à clé, je fourre les clefs dans l'une de mes poches arrière. Et je t'observe. Tu me regardes avec tant de haine que j'en suis un instant déstabilisé.

Mais c'est trop tard.

Je m'avance et t'attrape le menton pour t'embrasser. Bien sûr, tu me repousses et tu me mets une belle droite. J'ai la lèvre en sang. Alors je te frappe aussi. Je ne sais pas combien de temps, mais je te frappe jusqu'à en avoir mal aux bras. Quand je te regarde à nouveau, ton visage est en sang, tu gis sans vie au sol. Un instant, mon cœur s'arrête de battre. Et si je t'avais tué… ? Mais je vois ta bouche s'ouvrir lentement, cracher du sang, et tes yeux briller de rage derrière tes cheveux désordonnés. Alors j'ouvre le robinet de la douche en grand, côté eau froide. Je dirige le jet droit vers ton visage, je t'inonde d'eau gelée jusqu'à ce que je te voie grelotter. J'ai atteins mon but: tu te calmes, tu ne me résistes plus.

Je rentre dans la douche, referme la paroi, rallume le jet, côté eau chaude cette fois. Je fais couler le jet dans ton dos, lentement, pour que la chaleur parcoure peu à peu ton corps. Tu es à demi conscient, tu te laisses faire. Je me baisse à ton niveau, je te prends dans mes bras et je te caresse les cheveux. C'est tellement irréel que j'en pleure de bonheur. Je lâche le jet de douche et je m'assieds sur tes jambes pour mieux te serrer contre moi. Tu es glacé, comme toujours…

Tu gémis de douleur à cause de mon poids, je sursaute. A ce moment là, je ne te hais plus du tout. Je te soulève doucement, serré contre moi, nous sortons de la salle de bain, et je m'allonge dans le lit, ton corps sans vie sur le mien. Je rabats la couverture pour que nous soyons au chaud. Tu grelottes, toujours à moitié conscient. Je t'ôte tes vêtements mouillés, j'enlève les miens, je te garde contre moi. Je te caresse, je t'embrasse. Je suis en train de sombrer et tu ne te réveilles toujours pas.

Un instant, je réalise que je suis allé trop loin, que je dois te lâcher avant de commettre l'irréparable. J'ai bien trop chaud, j'ai attendu trop longtemps. Mais c'est trop tard. J'ai déjà délaissé tes lèvres pour attaquer ton torse, et je descends encore, alors que tu relèves tout juste la tête. Tu me regardes, interdit. Soudain, tu ouvres grand les yeux et tu tentes de me repousser, une lueur de panique dans les yeux. Je te rattrape sans difficulté, je te frappe au visage pour que tu ne bouges plus. Puis je continue à descendre le long de ton corps à coups de baisers. Malgré toi, tu gémis. Malgré toi, tu réagis. J'entoure ton pénis de mes lèvres et tu essaies encore une fois de me frapper. Je te repousse et je continue, tu déglutis, les yeux voilés. Tu te mords les lèvres, tu fermes les yeux.

Tu me détestes.

Tu ne céderas pas. Tu as perdu aux coups de poing, tu ne perdras pas maintenant. Tu n'exprimeras aucune émotion ni plaisir, ni dégoût. Rien. Tu es si prévisible… Je remonte lentement jusqu'à ton visage, et je force l'entrée de tes lèvres. Nous nous battons un moment, mais je garde le dessus, je me presse plus fort contre toi. Je te caresse toujours, puis je… -


Duo s'éveilla en sursaut, la bouche pâteuse. Il était en sueur, complètement décoiffé. Il se leva en hâte du canapé sur lequel il s'était endormis et alla vomir dans les toilettes. Il resta un bon quart d'heure au dessus de la cuvette des W.C, recrachant tout ce que contenait son estomac. Il claquait des dents et était entièrement gelé à présent. Il se releva en titubant et se regarda dans la petite glace de la salle de bain.

Il avait d'énormes cernes sous les yeux, un teint blafard, ses cheveux étaient ternes. Il se passa la main sur le visage en même temps que des larmes roulaient sur ses joues. Il n'arrivait pas à croire qu'il ait rêvé de ça. Il n'arrivait pas à dormir depuis des jours, et pour une fois qu'il trouvait le sommeil… Il se voyait violer son compagnon d'arme. Et en jouir.

Duo se cambra au dessus du lavabo, la bile remontant le long de sa gorge. Bon dieu ! Il avait jouit en pensant à un viol ! Refermant la porte, il alluma la douche et se jeta tout habillé sous l'eau froide. Ses larmes continuaient de couler, alors que lui voyait peu à peu plus clair. Il était en train de devenir fou. S'il en arrivait à ce point, il fallait qu'il s'en aille avant de passer à l'acte.

Heero était bien trop sûr de lui pour se douter un instant qu'il risquait gros. Son coéquipier était un idiot. Un terroriste intelligent certes, mais absolument à la masse concernant la psychologie humaine. S'il ne s'était pas rendu compte qu'il perdait pied, alors Heero était plus qu'en danger. Duo enleva enfin ses vêtements et fit passer l'eau froide au chaud. Il se doucha en vitesse et alla chercher des habits propres ainsi que le reste de ses affaires. Il prit son temps pour vérifier qu'il n'avait rien oublié.

Sûr qu'il avait bien tout pris, il déposa le tout dans l'entrée et marcha sur la pointe des pieds jusqu'à la chambre où dormait le Japonais. Il ouvrit très doucement la porte et vit le corps de son coéquipier allongé en travers du lit. Sa respiration était calme et régulière, mais Duo était certain qu'il savait qu'il l'observait.

Le châtain avait affreusement mal. Son cœur battait très vite, comme s'il voulait arriver à sa limite et exploser. Il avait presque envie de se mettre à genoux, de pleurer et de demander pardon. Duo referma vivement la porte et retourna jusqu'à l'entrée. Il prit ses affaires et partit.

Il allait oublier Heero. Le viol. Sa folie.

Heero n'avait pas besoin de lui pour une mission, tout comme lui savait se débrouiller tout seul. Les Mads pensaient ce qu'ils voulaient, il se barrait sans rien dire et ils feraient avec. Sinon ils perdaient l'un de leurs meilleurs pilotes, si ce n'était pas les deux.

Duo partit à l'autre bout du monde. Il ne savait pas ce qu'il allait y faire, mais au moins il éviterait, en plus d'être un assassin, d'être un monstre.