Vous n'avez pas lu les 36 chapitres (et quelques) des foudres de Renji, et vous n'en avez pas l'intention ? Rassurez-vous, ce n'est pas nécessaire pour lire cette mini-fiction en deux chapitres... La suite de cette note en bas de page, pour éviter un éventuel spoiler aux lecteurs/lectrices des foudres de Renji.
Mise en garde : Pour celles et ceux qui lisent ou liront la fiction principale, ATTENTION, cette histoire bonus contient des spoilers (essentiellement, le chapitre 36 que je conseille de lire avant)
NB : Les foudres de Renji relatent les péripéties amoureuses de Byakuya et Renji, alors que rien ne va plus entre les mondes (Yaoi, rating M).
Disclaimer : Bleach est un manga de Tite Kubo, dont j'emprunte sans autorisation l'univers et les personnages, en espérant qu'il ne m'en voudra pas.
Rikichi et son zanpakutô
Première partie
La matinée avait été riche en émotions. Le seigneur Kuchiki se détendait, appréciant l'ombre fraîche des marronniers de la Cour d'honneur de la sixième division. Le bruissement des feuilles, agitées par une légère brise, n'arrivait pourtant pas à couvrir les cris qui émanaient du terre-plein central où s'entraînaient les plus jeunes recrues.
Là-bas se trouvait Renji, publiquement, le vice-capitaine de la sixième division, et dans l'intimité, son amant. Pour le Shinigami à la chevelure de feu, se détendre était synonyme d'agitation en tous sens, de déploiement d'une énergie qu'il avait dû se contraindre de retenir jusqu'à maintenant. C'était à travers ses éclats de voix qu'il manifestait son humeur. L'air vibrait de sa gaieté et sa joie était communicative.
Aussitôt que Renji était arrivé sur le terrain d'entraînement, les appels avaient fusé.
« Ohayo, fukutaichô !
— Ohayo, Abarai-san !
— Comment allez-vous, Abarai-san ?
— Abarai fukutaichô, pourrais-je vous entretenir d'un problème survenu hier ? »... etc.
Réunis autour de lui, sous-officiers et soldats avaient interrompu leurs exercices matinaux et les conversations étaient allées bon train. La sociabilité de Renji n'étonnait plus son capitaine. C'était une qualité que lui ne possédait pas, et quand bien même il avait fait exceptionnellement quelques efforts en ce sens, dans le but inavoué de se concilier les bonnes grâces de son lieutenant, il ne désirait pas vraiment la développer. La distance qu'il y avait entre lui et les autres lui convenait parfaitement, du moment qu'elle ne s'étendait pas jusqu'à son amant.
Tous les deux venaient d'échapper à la menace d'une séparation forcée. Leur liaison, qu'ils s'appliquaient à garder secrète, avait été découverte le matin même par le seigneur Ginrei. C'était presque un miracle qu'ils pussent être encore ensemble.
De retour du manoir Kuchiki, à peine en vue de la sixième division, Renji, libéré de l'anxiété que cet événement leur avait causé, s'était précipité pour évacuer le stress accumulé :
« Quelle chance, les premiers entraînements du matin ne sont pas terminés ! Je peux, taichô ? »
Comment Byakuya aurait pu résister à ce regard où miroitaient des dizaines d'étoiles d'excitation et de plaisir anticipé ? Comment aurait-il pu lui dire non, quand il avait pensé qu'ils seraient obligés de se quitter ?
Entre les sentiments qu'il éprouvait pour Renji et sa volonté d'être, vis-à-vis de son lieutenant, un capitaine responsable, il se trouva, à cet instant, influencé par les battements de son cœur charmé.
Devant Renji qui trépignait littéralement d'impatience, il hocha du menton, donnant son assentiment.
Sur un « Oh ! Merci, taichô », Renji était parti vers l'esplanade sans se retourner, échappant à la pile de dossiers qui devaient l'attendre après plusieurs jours d'absence. Quant à Byakuya, la perspective de se retrouver face au même problème administratif ne l'enchantant guère, il s'était dirigé vers la cour d'honneur et ses arbres séculaires, afin d'y trouver le calme et la tranquillité qui apaiserait son esprit.
Au bout de quelques minutes, l'attention de Byakuya fut attirée par une silhouette familière dont la présence avait un soupçon d'étrangeté. En temps normal, il ne l'aurait sans doute pas remarqué, mais rien ne se passait comme d'habitude, ce matin-là. Il s'approcha.
Rikichi, le jeune et intrépide intendant de la sixième division, se tenait adossé à un pilier de la galerie couverte qui séparait la cour d'honneur du terre-plein central, apparemment absorbé dans la contemplation de Renji. À cela, rien d'étrange quand on connaissait l'admiration qu'il portait au vice-capitaine. Cependant, à y regarder de plus près, il avait un air abattu et découragé, ce qui ne lui ressemblait pas.
Son reiatsu peu énergique, ses épaules affaissées, confirmèrent au capitaine que quelque chose n'était pas à sa place dans le portrait qu'il offrait.
Renji échangeait des passes d'arme avec un Shinigami peu expérimenté. À le voir faire, on aurait dit que le lieutenant entendait montrer à l'épéiste débutant tous les coups d'une vie en un seul exercice, et lui faire connaître le poids de son sabre pour chacune de ses fautes d'esquives. Rikichi soupira. Il allait reprendre la cage posée à ses pieds lorsque Byakuya intervint :
« Rikichi...
— Oh ! Bonjour, Kuchiki taichô.
— Rikichi, que signifie ta présence ici ? Ne devrais-tu pas t'entraîner, tout comme tes camarades ?
— C'est que... Les papillons... bredouilla Rikichi, en désignant la cage.
— Les messagers de l'enfer peuvent attendre. Comment espères-tu progresser si tu ne pratiques pas quotidiennement tes exercices ?
— C'est que... même si je les fais, je ne l'entends toujours pas. »
Tout en parlant, Rikichi regardait avec envie le zanpakutô de Renji. Ce dernier était passé en shikai, et se battait à présent contre l'escadron tout entier. « Mais à quoi pense-t-il ? se demanda Byakuya, quel est l'apport de cet exercice pour nos aspirants ? » En effet, sur le terrain, c'était une belle pagaille. Si les sous-officiers arrivaient plus ou moins à s'en sortir, les pauvres soldats finissaient dans la poussière, sous les exhortations de leur vice-capitaine :
« Holà, holà, holà, on se relève plus vite que ça ! Un peu d'énergie, que diable ! »
Zabimaru serpentait parmi les Shinigamis, frappant le sol de son croc, soulevant un courant de pression spirituelle qui faisait retomber ceux qui s'étaient difficilement remis debout. À trois, à quatre, à cinq, ils se ruaient contre lui, hurlant un cri de guerre rageur, que Renji accueillait d'un rire moqueur :
« Ha, ha, ha, pas assez, pas assez ! Venez tous ! »
Pour un peu, on se serait cru dans les dojos de la onzième division !
Byakuya ferma les paupières. « Je vais laisser passer... pour cette fois », décida-t-il. Il était intrigué par l'intendant, dont le regard était toujours fixé sur Zabimaru et Renji.
On ne pouvait que reconnaître la dextérité de Renji. Arriver à manier un zanpakutô aussi sauvage d'une façon si adroite était remarquable. Sous le désordre apparent de ses coups, résidait une précision telle qu'aucune blessure sérieuse ne serait à déplorer à la fin de cet exercice un peu spécial.
« J'aimerais tellement être comme lui, déclara Rikichi, mélancolique, en saisissant la poignée de son sabre, pendu à sa hanche.
— Renji est... Renji. Qu'admires-tu précisément en lui ?
— Son extraordinaire force, son courage, sa volonté, répondit Rikichi, le regard poursuivant les mouvements de son idole.
— Tu ne manques ni de courage, ni de volonté, Rikichi. Quant à la force, chacun doit trouver celle qui lui est propre.
— Mais... Mais j'avais espéré qu'en m'entraînant encore et encore, j'y arriverais. Pourtant, je n'entends toujours pas mon zanpakutô. »
Rikichi caressait le manche de son épée, les yeux toujours fixés sur Zabimaru. Byakuya s'étonnait. L'intendant avait une qualité spirituelle particulière qui lui permettait de s'occuper des papillons de l'enfer. Qu'il n'arrivât pas à communiquer avec l'esprit de son sabre était effectivement déroutant.
« De quelle manière se déroulent tes méditations ? ».
Rikichi reporta son attention sur son capitaine. Ayant fait de Renji son modèle, il aspirait à lui ressembler en tout, aussi imitait-il jusqu'à sa façon de s'adresser au seigneur Kuchiki, sans s'arrêter au manque de répartie de ce dernier, ou à ses traits impassibles. En cela, il était aidé par sa fonction d'ordonnance du capitaine lorsqu'il prenait ses quartiers à la division. Cependant, leurs rares conversations tenaient plutôt du monologue, que des battements de cils et des regards que l'habitude rendait expressifs suffisaient à entretenir. Aujourd'hui, jour à marquer d'une pierre blanche sur le calendrier de l'intendant, le capitaine s'intéressait à lui et lui parlait !
Rikichi, d'un naturel plutôt optimiste, il faut le dire, oublia de suite son accès de déprime. Il affichait une mine réjouie en répondant avec verve à la question :
« Faire le vide en soi et écouter son cœur, n'est-ce pas, taichô ? Pour moi, rien n'est plus important que d'être un courageux Shinigami comme Abarai-san ; d'être fort un jour, comme lui avec Zabimaru. »
Rikichi porta la main aux tatouages qu'il s'était fait faire sur le front, en hommage à sa volonté de ressembler à Renji. Ce qui occupait son esprit pendant ses exercices mentaux ne faisait aucun doute. Il continuait, cependant :
« Je dois dire que j'ai tendance à être distrait, alors si un de mes papillons n'a pas la forme, cela m'inquiète, forcément. Mais, je me dis que cela fait partie de moi, donc, pas de souci ! Et...
— Rikichi.
— Oui ?
— Cela est suffisant.
— Ah, bon. »
Rikichi se tut, et resta miraculeusement silencieux. Byakuya avait fermé les yeux, le jeune intendant sentait instinctivement que toute autre parole serait malvenue.
Il n'avait pas fallu longtemps à Byakuya pour discerner le problème qu'avait Rikichi. À présent, il cherchait les mots qui sauraient le mettre sur la bonne voie, car chacun devait parcourir seul le chemin de la reconnaissance de son zanpakutô.
« Rikichi, les zanpakutôs ont des sentiments, eux-aussi. Certains sont jeunes, imprévisibles, d'autres sont sages et sauront modérer leurs réactions. Mais, tous souhaitent une chose de la part de leur maître.
— Laquelle ?
— C'est à toi de découvrir ce que ton sabre attend de toi ».
Sur cette parole énigmatique, Byakuya quitta le jeune Shinigami, le laissant très perplexe.
« Ce que mon sabre attend de moi ? s'étonnait-il, mais, c'est moi qui attends qu'il me parle et me donne son nom ! »
fin de la première partie
i) En effet, il vous suffit de savoir que, suite à des événements qui n'ont pas d'importance ici, Byakuya se trouve comme sur un petit nuage rose à l'issue du chapitre 36 – toutes perspectives gardées, bien entendu, ce qui explique son inexplicable bonne humeur.
